Le pire, dans un premier temps, c'était les nuits. Quand je me couchais, j'avais des flahs hyper-réalistes, je revoyais ces instants abominables où mon compagnon était en train de mourir, avec tout ce sang, et l'instant où son visage s'est figé...c'était comme un film d'horreur qui repassait en boucle dans ma tête, mis-à-part que tout avait été réèl, je ne le savais que trop  pour ne pas  sombrer, j'ai commencé à essayer de remplacer ces terribles images par d'autres, simples et positives à la fois, de mon vécu avec Jean-Philippe. Les premiers temps, ça a été trés difficile, mais j'y arrivais quant même jusqu'à un certain point, avec beaucoup de volonté et de concentration.

  Il y a une image positive, surtout, dont j'aimerais parler, parce-qu'elle a un côté très symbolique: elle est liée à la robe de chambre  que j'avais mise dans la machine à laver, avec les draps, après le dècès de Jean-Philippe. Je m'ètais demandé si j'arriverais à la porter de nouveau un jour, et si je n'allais pas la jeter finalement. Et puis non: aussi contradictoire que ça puisse paraître, ce vêtement est devenu le symbole de l'image positive 

  Je m'explique: comme ce vêtement était lié à l'un des pires moments de ma vie, je m'en suis servis pour remplacer cette image atroce par un petit souvenir pittoresque. Voici lequel: quand je m'ètais installée dans ce nouvel appartement, un an plus tôt, avec Jean-Philippe, on n'avait pas encore eu le temps de déballer toutes nos affaires. Ce qui fait que le lendemain matin, mon compagnon n'ayant pas encore rècupèré son peignoir, m"avait emprunté cette fameuse robe de chambre, tandis que moi, je m'ètais habillée tout de suite. On ètait en train de prendre le petit-déjeuner, quant un copain a nous est venu nous rendre visite. Comme la robe de chambre était en velours rose, Jean-Philippe a plaisanté, dès que notre copain est entré: "Je suis belle, hein?" On a trouvé ça trés drôle tous les trois 

  Hé bien, c'est ce mini-souvenir dont je me suis principalement servie-il y en a eu beaucoup d'autres par la suite, mais celui-ci est souvent revenu-pour remplacer le pire.

  Je la portais encore ce matin, cette robe de chambre 

Oui Stana faire attention aux choses qui font mal est vraiment très utile
ton témoignage sur ton processus j'espère servira ici
car il résume très bien ce processus de remplacer du négatif par un souvenir lié à du positif
et ta résilience pour la robe de chambre est une vraie démonstration  de ce parcours

à la base tu ne sais pas comment tu vas faire mais tu veux honorer dans le quotidien le défunt

continu à écrire = purger tout ce qui vient de plus ton amie  Marie France n'étant plus là tu a sans doute moins l'opportunité d'en parler

  Je suis contente de pouvoir poster à nouveau sur d'autres topics, ça m'avait manqué, et puis si ça peux aussi aider d'autres personnes, c'est le plus important  demain je passerai plus de temps à la médiathèque, aujourd'hui je ne suis pas trés en forme. Pour poster sur mon topic personnel-celui-ci donc-ça me demande plus d'énergie que sur d'autres. Ce sera aussi pour demain donc...
  Cela dit, il y a eu du positif aujourd'hui, avant que je vienne à la médiathèque: quant j'y viens à pieds, je passe par le cimetière où se trouve la tombe de Pierre (ce n'est pas le même que celui où les cendres de Jean-Philippe ont été dispersées, ce dernier est beaucoup plus loin hélas) et j'ai apporté un genre de couronne de roses artificielles mais trés jolies, rouges et roses, disposées et en forme de coeur  Je m'y suis receuillie avec tendresse et apaisement, je lui ai parlé à voix haute, comme souvent. Depuis mon dernier démènagement, je suis dans le quartier situé juste à côté de ce cimetière, et ça me fait toujours du bien d'y venir, plusieurs fois par mois. Comme quoi, quoiqu'il arrive ou non dans nos vies, les véritables amours que nous avons connu, et qui ne sont plus de ce monde, ont toujours leur place dans nos coeurs  Je souris en ècrivant ces mots, et j'espère que les autres membres du forum-ceux qui sont encore loin d'avoir trouvé cet apaisement, y parviendront un jour ou l'autre.

