Bonjour à tous
Au cours de notre vie ensemble Odile et moi avons du vivre des deuils, ses deux frères pour elle, mon père et mes deux sœurs pour moi, tous partis sans exception beaucoup trop jeune. En 2011, nous avons perdu notre fils Ludovic. Après le décès de notre fils, nous nous sommes isolés des autres, des amis, de la famille. Plus de fêtes entre amis, plus de sortis a deux, pas de vacances. Nous l’avons fait sans même nous concerter. Comme si nous avions décidé que puisque lui ne peut plus profiter de la vie, alors nous non plus, une sorte d’autopunitions inconsciente. De culpabilités, sûrement, parce que notre fils s’est suicidé, et qu’on se demandera éternellement ce qu’on a raté, ce qu’on aurait pu faire. Il avait 33 ans quand il s’est donné la mort, il avait pris son indépendance depuis longtemps déjà, mais ça n’empêche pas de se poser des questions. Quand on est parent, c’est à vie…
Pour le deuil de mon fils, je me suis refermé encore plus sur moi-même, j’ai tout gardé à l’intérieur et mis un couvercle par-dessus. Avec le recul, quelle erreur et quels regrets, je n’ai pas soutenu ma femme et ma fille comme elles l’auraient méritées, pardon à toutes les deux…
J’ai toujours réagi de la même façon face aux épreuves que la vie a mise devant moi, en me protégeant derrière cette forme de carapace. J’ai dû passer, je m’en rends compte, aux yeux des autres pour quelqu’un d’insensible, alors que la réalité, c’est précisément l’inverse. Odile savait cela, mais à sa mort, cette carapace a volé en éclats. Aujourd’hui je suis totalement incapable de retenir mes émotions, ma douleur, je me sens si vulnérable et si seul sans elle, sans protection. Le deuil d’Odile est le plus intense et le plus douloureux que j’ai eu à vivre, ça n’en finit pas et je suis seulement au début, j’en ai bien conscience et cela me fait peur.
Cordialement.
Thierry.