Auteur Sujet: épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée  (Lu 25518 fois)

0 Membres et 1 Invité sur ce sujet

mirele

  • Invité
épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« le: 10 décembre 2012 à 18:27:51 »
Bonjour à tous,
Me revoilà après quelques jours d'accalmie. J'ai continué à venir sur le forum. Mais je n'ai rien écrit. Pas la force, pas le courage. Je crois que j'entame une nouvelle phase de mon deuil : je suis exsangue, lessivée. Je ne ressens plus rien. Ni la souffrance, ni le manque, ni le désespoir, ni la colère : rien !
Le vide absolu dans mon coeur.
J'ai parfois une velléité d'entreprendre un truc, du rangement, et puis je m'arrête, fatiguée avant d'avoir commencé.
Avec les autres, je n'ai rien à dire. Même parler d'Emmanuel ne m'intéresse plus. J'en ai marre de ressasser la même histoire affreusement courte et triste de nos six petits mois de bonheur. mais je n'ai absolument rien d'autre à dire.

L'une d'entre vous a écrit qu'elle avait un cerveau de poule. j'ai le sentiment d'avoir un un cerveau d'huître. Je reste assise là, vide et bête, et sans conversation ni mémoire ni concentration... Et je suis prof, alors devant les élèves ....

Est-ce que vous croyez que je commence une vraie dépression ? ou bien est-ce normal ?

Je commence à m'inquiéter, ma confiance en moi en prend un nouveau coup, je me sens si bête !!!!!

Merci

Muriel
« Modifié: 10 décembre 2012 à 18:29:29 par mirele »

chrisam

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #1 le: 10 décembre 2012 à 18:36:18 »
Que te dire, moi-même je suis dans un état pas possible
2 mois qu'elle décédée après 30 ans de vie ensemble 24h/24

LE GOUFFRE

Je voudrais t'aider mais pas possible pour le moment
D'autres vont venir te soutenir

Courage, courage et encore du courage
Mais ces personnes qui sont ici, vont te dire la même chose mais ça a plus de valeur, car nous sommes dans le même état d'esprit que toi et nous savons ce que perdre un proche provoque en nous.

Christian

clara

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #2 le: 10 décembre 2012 à 18:51:57 »
Chère Muriel,
oui tu es normale ... j'ai fait un fil, il y a longtemps "impression d'être de glace" page 7 de "vivre le deuil de son conjoint"
je ne pense pas que ce soit une dépression (mais je ne suis pas médecin ...)
tu es juste fatiguée, exténuée de toutes les émotions qui se bousculent ... alors, ton corps,ton cœur font riposte et te font une carapace en acier pour te permettre de "souffler"

Ça doit être très dur d'enseigner dans ces conditions ... très très dur

tu pourrais peut-être penser à te faire arrêter jusqu'aux vacances  :-\

j'enseigne moi même un sport de loisir, mais je ne peux pas pour l'instant ... je n'ai pas l'énergie pour transmettre, pour partager ...

je te souhaite, une nuit de réconfort et (je suis fan de bougies en ce moment) j'allumerai une bougie à 19h pour toi  :)

Je t'embrasse

Claire

ROUBOU35

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #3 le: 10 décembre 2012 à 18:58:28 »
Bonsoir

je peux te rassurer en te disant que j'ai aussi ressenti ce vide et cette absence d'émotion il y a quelques temps et me posais des questions devant le flot de pleurs que je lisais ici,...et puis c'est revenu, sans savoir pourquoi et la douleur avec.
La fatigue permanente aussi , peut-être due aussi à un sommeil entrecoupé.
Et donc un manque de concentration, pas envie de lire, des oublis, obligée de tout noter etc..et parfois du mal à m'exprimer
 Et forcément dans ce métier où il faut toujours avoir une pêche d'enfer, être en quelque sorte sur une scène de théâtre, sans compter cette période de conseils de classes , fin de trimestre, réunions de parents... c'est épuisant.
Cela me semble normal. Mais pour savoir si c'est une dépression, il vaut mieux consulter ton médecin.
Viens ici ressasser ton histoire, je ne l'ai pas lue et si cela te permet d'évacuer encore, ce forum est là pour ça.
Courage pour cette dernière ligne droite avant un peu de repos.
Dominique

