FORUM "LES MOTS DU DEUIL"

Comprendre et vivre son deuil => Vivre le deuil de son conjoint => Discussion démarrée par: Alexandra le 19 décembre 2016 à 11:31:15

Titre: En décalage
Posté par: Alexandra le 19 décembre 2016 à 11:31:15
Je me lance à mon tour, ces derniers jours sont si lourds, si violents et le silence assourdissant. Je ne sais pas à qui parler, je ne sais pas comment en parler, j’ai l’impression que je gêne, que ma peine dérange, je me sens terriblement seule et je ne sais pas à qui le dire.

J’ai perdu mon compagnon le 10 Juillet, en 3 semaines d’horreur après 6 mois de déni, son corps nous a lâché brutalement. Des métastases partout et cette image monstrueuse du scanner de tes poumons mon amour, qui ne sont plus qu’une tâche blanche de métastases. Ces jours où tu déclines, violemment, où tu me dis des horreurs et je t’engueule parce que tu n’as pas voulu réagir plus tôt, où je te dis que je veux t’épouser et que tu me dis pas maintenant, où je te mens quand tu me dis que tu as peur de mourir en te disant que ce n’est pas pour ce soir. Et ce coup de téléphone de l’hôpital, où j’entends comme ces derniers jours ton cœur qui s’affole, bip-bip-bip, bip-bip-bip, bip-bip-bip, et je sais, je sais que quand j’arriverai à l’hôpital tu seras mort, et j’arrive à l’hôpital et tu es mort. Et je revois en boucle l’interne qui m’accueille, qui me dit que ce n’était pas prudent de conduire, qui me fait assoir dans la salle de réunion du service de réanimation et qui me dit que tu es mort depuis 10 minutes. Je suis arrivée 10 minutes trop tard. Et il ne me regarde pas, et je répète en boucle que ça n’est pas possible, c’est pas possible, c’est pas possible, non. Et il s’en va, il ne sait pas quoi faire de ma peine et l’infirmière qui vient le remplacer joue avec ses ongles, clic-clic-clic. Et j’attends ma sœur, et j’attends nos amis, et j’attends ta famille. Ta mère qui arrive, qui crie que ça n’est pas possible, qui tape du point sur la table, c’est pas possible. Et on nous dit qu’on pourra te voir, et je n’ose pas, deux heures passent, avant d’aller te voir je demande à mon père si tu seras déjà rigide. Et on ne nous dit rien, et je rentre dans ta chambre, tu es rigide, difforme, blanc, ça n’est plus toi, ça n’est même plus ton corps cette chose difforme et froide et l’infirmière me dit que tu as l’air apaisé et je veux lui dire que je m’en fous, que tu es mort, et je m’en fous. Je m’en fous que tu n’aies pas l’air de souffrir maintenant, tu as tellement souffert ces derniers jours, alors je m’en fous, et tu es mort, tu ne seras plus jamais là, je regarde ce corps, je crois que ta poitrine se soulève et tes yeux s’ouvrent mais il ne se passe rien. Je te quitte quelques minutes, je veux te revoir et ma sœur me dit que ça ne sert à rien, que je te reverrai plus tard, plus tard, mais bordel, tu es mort, et je ne te reverrai plus.

Et il faut affronter cette cérémonie, depuis quelques jours je sais, je sais que tu n’es déjà plus là, je l’ai lu dans tes yeux, je l’ai vu dans ton corps, ça n’est plus toi ce presque cadavre à qui je ne sais plus trop quoi dire. Depuis quelques jours je me demande quelle musique je mettrai le jour de ton enterrement. Mais il n’y a pas d’enterrement, tu avais dit à tes parents que tu voulais une crémation, ça me glace le sang. Trois jours avec ton corps, ils ont réussi à te rendre ton visage et tu es si beau, je te regarde encore et encore, j’attends que tu reprennes ton souffle mais ça ne vient pas. Tu reste froid, dur comme la pierre, la couleur de ta peau change tellement vite, j’ai envie de poser ma tête contre toi, mais je ne supporte pas l’odeur, j’ai froid dans cette pièce frigo mais je reste avec toi, je veux veiller sur toi, dans quelques heures, ils brûleront ton corps, ils te feront disparaître le plus vite possible, pour qu’il ne reste rien. Je ne veux pas entrer dans la salle pour la cérémonie, je ne veux pas entendre les discours l’un après l’autre, je ne veux plus lire ton nom sur cet écran qui dit que tu as 28 ans, je ne veux pas que ça soit fini, je ne veux pas attendre qu’on nous fasse entrer dans l’autre salle, je ne veux pas voir leur film, parce que je sais que quand ils zoomeront sur la plaque, quand on verra en gros ton nom, avec la date de ta naissance et celle de ta mort, quand cette image s’éteindra, ils brûleront ton corps comme on brûle un déchet, on te tuera une deuxième fois en te faisant disparaître le plus possible. Et ça y est, on zoome sur la plaque sur ton cercueil, avec cette horrible faute d’orthographe, et l’image s’éteint, et je sais ce qu’ils te font, ce qu’ils font au peu qu’il restait de toi, je sanglote comme une folle. Et il faut faire bonne figure, se retrouver après avec les amis, les collègues, la famille, sans toi depuis trois jours et sans toi pour toujours. Et encore rentrer chez nous, essayer de manger, les entendre encore parler des vacances de mon père au Japon, je n’en peux plus, je n’en peux plus. Et heureusement la psy quelques jours plus tard, heureusement grâce à elle, je demande à tout le monde de partir, de me laisser seule, de me laisser dans le silence sans toi.

Des mois maintenant que je vis dans ce silence, je suis obligée de me protéger. Je ne supporte pas ma famille qui me presse, qui me scrute, qui me dit que si je reste seule je vais devenir folle, qui m’accuse de me victimiser, qui me félicite de ne pas pleurer devant les gens, qui me dit qu’au final si on m’écoutait ce serait moi la plus malheureuse et pas toi. J’ai tout quitté, j’ai recommencé à travailler, il a fallu trois mois pour que j’y arrive, je me suis installée dans cette région où on rêvait de s’installer, où tu regardais les maisons. Deux mois plus tard, j’essaie toujours de me raccrocher à quelque chose. Je n’y arrive pas, je n’arrive pas à travailler, je n’arrive pas à m’intéresser à ce travail qui me faisait rêver. J’essaie de rencontrer du monde, je me suis mise au yoga pour me détendre, mais me détendre me donne envie de pleurer et c’est dur qu’on puisse me voir comme ça. J’ai fait des rencontres, mais j’ai peur de déranger, je suis tellement seule que quand ça sort je ne filtre plus rien et je raconte toute ma vie à des étrangers que je dérange, je le sens bien. Je ne veux plus rencontrer ces gens qui comparent leur divorce à ta perte, toi tu n’auras pas la chance de refaire ta vie sans moi, moi je n’oublierai jamais ce corps qui n’était plus toi. Samedi, je me suis confiée à une fille que je venais de rencontrer et qui m’a dit de faire attention de ne pas raconter ma vie à tout le monde. Hier, j’ai baissé les armes un peu avec cet homme que je viens de rencontrer et avec qui, de façon incroyable après si peu de temps sans toi, je me sens bien. Il a fait ce qu’il a pu pour comprendre, mais on était au resto, et ça le dérangeait, chut, ne parle pas si fort… Et je me suis excusée, il m’a dit que je n’avais pas à m’excuser, mais j’ai bien senti qu’il aurait préféré que je ne parle pas de toi, que je ne lui dise pas à quel point ma famille me faisait souffrir déjà bien avant toi.

Alors aujourd’hui je me sens en décalage, j’ai l’impression d’être en dehors du monde, de regarder le monde qui s’anime et de ne plus en faire partie. Et aujourd’hui je voudrais dire merci à toutes celles et à tous ceux dont j’ai pu lire les histoires ici depuis quelques jours, certains jours c’est moins dur de savoir que je ne traverse pas ça toute seule.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Titi62 le 20 décembre 2016 à 08:42:53
Alexandra,

Je ne veux pas être la donneuse de conseil de plus mais ton récit montre que tu affrontes ton deuil seule, que tu es en colère et que tu ne trouves personne pour partager tes sentiments.
Si tes proches ne peuvent pas t'aider, pourquoi ne cherches tu pas de l'aide auprès de professionnels du deuil. Je suis du genre à penser qu'on doit s'en sortir seul, que les psy ne servent à rien.... pourtant pendant la maladie de mon mari a été malade 5 mois, j'ai craqué, impossible de m'arrêter de pleurer. J'étais au boulot et ma crainte était de ne pas pouvoir rentrer chez moi et que mon mari me voit dans cet état. J'ai donc été voir un médecin, chance ce jour là, il a eu des patients qui ne sont pas venus  et il a donc pu me consacrer du temps. Cet échange m'a remis sur les rails, j'ai pu rentrer chez moi, parler avec mon mari de mon angoisse face à sa maladie et lui a pu me dire qu'il avait peur que je tombe malade... bref j'ai pu continuer et faire face.
Je pense que si ce dialogue avec quelqu'un qui ne me connaissais pas, qui ne connaissait pas mon mari m'a aidé, cela doit être possible pour toi aussi.
 Penses-y, une personne formée à l'écoute sera plus aidante qu'un inconnu auprès de qui tu déverses ta peine sans qu'il sache quoi en faire, ou que ta famille qui trouve que tu mets bien longtemps à te remettre parce qu'ils ont envie de reprendre leur vie parce que ta peine n'est pas la leur
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 20 décembre 2016 à 10:53:41
Je sais bien Françoise, j'ai de l'aide avec une psy depuis que j'ai perdu mon compagnon, je ne pouvais pas affronter tout ça seule. Mais je crois que ces jours-ci, ça ne suffit plus. Parler de Tom une fois de temps en temps, alors qu'il était toute ma vie, qu'il est encore toute ma vie, non ça ne suffit pas, ça ne suffira jamais. Bien sûr je sais bien que parler de ce que je traverse à des personnes qui me connaissent à peine, ça ne sert à rien, ça ne va pas me soulager, ça n'est pas le but d'ailleurs.

J'ai du changer de région pour travailler et j'ai le choix: soit je reste terrée chez moi à ne voir personne, soit je rencontre de nouvelles personnes. Et inévitablement si je le fais, je sais aussi que ça ne sera pas facile. Ce que je traverse fait partie de moi maintenant, évidemment quand je rencontre de nouvelles personnes, ça vient pêle-mêle au milieu de toutes les petites banalités qu'on se raconte pour faire connaissance, "oui je viens d'arriver dans la région, non je ne connais pas beaucoup de monde ici, je viens de perdre mon compagnon et j'ai envie de voir du monde depuis quelques temps". Je ne veux pas me sentir coupable d'avoir perdu l'homme que j'aime et je ne peux pas faire semblant que ça ne fait pas partie de ma vie, sinon ça ne sert à rien, je préfère rester chez moi et ne rencontrer personne ici.

Alors hier, j'avais juste besoin de déverser ma colère, de regarder en face ces images qui tournent en boucle. Pas pour qu'on les lise, juste pour les sortir de ma tête, pour les poser devant moi, parce que justement ces images sont là et que je ne veux pas tisser de nouveaux liens avec elles en arrière-plan.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Faïk le 20 décembre 2016 à 12:08:49
En décalage… l'impression d'être entre deux mondes qui ne communiquent guère ou plus ajoute de la souffrance là ou il y en a tant déjà ... Tous nos repères ont volé en éclats et notre nouvel état ne semble plus adapté au monde qui continue de tourner.  Nous voici tels une pièce inadéquate qui bien que  retournée en tous sens, ne trouve plus sa place dans le puzzle qui faisait autrefois notre vie, celle que nous menions parmi ceux qui sont devenus maintenant les autres ... une pièce en trop ?
La lecture des nombreux messages postés ici montre que c'est une constante alors même que notre humeur est inconstante et épuisante.
On peut comprendre qu'outre son chagrin, notre entourage ne peut appréhender les bouleversements qui nous agitent, la perte étant une « expérience »solitaire.
Même chagrinés, peu seront à même de comprendre ou d'avoir la patience de confronter notre souffrance à leur propre bien-être. Certains prendront carrément leurs jambes à leur cou quand quelques-uns essaieront de nous accompagner, un jour, deux jours, quelques semaines ou quelques mois…
Peut-être deviendrons-nous un jour le maillon qui relie ces deux mondes …et que « savants » de la perte, nous deviendrons assez malléables pour passer de l'un à l'autre, selon nos envies, nos humeurs, nos tristesses et nos joies … certains semblent y arriver …

Dans un entre-soi ou avec ceux qui ne savent pas, parler, écrire, tous les moyens d'expression dans lesquels on peut déposer le trop-plein sont à prendre pour rester un tant soi peu debout si on a fait ce choix, à notre corps et cœur défendants parfois …sans honte ni culpabilité ...

Je pense à vous
Titre: Re : En décalage
Posté par: souci le 20 décembre 2016 à 12:42:36

    Ces derniers mots de Faïk, ce thème du décalage ...
    m'ont fait apparaître l'image d'un clown monté sur échasses, car dans le meilleur des cas, c'est ce que nous sommes en société ...
    Jamais plus sur le même plan ...
    Ou bien on va devenir des as du paradoxe, ou bien on va morfler, ou bien on va s'abrutir, ou un peu de mélange en fatras de tout ça ...
     Solidairement, Martine.
     (http://www.aht.li/2998758/echassier2.png)
Titre: Re : En décalage
Posté par: Titi62 le 20 décembre 2016 à 14:49:00
Alexandra,

C'est ce qui est bien sur le forum, pouvoir écrire ce qu'on ose pas dire ou qu'on ne peut pas dire ailleurs. Partager avec ceux et celles qui traversent la même tempête, nos doutes, nos pensées.

J'ai la chance d'avoir une famille formidable qui m'épaule. Michel est parti le 24 novembre qu'en sera-t-il dans quelques mois ?
Je prends ce qu'on me donne aujourd'hui, c'est déjà beaucoup. J'ignorais qu'on souffrait autant physiquement du deuil de son compagnon. J'ai perdu mon père à l'âge de 20 ans,, il y a 34 ans. Ma mère avait 56 ans, elle n'a jamais exprimé ou partagé sa douleur.

J'ai deux filles de 27 et 25 ans et nous parlons beaucoup de ce que nous ressentons, de la douleur de l'absence de Michel. J'ai vraiment l'impression que cela nous aide toutes les trois.
Puisque tu es seule dans une région où tu ne connais pas grand monde, j'imagine qu'il est difficile de partager, et c'est là que le forum est utile.
Continue à écrire, tu auras toujours une écoute attentive des membres du forum.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Pierre le 20 décembre 2016 à 16:39:13
Alexandra,
Et pourquoi ne pourrais tu pleurer?
Peur du regard des autres?
Mais on s'en fiche des autres!
Si pleurer te fait du bien (et cela fait du bien il me semble), et bien détend toi.
Le Yoga effectivement peut t'aider... si tu acceptes tes émotions.
Quand j'ai commencé la méditation (dans un groupe), j'ai passé les premières séances à pleurer.
Les larmes coulaient en silence.
Et petit à petit, elles se sont taries.
De temps à autre, la tristesse se rappelle à moi et puis s'éloigne.
A mon avis, il ne faut pas lutter contre ses émotions. Il faut au contraire les reconnaître, les accueillir et les laisser partir.
Tu peux y arriver, tu sais!!!
Pierre
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 20 décembre 2016 à 21:57:43
Bonsoir,
Ce besoin ou ce refus de parler...
L'autre si désemparé dès que l'on ose évoquer notre peine...
Ou seulement notre aimé qui n'est plus.

Cet entre deux mondes.
Entre le monde d'avant ; celui de nous deux.
Et le monde  d'aujourd'hui ; celui de nous sans lui.
Nous sommes d'étranges animaux.
Semblables à ce que nous fumes, et pourtant si différentes.

Bon, ce matin, nous avons travaillé sur   un ancien agenda professionnel, et instantanément les yeux humides et la voix qui tremble. Face à mon patron qui a vraiment dû me prendre pour une folle.....
Ben oui, M'sieur, mais voilà, ce jour-là, c'était encore le temps d'avant...
Il est bien élevé, ce monsieur, alors il n'a rien laissé paraître.
Seulement trahi par  son regard, soudain un peu perdu ; inquiet.
Et moi,... juste assez de souffle pour péniblement terminer ma phrase.

Le temps qui passe adoucit la peine, c'est vrai ; je le sais bien.
Mais nom de nom.... l'émotion n'est pas loin.
Cette fichue période des fêtes de fin d'année, et la  pluie qui revient  sur les joues.
Rien de grave ; juste de quoi faire briller le regard.
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 21 décembre 2016 à 16:59:28
ayant côtoyé avant le décès et après (dans ma clientèle) des personnes veuves depuis très longtemps (plus de 30 ans) d'autres plus récentes j'avais pu constater
ce décalage
marquée par mes deuils jeunes
(petit rappel à 20 ma meilleure amie -accident-alors que j'étais dans ma nouvelle vie de femme enceinte et un ami d’enfance : leucémie , quelques mois après mon papa : cancer, deux ans plus tard mon beau père : cancer, puis d'autres)
 et en 2006 ma meilleure amie
tout ça m'a placée toute ma vie en équilibriste, en décalage permanent !
Si j'ai su jusqu'au deuil de mon aimé me relever au bout chaque fois de 1 à 2 ans là c'est et bien plus fort, plus profond, difficile à panser et penser ...
les paradoxes des rires et du désespoir intérieur (par rapport à la perte de mes meilleures amies de mon papa) ont été une constante
là de clown je crois être devenu l’ornithorynque  (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ornithorynque) de mon livre d'images d'histoire d'enfant qui était mal et pas reconnu où qu'il aille ...
j'ai décidé d'apprendre à continuer à vivre en allant vers les autres qui parfois sont bienveillants, respectueux dans des milieux où on ne croirai pas spontanément trouver cela ...
la magie aussi des possibles beaux humains ...
ces lieux, milieux sont TRÈS rares mais me permettent un peu de vie sociale hors de celle obligatoire niveau pro.
chaleureusement que de l'apaisement vous visite de plus en plus
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 21 décembre 2016 à 19:46:20
Martine, ton clown monté sur échasses, il me plait bien.
Moi je crois que les bras grands ouverts, c'est un signe de générosité.
Avec ses longues longues jambes, il va pouvoir avancer plus vite sur les chemins qui s'ouvrent à lui.
Et puis c'est sur, de là-haut, le paysage doit être encore plus beau.
Mwoui, je l'aime bien ton clown.
Alors merci pour l'image.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Ela le 21 décembre 2016 à 20:15:31
Qigan.... Depuis toujours, je me sens très "ornithorynque" moi aussi... Les accidents de parcours, qui font de nous des gueules cassées, transformées, difficiles à intégrer, en apparence, à certains paysages... Mais tout comme l'ornithorynque, on apprend à avancer en clopinant, cahin caha... On apprend à nager pour ne pas couler. On apprend à se défendre face à l'adversité. On apprend à ne pas toujours être compris.   Moi je veux bien continuer à patauger et claudiquer avec toi et d'autres sur ce forum. Car oui, heureusement, il reste toujours des clowns tristes et bienveillants, des ornithorynques et autres animaux étranges et sympathiques à rencontrer sur les chemins de traverse des accidentés de la vie. Je vous embrasse bien fort.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 22 décembre 2016 à 09:42:57
Merci à toutes et à tous pour vos réponses, je crois que ce matin pour la première fois depuis quelques semaines, ça va un peu mieux. J'avais l'impression d'être une horrible chimère à trois têtes, je préfère de loin ressembler à un ornithorynque, un peu étrange, mais au moins pas repoussant.

