Les premiers mois de ce deuil, j'ètais donc presque tous les après-midi chez mon amie Marie-France. D'autant plus qu'au bout d'un mois-comme si le deuil ne suffisait pas
-ma télé avait cessé de fonctionner! Je n'avais même plus le minuscule réconfort du bruit, des images qui meublaient, semblaient recouvrir le silence de l'appartement, ce silence écrasant et immuable, alors que j'avais été habituée à être quotidiennement avec Jean-Philippe, à èchanger des phrases avec lui
c'était encore pire du coup. J'avais une vieille radio, mais le son était dérèglé, et je n'entendais pas grand chose.
Le soir et le matin, je la mettais quant même en route-un silence complet, ce n'aurait pas été supportable!-et je tendais l'oreille...les soirs surtout, je mettais la radio tout à côté du canapé ou j'ètais assise, et je lisais en concentrant, en même temps, mon ouÏe sur les chansons qui passaient. Comme j'ècoutais presque toujours la même chaine, c'est souvent les mêmes chansons qui revenaient en boucle. Depuis, quelques années après, quant j'en entends une, n'importe laquelle, à la télé par exemple, ça me rappelle cette période. Mais je les ècoute maintenant avec apaisement.
Avant d'avoir une nouvelle télé-ça a pris deux ou trois mois-je venais parfois même le matin chez Marie-France, et on regardais nos feuilletons préférés ensemble-ça a l'air frivole comme ça, mais c'était une petite complicité entre nous, ça faisait partie de notre amitié, et puis, tout ce qui peut apaiser, ne serait-ce qu'un minimum, durant un deuil est toujours bienvenu. Ces jours-là, je restais jusqu'au soir-elle m'invitais à manger-et ces journées où j'avais de la compagnie, et la compagnie de quelqu'un que j'aimais de surcrois, me faisaient plus de bien que n'importe quoi.
On parlais de Jean-Philippe bien sûr, mais aussi de tas d'autres sujets-ce qui m'apportait, comment dire? une impression de "normalité", la sensation que la vie continuait comme on dit, même si ce sentiment me faisait tout drôle: ça me paraissait ètrange que "la vie continue", que le quotidien, les journées, les actes, toutes les petites choses de la vie poursuivent leur cours naturel, alors qu'un drame ètait survenu, et que toute une partie de mon existence ne serait plus jamais la même. Un cataclysme...et pourtant, "la vie continue", le monde ne s'arrête pas de tourner, le quotidien est toujours là
c'était choquant d'une certaine manière, mais d'un autre côté, rassurant. Le plus frappant et à la fois...rassurant, oui, c'est le mot, était quand on parlait de choses et d'autres, comme n'importe qui.
La médiathèque est sur le point de fermer
je repasserai demain, et j'irai sur d'auttes topics. Je lirai aussi les deux témoignages dont tu m'as donné le lien Qiguan, dès que j'aurai plus de temps.
Amitiés à toi et à tout le forum!