 

melusineb

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #4 le: 10 décembre 2012 à 19:03:52 »
Muriel,

Je pense que ce que tu éprouves est tout à fait normal. Après la mort de mon mari, je me suis longtemps sentie hébétée, complètement vide et exténuée. La moindre activité, même anodine, m'était insurmontable. Le mot même de 'fatigue' ne me paraissait pas adéquat pour décrire cet épuisement total, à la fois physique et intellectuel, que je ressentais, et que rien ne semblait pouvoir améliorer. J'étais absolument incapable de me concentrer. Lire ne serait ce que deux lignes m'était impossible. Regarder un film jusqu'au bout également. J'avais la nette impression que je n'avais plus de cerveau, que toutes mes facultés intellectuelles avaient définitivement disparues. J'aurais été incapable d'enseigner dans cet état, je te trouve vraiment très courageuse.

Comme toi, je me sentais aussi souvent anesthésiée. Je n'éprouvais pas le besoin de parler avec les autres, je n'avais rien à leur dire.
Cet état a duré plusieurs mois en ce qui me concerne. J'en suis sortie très progressivement, sans vraiment m'en rendre compte - je ne me suis pas réveillée un matin en me sentant 'en forme'. J'ai ressenti le besoin de plus parler avec les autres, mais seulement dans un second temps.

Le deuil est vraiment quelque chose d'intime, et son déroulement est propre à chacun. Mais je suis passée par une 'phase' très similaire à ce que tu décris. Je me souviens que j'étais très inquiète, je n'en voyais pas la fin, je me disais que je passerai le reste de ma vie dans cet état, et qu'il fallait que je m'y fasse. Et cette pensée me désespérait.

Je voulais juste que tu saches que cette 'phase' passera avec le temps, que tu n'es pas la seule à la traverser, et qu'elle est normale.

Je t'embrasse



mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #5 le: 10 décembre 2012 à 19:49:24 »
Oh merci,

Vos réponses me réconfortent un peu. Un peu seulement. Même faire une phrase, c'est dur. Au clavier, j'inverse sans arrêt des lettres et je suis obligée de me relire, j'ai l'impression d'être dyslexique.

Ce qui m'inquiète le plus est cette absence d'émotions. Même le chagrin, bof, je ne le ressens plus vraiment.

Quant à m'arrêter... je ne sais pas. J'ai déjà été arrêtée il y a une semaine, en fait je n'ai repris que depuis jeudi... alors j'ai travaillé 3 jours, et quand je dis travailler ... Pendant ma semaine d'arrêt, j'ai eu deux jours d'intense douleur, puis je me suis réveillée un matin, j'étais comme ça...j'ai dormi sans arrêt, 10 heures par nuit plus une sieste. Par contre, depuis que j'ai repris, je ne dors plus ou très mal.

Peut être que j'angoisse inconsciemment de retourner dans le collège où mon homme travaillait avec moi, où nous nous sommes rencontrés ...

C'était magique en fait.
notre histoire qui s'est construite petit à petit, à l'insu des collègues, qui ne savaient rien (nous étions un couple illégitime)

Il s ne savaient rien au point qu'ils ont appris notre relation...le matin de sa mort, quand je la leur ai annoncée : "Ah, mais comment tu sais ce qui est arrivé à Emmanuel ? -- Je sais parce que j'étais avec lui "

Je devrais peut être demander une mutation ? Mais on dit bien qu'il ne faut pas prendre de décisions hâtives après un deuil ... Je vois le mal que j'ai quand je fais les courses... je mets deux heures à choisir entre des escalopes de poulet et des escalopes de dinde, ou alors choisir entre deux paquets de gateaux, suuuuper compliqué pour moi en ce moment

Je reste devant les rayons, immobile en apparence mais dans ma tête, c'est chaos et bataille pour me décider !!!!!!!!!! pathétique

Encore merci de votre soutien

Je vais essayer de regarder "L'impossible Monsieur Bébé", il paraît que c'est un film anti déprime, mais je n'arrive pas à suivre un film entier !!!!!!!!!!!!

Je vous embrasse tous,

Muriel

Corail

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #6 le: 10 décembre 2012 à 20:09:36 »
Bonsoir Mirele,

Je suis "malheureusement" exactement dans le même état que toi.
Je ne ressens rien, absence d'émotion, plus envie de parler de mon histoire aux autres, aucune envie.