Merci Pierre aussi, j'ai eu envie de méditer après ton message et certaines sensations qui font du bien sont remontées à la surface, je les garde bien au chaud pour le prochain creux de la vague.

Une grosse pensée pour vous toutes et vous tous.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 26 décembre 2016 à 11:34:13
Fausse alerte mon amour,
c'est déjà le creux de la vague, je coule, je m'étouffe, je replonge. Ces jours-ci, je replonge, je n'ai plus envie de rien. Je ne peux pas, je ne peux plus, je suis épuisée, je veux juste que ça s'arrête, mourir avec toi pour de bon. Je n'en peux plus de me réveiller le matin, de me dire que ce matin ça va, et d'ailleurs pourquoi je me dis ça, ah oui, ça y est, je me souviens, mon amour, tu es mort... Pas "parti", tu n'es même pas ailleurs, et tu me manques et tu ne le sais même pas. Parce que ça y est, c'est pour de vrai, j'aurai beau pleurer reviens, reviens, reviens, non tu ne reviendras pas. J'aurai beau t'aimer de toutes mes forces, ça n'aura pas d'importance, tu ne le sauras jamais.

J'en ai tellement marre, je veux juste que ça s'arrête, je ne veux même plus t'aimer. Et pourtant, il y a ton rire qui résonne, tes yeux qui rient, ta belle barbe rousse en pagaille, je cherche encore ta main, je me glisse encore dans tes bras sur le canapé,  je m'endors encore contre toi... mais je me réveille seule avec le chat contre moi. Je deviens complètement zinzin, je perds les pédales, j'écris à un souvenir, c'est pas beau à voir. J'en ai marre de cette foutue fracture du cœur, quand est-ce que ça s'arrête? 
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 26 décembre 2016 à 13:21:11
Notre malheur nous a projetées sur de gigantesques montagnes russes.
Contre notre gré.
Moi qui n'ai jamais aimé ces manèges à sensations, me suis trouvée, comme toi, confrontée à des moments où la douleur se faisait plus discrète.
Sans savoir ni comment ni pourquoi.
Et puis dans la minute suivante, pliée en deux à vômir d'avoir trop sangloté de désespoir.
Oh Alexandra, comment adoucir un peu ta peine ?
Je crains de déclencher ta colère si je te dis  qu'aussi incroyable que cela puisse paraître, le temps qui nous entraîne comme fétus de paille dans l'oeil du cyclone, oui, que le temps adoucit peu à peu notre peine.
Je crois bien que j'aurais hurlé de rage, et mordu, si on m'avait dit pareille chose dans les premiers mois de ma vie sans lui.

Le temps à suturé la plaie, et fait cesser l'hémorragie.
Bien sûr qu'il pleut encore sur mes joues, parfois.
Mais je suis debout.
Etonnée de l'être, car moi non plus, je ne pensais pas pouvoir survivre à cette abomination.
Ne plus penser pour effacer un présent invivable ; se réfugier dans des rêves d'où la souffrance serait bannie.

Puis peu à peu, j'ai recommencé à accepter de penser ; j'ai retrouvé mon humanité.

A résister pour ne pas sombrer, à lutter pour préserver un semblant d'équilibre, j'ai craint de perdre mon adoré dans une sorte de déni ; peur de perdre son image, le son de sa voix ; les souvenirs.
Mais les souvenirs sans les larmes.

Oh Alexandra, j'aurais tant voulu t'aider, et voilà que je te parle de moi....
Me croiras-tu si je t'écris que le temps arrondit notre peine, et que si notre coeur se fait lourd dans les moments de grisaille, il ne se déchire plus à chaque battement ?
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 26 décembre 2016 à 22:02:38
*
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 27 décembre 2016 à 10:34:04
Merci Ephémère pour tes mots,
ne t'excuse pas de parler de toi, de vous, je ne sais pas si je ferai mieux. Et puis je vois ce matin que tu as semé ici et là de petits messages, tu as sûrement besoin toi aussi qu'on prenne soin de toi. Alors merci Ephémère de trouver les mots, ce n'est pas si facile.

Et ne t'inquiète pas, je ne suis pas en colère quand tu me dis que le temps va apaiser les choses, juste en colère contre moi de penser que je suis à part, et que le temps pour moi ne fera rien de tout ça. C'est con et prétentieux de ma part et ça m'énerve.

Il semblerait que ce soit moi le cyclone ces jours-ci (et oui, me voilà! http://www.firinga.com/systeme-alexandra.html). Quand j'en aurai fini d'être en colère contre la vie, la mort, le cancer, la terre entière, mon compagnon, ma famille et pour finir contre moi, je pourrai doucement redevenir une tempête et si j'ai un peu de chance cette fois-ci juste une petite dépression. On croise les doigts!
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 27 décembre 2016 à 13:17:35
Mais non, Alexandra, rien de prétentieux dans l'idée que tu es "à part".
Pour avoir durant des mois, et des années, centré toute ma vie sur mon adoré, la maladie, et le combat, j'ai fini par  penser que, moi, je l'aimais plus que personne n'avait jamais aimé, et que moi, oui, moi, je ne ferais jamais ce fichu deuil que certains avaient l'outrecuidance d'évoquer..
Cela d'ailleurs, me mettait en colère.
Comment osaient-ils imaginer que je puisse survivre à pareille abomination ?
Qu'est ce qu'ils espéraient  tous, avec leurs mots gentils ?  Qu'ils parviendraient à effacer ma douleur ?
Non, mais, est-ce qu'ils ne voyaient pas que notre amour était extraordinaire ?
Et qu'à cet amour fabuleux, ne pouvait répondre qu'une douleur unique et inextinguible.
Vois-tu, je crois que je voulais me persuader qu'aucun couple ne s'était aimé autant que nous.
Et que par conséquent, j'étais la seule à éprouver ce qui me traversait le corps et l'âme.
Mais à venir ici, lire tant de chagrins, tant d'amours puissants, j'ai compris peu à peu que mon histoire et mon vécu n'avaient rien d'exceptionnel.
Et je crois que cela m'a rassurée, m'a aidée.
J'ai eu peur de ne pas assez souffrir.
Peur que ma peine ne soit pas à la hauteur de notre amour.
Mais je sais en même temps que mon adoré n'aurait pas accepté de me voir ainsi dans la douleur.
Alors, clopin, clopant, j'ai parcouru ce chemin qui me mène jusqu'ici aujourd'hui.
Et je sais que le sourire revenu, parfois même le rire, ne le trahissent pas ; ne trahissent rien de notre amour.

Sois douce et indulgente avec toi, Alexandra.
Je t'envoie en partage, le ciel tout bleu qui éclaire le paysage ce matin.
En espérant que ta journée soit plus sereine.

Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 30 décembre 2016 à 12:18:50
Mon amour,
Je rêve qu’on remonte le temps, un flashback pour tout recommencer, dans deux jours, 2016 pointera son nez. Une deuxième chance. Une chance d’essayer. C’est Noël et depuis quelques jours, il y a cette boule à ton sein. Je rêve que cette fois-ci tu m’écoutes et que tu t’inquiètes. Je rêve que cette fois-ci il n’y aura pas tous ces mois à savoir que quelque chose ne va pas sans savoir quoi. Je rêve que cette fois-ci 2016 sera l’année de la bataille et que cette fois-ci ce sera le cancer qui perdra et pas nous. Je rêve que cette fois-ci la souffrance sera terrible aussi, que nos vies seront fracassées aussi, et pourtant tu t’en sortiras. Mais je rêve…

Dans deux jours, 2017 sera là, il n’y aura pas de deuxième chance. Et je revois la plaque sur ton cercueil. 1987-2016. 2016 s’en va et toi tu y resteras. 2017 qui vient et que je hais déjà parce qu’il n’y aura pas la moindre petite seconde avec toi. Et l’envie terrible de rester en 2016 avec toi, de m’arrêter là, à quoi bon continuer à compter les jours, à compter les mois, à compter les années ? Affronter demain soir, seule parce que je n’ai pas la force de faire autrement, minuit sans t’embrasser, me réveiller sans toi encore, et cette année à ne pas voir nos rêves se réaliser. Non, je ne peux pas, je veux m’arrêter là.

Et je lutte contre l’idée de remettre de l’ordre dans mes papiers pour que ma famille n’ait que le minimum à faire quand je ne serai plus là, contre l’idée de demander qu’on enterre mes cendres avec les tiennes, contre l’idée de choisir qui pourra s’occuper du chat, contre l’idée de trouver la meilleure solution pour annoncer que j’ai décidé d’arrêter de survivre. Et je me demande ce que tu ressentirais si je ne luttais plus. Est-ce que tu serais en colère contre moi comme je suis en colère contre toi d’avoir fui la bataille contre la mort ? Est-ce que si c’était toi qui te retrouvais seul je voudrais te forcer à continuer si tu n’en avais pas la force ? Je ne sais pas, je ne crois pas, j’aurais trop mal que tu souffres, je voudrais que tu aies une chance de vivre mais pas que tu sois obligé de survivre. Je t’aime tellement mon amour et je ne peux pas te le dire. Je t’aime et tu me manques.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mon amour le 30 décembre 2016 à 19:57:34
Mon dieu que tes mots , que ce que tu ressens résonnent en moi ...plus la nouvelle annnée approche et  plus mon angoisse s'empare du moindre recoin de  mon corps ...étouffant progressivement le peu de raison qu'il me reste de vouloir rester en 2016, comme toi je ne veux pas que 2017 ose venir, ose s'écouler sans ma fille , ma fille qui faisait caque année le pari d'etre la premiére a minuit à me souhaiter la bonne année ...elle a toujours gagné... Alors comment 2017 peut elle oser s'annoncer sans l'appel d'andrea , sans l'appel de mon amour ...c'ést jsute pas possible ...2016 est l'année qui a tuée ma fille ...je veux la suspendre rester en elle, rester avec mon andreà ...mon dieu que s'est dur ..Comment supporter une nouvelle année sans elle ... Comme toi , je continue de lutter de ne pas rédiger une lettre à chacun pour demander pardon de vouloir partir la même année que ma fille , avoir sur ma tombe la même année de fin ....
Titre: Re : En décalage
Posté par: Pucinette le 30 décembre 2016 à 20:54:57
Comme vous. .. Je ne veux pas de 2017.... Je me m'accrocher à 2016... A cette dernière année avec mon amour....

Bon courage à toutes et tous. ...
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 31 décembre 2016 à 20:10:59
Comme tu as raison, Pucinette.
Nous sommes partagés entre le besoin et la peur de voir le temps passer.
Car c'est lui qui  nous éloigne du moment de l'apocalypse et use notre douleur.
Mais dans le même mouvement, cette avancée à travers les mois puis les années nous ancre davantage dans notre nouvelle réalité, et dans la peur de l'oubli.
Encore un paradoxe qu'il nous faut affronter.
Un dilemme de plus : avancer ou reculer...
Alors ce soir, je forme un vœu pour ceux d'entre nous qui sont au plus profond de la douleur : que la souffrance s'efface et qu'ils parviennent à s'autoriser à nouveau l'espoir.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 02 janvier 2017 à 11:51:53
Il y a quelques minutes, M. m’a envoyé un message pour me souhaiter une bonne année avec ces mots que je redoutais tant, ceux qui me souhaitent que 2017 soit mieux que 2016. Comment 2017 pourrait-il être mieux que quelques mois de 2016 avec toi ? Alors je lui ai dit que j’avais du chagrin, que toute une nouvelle année sans toi serait difficile. Et elle m’a dit d’essayer la méthode Coué ! Non mais mon amour, ils sont pas tous comme ça tes potes rassure-moi ? Tu me connais, j’ai fait ma pénible, je n’ai pas pu m’empêcher de lui répondre, elle s’en est pris une bonne tartine d’explications. Inutile mais ça fait du bien. Je tremble, j’ai les nerfs qui lâchent. Finalement, ce n’est peut-être pas moi qui suis en décalage, il y a vraiment des gens qui ont un problème avec la tristesse des autres !
Titre: Re : En décalage
Posté par: lisa le 02 janvier 2017 à 12:55:42
J ai aussi l impression que la grande majorité  des gens a ,comme tu dis,un problème  avec la tristesse des autres...J ai reçu  deux messages me souhaitant...plein de bonheur pour 2017...!!! Je n ai pas répondu, je ne répondrais pas.2 personnes à  rayer...Bouleversée  par tant d indifférence, par ce manque de sensibilité, d intelligence...
.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Nora le 02 janvier 2017 à 13:06:44
Règle numéro 1 : s'éloigner des personnes toxiques.

Bien à vous

Nora
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 02 janvier 2017 à 13:32:13

Oui, oui : s'éloigner des personnes toxiques, voilà qui est indispensable.
Et aussi ...des imbéciles...
Mais en dehors de ces deux catégories de contemporains,  je crois qu'en général,  ceux qui ne savent pas, sont  "en décalage" avec nous.
Il faut avoir affronté ce que nous traversons pour partager notre sensibilité.
Bien sur, il y a les indifférents, mais aussi les maladroits. Et il est vrai que le malheur et le chagrin de l'autre font peur.
J'ai moi-même entendu un très enthousiaste "joyeuses fêtes" de la part d'un proche....
Après tout, nous avons bien le droit d'expliquer. Si notre interlocuteur ne comprend toujours pas, au moins aurons-nous  exprimé un peu de ce que nous ressentons.
Je ne suis pas encore tout à fait résignée face à ce genre de phrases, alors  dans les moments où je suis plus fragile, la colère me vient.....
Lorsque je suis plus solide, je souris dans ma tête.
Au fond, je préfère qu'ils n'imaginent pas notre douleur.
Mais.... je suis parfois moins indulgente, je l'avoue.
Je vous adresse en partage le ronronnement du chat, roulé en boule près de la cheminée. Voilà de la tendresse à l'état pur.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 janvier 2017 à 12:20:17
6 mois mon amour… 6 mois depuis que je t’ai perdu et que j’ai tout perdu avec toi. Tu es mort et je ne vis plus, je ne sais même plus qui je suis, d’ailleurs je n’ai pas envie d’être qui ce soit sans toi. A quoi ça sert sans toi ? Sans ton sale caractère, sans ton rire, sans ta force, sans ton insouciance, sans tarte au citron m’ringuée, sans nous endormir comme deux vieux sur le canapé, sans ta belle barbe rousse, sans la maison qu’on aurait trouvée et refaite du sol au plafond… J’avais rêvé avec toi de cette maison, on était au tout début de nos rêves ensemble, à quelques semaines de tout inventer ensemble. Sans savoir, sans comprendre qu’il n’y aurait jamais la maison, le potager, le chien, les poules, les moutons pour tondre la pelouse et le hangar pour bricoler. On allait tourner une page pour en commencer une autre encore plus belle, toi d’ailleurs tu l’avais déjà tournée, depuis un an tu avais déjà la tête dans ce petit coin de Bretagne qui nous attendait. Et voilà qu’enfin c’est possible, je l’ai terminée cette foutue thèse, il ne reste que la soutenance fin Juin. Et je l’ai ce travail, c’est pour le 11 Juillet, tu vas me rejoindre un peu plus tard. Mille questions se bousculent, j’ai peur parce que tu te comportes comme un con ces derniers mois, j’ai peur de te déraciner et que tu m’en veuilles. Mais c’est le cancer qui te ronge de l’intérieur qui parle à ta place, on n’a vraiment rien compris, rien vu venir. Quelques semaines de répit, nos dernières escapades à moto, nos dernières engueulades mémorables, nos derniers moments de tendresse et puis le diagnostic qui se dessine, et puis ton corps qui te lâche, et puis cette bataille de 3 semaines, et puis ce 10 Juillet à 14h10. Tout s’arrête au moment où tout commençait. Pourquoi toi, pourquoi nous, pourquoi à cet instant précis ?

Je te revois ton premier soir à l’hôpital après l’opération, heureux de ne plus avoir mal, je t’entends encore me dire « tu vois, j’ai tenu jusque là », tellement content de toi. Mais moi je ne t’avais rien demandé mon amour, je ne t’avais pas demandé de souffrir pour faire semblant que rien ne se passait dans ton corps. Je ne t’avais pas demandé de me protéger, pas comme ça en tout cas. Rien, il ne me reste rien. Rien qui vaille la peine, je ne veux pas m’accrocher, je ne veux pas aller de l’avant sans toi, juste ne plus jamais vivre un autre jour sans toi. 6 mois c’est déjà beaucoup trop, je n’en veux pas des 60 années qu’il me faudra sûrement supporter sans toi. Pardon mon amour, pardon de n’avoir pas pu te sauver, pardon de ne pas avoir envie de sauver celle que j’étais devenue grâce à toi. J’ai tellement l’impression de t’avoir volé ta vie, d’avoir pris trop de place, j’avais trop besoin de toi et tu n’as pas pu écouter ce cancer qui te rongeait de l’intérieur à cause de moi. Et même si c’était ton excuse pour fuir la réalité, moi j’aurais du voir, moi j’aurais du comprendre à ta place, je m’en veux tellement. Et je ne veux pas vivre à ta place cette vie qu’on aurait du vivre ensemble si on avait été moins cons. Comment te pardonner d’avoir refusé de m’entendre quand je cherchais à savoir ce qui n’allait pas ? Comment me pardonner de m’être laissée entrainer dans ton déni alors que j’avais senti que tout allait de travers ? Comment vivre alors que tu n’as toi plus cette chance, qu’il ne reste de ton sourire que les photos, de preuve de ton passage dans ma vie que la douleur sourde qui m’arrache le cœur ? Je t’aime mon amour, je t’aime et j’ai mal.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Pucinette le 10 janvier 2017 à 14:01:21
J'aurai pu écrire le même texte... Les larmes coulent sur mon visage... Je ne sais pas comment je vais pouvoir vivre les 30 ou 40 ans qu'ils me restent à vivre...