  Amitiés à tous et toutes, et à demain 

  Et merci pour ta réponse chère Qiguan 

  Je vais reprendre où j'en ètais restée:
  L'un de mes plus grands regrets, après le décès de Pierre, avait été de ne pas avoir mon mot à dire concernant ses obsèques. Je n'ètais pas sa compagne officielle, et de plus, sa soeur me detestait; elle n'avait d'ailleurs pas beaucoup d'affection pour son frère, c'est même le moins qu'on puisse dire!  c'est elle qui s'ètait occuppé de tout, et elle avait fait vraiment le minimum  elle aurait largement eu les moyens de lui offrir une belle cérémonie, et un enterrement digne de ce nom...ou une incinèration, puisque telle était la volonté de Pierre. Seulement, elle est trés près de son argent, et comme elle manquait d'affection pour son unique frère, il n'en a pas été question  cet enterrement à la vas-vite a d'ailleurs été un vrai cauchemar, l'un des pires moments de toute ma vie, où tout le monde s'en est pris à moi et, ce qui est pire, à la mémoire de mon bien-aimé...mais comme j'en ai déjà parlé il y a des années et que ce souvenir reste douloureux, je ne vais pas y revenir.
  Heureusement, il n'en a pas été de même pour Jean-Philippe  une petite consolation dans ces moments si intimes et si douloureux en eux-mêmes 

  Comme Jean-Philippe et moi vivions officiellement ensemble, c'est à moi que, cette fois, on s'est adressé pour les dispositions des obsèques. Je souffrais beaucoup èvidemment, et j'ètais sous le choc de cette disparition brutale, mais ça m'a mis du baume au coeur de pouvoir choisir, selon les volontés de mon compagnon. On s'est aussi montré, dans l'ensemble, plus respectueux de ce que je vivais, c'est important.

  J'ai donc choisis l'incinèration, puisque-comme l'aurait aussi voulu Pierre...-il m'avait toujours dit que s'il partait avant moi, c'ètait son choix. On m'a aussi consultée pour les "détails" de la cérémonie.
  Comme pour ce qui est de mon précédent compagnon, je n'ai pas voulu-et pas pus-aller voire son corps au funérarium.  Je prèfèrais me souvenir de lui lorsqu'il ètait en bonne santé, bien vivant et heureux, sinon c'est cette image d'un corps sans respiration, au visage figé dans un cerceuil qui se serait toujours superposé aux beaux souvenirs de lui.

  De ce point de vue, mon amie Marie-France a eu du mal à comprendre. Elle m'a dit-avec les meilleures intentions du monde, ça je le sais-que ce que j'aurais vu dans ce cerceuil aurait été plus paisible que la toute dernière image que j'avais gardé de Jean-Philippe, en train de mourir, puis mort, la bouche ouverte, les yeux vitreux, couvert de sang..."Ils l'ont bien prèparé, m'a-t-elle dit. Il vaudrait peut-être mieux que tu garde cette image-là." Je comprends dans quel sens elle m'a dit ça, et je reconnais qu'objectivement, ça se tient, mais je ne pouvais tout simplement pas, c'est comme ça.
  J'ai fait un énorme effort sur moi-même pour remplacer cette terrible dernière image de Jean-Philippe dans ces derniers instants et ceux qui ont suivis par le souvenir de son visage et de toute sa personne lorsqu'il était plein de vie, heureux, joyeux, de nos meilleurs moments. J'y suis parvenue à force de volonté, et Marie-FRance qui, encore une fois, était une trés bonne amie, e finit par comprendre  c'était une personne trés tolèrante, trés ouverte, et qui avait le don, plutôt rare de nos jours, de se mettre à la place des autres, de comprendre leurs points de vue, même quant ils différaient des siens 

 

  Marie-France non plus n'était pas venue, mais elle, c'est différent: elle avait une terrible phobie des enterrements, des cimetières et de tout ce qui a rapport, de près ou de loin, avec ce genre d'endroits ou de cérémonies, ayant vécu des deuils trés traumatisants depuis son enfance. Je ne lui en veut pas du tout, je sais qu'elle était avec moi par la pensée. C'est la personne qui m'a le mieux entourée, soutenue et réconfortée durant cette période, comme ça avait déjà été le cas au dècès de Pierre. Ce dernier ètait l'un de ses meilleurs amis, et elle apprèciait aussi beaucoup Jean-Philippe. On venait dèjeuner chez elle une fois par mois, de son vivant; elle nous cuisinait de bons petits plats, et on bavardait tous les trois tout l'après-midi, de trés bons souvenirs amicaux 

  Je me suis retrouvée seule au crematorium avec cette autre amie-perdue de vue depuis, mais elle non plus je ne l'oublirai jamais  -et une dame qui devait diriger la cérémonie. Elle ètait originaire du même village que Jean-Philippe, et l'avait connu autrefois. Elle m'a demandé si je prèfèrais une cérémonie religieuse, et si oui, de quel genre, ou plutôt laique, auquel cas elle parlerait plutôt de beaux souvenirs que de spiritualité. Différents textes-adaptables selon les souhaits des personnes-étaient préparés. C'est une trés bonne chose, je trouve, cette possibilité de choisir  ça me changeait décidément de l'enterrement de Pierre...