Le pire, comme tu le dis, c'est cette absence d'émotion, de chagrin. Je dirais même que c'est ça qui est désolant que le reste !

J'en ai parlé à ma psy (sujet de notre dernière séance), je lui ai en gros dit "c'est comme si mon deuil était fini, comme si j'avais fait une croix sur tout ce qui a existé, comme si ça n'avait jamais existé... alors que je devrais être triste, me dire qu'il n'est pas là quand je m'endors, etc."... Elle m'a dit que j'étais encore un peu dans la phase de choc. Chouette, au bout de 4 mois, tout va bien...

Elle m'a dit que ça allait me rattraper, que je n'étais pas insensible et que qq part, c'est parce que lui il n'avait montré aucune faille dans la maladie et que donc, inconsciemment, je me suis dit que c'était à moi d'être forte maintenant...
Tout ça est inconscient bien sûr, puisque je préférerais nettement avoir des émotions !!!

Bref, encore un truc étrange du deuil, dans lequel on ne se retrouve pas vraiment... mais qui fait qu'on avance petit pas, par petit pas...

Bon courage à toi...

dan43

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #7 le: 10 décembre 2012 à 22:11:59 »


  Chère Muriel

  Le deuil passe par différentes phases,c'est mon ressenti au bout de trois mois;après l'anesthésie ,le chaos  intérieur,le désespoir, et ce vide sidéral,quand on réalise tout à coup qu'on ne reverra plus ce qui donnait un sens à notre vie...Ce soir je suis allé faire des courses au magasin du coin.mais je n'arrive pas à penser autrement qu'en terme d'absence "elle aimait çà,j" aurai pris ceci pour elle..." Bon sang ,rien ne me tentait,rien!Tout me parait tellement insignifiant,surtout qu'elle a partagé ma vie pendant 47 ans...et que tout me manque :sa voix, son sourire,son odeur ,ses yeux sa peau...Depuis 2 ans qu'elle était malade,je me suis occupé d'elle comme d'un bébé,et on a eu le temps d'avoir encore quelques moments heureux. maintenant ,comme toi ,je sens l'absence,et tout a perdu intéret... les autres ,à part des amis, en petit nombre ,je les regarde comme des aliens,  Mais, si j'ai bien compris, en lisant l'expérience de nos compagnes et compagnons d'infortune,il y aura des "avancées" vers des jours plus doux.. Tu es dans l'oeil du cyclone,mais tiens le coup!

  je ne vais pas te souhaiter de te remettre à souffrir, mais de trouver un peu de paix...

   je me permets de t'embrasser,

  Daniel

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #8 le: 10 décembre 2012 à 22:39:52 »
"c'est comme si mon deuil était fini, comme si j'avais fait une croix sur tout ce qui a existé, comme si ça n'avait jamais existé... alors que je devrais être triste, me dire qu'il n'est pas là quand je m'endors, etc."... Elle m'a dit que j'étais encore un peu dans la phase de choc. Chouette, au bout de 4 mois, tout va bien...[/b

Chère Corail,
Merci de cette nouvelle "réconfortante", si je puis dire. Cela fait 2 mois et demi, les 2 mois et demi les plus longs et les plus difficiles de ma vie ... et je serais encore dans la phase de choc ? Mon Dieu, mais je vais en avoir pour des années de ce deuil ! Je n'y arriverai jamais, c'est trop dur.

et puis je n'ai pas envie d'y passer des années : l'homme que j'aimais s'est suicidé au bout de six mois de notre histoire d'amour, il a tué sa femme et il est parti avec, alors que la veille nous faisions encore tous les deux des projets de vie commune.

Alors je n'ai pas envie de passer le reste de ma vie en deuil, je veux vivre ! C'est lui qui est parti, lui qui m'a abandonnée avec mon chagrin, la colère, la culpabilité et mon amour immense dont je ne sais ^plus quoi faire.

Comme le dit Daniel "tout a perdu intérêt...les autres, je les regarde comme des aliens".