Bon courage...
Titre: Re : En décalage
Posté par: Nandou_Guanaco le 10 janvier 2017 à 14:32:37
Idem, 30 ans m' attendent à m' emmerder copieusement, la retraite pour m' emmerder royalement, la solitude pour m' ennuyer à perpète , l' oisiveté la pire des emmerdeuses vicieuses, le passé, juste le passé, rien au présent, rien pour l' avenir. Zavez-vu l' heure? 14h30 et chuis encore en pyjama.  Je me laisse vivre.  Je ne permettrais pas  de dire que je me laisse mourir.  Je m' éteins.  Après une vie trépidante à faire 35 heures tous les 3 jours, à ne prendre presque jamais de vacances, à aller de l' avant, foncer, du jour au lendemain, plus de mari, plus de travail,  plus personne à la maison. Plus que deux personnes à la maison: mon ombre et moi. Donc ça ne fait plus qu' une personne. Je dirais même une moitié qui a perdu son autre moitié. Allé, c' est les soldes, je ne suis plus que le quart, je me demande même pourquoi je me compte. Je ne sers plus à rien.  Je ne cuisine plus, le ménage, quel ménage? Et pourquoi faire le ménage? Personne ne vient. Je ne repousse personne mais je me barricade, Je m' enferme telle une citadelle imprenable. Purée comme on dit chez nous, faut le voir pour le croire, jamais de la vie j' aurais pensé finir en pareille déconfiture. Eh bé, pire encore, je ne suis pas la seule! Pfffffff
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 11 janvier 2017 à 12:24:36
Et ben puisque c’est comme ça, on pourrait s’emmerder copieusement ensemble de temps en temps ? Je vous invite au pays des larves, des cyclones et du ciel gris ! Y a de la place pour tout le monde, les clowns sur échasse, les ornithorynques, les cancres, et toutes les bestioles curieuses qui habitent ce forum...

Merci Pucinette d’avoir versé quelques larmes avec moi, merci Nandou de m’avoir fait sourire un peu hier.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Nora le 11 janvier 2017 à 13:50:28
Alexandra,

Sans le vouloir, sans le savoir, par ton message d'hier, tu as ouvert une lucarne dans mon esprit tout claquemuré par le chagrin et la culpabilité. Mon seul neurone sauvé du cataclysme tournait en rond, je peux l'envoyer voir ailleurs.

Difficile d'expliquer pourquoi, les voies du chagrin sont impénétrables.

Mais je te remercie pour cela.

Et je veux bien venir m'emmerder un peu dans ton pays, et que Nandou-Guanaco me donne le nom de ses pilules.

Bien à toi, à vous tous

Nora



Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 16 janvier 2017 à 11:50:11
Mon amour,
J’ai glissé sur le verglas samedi matin et la voiture est allée se glisser tout doucement dans le fossé. Je n’ai rien, la voiture n’a rien et ça devrait me soulager mais non. Non parce que je n’ai pas pu t’appeler pour te raconter mon aventure. Non parce qu’hier soir en prenant la route les larmes ont recommencé à couler. Non parce qu’en allant me coucher je t’ai de nouveau appelé. Toujours cette litanie, reviens, reviens, reviens, je t’en supplie, je t’en supplie. Je croyais que j’avais dépassé cette étape, ce déni de ta mort, ce regret qu’il ne m’arrive rien de grave mais non, ça recommence et j’ai peur. Peur que ça dure, peur de ce rêve de samedi soir où je t’ai cherché dans l’hôpital sans te trouver, peur de cette absence d’émotions « normales » où j’ai moins peur de mourir que d’être encore en vie. Reviens mon amour, je suis si fatiguée d’être vide, reviens Tom, je n’en veux pas de la vie sans toi, je n’en peux plus d’attendre de mourir. Reviens, j'en ai marre de parler à tes photos...
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 30 janvier 2017 à 12:27:04
Mon amour,
Je te cherche ces jours-ci dans le silence qui annonce la prochaine tempête, presque 7 mois sans toi, presque 8 mois depuis que j’ai compris que je t’avais perdu. Partout dans mon appartement, sur mon bureau au travail, partout il y a tes photos qui sourient, il y a nos photos qui parlent de bonheur. Sur ma table de nuit, cette carte écrite il y a deux ans et que je relis sans cesse. Tu écris : « Deux années de bonheur et beaucoup d’autres encore plus belles devant nous ». Et moi, parfois, je pense « menteur », il n’y en a eu qu’une de plus. Tu me manques mon amour, tu me manquais déjà quand tu étais encore là. Il y a ces 7 mois depuis le 10 Juillet, mais il y a aussi cette dernière année où je sentais que je te perdais sans comprendre. Il y a ces images horribles de ton corps mais il y a aussi ces mois à se battre l’un contre l’autre,  et je ne pourrai jamais te demander pardon.

Nos adieux par texto, toi dans ton lit d’hôpital et moi seule sans toi dans notre appartement. Est-ce que tu avais compris mon amour ? Est-ce que tu l’as compris ce texto, est-ce que tu m’en as voulu de te dire la vérité et de ne pas jouer à ton jeu du déni, est-ce que tu as eu peur à cause de moi ? Pour ça non plus je ne pourrai jamais te demander pardon.

Tant de raisons de te demander pardon… Et tu continues de sourire comme un con sur les photos en me regardant droit dans les yeux. Mais merde, arrête de sourire, viens pleurer avec moi ! Fous-toi en colère pour rien comme avant d’être malade, fous-toi en colère comme à l’hôpital d’être en train de mourir même si c’est moi qui dois prendre ! Mais par pitié, arrête de sourire comme un con, c’est insupportable ton insouciance. Parce que je t’ai menti, je suis en colère contre toi, tu n’en n’as fait qu’à ta tête comme d’habitude. La grosseur au sein, c’était rien, hein ? Tes colères de môme, c’était rien, hein ? Toutes ces fois où je t’ai demandé si tu ne m’aimais plus et que tu as esquivées, c’était rien, hein ? Je t’aime mais qu’est-ce que tu m’énerves !

Et moi je me déteste, j’aurais du te trainer chez un médecin par la peau des fesses, j’aurais du t’aimer plus fort pour te donner envie de rester avec moi. Tu m’as donné une raison de vivre en m’aimant et pourtant je ne veux pas vivre. Je n’en ferai rien de cette vie, je te la donne si tu la veux. Tu m’entends ma tête de mule ? Viens prendre ma place, tu es plus solide que moi de toute façon.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Pucinette le 30 janvier 2017 à 13:33:41
J'aurai pu écrire exactement la même chose Alexandra...
Comme je te comprends...

Bon courage...
Titre: Re : En décalage
Posté par: nounouto le 31 janvier 2017 à 21:20:57
Tu décris exactement ce que j'ai vécu Alexandra. Cette boule qu'il a laissé grossir sans rien dire jusqu'à que son sein soit douloureux. Et moi  je ne l'ai vu que trop tard je l'ai trainé chez le médecin mais la tumeur était très importante chimio et opération. Cela a duré une année. Et puis remission plus rien. l'épreuve était derrière nous. 4 mois plus tard récidive agressive avec metastases aux os. J'ai alors compris que se serait le début et la fin. Mais lui me rassurait et faisait un déni de la maladie pour ne pas m'inquiéter. L'angoisse pendant un an et la descente aux enfers pour lui en avril dernier. La douleur qui ne le quitte pas nuit et jours. En Août il ne pouvait plus marcher et septembre ses forces l'ont abandonné. Mais jamais nous n'avons parlé de la mort, du après. J'avais trop peur qu'il abandonne, qu'il soit effrayé. Et lui peur de son côté que je m'effondre. Alors nous avons tenu le coups chacun de notre côté à notre façon. Nous aussi on se disputaient surtout à cause de la fatigue, de l'impuissance et de la colère face à cette injustice, à cette souffrance. J'aurai donné ma vie pour lui, j'aurai voulu souffrir à sa place.

Il était tellement courageux, il se forçait à sourire lorsque je rentrais ou à blaguer. Jusqu'au bout il a fait en sorte de rester à la maison. Je l'aimais et l'admirais encore plus pour cela.

Et tu as raison lorsqu'il a cessé de respirer je dormais à côté de lui. Pour moi il n'était pas dans ce corps cadavérique; Je n'avais qu'une envie quitter cette chambre d'hôpital car il n'était plus là.

cela va faire plus de 3 mois qu'il est mort et je ressens encore plus le manque, le manque de tout de son sourire de sa joie de vivre, de sa protection , de son amour, de sa tendresse. Il emplissait toute ma vie et je n'avais besoin de rien d'autre. Nous vivions l'un pour l'autre. Nos amis souvent ne comprenaient pas cette fusion.

Je sais ce que c'est de ne plus pouvoir respirer sans lui, d'être morte à l'intérieur, de  faire mecaniquement les gestes du quotidien. et on se demande quand cette souffrance s'arrêtera tellement ce mal à l'être ne nous quitte pas et nous empêche de dormir de manger et de vivre tout simplement.

J'attends comme beaucoup d'autre que cela passe car il parait que la douleur s'attenue avec le temps. Le psy les médicaments m'aident à travailler et avoir un comportement normal avec mes amis. Car ils ne peuvent pas comprendre réellement ce que je vis à l'intérieur. Personne et rien ne pourra me ramener mon amour.

Parfois j'ai envie d'abandonner, de baisser les bras et de le rejoindre. Je ne sais plus quoi faire tellement je me sens mal.

Tu n'es pas seule Alexandra. Nous sommes tous là pour toi et avec toi.  Il faut supporter la douleur et le chagrin comme nos amours l'ont fait.  Lorsque je sens que je sombre je repense à tout ce qu'il a supporter la tête haute et sans plainte. Alors je me redresse et serre les dents comme il a du le faire si souvent.

A bientôt Alexandra

Chaleureusement

Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 01 février 2017 à 10:20:53
Merci Nounouto,
Je t’ai lue hier soir et j’en ai pleuré de rage, de colère et de tristesse. J’ai des moments où je me dis que si le premier médecin que mon compagnon a vu avait fait des examens plutôt que de conclure à une inflammation, si j’avais réussi plus tôt à convaincre mon compagnon d’aller voir mon médecin pour avoir une vraie réponse, il aurait eu la chance de se battre, pas juste 3 semaines . Et puis d’autres où je me dis que c’était perdu d’avance, que je suis égoïste de penser que ça aurait été mieux qu’il se batte et qu’il souffre pour le même résultat. Quand je lis ce que ton mari et toi avez du traverser, je me dis que peut-être c’est mieux pour lui qu’il soit mort si vite et pas après tant de souffrance et de faux espoirs.

Mais en même temps, parce que c’est allé si vite, j’ai du mal avec cette idée de courage. Je pense que ni mon compagnon ni moi n’avons été courageux, tout s’est effondré et nous avons essayé comme nous avons pu de tenir bon. Je lui en veux à lui de m’avoir caché la vérité et à moi de ne pas avoir compris. Je n’y vois aucun courage, ni lui ni moi n’avons été capables de lui donner une chance de s’en sortir. Vraiment, je ne décolère pas. C’est terrible cette colère, ça me ronge. Et je n’ai pas la chance comme certains et certaines d’entre nous de croire que mon compagnon est encore là quelque part, que je dois tenir bon parce qu’il me regarde et que ça lui ferait trop mal de me savoir dans cet état.

Ni la chance de pouvoir m’appuyer sur ma famille, de me dire que je peux  tenir bon pour eux, encore il y a deux jours, mon grand-père m’a réexpliqué qu’avec un bon coup de pied aux fesses ce serait réglé. C’est con, mais d’entendre ça, ça me donne au contraire envie de tout laisser tomber, parce que je réalise en perdant mon compagnon que j’ai aussi perdu ma famille qui me semble n’être que des étrangers. J’ai tout perdu, y compris moi… Et je ne veux pas être digne, je ne peux plus serrer les dents, parce que la dignité est une violence supplémentaire qu’on nous inflige pour qu’on ne dérange pas. La dignité, c’est ce qui a tué mon compagnon, il ne fallait pas se plaindre, alors il s’est tu et il en est mort…
 
Alors je porte sa colère, à lui qui s’énervait toujours pour un rien. Je ne veux plus me taire, je ne veux pas faire semblant d’aller bien, c’est presque une façon d’honorer sa mémoire. Pour me souvenir que quand il a téléphoné à sa mère depuis son lit d’hôpital, quand il a trouvé la force de lui dire pour son cancer, elle lui a dit « resaisis-toi mon garçon » alors qu’il avait tous les droits de pleurer. Pour essayer de lui pardonner une faute qu’il n’a même pas commise.

Merci Nounouto, merci Pucinette d’être venues me faire signe. J’en ai encore écrit une sacré tartine, je fais une indigestion de ton absence mon amour, heureusement que tu ne vois pas ça… Je t’aime tellement.

Chaleureusement à vous toutes et à vous tous dans le pays des tempêtes
Titre: Re : En décalage
Posté par: Pandor le 01 février 2017 à 11:06:26
Si je peux te conseiller une chose Alexandra, lorsque je lis que tu n'as pas la chance de pouvoir "croire que ton compagnon est encore là quelque part" c'est de te plonger dans la recherche concernant la vie dans l'au delà.

Tu ne trouveras pas beaucoup plus sceptique que moi, mais le temps étant long, je trouve un certain réconfort à récolter des infos à droite à gauche, il y a de très beaux livres qui en parlent, et les personnes qui les ont écrits ne sont pas naïves ou non cultivées, tu as de tout, des psychiatres, des neurochirurgiens, des "médium", des gens comme tout le monde...

Je ne te dis pas d'y croire, car moi même je ne peux pas dire que j'y crois, mais se renseigner dessus ne coûte pas grand chose et peut apporter beaucoup.
___

Voici ce que j'ai lu/vu pour l'instant (je n'ai pas noté les divers sites)

https://www.youtube.com/watch?v=lBndbvIM3ig : Olivier Chambon : Etats élargis de conscience

https://www.youtube.com/watch?v=2zJbenv5_Kc : Christian Cambois : Communiquer avec l'au-delà

https://www.youtube.com/watch?v=9F-7A67S9PE&app=desktop : Le voyage astral

https://www.youtube.com/watch?v=kOOiQWPP1G4 : Montée en vibrations

https://www.youtube.com/watch?v=6gn4oe3pXhY : Augmenter sa vibration

https://www.youtube.com/watch?v=72gDWdSM6gA : contacts avec l'au delà


Livres lus :

La preuve du paradis : Eben alexander

Conversation avec Dieu 3 : Neale Donald Walsch

Qu'est ce que Dieu veut : Neale donald Walsh

***

Livres pour plus tard :

La vie après la mort : Deepak Chopra

Le livre des coïncidences : Deepak Chopra

Un souffle vers l’éternité : Patricia Darré

L'homme devant la mort  : temps des gisants/ la mort ensauvagée : Philippe Ariès   (approche sociologique sur l'évolution de la mort dans notre société)

______

C'est des visions assez "éloignées" des religions monothéistes, et ce qui est bluffant par moment, c'est que la physique quantique tant à donner raisons à certaines de leurs croyances.

____

Bon courage, et "bonne" journée
Titre: Re : En décalage
Posté par: Ela le 01 février 2017 à 14:01:24
J'ai lu le livre de Deepak Chopra, qui m'a apporté un réel réconfort et m'a interpellé. En revanche, il part d'une vision inspirée de sa culture et de son éducation fortement empruntes des sagesses orientales. M'intéresser à ces sagesses m'a et continue de beaucoup m'aider dans cette épreuve, mais face à la souffrance et à l'incompréhension générées par l'absence, j'ai trouvé davantage de réconfort à travers la lecture de "la mort n'est pas une terre étrangère" de Stéphane Allix. Stéphane Allix était journaliste de guerre, plutôt "athée", "cartésien"... Il a entamé une quête pour tenter de comprendre ce qu'est la mort suite à la perte de son petit frère, qui est décédé devant lui lors d'un séjour en Afghanistan. Ses paroles m'ont beaucoup touchées, car elles expriment mes propres doutes, mon propre cheminement face à l'incompréhension, à l'absurde... Il parle de son introspection, de ses intuitions... qui l'ont mené à réaliser une véritable enquête auprès de médiums, de chamans, de scientifiques, de représentants de différentes traditions spirituelles... Aujourd'hui, il est connu en tant que fondateur de l'Institut de Recherche sur les Expériences Extraordinaires (INREES), qui rassemble des spécialistes de multiples corps professionnels: psychiatres, neurochirurgiens, philosophes, théologiens, astrophysiciens, etc.). Je crois moi aussi, comme Pandor, que tout en conservant une ouverture d'esprit et sa capacité de remise en question, se plonger dans des lectures, s'intéresser à la mort, à l'intuition des forces invisibles qui agissent en ce monde, à l'au-delà... peut être d'un grand réconfort dans ce que nous vivons.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Ela le 01 février 2017 à 15:46:05
Alexandra... Pardonne moi, je n'avais pas vu ton message avant de poster le mien et ta colère et ta détresse n'appellent certainement pas de conseils de lecture de ma part. Mon précédent message faisait écho à celui de Pandor, et non au tien.
Je n'y suis pas aujourd'hui et pourtant, comme je connais cette rage, ce découragement que tu décris.... Cette sensation d'avoir tout perdu: au delà du départ de nos amours. La famille et les amis qui deviennent des étrangers... Cette impression d'errer dans le néant, de ne plus savoir qui nous sommes...
Comme toi, j'ai sentie cette colère énorme me déborder, face à tout ce qui dans mon éducation, dans ma vie, dans mes relations... m'est apparu comme trop policé, superficiel, tiède.... J'ai eu envie des milliers de fois et je l'ai fait quelques fois (peut être pas assez) de hurler MERDE! aux convenances, à la morale étriquée... A ceux qui sont gardiens des "ça se fait, ça ne se fait pas" et qui se chargent de vous cataloguer à travers un petit mot, un regard...
J'ai hurlé la tête enfoncé dans des coussins. J'ai hurlé à en vomir. J'étais en colère pour lui aussi. Parce qu'il m'avait appris à accueillir cette émotion qui là où j'ai grandi était toujours considérée comme "négative". Une émotion dérangeante qui n'avait pas sa place. J'ai hurlé par peur de voir cette ouverture qui s'était opérée en moi à travers lui se refermer avec son départ. J'ai eu envie de gifler, de frapper ceux qui trouvaient ma colère déplacée. Qui m'invitaient à plus de "dignité" dans l'épreuve... Ceux qui tiennent ce type de discours ne réalisent pas que c'est leur propre trouille qui les dérange. Leur impossibilité de regarder la mort, la souffrance en face...
Petit à petit, j'apprends à ne plus leur en vouloir, mais je revendique le droit de me mettre en colère. Lorsque c'est nécessaire. Il ne faut pas s'interdire la colère. Certaines colères sont salutaires et nous sauvent des griffes de l'hypocrisie. Mais bien sur, rester en colère ne nous rend pas pour autant, de manière systématique, plus authentique... J'ai souvent cru, ces derniers mois, que de rester en colère m'empêcherait de me voiler la face à l'image de tous ces gens trop polis qui ravalent les rancœurs pour les cacher derrière un faux sourire... Pourtant, j'ai aussi découvert que rester dans la colère c'est se faire mal et ne regarder la réalité qu'à travers un seul prisme.
Autorise toi à être en colère. Même si cette colère t'aveugle par moment. Tu souffres. Tu souffres tellement, et quand on est au cœur de la souffrance, personne ne peut exiger de nous, et on ne peut se demander à soi-même d'être raisonnable, de prendre du recul, et bla et bla... Viendra un temps où on pourra reprendre son souffle et réajuster ce qui doit l'être.
Mais surtout, si tu sens que tu t'enfermes dans la colère, ou la culpabilité, exprime le. Ici ou ailleurs. Exprime le pour ne pas t'enfoncer dans la rumination. Tu n'as rien à te reprocher. Bien évidemment que suite au décès de nos amours, les choses nous apparaissent sous un nouvel angle et que nous aimerions tant revenir en arrière pour changer certaines décisions, certaines attitudes... Mais nous ne pouvions pas savoir. Tu ne peux te reprocher de n'avoir pas su poser le même regard sur la maladie de ton amour que celui que tu poses aujourd'hui. Et je sais à quel point c'est dur de s'adresser ces mots là à soi-même. Alors, lorsque tu as besoin de déverser ta colère, ta culpabilité, exprime les pour que quelqu'un puisse te répéter autant de fois que nécessaire ces mots rassurants. Ces mots rassurants que pour l'instant, tu ne peux t'octroyer.
Prends soin de toi.

Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 01 février 2017 à 16:07:15
ça n'est pas grave Ela, peut-être que tous ces liens postés par Pandor et ce que tu écrivais pourrons servir.

Moi, je n'y crois pas du tout, je voulais juste exprimer le fait que c'était dur d'entendre les jugements des vivants et de devoir en plus imaginer que Tom me juge de ne pas être à la hauteur et de ne pas être assez digne de lui! Heureusement que je n'y crois pas, ça serait trop violent... C'est très personnel et puis je partage cette nécessité de trouver un sens, même si pour moi ça veut dire apprendre à supporter l’absurdité et la fragilité de cette vie. Et peut-être retrouver les traces de Tom dans l'empreinte qu'il a laissé sur ma vie.

Je crois juste que comme Nora il y a quelques semaines, mes neurones me désertent... Il ne m'en reste plus beaucoup à force de faire des nœuds. Voilà, c'est officiel, je deviens une veuve zinzin ^^. Prenez bien soin de vous Ela et Pandor.
Titre: Re : Re : En décalage
Posté par: Pandor le 01 février 2017 à 16:49:38
ça n'est pas grave Ela, peut-être que tous ces liens postés par Pandor et ce que tu écrivais pourrons servir.

Moi, je n'y crois pas du tout, je voulais juste exprimer le fait que c'était dur d'entendre les jugements des vivants et de devoir en plus imaginer que Tom me juge de ne pas être à la hauteur et de ne pas être assez digne de lui! Heureusement que je n'y crois pas, ça serait trop violent... C'est très personnel et puis je partage cette nécessité de trouver un sens, même si pour moi ça veut dire apprendre à supporter l’absurdité et la fragilité de cette vie. Et peut-être retrouver les traces de Tom dans l'empreinte qu'il a laissé sur ma vie.

Je crois juste que comme Nora il y a quelques semaines, mes neurones me désertent... Il ne m'en reste plus beaucoup à force de faire des nœuds. Voilà, c'est officiel, je deviens une veuve zinzin ^^. Prenez bien soin de vous Ela et Pandor.

Je suis désolé, j'ai mal compris ton message, il faut dire que mon cerveau est à l'ouest depuis 2 semaines...

Je me voulais rassurant, et surtout pas insinuer d'une quelconque façon que ton conjoint pourrait te juger.

On m'a souvent dit "Sois fort, elle ne voudrait pas te voir comme ça, elle voudrait que tu continues ta vie" bla bla bla... Ca a beau être potentiellement vrai, ce n'est pas un réconfort.

Ils nous aimaient, et nous les aimions, et jamais il n'y aurait eu un jugement de leur part quant à notre souffrance.

Prends soin de toi aussi.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 01 février 2017 à 17:17:47
Aucun problème, maintenant il y a plein de ressources pour ceux qui ont envie d'aller y jeter un oeil, tu as bien fait. Et puis, en tant que veuve zinzin autoproclamée, je ne vais pas te reprocher d'être à l'Ouest! Ma petite église athée reste ouverte à toutes les croyances qui parlent d'amour et à la folie douce.
Titre: Re : En décalage
Posté par: nounouto le 02 février 2017 à 22:03:33
La colère je la connais contre les médecins et infirmière pour s être acharnés sur lui examens piqures chimio je les haïssais de lui faire mal, colère contre lui et incompréhension face a son silence, colère envers moi pour ne pas être rester chaque instant avec lui de l avoir laisse seul la journee. Culpabilité de ne pas avoir fait plus et plus.
Je vais devoir vivre avec cela.
Le soir en rentrant dans cette maison vide je pleure et crie son nom jusqu'à ce je m épuise et que cette douleur s attenue jusqu'au lendemain. Parfois je ne comprends pourquoi il n'est plus la pourquoi lui ? le chagrin je ne le cache pas je l épuise j en parle et j en parle qu importe ce que les autres pensent j ai la chance d avoir des amis a l écoute autour de moi et d avoir des collègues merveilleux. Nous n avons pas avoir honte ni a nous cacher c est horrible ce que nous avons vécu et vivons.
Je ne crois pas a une présence après la mort le premier mois je lui demandais de me faire un signe de la haut le désespoir. Aujourd'hui pour moi il n y a rien après il n existe plus c est fini comme il me le disais. Et il avait raison pourtant devant sa tombe je lui parle j ai l impression d être proche de lui. On fait comme on peut chacun a notre manière on fait comme on peut pour gérer l horreur de notre situation.

J ai peu de mots de réconfort pour toi Alexandra excepte te répéter que je te comprends que ton histoire est proche de la mienne. Que le manque de l autre toi seule peut le ressentir. Je ne demande pas aux autres de le comprendre ils ne le peuvent pas.
A bientôt
Chaleureusement

Titre: Re : En décalage
Posté par: Nora le 02 février 2017 à 22:51:39
"Et peut-être retrouver les traces de Tom dans l'empreinte qu'il a laissé sur ma vie"  - Alexandra

"Et pourtant devant sa tombe je lui parle j ai l impression d être proche de lui"  - Nounouto

Croire en une "vie" après la mort n'apporte pas forcément une aide,  mais cela oui.

Douce nuit à toutes les deux.

Nora

Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 09 février 2017 à 15:54:36
Mon amour,
Il fait beau et froid aujourd’hui, le temps parfait pour que cette nouvelle vie qui nous attendait commence. Tout à l’heure, je me suis dit que si tu étais encore vivant, ce serait sûrement le moment où tu m’aurais rejointe ici, j’ai repensé aux étapes qu’on avait planifiées, d’abord un petit appartement pour le chat et pour moi, et puis tu serais venu, on aurait loué une maison le temps de trouver la notre. Il n’y aura rien de tout ça, demain tout ça sera parti avec toi depuis 7 mois. Je lis ici des déclarations d’amour magnifiques, et moi, je suis immensément triste de ne pas pouvoir t’écrire quelque chose de beau. Parce que je t’aime et à la fois je te déteste de m’avoir donné tout cet amour pour qu’il me soit arraché. Parce que les souvenirs magiques se mêlent encore trop à l’horreur de te voir mourir et de te voir mort. Parce qu’on ne peut pas mourir comme ça à 28 ans, on peut avoir un accident, on peut se battre des mois contre la maladie, mais est-ce qu’on meurt en à peine 3 semaines, sans aucun vrai signe pour annoncer le désastre, et au moment précis où tous les projets vont se réaliser ?

Je n’y arrive pas Tom, je n’y arrive plus. J’ai toujours cru qu’en m’accrochant, un jour tout irait bien. Mais c’était faux, on n’a pas de contrôle sur le hasard. Quand j’étais petite et que tout allait si mal, je rêvais d’un Prince Charmant qui viendrait me sauver, avec qui j’aurais enfin le droit au bonheur. Je t’ai cherché longtemps, je me suis cassé les dents et laissé brisé le cœur, et puis je t’ai trouvé. Enfin, toi tu m’as trouvée, tu as tenu bon jusqu’à ce que je te fasse une place, jusqu’à ce que je comprenne. Et ça a été une évidence, malgré les questions, malgré les épreuves, on a tenu bon ensemble. Tu avais grandi et moi j’étais devenue plus forte. En 3 ans seulement, alors imagine toute une vie ensemble… Je veux dire une vraie vie, pas juste tes 28 ans, une vie qui s’arrête quand on est bien vieux et fatigués d’avoir vécu…

Mais toi tu es mort et moi je me sens morte, c’est un tel gâchis. Tu me manques tellement mon amour. Je voudrais tellement que tu m’appelles encore en plein après-midi alors que j’essaie de travailler, je voudrais passer des heures à regarder des photos de maisons en pierre comme on en rêvait, je voudrais t’entendre rire, je voudrais t’entendre râler. J’en crève de l’absence de toi, je ne suis plus qu’un corps inhabité, et encore, un corps qui manque du tien, inutile et encombrant. Il parait que la vie est belle, qu’elle est sacrée, qu’elle mérite d’être vécue, qu’il me reste des belles choses à vivre. Super, mais moi, sans toi, je n’en veux pas de tout ça. Pas sans toi et surtout pas si tu ne peux pas vivre tout ça avec ou sans moi. Toi, si beau sans le savoir, toi qu’on ne pouvait qu’aimer, toi le subtil mélange de gentillesse, d’optimisme, de grognon, de force et de fragilité.

Qu’est-ce que tu me manques ! Je donnerai tout pour ne pas écrire tout ça à des inconnus et à moi, pour te le dire à toi les yeux dans les yeux. Mais demain, encore une fois, ce sera le 10, il sera 14h10, je me souviendrais que je suis arrivée 10 minutes trop tard à l’hôpital pour que tu ne meures pas seul avec des médecins. Ce sera encore un jour comme les autres pour tout le monde mais encore un autre jour d’enfer sans toi pour moi. Je t’aime mon amour, c’est l’enfer mais je continue de t’aimer.
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 09 février 2017 à 23:32:33
Bonsoir Alexandra,
Juste un petit signe pour toi.
Pour que demain ne soit pas trop lourd à porter.

Après le 10, un autre jour.
Après la douleur, les souvenirs sans les larmes...

Point n'est besoin d'écrire ton amour dans de longues phrases, Alexandra.
Il est là, qui palpite à chacun de tes mots.

Titre: Re : En décalage
Posté par: lisa le 10 février 2017 à 09:00:08
Toutes mes pensées, Alexandra.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 février 2017 à 14:36:23
https://www.youtube.com/watch?v=Qtb11P1FWnc
No I don't, no I don't, no I don't
Want anybody else but you
Je t'aime mon Tom

Merci Ephémère, merci Lisa
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 10 février 2017 à 23:08:52

No,
No.
We do not want anybody else but our love.....
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 21 février 2017 à 09:36:58
Message personnel

(https://s-media-cache-ak0.pinimg.com/736x/d8/a0/aa/d8a0aae2d4c589ccbb0175340cd78ff7.jpg)

Tu me manques mon Tom
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 25 février 2017 à 21:23:41
Alexandra,
Que la nuit qui a rallumé le feu dans la cheminée, t'apporte enfin, le repos.
La tête sur l'oreiller, sans la pluie salée, ni les tourments.
Que ta nuit soit douce.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 27 février 2017 à 12:02:24
Bonjour Alexandra,

J'espère que tu vas pouvoir retrouver des nuits de repos, nous avons tellement besoin de ce sommeil réparateur. Je e sais pas si tu as lu le livre du dr Fauré mais il parle de ce besoin d'affection dont on peut avoir besoin durant un deuil, il n'y a pas de mal à cela.
Et si tu réussis à chasser ces peurs, ce serait superbe, on a assez à faire avec notre chagrin
je t'embrasse
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 mars 2017 à 15:20:37
8 mois mon amour, qu'est-ce que c'est long et qu'est-ce que c'est proche à la fois... Et voilà, un mois de plus sans toi. Un mois pour vaincre la colère pour la première fois, pour ne plus t'en vouloir de ton déni, pour ne plus m'en vouloir de t'avoir laissé faire. Un mois pour découvrir le chagrin sans fond qui se cachait derrière la colère, le chagrin que tu ne puisses plus vivre, le chagrin de ne pas savoir ce que je fais là sans toi.

Et toujours comme tous ces mois depuis ta mort, revivre tes dernières heures. Cet après-midi là où tes parents avaient décidé de partir. Je m'entends encore te dire que nous allons être tous les deux pour les jours qui viennent mais que je serai avec toi à chaque seconde où je pourrai. Je nous entends encore nous disputer parce que tu ne peux plus manger et que ça m'inquiète. Et puis tu n'as plus la force, tu y penses déjà depuis plusieurs jours à cette intubation, t'endormir pour ne plus souffrir et te réveiller quand ça ira mieux. Alors tu me demandes d'aller voir les infirmiers et le médecin qui nous laissent quelques minutes, les dernières parce que tu ne te réveilleras pas. Les minutes les plus longues de ma vie mon amour, je te répète en boucle que je t'aime et la seconde d'après on s'engueule parce qu'on a tellement la trouille de ce qui arrive, parce que tu ne sais pas combien de temps tu vas être intubé et que je ne peux pas te répondre. Tu me dis que tu as peur de mourir, je vois encore cette peur immense dans tes yeux, j'ai tellement peur de ce que je vais te répondre. Alors je dis n'importe quoi, je te dis que ce n'est pas pour ce soir, que ce ne sera pas avant dans 30 ou 40 ans. Mais c'est faux, toi et moi on le sait bien, on s'accroche à ce qu'il nous reste de déni.

Ce soir là déjà tu as failli mourir pendant l'intubation. Tu as tenu quelques heures de plus, un après-midi où j'ai pu venir te voir et te parler alors que tu ne m'entendais pas. Cet après-midi là, je t'ai dit que si tu n'avais plus la force j'étais prête mais que si tu pouvais encore il fallait te battre. Je t'ai menti là encore mon amour, je n'étais pas prête, je ne serai jamais prête à une vie sans toi. Je n'étais pas prête quand le téléphone a sonné le lendemain. L'interne avait déjà appelé le matin pour donner de tes nouvelles, alors j'ai compris tout de suite. Non, non, non, non, pas ça. Et j'ai décroché pour entendre qu'il fallait venir et je savais que ce serait trop tard. Regarder la route dans la voiture, cette montée où tu adorais accélérer comme un dingue et penser que tu ne la prendras plus jamais. Rappeler à l'hôpital pour savoir si tu es encore là et apprendre qu'ils ont appelé tout à l'heure parce que tu avais fait un arrêt cardiaque. Sortir en courant de la voiture pour arriver trop tard. L'interne me dit que tu es "décédé depuis 10 minutes". Je regarde la pendule dans la salle, il est 14h20. Tu es mort à 14h10 et je n'étais pas là.

J'ai allumé une bougie pour toi depuis ce matin mon amour. Je me suis dépêchée d'arriver au travail pour arriver dans mon bureau avant 14h10, pour pleurer mon 8ème mois à 14h10 sans toi. Pour pleurer ce 8ème mois à 14h10 où tu ne vois pas le soleil qui brille dehors. Pleurer nos deux vies brisées, encore une fois. Je t'aime tellement mon amour, je n'en peux plus de ton absence. 8 mois sur les 60 années qu'il reste encore sans toi, je t'aime et ça ne sert plus à rien.
Titre: Re : En décalage
Posté par: nounouto le 10 mars 2017 à 21:18:10
Comme je te comprends Alexandra moi je lui souffler l oreille de partir que tout irait bien pour moi je ne voulais plus qui il souffre. Il est mort cette nuit la
Moi aussi je lui ai menti car je me sens terriblement seule sans lui perdue .
Sa mort me semble loin et si proche 4 mois.
courage Alexandra je sais difficile
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 mars 2017 à 22:08:10
Je t'envoie un peu de chaleur Nounouto, oui c'est difficile. Mais pour la première fois je suis triste, immensément triste mais plus en colère. C'est une bien maigre victoire et elle a un goût amer, mais c'est quand même une victoire. Tu as pu aller au café deuil?
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 12 mars 2017 à 00:53:10
Alexandra, Nounoute,
Le laisser partir alors que c'est exactement le contraire que nous souhaitons est un si beau cadeau,
tendres pensées pour vous
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 14 mars 2017 à 10:54:09
Encore une nuit de larmes sans beaucoup de sommeil... Il a fallu il y a quelques mois fournir une liste de pièces justificatives longues comme le bras pour recevoir je ne sais même pas quelle somme de l'assurance vie. C'est confidentiel il parait, mais c'est moi la bénéficiaire, on pourrait peut-être me mettre dans la confidence non? Prouver qu'on a bien vécu ensemble, prouver que Tom est bien mort de "mort naturelle" (saloperie de cancer, c'est tout sauf naturel!), prouver qu'il est bien mort avec toute cette paperasse avec la date et l'heure du décès... Et voilà que ça recommence, 8 mois après il manque des papiers et il faut recommencer. J'ai presque envie d'abandonner pour ne pas avoir à me replonger dans tout ça, j'ai juste besoin qu'on me laisse être triste sans avoir à me justifier. Je suis fatiguée de tout ça, fatiguée de la douleur physique qui me coupe les jambes, j'en peux plus de mon corps qui crève de ton absence mon amour. Je veux juste que ça s'arrête... Juste que tu me prennes dans tes bras, que tu m'embrasses, que tu m'aimes. Le reste je m'en fous.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mabrugayo le 14 mars 2017 à 16:39:09
Oh Alexandra, comme ce que tu dis me parle... Voilà bientôt 9 mois que Bruno m'a laissé. Brutalement, sans prévenir. J'ai été dans la colère, contre lui, contre moi....
Ephémère, tu dis :
 "Il m'est arrivé, tant j'avais mal, de me dire que peut-être, si je l'avais moins aimé, ma douleur aurait été moins violente.
Et parfois même, je l'avoue, il m'est arrivé, pour un court instant, de penser que si je ne l'avais pas connu,  je n'aurais pas eu à affronter cet impensable qui me faisait gémir comme un vieux chien malade."
c'est tellement vrai... On me dit que j'ai connu au moins cela : le bonheur avec lui... Mais qu'est-ce qui est pire ? Ne pas avoir connu ce bonheur ou qu'il me soit arraché si brutalement, en quelques heures ?