  J'ai expliqué que Jean-Philippe et moi étions trés croyants à notre manière, mais sans nous réclamer d'une religion ou d'une autre, plutôt déistes peut-on dire. Et que donc, ce serait bien qu'elle parle de spiritualité, mais de manière générale, et que l'idéal serait un mélange de spiritualité et de laïcité. Un mélange de textes  elle a trés bien compris, comme quoi elle doit recevoir des demandes de tous les genres, et se tenir prète à les remplir. C'est vraiment bien, ces attentions aux souhaits de chacun. Je ne savais pas que ça pouvait se passer comme ça, mais c'est vrai que c'est normal dans un pays laïc.

  Comme je l'ai déjà dit dans la rubrique "spiritualité", où il est question des signes que nous envoient éventuellement nos aimés-aussi je n'en parlerai ici que brièvement-au cours de cette cérémonie simple et digne, j'ai ressentis, alors que je ne m'y attendais absolument pas, la présence de Jean-Philippe. Une présence si intense, si concrète, telle que je n'en ai ressentie ni avant, ni après, pas même vis-à-vis de Pierre (et ce n'est pas peu dire!) et qui s'est imposée d'une telle manière, que depuis, je n'ai plus aucun doute: ceux que nous avons aimés sont toujours là, quelque part, et veulent que nous soyons heureux. Même moi, qui ai toujours été ouverte à ce genre de choses, j'ai été surprise par cette présence indiscutable, qui est entrée en moi à la fois psychiquement et comme physiquement. J'en garde un souvenir intact, et en cet instant même 

  Ensuite, nous sommes passées toutes les trois dans une petite pièce à côté, et nous avons regardé, sur un petit écran, le cerceuil entrer dans l'incinérateur, puis la porte de celui-ci se refermer. Certaines personnes n'ont pas compris, par la suite, comment cette dernière image avait pus me faire du bien en quoi que ce soit (mais chacun ses idées et ses impressions, après tout!) mais le fait est là: cela a terminé de m'apaiser. C'est ainsi que les choses devaient se passer.

  Nous sommes ensuite sorties dans le parc qui entoure le crematorium, ce qu'on appel "le jardin du souvenir", et nous avons parcouru les allées bien entretenues, entourées de gazon, d'arbres et de trés jolis massifs. Vision sereine, là encore...j'ai vu qu'en de nombreux endroits, des bouquets de fleurs étaient disposés, là où les proches des défunts viennent leur rendre hommage, là où les cendres ont été répandues.
  Ce fut le lendemain que celles de Jean-Philippe ont été dispersées, sous un arbre, dans l'herbe où avaient déja été réandues celles d'autres défunts. Dans ce coin de belle versure...Jean-Philippe adorait la nature, comme moi, il n'aurait pas pus souhaiter mieux, ça aussi je le sais  le moment venu, je veux que mes cendres à moi soient au même endroit exactement. Elles se dissoudront comme les siennes, sous cet arbre...

un peu plus de 3 ans après ces évènements douloureux tu as réussi à faire ce que tu voulais = raconter
peut être pourras tu cliquer sur le bouton imprimer et à la médiathèque le mettre sur clef USB au cas où ce forum disparaitrait  ...
Je t'ai lue
c'est un peu, à postériori comme si j’avais pu avec mon amitié être là à t'accompagner ces jours là ...
je te serre fort dans mes bras
 

ça t'aide
et cela devrait en aider d'autres :
la résilience, pour aimer passionnément à nouveau, quelques 3 ans après la perte d'un aimé, que tu décris qui montre que cela ne veut pas du tout dire oubli : la preuve ta récente visite au cimetière à la sépulture de Pierre
tes outils à chacun de ces deuils
ta résilience à cette seconde perte d'un aimé comment depuis ton deuil évolue
tes remarques sur ces deuils similaires ce qui leur est commun, ce qui les différencient et parfois tes réactions différentes
tout cela est très précieux comme témoignage !
tout comme
http://forumdeuil.comemo.org/philosophie-spiritualite-deuil/peut-t-il-y-avoir-des-signes/msg137936/#msg137936
http://forumdeuil.comemo.org/philosophie-spiritualite-deuil/peut-t-il-y-avoir-des-signes/msg137939/#msg137939
Tu es la 3 ième personne que je connais veuve 2 fois : Jeannine d'abord que j'accompagnais quand le second compagnon partait d'un cancer comme le premier
puis Lisette
venues toutes duex peu ici, Lisette je l'ai écrit en a fait elle une pièce de théâtre et quand je l'ai rencontrée elle amorçait une nouvelle reconstruction puis il y a eu séparation  ... une autre difficulté pour elle dans la période Covid et où ele perdait aussi ses deux parents âgés

Prends soin de toi comme tes aimés Pierre et Jean-Philippe voudraient