Je suis alien de partout en fait. Alien aux yeux des autres qui ne comprennent pas ce que je ressens. Alien au regard de mon histoire d'amour qui s'est si vite et si mal et si absurdement terminée. Alien aux yeux de l'homme qui m'aimait et qui m'a pourtant  "éjectée" de sa vie en choisissant de mourir avec sa femme.

Alien à mes propres yeux. Car je ne me reconnais ni dans cette colère qui me guette ce soir, ni dans cet immense chagrin, ni surtout dans cette absence d'émotions.

Cette anesthésie, alors c'est que je recule ? je reviens à la phase de choc ? mon organisme s'est endormi en attendant la prochaine vague de douleur ? Comme le dit Corail : "chouette, tout va bien" !!

Bon je vais avaler un somnifère et essayer de dormir cette nuit.
Merci encore de tous vos soutiens, mes compagnons d'infortune. J'espère un jour que moi aussi je pourrai réconforter, mais pour l'instant je crois que c'est impossible !

Une nuit paisible à tous ceux qui peuvent, je souhaite,

Muriel

cathy

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #9 le: 11 décembre 2012 à 10:59:33 »
Bonjour Muriel,

Je crois que cette absence d'émotions qui te fait si peur est normale, ton organisme se protège, le choc a été rude. Il va falloir du temps pour peu à peu assimiler ce qui s'est passé.
Oui, cette phase où l'on se sent anesthésié existe, mais j'ai fini par penser qu'elle était salutaire, même si on se sent désorienté.

 Notre esprit dispense les émotions au compte goutte, ouvrir "en grand" la vanne de la souffrance  si tôt après la perte de l'être aimé serait bien trop violent. Essaie d'accepter cet état, il n'est que temporaire, et non!  tu ne perds pas la raison ! Bien au contraire, les barrières se sont mises en place pour la protéger.

Dans ce que tu écris, je perçois beaucoup de colère et de la rancune aussi.
Ces sentiments sont normaux, il va falloir que tu apprennes à les gérer petit à petit, un jour après l'autre et ensuite alors ton chagrin pourra prendre sa place.
Bien sûr, il y aura encore des moments de révolte, de colère, mais peut être pourrais tu consulter un psy que t'aiderait à exprimer tout ça ?


Ce n'est là que l'expression de ma propre expérience, et dans ce domaine, chacun est différent et je ne prétends détenir aucune clé, ma vie quotidienne, hélas en est la preuve.

 Accepte cette anesthésie Muriel, elle est "bonne" pour toi.

Je t'embrasse
Cathy


chrisam

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #10 le: 11 décembre 2012 à 23:40:26 »
Pour ma part, toute la journée, j'ai un noeud au ventre, une certaine oppression sur l'estomac, le foie

Ça va passer ?
Parfois, je pense que si pouvait déclencher cette p..... de maladie de cancer qui m' a enlevé AM, je pourrai la rejoindre

Voila 8 semaines, et suis toujours dans le creux de la vague, je ne remonte qu'un tout petit peu mais sans jamais émerger

Corail

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #11 le: 12 décembre 2012 à 14:29:07 »
Oh Chrisam !
Je te trouve hyper dur...
Citer
Parfois, je pense que si pouvait déclencher cette p..... de maladie de cancer qui m' a enlevé AM, je pourrai la rejoindre
Vouloir la rejoindre je peux le concevoir mais vivre le cancer, c'est vraiment dur ! Vivre la chose qui t'a enlevée ta femme, faire vivre ça à tes proches (la maladie), es-tu sûr ?
En ce qui me concerne, mon mari est également mort d'un cancer, j'ai vu la progression de cette saloperie et sincèrement, je ne le souhaite à personne et surtout pas à moi même car je me dis que pour l'entourage, c'est revivre une 2ème fois la même chose et pour toi, c'est de la souffrance...
Quitte à choisir, je choisirai qq chose d'autre pour partir ;)
Je ne remets pas en cause la finalité qu'est de mourir car ça, on peut en avoir envie, c'est bien normal quand on se retrouve seul sans aucun point de repère, avec l'absence... mais un cancer... ça NON !!!
Voilà, je tenais juste à te faire partager mon point de vue !
Courage à toi, un pas après l'autre... (même si l'envie n'est pas vraiment là)

alsy

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #12 le: 12 décembre 2012 à 15:37:24 »