Je viens de découvrir ce forum, que j'arpente aujourd'hui au lieu de travailler. Il me fait du bien car on y parle vrai.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 14 mars 2017 à 17:24:04
Alexandra,
Comme tout l'administratif est épuisant, comme les personnes que nous sommes amené(e)s à côtoyer peuvent nous sembler inhumains!! Pour ma part les banquiers ont été les pires!!!!
Je voudrais tant réussir à alléger ta peine, à t'offrir un peu de répit, ce que nous vivons est si douloureux, si impensable.
Je t'embrasse bien fort

Titre: Re : Re : En décalage
Posté par: Pandor le 14 mars 2017 à 20:52:26
Oh Alexandra, comme ce que tu dis me parle... Voilà bientôt 9 mois que Bruno m'a laissé. Brutalement, sans prévenir. J'ai été dans la colère, contre lui, contre moi....
Ephémère, tu dis :
 "Il m'est arrivé, tant j'avais mal, de me dire que peut-être, si je l'avais moins aimé, ma douleur aurait été moins violente.
Et parfois même, je l'avoue, il m'est arrivé, pour un court instant, de penser que si je ne l'avais pas connu,  je n'aurais pas eu à affronter cet impensable qui me faisait gémir comme un vieux chien malade."
c'est tellement vrai... On me dit que j'ai connu au moins cela : le bonheur avec lui... Mais qu'est-ce qui est pire ? Ne pas avoir connu ce bonheur ou qu'il me soit arraché si brutalement, en quelques heures ?

Je viens de découvrir ce forum, que j'arpente aujourd'hui au lieu de travailler. Il me fait du bien car on y parle vrai.

Je suis exactement dans le même questionnement...

Remercier pour avoir connu
En vouloir pour avoir perdu

La perte du connu est t-elle pire que l'inconnu, allez savoir...

Courage à tous (toutes).
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 14 mars 2017 à 21:36:43
Cette dualité, cette ambivalence est partout je crois. Continuer de l'aimer ou être en colère de l'avoir perdu? Avoir besoin d'aide ou refuser les conseils, même maladroits? Être vivante alors que je me sens morte? Toujours ces questions sans réponse, cette sensation d'être en décalage du monde et même de celle que j'étais... Il ne reste plus semble-t-il qu'à accepter de ne pas avoir de réponses... Ou à choisir la réponse parfois. Je veux choisir l'amour pas la colère, même si la colère me semble plus supportable que d'aimer un souvenir.

Je t'embrasse aussi Mononoké, je t'envoie quelques forces Pandor et je glandouille avec toi au lieu de travailler Mabrugayao...

Et toi mon amour, je t'aime.
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 15 mars 2017 à 10:45:39
accepter d'être autre
accepter cette dualité
accepter de ne pas savoir
quel programme ... de déstructuration ...
mais la reconstruction pointe son nez peu à peu déjà quand on sent
l'envie 
Citer
Ou à choisir la réponse parfois.
affectueusement le long de ce chemin très long et cabossé
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 15 mars 2017 à 20:57:00
Comme tu as raison, Alexandra  : "accepter de ne pas avoir de réponse"...

La perte de notre aimé nous plonge dans un océan de questions auxquelles  nous n'avons ni n'aurons de réponse.
Sauf à accepter  certaines croyances ; avec  les promesses qu'elles opposent  à notre peine,  mais sans les consolations qu'elles ne nous offriront pas.
Alors parfois, la tentation d'imaginer un ailleurs où ils sont heureux, et où nous les rejoindrons un jour.

En fonction de ce que nous redoutons le plus.
Pour notre aimé qui n'est plus ; pour nous qui devons continuer le chemin sans lui.

Accepter de ne pas avoir de réponse ; de ne pas savoir.
Comme c'est difficile.
Sauf à renoncer , et accepter le Mystère... et c'est un long cheminement.
Et quand la douleur éteint notre raison,  presque envier ceux qui croient en cet ailleurs magnifique en se disant qu'ils souffrent peut-être moins...
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 avril 2017 à 10:10:29
9 mois aujourd'hui mon amour, 3 saisons sur 4 d'une première année sans toi et pourtant ça ne ressemble toujours pas à l'été. Hier pourtant au soleil sur la plage, j'y ai cru un instant et puis je me suis souvenue... La serviette biplace étalée sur le sable, enroulée contre toi, ma tête lovée dans ton cou, mon bras posé sur ta poitrine. Et puis rentrer chez nous et glisser encore ma peau contre la tienne, t'aimer encore de tout mon corps... Mais hier encore tu n'étais pas là, hier encore le soleil s'est permis de briller sans toi, la marée de monter et descendre sans toi, la plage d'être belle sans toi et mon corps de respirer sans toi. Un jour de plus, un mois de plus, une saison de plus de ce temps qui t'éloigne et de cette douleur qui ne s'efface pas.

Le temps et les dates qui s'égrènent encore et encore. Presque 4 ans que tu m'as embrassée dans ce lieu qui abrite désormais ce qu'ils ont fait de ton corps, toi si beau et si solide qu'ils ont pulvérisé dans cette bois en métal que j'ai déposée là où notre histoire avait commencé. Plus que quelques jours et 1000 km avant de revenir pour la première fois auprès de ce qu'il reste de toi et de notre amour. Et encore une fois aujourd'hui un autre jour, un autre 14h10 où mon cœur s'arrêtera de battre avec le tien.  Je t'aime mon amour et j'ai hâte d'être auprès de toi.
Titre: Re : En décalage
Posté par: sellig le 10 avril 2017 à 12:17:46
Bonjour Alexandra,

Moi ça ne fait que ou déjà 2 mois... je ne sais pas si c'est long ou court... de toute manière tout m'angoisse et l'idée de vivre sans lui ne me paraît pas imaginable...

J'ai deux enfants de lui... donc je dois continuer.... Mon Gillou comme je l'appelais me manque tellement... mais tu sais... que faire... que dire... la souffrance est tellement profonde, sourde et vive à la fois... Le 13 février jusqu'à 7h40, j'étais une femme heureuse et puis les deux policiers sont venus sonner à la porte et m'annoncer son décès dans un accident...

Et la radio qui continue de diffuser,  le soleil de briller, les gens de vivre... moi ça me fait mal... pourquoi tout ne s'arrête pas un moment... le temps de nous laisser tranquille... juste un moment... et dormir... un peu...

Que te dire? Courage? Tu n'en n'auras rien à foutre... Du temps? Idem... Moi je n'ai rien à foutre de tout ce qu'on me dit... C'est avec lui que je veux être et personne d'autre! Pourquoi lui? Pourquoi nous? Pourquoi eux?
Titre: Re : En décalage
Posté par: ilaf le 10 avril 2017 à 14:13:03
Bonjour qiguan, Ephémère et Alexandra,
C'est incroyable mais ce week end j'ai justement pensé qu'il faut accepter de ne pas savoir.
C'est très difficile pour moi car je suis une scientifique et je me suis toujours posé de questions. C'est ma nature. Et celle-la c'est la seule question dont je n'aurai pas la réponse. Fraichement le fait de le savoir en sécurité, le fait de savoir qu'il n'a plus mal (car l'idée de la façon avec laquelle il a été tué me rend folle) et qu'il m'attend pourrait vraiment me donner la force. Ma fois étant pas si profonde, j'ai besoin de quelque chose de plus.
Je me refuge dans la lecture..dans le boulot que j'ai repris après un moi.. Mais rien ne m’intéresse plus..

Et pour Alexandra: je me sens très proche de toi. Mon mari a été tué le 24/02/2017. Le 26 était mon anniversaire. Le 1 on aurait du déménager dans notre appartement qu'on venait d'acheter et se mettre au bébé.
2 mois.. j'ai une image très loin dans le temps de la fille heureuse que j’étais. Je me regarde au miroir et je ne vois qu'un corps vide.
Tout le monde n’arrête pas de dire: il faut être fort pour lui. Il ne voudrait pas te voir comme ça.
Mais.. vous étés surs qu'il me regarde? Qu'il soit à coté de moi?
Moi je ne sens que la douleur..
Je dis tout le temps à ma mère que je me sens comme un tétraplégique à l'envers: eux ils ont l'envie de vivre, la force vitale mais ils n'ont plus leur corps. Et moi j'ai mon corps mais pas l'envie ni la force.
Je pense que les gens comme nous auxquels tout a été pris méritent une réponse supplémentaire..un signe de plus pour les rassurer car ce qui nous demandent est trop.
Je m'excuse si je vous déprime.. peut être un jours j'aurai de mots plus doux..
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 10 avril 2017 à 14:43:17
Citer
Je m'excuse si je vous déprime..
ici pas besoin de s'excuser
c'est fait pour user sa peine en se sentant compris
affectueusement
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 avril 2017 à 17:41:31
Pascale, Ilaf, j'avais lu vos histoires et la brutalité de vos chagrins il y a quelques jours sans trouver le courage de vous répondre. Merci à vous deux de venir me faire un signe malgré votre tristesse si récente. Je ne saurais pas trouver les mots mieux que vous et Qiguan a raison, ne vous excusez pas de ne pas les trouver.

A toi Pascale, c'est vrai je n'en ai souvent rien à foutre de ce qu'on me dit. Rien à foutre que le temps qui passe apaise la blessure parce que pour l'instant il m'éloigne surtout de Tom. Rien à foutre d'avoir du courage parce que je m'en fous de vivre maintenant. Mais pas rien à foutre de lire ce qui vous est arrivé à ton Gillou, à vos enfants et à toi, alors je veux à mon tour te faire un signe. Je voudrais moi aussi trouver les mots t'aider à amarrer ton petit bateau de fortune juste un moment, juste le temps d'une accalmie dans la tempête des "pourquoi?"

A toi Ilaf, tétraplégique à l'envers, rien ne t'oblige à être forte pour lui, ni à être forte pour ceux qui te le demandent pour eux-mêmes, ni à être forte pour toi. Ces mots que j'ai entendus mille fois, je les refuse, moi je suis sûre que si Tom avait pu imaginer la violence que ce serait d'être condamnée à (sur)vivre sans lui, il ne m'aurait pas jugée de ne pas me montrer à la hauteur. Je suis une scientifique sans réponse tout comme toi alors la seule réponse que je peux t'offrir c'est un peu de chaleur, en espérant que tu la sentes un peu malgré la douleur.

Mes pensées à vous toutes et à vous tous
Titre: Re : En décalage
Posté par: *Ephémère* le 10 avril 2017 à 22:40:04
Bonsoir Alexandra,
Comme toi, j'ai lu les lignes de Pascale, et d'Ilaf.
Les tiennes aussi, bien sur.
Et ce manque de mots qui fige mes doigts sur le clavier me glace.
Aucun dictionnaire aussi savant soit-il ne saurait délivrer les mots de la consolation.
Consolation.... même ce vocable me parait ridicule face à certaines douleurs.
Alors je te rejoins.
Et viens simplement offrir douceur, chaleur et soutien en partage.
Puissent les tourments et le chagrin desserrer leurs griffes et vous laisser passer une nuit sereine.

Titre: Re : En décalage
Posté par: Faïk le 10 avril 2017 à 23:38:32
Pour ma part, les injonctions à la "force" m'ont quelque peu hérissée ...

Si je me suis sentie anéantie, je ne me suis pas sentie sans force ... Au contraire,  j'ai eu l'impression que ma souffrance était d'une telle violence que son souffle me portait ... et qu'il me porte encore.
 
J'ai trouvé bien présomptueux de la part de mon entourage de m'engager à cette "force" sans savoir si j'en manquais, sans savoir si je me fichais bien d'en avoir ou pas, sans savoir s'il  aurait aimé se sentir « fier" (force, fierté, honneur : les 3 commandements du deuil ) d'un courage qu'on me demandait.

Si j'ai été faible, c'est d'avoir cru, moi, en leur courage ...
Titre: Re : En décalage
Posté par: Eva Luna le 11 avril 2017 à 03:14:38
Les "bon courage, hein!" à répétition dont on assaisonnait mes journées, m' auraient laissée folle de rage si j'avais eu la moindre force à distraire de mon combat de survie de chaque heure, chaque minute , aux débuts...
Je n'ai pas choisi d’être forte,ça m'est tombé dessus comme seule réaction possible , dans KO debout, il y a surtout KO!

Si j'ai été faible, c'est d'avoir cru, moi, en leur amour(pour moi,pour eux,pour elle...) transcendant leur peur (de la mort, du chagrin,des émotions, de l'engagement aux cotés...)...cruel raté!

des bises de nuit,  Faïk
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 11 avril 2017 à 09:57:15
Pour moi le plus terrible c'est effectivement que ceux qui me demandent d'être forte ne sont absolument pas capables d'être forts pour moi. Je ne sais pas s'ils ne supportent pas ma souffrance, s'ils ne supportent pas que je sois plus occupée à aimer Tom qu'à les aimer eux, si ça les vexe de ne pas être mes sauveurs, s'ils s'en foutent, ou bien un mélange de tout ça mais après tous ces mois ça me choque toujours autant.

Hier encore, j'ai fait la bêtise d'appeler ma grand-mère un jour douloureux. Elle ne sait pas et elle s'en fout que tous les 10 du mois me font mal depuis ce 10 Juillet. Je lui ai parlé de Tom, je lui ai dit combien j'avais le sentiment que sa mort était comme une amputation et elle m'a répondu que c'était quand même moins grave qu'une amputation. Ah bah merci, ça me rappelle tes gentils mots deux jours après sa mort: "de toute façon, ça n'allait pas si bien entre vous, non?". C'est sûr, entre le cancer qui lui bouffait le corps et ma putain de thèse à écrire, on n'avait aucune raison que ça aille mal. Tu as raison heureusement que Tom est mort, ça m'évitera de passer ma vie avec le mauvais mec. Franchement, qui voudrait vivre avec un homme qui l'aime même quand elle se comporte comme un conne, qui quitte un boulot qu'il aime pour lui permettre d'avoir le boulot qu'elle veut, qui cherche une maison pour s'installer avec elle? Et puis c'est vrai que pour lui c'est pas si grave, il est mort, il ne ressent plus rien. Je précise au passage que ma grand-mère était psy... (pauvres patients!)

Je crois bien que si je manque de forces, c'est pour supporter ces conneries! Et maintenant, bon courage pour ne pas devenir complètement zinzin... ;)
La bise à vous toutes (et tous)
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 11 avril 2017 à 21:57:58
Alexandra tu illustres si bien par le récit de tes vécus ce qu'il est souvent donné de supporter ...
ah ces injonctions ...
sois forte, tu es forte ...
non on n'est définitivement plus sur le même plan avec ces personnes même si on retourne au milieu d'elles ...
je ne leur souhaite pas qu'un malheur les fasse passer dans cet autre plan ... mais je sais que seule l'expérience, l'expérimentation est ce qui peut clarifier des choses si ces personnes ont une honnêteté morale
sinon ce sera comme certaines que je croise dans ma famille : "oh moi, c'est différent à cause de ..."
baissez le rideau y a rien à voir
juste à se hérisser ...
tiens Faik je viens prendre une toute petite place entre les piquants ...
je vous embrasse
Titre: Re : En décalage
Posté par: Federico le 28 avril 2017 à 17:33:48

Chère Alexandra,

J'aimerais bien pouvoir t'envoyer une jolie carte postale pour te remonter le moral... mais j'ne sais pas l'faire !

Come on Baby... let's have a drink together !... Allez ma belle ... Courage ! laisse passer .. les giboulées de mars, les pluies d'avril et les orages d'été...

Laisse moi prendre ta main... je t'écoute... oui, je t'écoute attentivement... tu peux ne rien dire et pleurer !... silencieux et juste à côté de toi !

C'est cruel, définitif !......... aie confiance en toi ... TU ES... tu vas savoir... tu vas pouvoir...

Un doux souvenir... un regard complice ...  un tendre sourire... et tu repenses déjà bien sûr à ton amoureux !...

... je te laisse avec Tom... dans ses bras !

Bise. A+
Federico

Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 28 avril 2017 à 18:08:08
Merci Federico,
je suis allée "voir Tom" pour nos 4 ans, dont 9 mois, presque 10 maintenant, à aimer un souvenir. Je suis allée là où il m'a embrassée ce soir là et où j'ai déposé ses cendres. L'endroit était magnifique, tout fleuri de fleurs jaunes, sa couleur à lui et ça m'a apaisée que cet endroit soit celui qui le symbolise maintenant.

Et puis j'ai appris qu'une de nos amies ne souhaitait plus jamais me voir, parce que c'est plus facile pour elle. Alors ça m'a fait mal et ça m'a mis en colère, encore une perte, la liste est longue. Perdre Tom, perdre le plaisir de le voir vivre, perdre notre vie, perdre le plaisir de vivre, perdre le lien avec ma famille, et maintenant perdre nos amis...

Depuis une semaine mon corps se venge, ma tristesse me dévore une jambe... Ce n'est qu'un virus, ça se soigne et je suis presque déçue, déçue de n'avoir rien de grave et d'être encore obligée de vivre, déçue de ces idées noires.

Mais oui, let's have a drink, je préviens par contre, j'ai l'alcool triste ;)
A bientôt Federico, merci pour ton message!
Titre: Re : En décalage
Posté par: Federico le 28 avril 2017 à 19:21:41

Chère Alexandra,

C'est là la vraie limite du Forum : le simple échange par l'écriture ( ce qui est déjà très bien ! ) mais qui s'avère parfois insuffisant et frustrant !
J'aimerais pouvoir longuement te parler pour t'apporter soutien et réconfort !

Tu es en colère, tu as raison, encore la perte d'une soi disant amie... nous sommes toutes et tous victime de la double et même parfois de la triple sanction, peine !... d'abord la perte de Notre Amour... puis ils décident que c'est plus facile pour eux de ne plus jamais nous voir... ils s'éloignent, ils disparaissent...et enfin, c'est l'oubli, l'abandon, la trahison de parfois une longue amitié ! incroyable ! pitoyable ! miséreux !

Je connais... la perte de mon fils Raphaël... la disparition "d'amis"... la séparation de mon couple...nouvelle disparition "d'amis"... et comme tu dis "c'est plus facile pour eux" !
Quelle absurdité ! quelle nullité ! quelle médiocrité !... Honte à eux !

Alexandra, pardonne moi, je vais faire le Grand Con... et j'ai horreur de ça ! mais j'ai envie de te dire, de crier, de hurler que TOI, tu n'as pas tout perdu... non, ma chère Alexandra, fait attention et prends bien soin de ta vie...
 aïe aïe aïe... j'ose te le dire : essaye de garder un lien avec ta famille... pardonne leurs maladresses ! et entoure toi de nouveaux amis... plus facile à dire qu'à faire, j'en conviens !

Alexandra, je ne suis pas un donneur de leçons, je voudrais naïvement te réconforter alors que je sais que nous sommes inconsolables... c'est aussi le paradoxe de ce forum... nous soutenir et parfois écrire des "choses" qui nous agacent encore un peu ! ils faut bien contre balancer... tout ne peut pas être noir ! je t'apporte un peu de gris !

Prends bien soin de toi, de ta jambe... ça se soigne et c'est tant mieux ! tu peux me faire la tête si tu veux... prends bien soin de toi ! point barre !

et, maintenant, c'est sûr, let's have some drinks, je préviens... j'ai l'alcool joyeux , je chante, je danse et je vis !
çà ne m'enlève ni chagrin, ni douleur, ni tristesse !

A bientôt Alexandra
Bises

Federico
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 mai 2017 à 10:39:02
10 mois mon amour, un mois de plus sans toi pour découvrir une nouvelle couleur du chagrin. Un mois où pour la première fois tu me manques à en crever, à supplier d’en crever en me tordant de douleur, à espérer d’en crever pour que ça s’arrête. Que ça s’arrête hier à regarder la mer dans le soleil sans toi. Que ça s’arrête l’espoir que l’avion va s’écraser à l’atterrissage. Que ça s’arrête tout ce temps qui t’est volé, tout ce soleil qui brille, toute cette Bretagne que tu ne verras pas. Que ça s’arrête de penser que tu aurais été heureux ici, de ne plus entendre ta voix, de ne plus sentir ta peau. Je ne veux plus mon amour, ça fait des mois que je ne veux plus et que ça empire, chaque seconde sans toi ça empire. On me promet que le temps apaisera la douleur mais rien n’apaisera le temps que toi tu ne vois pas, rien ne rendra la vie supportable s’il faut accepter de t’avoir perdu et de reperdre ceux qu’on aime encore et encore. Non je ne veux plus, non je n’aime plus la vie, non je ne veux pas que le temps passe pour apaiser la douleur. Tu me manques et je veux juste en crever. Je t’aime.

https://www.youtube.com/watch?v=PvRHz3mKjUU
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 10 mai 2017 à 18:42:04
à une des séances de groupe de parole veuvage
une personne avait dit un jour :
"je n'ai pas envie d'aller bien , ni mieux"
on a le droit d'exprimer notre douleur
 :-* à toi
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 10 mai 2017 à 23:04:26
10 mois mon amour, un mois de plus sans toi pour découvrir une nouvelle couleur du chagrin. Un mois où pour la première fois tu me manques à en crever, à supplier d’en crever en me tordant de douleur, à espérer d’en crever pour que ça s’arrête. Que ça s’arrête hier à regarder la mer dans le soleil sans toi. Que ça s’arrête l’espoir que l’avion va s’écraser à l’atterrissage. Que ça s’arrête tout ce temps qui t’est volé, tout ce soleil qui brille, toute cette Bretagne que tu ne verras pas. Que ça s’arrête de penser que tu aurais été heureux ici, de ne plus entendre ta voix, de ne plus sentir ta peau. Je ne veux plus mon amour, ça fait des mois que je ne veux plus et que ça empire, chaque seconde sans toi ça empire. On me promet que le temps apaisera la douleur mais rien n’apaisera le temps que toi tu ne vois pas, rien ne rendra la vie supportable s’il faut accepter de t’avoir perdu et de reperdre ceux qu’on aime encore et encore. Non je ne veux plus, non je n’aime plus la vie, non je ne veux pas que le temps passe pour apaiser la douleur. Tu me manques et je veux juste en crever. Je t’aime.

https://www.youtube.com/watch?v=PvRHz3mKjUU

Bonsoir Alexandra,
la lecture de ton message m'a beaucoup touchée,
je ne trouve pas les mots,
en ce moment écrire m'est difficile mais je ne peux me résoudre à m'éclipser sans te laisser un petit mot
alors ce message, juste pour te faire part de mon affection
tendrement
Titre: Re : En décalage
Posté par: Ela le 11 mai 2017 à 00:14:49
Alexandra...
Si je le pouvais, j'aimerais simplement m'asseoir en silence près de toi... Parce que je connais ces moments, où on réalise plus fort encore, que rien d'autre n'a d'importance que lui... Que rien ni personne n'est en mesure de nous consoler de son absence, hormis:  lui.. Que personne n'est susceptible de comprendre, aussi bien que lui.... Et même si on ne peut pas vivre avec cette souffrance... pour rien au monde on ne voudrait qu'elle s'atténue...
Alors je me contente juste de passer par là... pour t'apporter... un petit geste, une petite présence, un peu de chaleur...
Et je te laisse avec lui... qui quoi qu'il arrive, ne te quittera plus...
Je t'embrasse.
Titre: Re : En décalage
Posté par: malex le 11 mai 2017 à 09:30:15
Alexandra,

Comme Ella je viens juste m'asseoir un petit instant à côté de toi en silence .
Malex
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 11 mai 2017 à 10:16:50
Merci à vous toutes, merci d'avoir lu mes quelques fleurs de chagrin que je suis venue déposer à Tom hier. Au chagrin s'ajoute celui que j'impose à ma famille, à qui je dis que je n'ai plus envie et qui en souffre...

Je réalise que pour que la douleur s'apaise il faut en avoir envie et que moi je ne veux pas, je ne veux pas reprendre contact avec la vie. Que je ne veux plus, que je ne peux plus être celle que j'étais, celle pour qui aimer était une raison de vivre. Alors oui je veux bien qu'on s'asseye en silence en regardant la pluie qui tombe ce matin sur le port.

Je vous embrasse bien fort.

Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 16 mai 2017 à 22:54:17
alors je viens m'assoir avec vous, si c'est ok pour vous,
et je veux bien regarder la nature en silence (pas de port ici  ;))
bien tendrement
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 17 mai 2017 à 16:05:26
près de toi Alexandra avec vous toutes et tous
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 13 juin 2017 à 10:22:55
Ce matin je me réveille avec la gueule de bois, je viens écrire pour ne pas oublier ce qu'il s'est passé hier, pour ne pas accepter de croire que "je fais tout pour aller de plus en plus mal" alors qu'à 11 mois de la mort de celui que j'aime, bientôt un an de ce départ en catastrophe pour l'hôpital, je n'ai simplement plus la force d'aller bien. Hier j'avais besoin de parler, 11 mois après la mort de Tom, j'attends toujours que l'assurance vie me soit versée et chaque fois on me demande des papiers qui n'ont rien à voir avec ceux de la fois précédente ou que j'ai déjà donnés. Cette assurance vie, je l'attends pas pour l'argent qu'elle représente, mais parce que le jour de la crémation de Tom j'ai promis à son cercueil que j'achèterai la maison dont on rêvait. Et ça me met en colère que ça prenne si longtemps, d'avoir l'impression qu'ils cherchent par tous les moyens à ne pas nous verser ce que Tom a voulu qu'on reçoive sa sœur et moi en nous désignant comme bénéficiaires.

Alors hier soir, j'avais envie de parler et j'ai appelé ma grand-mère qui est comme ma mère. Et elle n'a rien trouvé de mieux à me dire que de toute façon ce qu'on me verserait serait imposable et sûrement avec un fort taux d'imposition. Et que cette idée d'acheter une maison est une mauvaise idée, parce qu'une maison c'est juste des emmerdes en plus, qu'il vaut mieux acheter un appartement, que je verrai plus tard pour une maison. Je lui ai répondu que c'était notre projet avec Tom et que je voulais aller bout mais encore une fois je me suis entendu dire que ça n'allait pas si bien que ça avec Tom les derniers mois.

Je ne sais plus, sous le choc j'ai oublié dans quel ordre sont sorties les choses et c'est pour ça que j'écris ce matin, pour démêler et ne pas me laisser envahir. Mais certaines choses entendues hier et au cours de ces derniers mois m'obsèdent, ça n'allait pas si bien entre Tom et moi, je l'ai dit alors ma grand-mère s'autorise le droit de penser que ce deuil sera plus facile. Mais aujourd'hui je sais que ça n'allait pas parce qu'il était malade, pas parce qu'on ne s'aimait plus, pas parce que je lui demandais de me suivre à l'autre bout de la France et que je préférais encore qu'il ne me suive pas plutôt que de le savoir malheureux. J'ai redouté pendant des mois de le déraciner, que son nouveau boulot ne lui plaise pas et qu'on finisse par se séparer et je ne voulais pas qu'il soit malheureux à cause de moi. On s'est disputés quelques jours avant qu'il ne tombe malade à cause de ça justement, je le revois encore assis à son bureau à me dire qu'à cause de moi il va "redescendre en bas de l'échelle" et je lui dis que si c'est comme ça il n'a qu'à rester, que je pars et qu'il reste. Est-ce que c'était le cancer? Est-ce que c'était nos sales caractères? Est-ce qu'on ne s'aimait plus? Je ne sais pas, je ne crois pas que je réinvente notre histoire en pensant que ce foutu cancer lui a détraqué le comportement et qu'on le savait pas, que ça allait mal oui, mais qu'on s'aimait sans comprendre ce qui nous tombait dessus.

Et est-ce que ça veut vraiment dire que je "fais tout pour aller de plus en plus mal"? C'est vrai en ce moment, je ne fais rien pour aller mieux. Je ne veux pas, je ne veux plus, je ne me sens pas vivante et je ne veux pas me raccrocher à la vie. Parce que j'ai peur d'aimer encore et de perdre encore, c'est évidemment ça la vie, vivre et mourir et c'est tellement absurde. A presque 1 an, je veux juste mourir. Je me raccroche à ce projet de maison pour me donner l'illusion que Tom est encore là, je me raccroche à cette assurance vie pour qu'elle me soit versée avant de prendre la décision de partir et que mes sœurs puissent la récupérer dans la succession. Mais est-ce que je fais exprès de souffrir, est-ce que je réinvente notre histoire avec Tom en la croyant merveilleuse pour me faire encore plus mal, est-ce que je fais le choix de ne pas avancer? Oui et non. Oui je fais le choix de ne pas avancer, 11 mois c'est trop tôt et vivre me semble absurde. Non je ne m'invente pas une vie merveilleuse avec Tom pour avoir encore plus mal. Je le sais que nos derniers mois ont été terribles, je le sais et je m'en veux. Je m'en veux parce que j'ai peur de l'avoir laissé mourir à cause de ça, je m'en veux parce que nous avons peu profité de nos derniers mois ensemble et qu'il méritait mieux. Et que je l'aime et que je ne pourrai jamais réparer ce que j'ai fait.

Je ne sais plus, je ne sais plus démêler le vrai du faux. Hier en raccrochant le téléphone, j'étais contente d'avoir dit ce que j'avais sur le cœur. Ce matin en me réveillant, je ne comprends pas pourquoi ma grand-mère s'est autorisé à me dire ce genre de choses, c'est de la violence supplémentaire et ça me fait terriblement mal. Peut-être que je me mens ou peut-être pas, peut-être qu'on aurait fini par se séparer ou peut-être pas, mais je ne sais pas si quelqu'un d'extérieur a le droit de le décider à ma place. Je me sens seule dans mon chagrin que je voudrais partager avec Tom, je voudrais savoir si lui croyait encore en nous, je voudrais savoir s'il a cru que je ne l'aimais plus. Et remonter le temps pour effacer mes erreurs, parce que je l'aime et qui ni les derniers mois douloureux ni sa mort ne peuvent remettre en question ce que je ressens toujours pour lui.

Voilà, je ne suis pas plus avancée après toutes ces interminables lamentations. Et encore une fois, je me sens en décalage, zinzin et misérable. Désolée pour le spectacle...
Titre: Re : En décalage
Posté par: souci le 13 juin 2017 à 14:42:02

   En décalage, zinzin et misérable: pas grave, tu es bien plus que ça, Alexandra.
   Tu souffres beaucoup, tu te sens souvent proche du point de rupture, l'envie que tout s'arrête, ch'uis passée par là dans mon deuil pourtant différent du tien, et les moments de découragement me prennent encore d'assaut de temps en temps, comme une sorte de cyclothymie inlassable ... parce que la perte d'un être cher est irréparable ...

  Je fréquente un autre forum à vocation de prévention du suicide, en m'associant à la souffrance de mon neveu qui s'est donné la mort ...

  Oh, je n'ai pas toujours de "brillantes idées" pour, pour ...

  Tantôt, je me suis demandé ce que j'allais pouvoir répondre à une jeune fille qui a souffert d'abus sexuels depuis ses six ans ...
  Et voilà que je retrouve cette fille à répondre à un autre suicidaire, et elle m'a époustouflée, voici sa réponse, peu importe finalement ce qui précède:

    "Bonjour Jean peuplu,
J'ai déjà moi aussi été attirée par la mort, elle est même devenue a un moment ma meilleure amie.
Souvent je me demande encore si je n'aurais pas du réussir mes coups pour ne plus être ici.
Mis sache que la roue tourne, je ne sais pas pour qu'elle raison tu veux quitter se monde mais il y a toujours moyen de s'en sortir.
Après se n'est pas facile je te l'accorde mais c'est réalisable si tu le veux. MAintenant si ton désire le plus profond est de mourir je ne sais pas comment t'aider. Mon envie avant ne tournait qu'autour de la mort pour retrouver mes proches parti beaucoup trop tot.
Mais j'ai su passer au dessus de cela car j'ai utilisé d'autre métode pour oublier ma vie mais rester vivante. Car après avoir essayer plusieurs fois et que ça ne fonctionnait pas, j'ai bien comprit que la mort ne voulais juste pas de moi. Donc je suis restée en vie mais en étant dans un autre monde en même temps."

   Toi qui as le SENS DES MOTS, Alexandra, que dis-tu de la dernière phrase,
  "Je suis restée en vie, mais en étant dans un autre monde en même temps" ...
   Comme cela nous rejoint bien dans nos souffrances de deuil ...
   Nous ne sommes pas seuls ...
   Nombreux sont ceux qui ne comprennent pas nos difficultés, mais les mots vrais ne mentent pas ...
   Clin d’œil, Titine.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Pandor le 13 juin 2017 à 14:43:15
Ta grand mère est maladroite, comme tous nos proches j'ai envie de dire.

Son père m'a dit que lui avait perdu sa fille, unique, tandis que moi je finirais par retrouver quelqu'un, alors que c'est pas une conjointe que je veux retrouver, mais elle.

Tu n'es pas misérable, enfin en tout cas je ne vois pas en quoi, si ce projet de maison est important à tes yeux, alors réalise le, est-ce que quelque chose a + d'importance que de suivre ce que ton coeur te dit ?

Personne n'a à remettre en doute tes sentiments, un couple y'a des hauts et des bas, et ce n'est pas parce que sur la fin vous aviez peut-être un passage à vide que vous ne vous aimiez plus, laisse les gens parler sinon tu ne t'en sortiras pas.

Je te souhaite malgré tout beaucoup de courage, et je me retrouve dans ce que tu écris.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 13 juin 2017 à 15:21:32
Merci Souci, merci Pandor et merci aussi à Malex et Qiguan qui m'ont aussi répondu. Bien sûr Souci, cette dernière phrase a tellement de sens. Évidemment Pandor nos proches sont maladroits. Et je me sens proche de vous toutes et de vous tous, oui ici je ne me sens pas seule et c'est aussi pour ça que j'avais envie de poster mon pavé de ce matin. Parce que les mots ne vrais ne mentent pas , oui ici c'est vrai.

Mais ma grand-mère était psy, elle sait le poids des mots qu'elle prononce. Elle l'a déjà fait il y a quelques mois et nous avons déjà eu une énorme dispute. Et pourtant elle recommence, elle sait que nier mon désir réel de construire quelque chose avec Tom va me faire horriblement mal et pourtant elle le refait! Mais pourquoi elle fait une chose pareille? Comment est-ce qu'elle peut même imaginer que c'est moins dur de perdre Tom parce que les derniers mois ont été compliqués?

Bordel, il avait des hormones de femme enceinte dans le sang à cause de sa tumeur et une lésion au cerveau, on ne le savait pas et moi je croyais qu'il faisait la gueule parce que je ne m'occupais pas de lui pendant que je rédigeais ma thèse! J'avais peur de le perdre, peur de le faire quitter le Sud de la France pour la Bretagne pour une relation qui n'allait peut-être pas marcher. Mais j'avais envie qu'elle marche, j'en avais envie plus que tout! Et c'est pour ça que j'en ai parlé à ma grand-mère, pas pour qu'elle s'en serve pour me faire je ne sais pas quel électrochoc aujourd'hui.

Je sais bien que je devrais me blinder, tu as tellement raison Pandor. Mais c'est la magie de ce deuil, ça me fragilise d'autant plus que celui qui était fort c'était Tom. Complètement autiste mais robuste, et moi je suis tout l'inverse et il me manque.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 20 juin 2017 à 11:26:19
Mon amour,
les dates s'enchaînent, 11 mois sans toi il y a quelques jours, 1 an depuis que je t'ai emmené en catastrophe à l'hôpital hier. Le compte à rebours est lancé, 3 semaines avant de te perdre, 3 semaines de chagrin, de colère et d'angoisse sourde. Je voudrais remonter le temps pour tout changer, réécrire l'histoire de ces 3 semaines pour te dire combien je t'aime sans la colère de te perdre, pour ne plus regretter ce que j'ai dit, ce que j'ai fait, ce que je n'ai pas dit, ce que je n'ai pas fait. Je voudrais remonter plus loin encore, apaiser ces batailles qui je crois ont provoqué ce cancer, pour rien, parce que tu découvrais pour la première fois les emmerdes qui s'enchaînent. Je voudrais effacer la colère et la remplacer par la force d'être ensemble, te raccrocher à nos rêves et si tu devais mourir quand même, ne pas te laisser partir sur la colère.