Trop affreux de vivre les douleurs du cancer...
de voir souffrir les gens ainsi.... :'(
non faut pas souhaiter...cette s....... e de maladie...
j'ai encore les images dans la tête... :-\
quand il me disait "je n'en peux plus" ...chaque jour"
pourtant il se battait...
NON Chrisam...t'as pas le droit de souhaiter cela... :o
suis d'accord avec Corail...
trop souffrir....
ne souffre t-on pas déjà assez ???

chrisam

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #13 le: 12 décembre 2012 à 18:51:15 »
Je vous comprends, mais j'ai envie de la rejoindre, elle me manque tellement
Au risque de me répéter, depuis 30 ans nous étions ensemble 24h/24
Celui ou celle que le conjoint part à 7h le matin et rentre à 18h, il a du chagrin, je ne dis pas le contraire, mais nous, c'était 24h/24, c'est le cas de le dire : il me manque ma moitié. C'est le vide, le néant.
Encore une fois, chacun souffre.

Le deuil dépend du degré d'attachement à la personne disparue, de la nature de la relation avant le décès, du degré de dépendance par rapport à cette personne et aussi du temps de l'accompagnement pendant sa maladie. Nous ne faisions qu' UN

Encore une fois, tout le monde souffre d'un décès, et je ne veux surtout pas dire que le mien est plus important que les autres.
« Modifié: 12 décembre 2012 à 18:57:00 par chrisam »

Corail

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #14 le: 12 décembre 2012 à 19:12:02 »
Chrisam,

Je pense que les personnes qui lisent ce forum savent que tu étais avec ta femme depuis 30 ans, 24h sur 24 ensemble.
ça fait un moment que j'avais envie d'écrire ici ou d'ouvrir un post pour le faire et pour dire que malheureusement, le nombre de d'années ne fait en rien la souffrance, ni même le fait que tu aies été 24h/24 avec elle.
Tu sais, on aura chacun notre vision des choses sur la souffrance des autres. On va estimer que la notre est plus importante que celle des autres, selon notre histoire, notre vécu.

Je sais bien comment tu dois souffrir, tout simplement parce que j'ai connu moi aussi LE grand amour. Le mien a balayé en un regard tout ce que j'avais pu vivre précédemment, il a remis en cause tout ce que je croyais être vérité avant.
Quand je le serrais dans mes bras, j'en avais des frissons. Je peux te dire que j'ai été heureuse comme jamais et que pour moi aussi, c'est le gouffre, le néant, le vide, l'absence d'envie, etc.
Et pourtant... Je ne l'ai connu qu'un peu plus de 2 ans et demi, nous nous sommes mariés, avons eu un bébé. L'amour fou. Et pourtant, pas 24h/24 ni 30 ans.
Et pourtant, la même souffrance que toi. Oui, la même !

A mon niveau, je pense juste à TOUT ce que je ne vivrais JAMAIS avec lui, lui qui était ma vie. Je pense à cet amour fou, trop court, je pense au 2ème enfant que nous voulions et que nous n'aurons jamais. Je pense à ma fille qui n'aura jamais connu son papa (6 semaines !), je pense à ses enfants qui n'auront pas de grand-père, je pense au fait que si je dois vivre encore 40 ans, ça sera 40 ans sans lui physiquement...
Donc je te le dis, tu peux te répéter si tu le souhaites mais moi je te dirai juste que ce ne sont pas tes 30 ans ni les 24h/24 qui font ta souffrance, c'est juste le fait que tu l'aimais, qu'elle était tout pour toi et que ça, tu ne l'as plus. Tout comme nous...

Tu finis -il est vrai- en disant que tu ne veux pas dire que ton deuil est plus important que les autres... mais pour moi, sache juste que quand je te lis, j'ai pourtant l'impression que c'est ce que ça veut dire, d'ailleurs, plus haut, tu parles de ceux qui ne se voient pas la journée et tu mets en parallèle ton cas.....
Il te manque ta moitié, il me manque ma moitié, il nous manque, à tous, notre moitié.

La dernière chose que j'ai trouvé et que mon mari a écrit à l'hôpital sans que je le sache : " (....)tu es ma demi-âme" : ça résume assez bien ce que nous étions l'un pour l'autre...

Virginie