Mais le compte à rebours est lancé, chaque seconde qui passe continue de m'éloigner de toi et d’égrèner les souvenirs de ce que je n'ai pas su faire pour toi. Toutes ces erreurs encore et encore, toutes ces incertitudes sur ce qu'on serait devenus sans ce cancer encore et encore, tout ce chagrin et toute cette culpabilité encore et encore. Et le silence et ton absence encore et encore. Je t'aime mon amour et plus rien n'a de sens sans toi.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Federico le 20 juin 2017 à 15:40:48

Chère Alexandra,

Je suis sincère... ça fait 3 heures que je cherche à te répondre et je ne trouve ni les "bons" ni les "beaux" mots pour te réconforter... Seule la présence de ton amoureux Tom...
Je comprends... tu es à fleur de peau... tu es inconsolable ! puis je seulement m'approcher tout doucement  de toi ? je te dérange mais je ne veux pas te laisser seule... je veux simplement croiser ton regard et t'exprimer ainsi par sa force toute mon empathie et ma solidarité.
Particulièrement, en ce moment, tu es une écorchée vive... tu vis... jour après jour... heure après heure... minute après minute... cet effroyable compte à rebours ...
Je l'ai vécu... tu le vis... je sais ! je comprends ! je pense à toi... je suis avec toi !
Vois tu, Alexandra, le paradoxe de toute cette cruauté ... c'est qu'en ce moment à chaque fois que tu penses à lui... l'année dernière IL était encore en vie !
APRES le premier anniversaire de son décès... ce ne sera plus jamais pareil... Tu ne pourras que te dire : l'année dernière... IL était déjà bien mort !
APRES, cette distance peut être une bonne chose... mais je sais qu'on n'aime pas trop s'éloigner de nos amours !
Les contradictions, les malentendus, les incompréhensions, les questions,  les incertitudes, la culpabilité ... c'est le côté très négatif du deuil ! Alexandra : essaye de prendre de la distance et si tu peux ;laisse tomber tout ça !

Jette le matériel... monte sur la table... prends un autre angle, donne une autre perspective à ton deuil...

Tu continueras à souffrir mais Votre Amour ne sera que plus beau !

SEUL doit compter à tes yeux :  " JE T'AIME MON AMOUR " Alexandra.

Pardonne moi si ce message est confus... tu as bien compris que je ne cherche qu'à soulager ta peine ! ton chagrin !

Amitiés.
Je t'embrasse.

Bien Solidairement.
Federico


Titre: Re : En décalage
Posté par: Nora le 20 juin 2017 à 21:27:28
Bonsoir Alexandra,

En culpabilité je suis championne du monde, et très experte en "sijavaisfaitditsu ".

J'entends tes mots, je suis tes pensées, ils et elles m'accompagnent depuis 28 mois.

Mais je ne suis pas un exemple.

Mon amoureux aussi est parti en colère, contre la maladie, sans doute, contre la vie qui le  lâchait alors qu'il l'aimait tant, et contre moi.
Comme vous nous étions sur le point de changer de lieu de vie, à mon initiative, et c'était difficile sur certains points à accepter pour lui.
Comme vous, nous avions eu des conflits, tout n'avait pas été serein les derniers mois, mais ils avaient renforcé notre entente.
Comme vous, la maladie était présente sans que nous le sachions, et avait probablement modifié son comportement.

Ils sont tous les deux partis en colère, et cela fait très mal.

Federico a raison, il faut essayer de laisser tomber tous ces sentiments négatifs et ne garder que l'amour que vous partagiez. Mais c'est sans doute impossible, indépendant de ta volonté, pour toi, pour l'instant.

Ces sentiments, cette culpabilité,  à force de les regarder dans tous les sens depuis des mois, j'ai fini par accepter de vivre avec eux. Ils ne partiront jamais, ils viennent me heurter régulièrement, mais ils me laissent un peu plus en paix maintenant.

La période d'anniversaire du départ est difficile à traverser. Nous sommes tellement concentrés à revivre ces derniers moments que des réminiscences, des situations oubliées viennent s'imposer à notre mémoire.

User sa peine, user son chagrin, passer et repasser sans cesse dessus, jusqu'à ce qu'il soit assez élimé pour faire passer un peu de lumière.

Je pense à toi.

Nora
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 29 juin 2017 à 10:27:01
All I can think about is you ... https://www.youtube.com/watch?v=KnLNG0WnGsI&feature=youtu.be
Oui ces jours-ci je ne pense qu'à toi, à ton rire, à ta colère, à ta souffrance. Toi si beau et si fort sans qui rien n'a plus de sens. Toi pourtant si fragile et que je n'ai pas pu aimer assez fort pour raccrocher à la vie. Ton corps qui t'a trahi et dont il ne reste que des cendres. Nos rêves d'une vie plus belle qui deviennent une réalité à traverser seule, comme un cauchemar qui n'en finit plus, parce qu'il n'y a pas de rêves sans toi. Je t'aime mon Tom.
Titre: Re : En décalage
Posté par: marijo le 29 juin 2017 à 10:43:06
 I can’t stop thinking about you, ce serait plutôt Sting que Coldplay mais tes mots m'ont fait venir les larmes aux yeux car ils disent parfaitement ce que je ressens depuis plus de 6 mois. Je te souhaite tout de même une journée aussi sereine que possible.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Federico le 07 juillet 2017 à 14:30:23

Chère Alexandra,

Pense uniquement  à la seule chose qui compte et qui est importante à tes yeux : " JE T'AIME TOM, MON AMOUR ".

OUI, je sais... lundi... le 10 juillet... 1 an... Tom, ton amoureux.

Amicales pensées. Avec TOI.
je t'embrasse.

Federico
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 10 juillet 2017 à 14:14:02
juste ma chère Alexandra
te dire mes affectueuses pensées pour ce jour ...
fais bon usage du texte que tu avais prévu de relire au petit dej ...
je t'embrasse fort
Titre: Re : En décalage
Posté par: souci le 10 juillet 2017 à 22:50:48

    Pensée pour toi Alexandra.
    Un an, c'est terrible.
    M.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Federico le 14 septembre 2017 à 15:23:21


AVIS DE RECHERCHE INTERNATIONAL INTERPOL

Recherche magnifique jeune femme : Alexandra

Pensées amicales.

Federico
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 18 septembre 2017 à 11:59:38
Bonjour Federico, bonjour à toutes et à tous,
J'ai disparu du forum ces derniers temps, un an s'est écoulé sans Tom. J'ai retraversé les 1000 kilomètres qui me séparent de l'endroit où j'ai déposé les cendres de Tom, cet endroit qui était si important pour nous, là où Tom m'avait embrassée la première fois. J'y suis allée tous les jours, je me suis assise là où j'ai enterré les cendres, mais Tom n'était pas là. J'étais chez nos amis, sur le pallier où nous habitions, la porte de notre appartement était fermée, d'autres gens y habitent, et Tom n'était pas là. Je suis allée dans ce bar en bas de chez nous, notre "terrasse" et Tom n'était pas là. Oui pour la première fois, j'ai réalisé que ce n'était pas juste 1000 kilomètres qui me séparent de Tom mais qu'il n'est plus là, que ses cendres ne sont que des cendres, que tous ces endroits ne sont plus rien, que même ses cendres ne sont plus rien. Et j'ai eu mal, parce que je n'avais pas suffisamment mal, parce que ce 10 Juillet stupide ne signifiait plus rien. Alors je n'ai plus eu envie d'écrire ici, je me sentais comme une imposteure du chagrin, j'avais lu toutes vos histoires, vos chagrins à un an de deuil et moi je ne ressentais plus rien, je ne me sentais pas légitime de venir vous raconter ça.

Oh bien sûr, j'aurais du me méfier, le chagrin est tenace et fourbe, il s'est tu un instant pour mieux revenir avec sa copine la culpabilité. Depuis un an avec Tom, nous regardions les maisons pour quand nous arriverions en Bretagne. Ce 13 Juillet il y a un an, ce jour où ils ont réduit son corps en cendres, j'avais promis à Tom et je me suis promis pendant la cérémonie de porter nos rêves pour deux. Alors j'ai continué à chercher notre maison, j'ai bataillé avec l'assurance vie pour qu'elle fasse ce qu'elle devait faire. Et pile le jour où je dois partir "rejoindre Tom", notre chat tombe malade et je reste un jour de plus avec lui avant de partir. Pile ce jour-là l'agence m'appelle, ils ont une maison à me montrer et c'est la maison de nos rêves, le grand terrain, les pierres, le toit en ardoises, la cheminée, tout y est. Je ne crois pas aux signes, je ne crois pas que Tom ait décidé de mettre cette maison sur mon chemin, mais elle est là, elle apporte un projet, elle parle d'avenir et d'espoir peut-être aussi et elle arrive précisément au moment où je cherche Tom désespérément sans le trouver. Mais elle n'arrive pas seule, la culpabilité refait surface avec elle... Tom est mort et moi j'achète une maison... J'ai laissé mourir Tom alors qu'il m'a mise à l'abri avec l'assurance vie... La maison est trop grande, les démarches sont trop lourdes sans Tom et je continue de faire semblant qu'il va revenir... Je ne mérite pas que Tom m'ait laissé cet argent, il me sauve la vie alors que je n'ai pas sauvé la sienne...

Je tourne en boucle et mes questions me semblent si décalées, encore une fois, mais cette fois décalées de vos chagrins ici. J'avais peur des les écrire ici, peur de faire mal alors j'ai disparu... et je suis désolée parce que tout ce temps, j'aurais aimé pouvoir être là avec vous mais je ne voulais pas parler que de moi. Une nouvelle année sans Tom a commencé et elle me terrifie.

Je vous embrasse toutes et tous bien fort,
Alex
Titre: Re : En décalage
Posté par: Ela le 19 septembre 2017 à 20:01:38
Alexandra... Depuis hier je cherche l'énergie, et les mots pour te répondre... Je ne les trouve pas... Tes paroles me touchent... Si elles me touchent, c'est qu'elles parlent de moi aussi... Alors tu vois, tu te sens en décalage, je me sens en décalage... Tous ici, nous nous sentons en décalage.... Des ovnis qui parlent tous de leur propre souffrance, mais nous demeurons tout de même unis par ça... par cette "ovnitude"... La souffrance emprunte mille visage... On croit l'avoir cernée qu'elle se transforme encore... On préfèrerait la tristesse, et c'est la culpabilité qui pointe son nez. On préférerait une douce nostalgie, et c'est la colère qui  nous bouffe... C'est ainsi. Pour nous tous. On fait face. On ne choisit pas...
Je sais que ce n'est pas simple, oh que non... Mais puisses-tu être douce avec toi-même... Tu as droit à de la douceur, de la considération, de la gentillesse. N'en doute pas.
Reçois toute mon affection, ma tendresse...
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 19 septembre 2017 à 22:00:08
Oh Alexandra oui Ela a raison
Citer
La souffrance emprunte mille visage...
et tu as le droit de faire connaître ce visage, ne doute pas que certain(e)s silencieux, même pas inscrits au forum vont s'y reconnaître ...
n'hésite pas à écrire si tu le veux, le peux ... ça servira aussi
c'est la grande richesse de ce forum !
Avec ces circonstances dont tu parles la Vie te fait quand même des sortes de clin d'oeil nommés synchronicité
garde ta force pour continuer à concrétiser ce but que tu avais choisi
je t'embrasse fort
Titre: Re : En décalage
Posté par: tony36 le 20 septembre 2017 à 18:26:30
Pendant 2 ans et demi, j'ai aussi suivi le chemin que nous nous étions tracés avec ma femme, en essayant en parallèle de faire aussi ma vie.
Rien n'avait bougé dans la maison, je faisais le grand écart entre ma femme et ma nouvelle vie, entre la mort et la vie.

J'avais acheté par exemple la nouvelle saison d'une série que l'on suivait avec ma femme pour la regarder dans notre canapé, comme si elle était là. Est-ce que je serais allé jusqu'à regarder cette série avec l'urne de ma femme à mes côtés ? Pas impossible...

J'avais refait le sol de la salle de bain car elle voulait qu'il soit refait, repeint les volets justement, bourré de médicaments quitte à tomber de l'échelle.
Que des choses "comme si".

Les sentiments, l'amertume, la tristesse, tout cela va et vient, on devient un peu bipolaire, on est destabilisés.

Je sais qu'il y a des signes, mais à un moment l'être aimé n'est plus constamment à nos côtés je suppose comme si nous formions toujours un couple.

Je ressentais la douleur, mais cet espèce de monde entre la vie et la mort était confortable.
Mais voilà... est-ce qu'il faut y rester dans ce monde ?
Est-ce qu'il faut tout faire comme si l'autre était là ?

Je n'en sais rien. J'ai pour ma part choisi d'en sortir récemment de ce monde, et j'en bave affreusement, tout a ressurgi.
Culpabilité d'être vivant et de ne pas l'avoir sauvée, culpabilité de refaire des choses.

Mais comme je l'ai déjà dit, je ne suis pas mort, je ne sais pas si j'y arriverai, je suis devenu une larve, c'est blessant, mais j'essaye d'avancer et de faire des choses même si je suis devenu une espèce de zombie.

Ton message est bien triste Alexandra, mais quoi qu'il en soit, tu essayes aussi de faire quelque chose. Est-ce qu'il faut que ce quelque chose soit "comme si" il était là ? Ça, je ne sais pas, peut-être est-ce la synchronicité, oui.
Quant à la  culpabilité que je connais bien moi aussi... comment dire... laissons la aux assassins.
Titre: Re : Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 27 septembre 2017 à 18:16:21
Je ressentais la douleur, mais cet espèce de monde entre la vie et la mort était confortable.
Mais voilà... est-ce qu'il faut y rester dans ce monde ?
Est-ce qu'il faut tout faire comme si l'autre était là ?


Je ne sais pas non plus Tony. J'aime bien le confort inconfortable de ce monde entre la vie et la mort. Il me rassure ce monde, ça me rassure d'avoir mal. J'arrive dans une phase où il ne me reste plus rien. Plus rien que la douleur pour me rappeler que Tom a fait partie de ma vie et beaucoup d'argent sur mon compte en banque qui attend que j'en fasse quelque chose. Je ne reconnais plus cet homme qui sourit sur les photos, ni celle qui se tient à ses côtés d'ailleurs, elle est morte elle aussi. Nous avons complètement disparu, même les objets qui appartenaient à Tom, même sa chaine autour de mon cou, même les meubles construits ensemble se vident de leur sens. Et je m'accroche désespérément à la douleur, la seule preuve tangible que Tom a existé puisque j'ai mal qu'il ne soit pas là. Je sombre dans la douleur, à nouveau, presque avec satisfaction, je ne veux plus "aller mieux" ou même juste "souffrir moins". Alors je sombre...

Quelle ironie, il y a quelques mois ma grand-mère m'accusait de faire tout pour aller de plus en plus mal et ça m'avait rendu dingue! Mais aujourd'hui c'est devenu vrai, je veux aller mal parce que je ne veux pas accepter que Tom soit mort. Il y a un an à la même période je voulais désespérément intégrer cette réalité, réaliser que Tom est mort. Mais aujourd'hui je veux désespérément lutter contre cette réalité, je veux juste retourner en arrière. Pour ne pas aller de l'avant. Pour ne pas laisser Tom dans le passé. Pour lutter contre les souvenirs qui s'enfuient.

Oui c'est n'importe quoi mais je suis contente que la douleur revienne si c'est tout ce qu'il me reste. Qu'est-ce que je suis sensée faire de ce constat affligeant maintenant? Aucune idée, on verra bien, c'est sûrement une des facettes du chagrin que je n'avais pas encore exploré.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Ela le 27 septembre 2017 à 19:46:52
Oh non Alexandra, ce n'est pas n'importe quoi... Ce dont tu parles, c'est un paradoxe cruel, qui ne fait souffrir que nous, et en même temps c' une sorte de réflexe tellement humain... Plus de 17 mois que mon amour est parti... mort... (il faut bien que j'arrive à dire les choses comme elles sont...), et bien souvent j'en suis là moi aussi. Si je fais un pas en avant, j'ai une envie terrible de me retourner et d'en faire 10 en arrière... Accepter de vivre... c'est un défi monstrueux... Et en même temps, tout au fond de moi, je sens bien que c'est nécessaire... Je peux lutter tant que je veux pour annuler le temps: marcher à reculons, m'accrocher à la souffrance comme une désespérée pour le retrouver à travers elle... je sais bien que ce n'est pas possible. Il n'y a pas de retour possible... 
Mais je m'obstine! Alors vient la culpabilité de vivre. La culpabilité d'être encore là, qui nous dévore mais qu'on continue de nourrir, malgré soi mais aussi parce que celle là, elle reste un peu maitrisable... On peut l'alimenter pour la faire durer encore et encore et encore... Lui donner la fonction de nous rappeler que chaque nouvelle expérience que l'on fait désormais, on la fait sans eux....
Cette peur de les perdre encore et encore et encore... qui peut enfler jusqu'à l'absurde, absurdité dont on est conscient d'ailleurs, mais viscéralement.... on ne peut se raisonner.
C'est humain tout ça... Je sais que c'est très dur... oh que oui! mais je crois qu'il faut déjà commencer par ne pas se juger trop sévèrement d'en être là. Savoir aussi, petit à petit, décrypter la part de ce mécanisme que l'on cherche à étouffer, à nier, à annuler... Et je crois que cette réalité qu'on ne veut pas admettre se résume à une chose: le fait qu'une part de nous a conservé l'envie de vivre! Oui. Une pulsion de vie, qui fait qu'on est toujours là, qu'on se lève chaque matin... mais qui tout tout tout au fond de nous réclame un peu plus. Réclame le droit de profiter, d'éprouver du plaisir, d'être heureux... Et quelque chose en nous veut la faire taire cette foutue voix. On ne veut pas l'écouter parce qu'elle est menaçante, dangereuse.... et qu'on la juge déplacée aussi.... Parce qu'elle nous pousse à ne pas suivre ceux que nous aimons dans la mort. A ne pas reproduire ce modèle de fidélité ancestral à la Roméo et Juliette. Une part de nous veut vivre et on se punit pour ça.
Est ce qu'aimer quelqu'un signifie nécessairement en arriver là? En arriver à le suivre dans la mort? Ça me faite bizarre, ça me coute même d'écrire ça aussi clairement, noir sur blanc, mais j'aimerais faire péter ce qui reste un tabou même pour moi. Est ce la seule forme d'amour authentique possible? Je me pose parfois la question oui... mais je continue à vouloir dire "non". Pour me donner bonne conscience? Parce que je n'ai pas assumé de suivre mon chéri dans la tombe? Oui oui, je me demande ça. Souvent. Je me torture avec ces questions pendant des heures.... Et puis je me dis que de là où il est, s'il exigeait ça de moi, il ne serait pas vraiment lui. Il ne serait pas ou plus l'homme que j'ai tant aimé, que j'aime de tout mon cœur. Alors j'espère vraiment être capable un jour de me pardonner totalement de ne pas avoir suivi la voie de cette fidélité morbide. Me le pardonner et assumer pleinement d'être en vie.
Mais laissons nous le temps, Alexandra...
J'espère ne pas avoir été trop longue, ni égocentrique. J'avais envie de te partager mon expérience et mes réflexions, que tu saches que tu n'es pas seule à batailler avec ce "n'importe quoi " dont tu parles.
Je t'embrasse.
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 27 septembre 2017 à 23:05:51
Citer
Accepter de vivre... c'est un défi monstrueux... Et en même temps, tout au fond de moi, je sens bien que c'est nécessaire..

oui c'est ce qui est caché derrière ce que tu vis Alexandra
que j'ai traversé et qui me revient aussi par vagues encore oui
et qu’Ela côtoie
merci à vous deux de si bien le transcrire ...
paradoxes ... oui dans le deuil c'est le temps des paradoxes
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 28 septembre 2017 à 11:12:56
J'espère ne pas avoir été trop longue, ni égocentrique. J'avais envie de te partager mon expérience et mes réflexions, que tu saches que tu n'es pas seule à batailler avec ce "n'importe quoi " dont tu parles.

Tu sais bien que non Ela. A quelques mois de distance dans ce foutu deuil, je pense bien oui qu'on traverse un cycle similaire. Et en lisant Qiguan et l'article que nous a envoyé Yacine hier, je pense aussi que ce sera le plus dur. J'ai bien conscience que je me dis ça à chaque fois, à chaque nouvelle apparition d'un nouveau "dysfonctionnement intellectuel", mais là je crois bien que c'est vrai pour une fois. Savoir que celui qu'on aime est mort et refuser de l'accepter... Savoir que c'est "n'importe quoi" ce retour en arrière et ces questions mais se laisser faire quand même (non mais franchement, est-ce que Tom a eu un cancer du testicule parce que je ne voulais pas d'enfants, donc son testicule s'est dit, et ben puisque c'est comme ça, t'es le corps le plus inutile du monde, alors je vais te zigouiller ? N'importe quoi) ...

Oui tu as raison Ela, il y a bien un peu de ce syndrome de Roméo et Juliette. Je ne sais pas si c'est parce que je me sens coupable de ne pas avoir fait comme eux ou si je les envie de ne pas avoir eu à souffrir trop longtemps. Ou simplement si je ne suis pas désespérée de ne pas pouvoir mourir de chagrin comme Iseut quand elle a découvert le corps de Tristan. Les trois sûrement. Je pense qu'on prend de plein fouet l'imaginaire collectif pour ne rien arranger au chagrin, tous ces amants maudits et aussi toutes les croyances sur le veuvage, toutes les images de "veuve noire" ou de "veuve joyeuse".

J'ai peur qu'on croit que je m'en fous de la mort de Tom, j'ai peur qu'en ayant reçu l'assurance vie on pense que je "profite" de sa mort et j'ai tellement de rancœur contre les "tu vas refaire ta vie, tu es jeune" que je revendique haut et fort que j'ai mal. Et comme tout le monde a son petit mot à dire là-dessus sans jamais avoir vécu ça, la culpabilité revient en flèche et je me dis que Tom est mort parce que je ne l'ai pas assez aimé (ce qui est tout autant n'importe quoi que l'histoire de la couille revancharde). C'est étrange de l'écrire noir su blanc aussi, mais c'est vrai, je porte la douleur et la culpabilité comme une revendication et une preuve que Tom a bien existé dans ma vie et que son absence est un gouffre béant.

Que de paradoxes, tu as raison Qiguan, que de "n'importe quoi"... Et pourtant aujourd'hui il fait soleil sur notre belle Bretagne alors je vous en envoie un peu.
Je vous embrasse
Titre: Re : En décalage
Posté par: Federico le 28 septembre 2017 à 11:30:33

Coucou Alexandra,

j'ai du mal à t'écrire... je voudrais bien... je bloque... je ne trouve pas les mots !
Entre le fait que tu as du mal à trouver la motivation dans ton travail... qui est liée à la fin de ta thèse pour laquelle tu as dû te consacrer et qui correspond très exactement aux dernières semaines de la vie de Tom...
et le fait d'avoir reçu une importante somme d'argent de l'assurance-vie suite au décès de Tom...
Tu traînes un double sentiment de culpabilité... lui, il est mort et il ne va ni profiter  de la vie avec toi ni de cet argent pour l'achat de la maison de vos rêves... et toi, tu es en vie et tu vas profiter maintenant et de ta vie et de cet argent et maison !

Mais... Alexandra... c'est pas comme ça qu'il faut voir les choses !
Tu as également étudié POUR LUI... pour ensuite partir ensemble dans un endroit choisi par vous deux... tu es généreuse... tu voulais lui offrir une destination de rêve avec de beaux voyages...
Ensuite, cet argent .... c'est matériel... il t'a mis à l'abri financièrement comme dans beaucoup de couple ils prennent une assurance vie et c'est l'un ou l'autre qui en profite en cas de décès ou même c'est parfois les enfants...ou même des associations s'il n'y a pas d'héritiers... il n'y a pas eu arnaque... ce n'est pas de l'argent sale... c'est uniquement matériel...
TU dois principalement voir le côté sentimental... je t'ai déjà écrit de "laisser tomber" tout sentiment de culpabilité... ça ce n'est bon que pour les psys...
Tu voulais être très généreuse... lui offrir de belles choses, une belle vie... ça ne s'est pas passé comme ça !
Tu es terriblement frustrée avec toute ta flamme amoureuse, la force de ta jeunesse... sois sage !

Je te souhaite de bonnes choses et je suis triste de te lire... j'espère que tu comprendras l'essentiel de mon message... je laisse parler mon cœur comme toujours... c'est sincère !

VIS ALEXANDRA... VIS TA VIE ... maintenant et demain ! le passé est là... Tom a été, est et sera toujours avec toi...

VAS Y ALEXANDRA.... FONCE et ne te retourne pas trop... AVANCE... crie, pleure mais il y a LA VIE avec toute ta tristesse, ton chagrin, ta douleur, ta souffrance...

En pensées... tu lui seras toujours fidèle... sincère... c'est déjà bien, beau et magnifique !

Je t'embrasse.
Federico
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 28 septembre 2017 à 21:29:37
oh Alexandra,
tes mots me touchent et certains m'éclairent,

Suite à la mort de Jérôme et bien, je vais toucher de l'argent (pas une assurance vie, mais de l'argent de l'assurance du chauffeur qui l'a tué), Avec Jérôme on vivait en faisant toujours attention à nos dépenses, et bien là, je ne vais plus devoir le faire autant, moi je me dis qu'il m'a mise à l'abri (depuis sa mort, la maison est payée, alors qu'on avait pas fini... ) Aujourd'hui, je me dis heureusement qu'il n'y a pas un souci financier en plus, que je n'ai pas à m'inquiéter de cela, que ce serait un poids de plus, .. et l'argent, comme le dit si bien Fédérico, ça n'est que matériel, rien ne peut remplacer l'être que l'on aime, et certainement pas ça.

dans ce que tu as écrit, tu m'as fait comprendre que quand les gens me disent que j'ai l'air d'aller bien, que j'ai meilleure mine, j'ai peur qu'on croit que je je vais mieux (et pourtant j'avance), je ne veux pas qu'ils croient que je suis passée à autre chose, que je m'en suis remise.., "que de n'importe quoi"
je t'embrasse très fort,
Titre: Re : En décalage
Posté par: malex le 28 septembre 2017 à 23:59:04
A Alexandra et celles et ceux qui se retrouvent dans tes mots  : MERCI

Il y a longtemps que je n'avais pas eu la possibilité de revenir dans ce forum. Ma vie de nomade continue avec son effet anesthésiant...   revenir sur ce forum c'est comme si je rentrais chez moi. 

Tes mots, vos mots me touchent , ça fait du bien d être en pays connu , d'en comprendre la langue . Ailleurs  je me sens si étrangère  .
Titre: Re : Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 29 septembre 2017 à 10:11:44
Aujourd'hui, je me dis heureusement qu'il n'y a pas un souci financier en plus, que je n'ai pas à m'inquiéter de cela, que ce serait un poids de plus, .. et l'argent, comme le dit si bien Fédérico, ça n'est que matériel, rien ne peut remplacer l'être que l'on aime, et certainement pas ça.

Oui Mononoké, tu as raison... Je veux dire, intellectuellement, je sens bien que tu as raison. Émotionnellement, c'est une autre histoire. Depuis tous ces mois, j'ai appris que malheureusement je ne pourrai pas forcer mes émotions à accepter quelque chose que je ne ressens pas comme ça. Il y a cette sale bestiole de culpabilité qui vit tapie dans l'ombre et qui n'attend qu'une nouvelle occasion pour me dévorer toute crue (la sale bête!)

Si je pousse le (dé)-raisonnement jusqu'au bout:
1- j'avais ma thèse à finir, Tom allait mal, je l'avais vu, mais ça n'était pas ma priorité. Quand il m'a parlé de sa grosseur au sein, le premier truc que j'ai pensé, c'était à un cancer et pourtant j'ai laissé Tom faire comme si ça n'était rien.
2- on devait commencer une autre vie après la thèse, il y avait des projets de maison qui nous faisaient plaisir à tous les deux même si au début l'idée de partir du sud direction la Bretagne ne plaisait pas du tout à Tom
3- mais j'ai failli planter Tom au moins 1000 fois dans la dernière année ensemble, je ne saurais jamais si c'était la maladie ou si on commençait à ne plus s'aimer. D'ailleurs les 3 semaines à l'hôpital, j'ai eu envie de me barrer, je me disais qu'il m'avait entrainée dans cet enfer et que c'était injuste pour moi

Conclusion: est-ce qu'aujourd'hui je peux vraiment dire que j'ai mal parce que j'aime Tom? Ou parce que je me sens coupable d'un an gâché en disputes et à fermer les yeux sur son cancer? Les deux si je dois être parfaitement honnête avec moi.

Alors tu comprends bien ma question de la "légitimité" dans ce contexte. Est-ce que je suis légitime de continuer les projets de maison alors que Tom est mort et que j'ai l'impression de l'avoir sacrifié pour obtenir ce que je vais avoir maintenant avec l'assurance vie?

Je sais bien que c'est absurde ces questions, qu'est-ce qu'on en sait au fond de comment ça se serait passé si Tom n'avait pas été malade? Je sais bien que j'ai dit à Tom que sa grosseur au sein n'était pas normale, que je trouvais qu'il allait mal et que je ne savais pas comment l'aider. On s'est engueulé vraiment fort quelques semaines avant de découvrir ce qu'il avait, je lui ai écrit une lettre dans laquelle il est écrit noir sur blanc qu'il faut qu'on arrête de se voiler la face et que ma thèse n'est pas responsable de ce qui ne va pas.

Mais je n'ai rien fait, je l'ai laissé mourir. On me répète que je ne savais pas. Moi ce que je ressens c'est que j'ai pensé à moi, je me suis détachée de Tom émotionnellement pour moins en baver si on se dirigeait vers une rupture. Alors je ne l'ai peut-être pas tué mais je l'ai laissé mourir et jamais je ne pourrai me le pardonner. Cet argent a un goût d'autant plus amer que depuis qu'il est sur mon compte en banque je ne pense plus à mourir moi aussi. Et je me dis que Tom m'a sauvé la vie alors que je n'ai pas pu sauvé la sienne. Et ça fait horriblement mal.

Voilà c'est bien moche ce qui se passe dans ma cervelle de veuve zinzin. C'est absurde et je le sais, c'est bien de l'écrire aussi parce que malheureusement c'est ça aussi le deuil, le temps des paradoxes et des absurdités. Merci à celles et ceux qui ont le courage de lire tout ça, il faut que ça sorte et après je me fais la promesse de pouvoir vous aider vraiment. Avec du soleil plutôt qu'avec toute cette noirceur.

Je pense à vous toutes et à vous tous,
Alex

Titre: Re : En décalage
Posté par: loma le 29 septembre 2017 à 13:48:31
Alexandra, peut être si tu changes d'angle de vue, les choses te paraitront différentes . La dernière année si j'ai bien compris a été assombrie par des disputes et de la distance entre vous. Malgré cela il n'a pas changé le nom du bénéficiaire, toi, alors qu'il pouvait le faire facilement et choisir, un membre de sa famille, un ami, une association ... Il a continué à te choisir TOI ! En dépit de ce qui s'effilochait , il a considéré que le lien d'amour qui vous unissait était fort.
Sois douce avec toi.
Tendrement loma
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 29 septembre 2017 à 14:01:17
Alexandra bravo à l’écriture qui te permet de poser les choses clairement et de les exposer ...
je peux me tromper mais j'ai comme dans l'idée que tant que tu n'auras pas , seule ou avec des aides pros (type technique rapide comportementaliste, pas analytique) dans le domaine émotionnel purgé, traité ta culpabilité, le "vrai" deuil de Tom ne pourra pas avancer ... peut être je me trompe !
 Si tu avais reçu cet argent autrement : gain au loto par exemple ce serait différent pour toi ...
Comment peux tu accepter ce cadeau de la vie ?
Votre couple était en crise quand Tom a été malade ... il y a sans doute à chercher ce que révélait en soi cette crise où^tu as voulu te blinder pour moins souffrir si la séparation venait.
As tu pu imaginer ton chagrin si déjà avant la maladie de Tom, son décès vous vous étiez séparés ?
ce ne sont que des pistes ...
et je te souhaite toute l'énergie possible pour que tu puisses avancer dans ta vie libérée de tout ce négatif
affectueusement
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 29 septembre 2017 à 15:48:56
oh Alexandra,
j'aimerai tellement que tu sois douce avec toi, je voudrais tellement que tu ne te reproche rien, vivre son deuil, vivre avec ses souffrances, leurs manifestations violentes et une peine assez lourde,

Voilà c'est bien moche ce qui se passe dans ma cervelle de veuve zinzin. C'est absurde et je le sais, c'est bien de l'écrire aussi parce que malheureusement c'est ça aussi le deuil, le temps des paradoxes et des absurdités.
tu as raison, je pense qu'ici, il se passe des choses bizarres dans le cerveau de chacun de nous, savoir le débrancher pour vivre un peu de répit, de repos serait une bonne chose

je te souhaite beaucoup de douceurs Alexandra
Titre: Re : En décalage
Posté par: malex le 30 septembre 2017 à 13:48:27
Alexandra,

Ne t'accables pas de reproches, de regrets, de remords . La vie quand elle nous joue ce p..... de mauvais tour de nous enlever notre compagnon  nous  détruit suffisamment comme ça.
Mon mari est décédé il y a 1an et 9 mois après 8mois de bataille contre le crabe.  Comme toi je suis arrivée sur ce forum, perdue  traînant mon chagrin et surtout ma culpabilité. Je peux dire à ce jour que je ne parvenais pas à discerner où se trouvait ma douleur .  Quand je lisais les contributions sur le forum je ne voyais que des couples fusionnels et je m'en voulais encore plus de ne pas avoir dit... de ne pas avoir fait...  de ne pas avoir compris..... 
Je m'en suis voulue de ne pas l'avoir rendu plus heureux .
Je partageais mon temps entre un métier pour lequel je m'investissais à fond,  le temps de repos je le consacrais à mes petits enfants et à ma maman ( je montais dans le nord la moitié de mes congés pour m'occuper d'elle).  La vie pas celle d'une vitrine magique , celle avec ses hauts et ses  bas , avec ses contraintes réelles  , avec des contraintes que l'on s'invente. 
Souvent il me disait " Il n'y a jamais de temps rien que pour nous"....  et moi je pensais "il est égoïste peut être même jaloux!"
 Maintenant je suis persuadée que ceux qui vont partir ont une intuition , quelque chose de complètement inconscient qui leur souffle que le temps qui passe ne reviendra pas . Ils savent....  et celui qui reste lui ne savait pas.  Est ce que l'on peut se sentir coupable de ne pas avoir su ?
Quand la "sale bestiole " de la culpabilité (comme tu l'appelles) refait surface , je m'accroche à des heures douces passées ensemble . Je t'avoue qu'au début j'avais du mal à en trouver , dévorée que j'étais par le négatif . Petit à petit , je me rends compte que nous avons vécu une vraie vie de couple , pas une vie rêvée mais une vraie avec des coups de gueule, avec des coups de cœur, avec des moments de connivence , avec des moments d'incompréhension, avec des moments de partage ,avec des moments de profonde solitude.... LA VIE!
Au début, je voulais "ouvrir les yeux" aux amis en couple qui se disputaient , qui parlaient de se séparer .... j 'avais l'impression de détenir (trop tard )  le secret du bonheur et je voulais qu'ils profitent  de ce que je venais de découvrir.
A présent ils me font sourire avec tendresse , ils sont ce que nous avons été mon mari et moi.

Synchronicité  que je partage à l'instant  avec toi : pendant que je t'écris ce message j'entends Bob Dylan à la radio, mon mari l'écoutait souvent et nous avons accompagné son départ avec ces balades là.  J'aime à penser que ça veut dire qu'il approuve .

Prends soin de toi, Alexandra , le chemin de son propre pardon est long mais il se fait petit à petit .
Avec toute mon affection.

Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 26 octobre 2017 à 11:34:12
Tellement de mois se sont écoulés que je ne les compte même plus. Tellement de mois sans Tom, tellement de mois à refuser son absence. Jusqu’à lui écrire comme s’il pouvait me lire alors que je suis de ceux qui ne croient pas à un « après », juste au silence. Tellement de mois à revisiter encore et encore notre histoire pour comprendre, pour trouver le coupable pour aboutir toujours au même constat : il n’y a pas de réponse, juste du silence. Trop de silence. Trop de culpabilité. Trop d’absence. Trop de chagrin. Et trop peu de Tom.

Et voilà qu’une nouvelle guerre des tranchées commence, entre deux routes à prendre et qui chacune prennent racine dans l’absence de Tom. Un carrefour effrayant entre le refus de laisser partir Tom, ce qui aurait dû être notre vie, et le besoin physique de remplir le vide. J’ai sombré ces dernières semaines, presque avec plaisir dans un retour en arrière du chagrin, j’ai fouillé nos souvenirs, j’ai attisé ma culpabilité, soufflé sur les braises de la colère en espérant retenir les souvenirs qui s’échappent. Et pourtant, en même temps, j’ai ressorti ma collection de robes du placard, j’ai pensé à ce que ce serait de continuer à aimer Tom tout en faisant une place à quelqu’un d’autre.

Toujours, toujours des millions de questions… Est-ce le chagrin qui me vole nos souvenirs, est-ce qu’ils reviendront quand il s’apaisera ? Est-ce qu’il faut accepter la mémoire qui se dérobe, accepter de laisser partir le déni, accepter qu’il n’y aura pas de retour et que peu à peu Tom ne sera plus que des souvenirs qui se brouillent ? Est-ce tout ce qu’il me reste la douleur ? Est-ce que j’ai le droit à autre chose, alors que j’ai l’impression d’avoir laissé mourir Tom, alors que je sais que je n'ai pas fait autant que j'aurais voulu faire pour lui ? Est-ce que je peux même vivre autre chose, aimer sans avoir peur de perdre à chaque seconde, faire de la place à quelqu’un d’autre là où il y a déjà tellement de place pour Tom ?

Il n’y a pas de réponse à toutes ces questions, qui sont probablement absurdes… mais j’avais juste envie de les partager avec vous, de les écrire pour mieux les apprivoiser et reprendre le dessus. Encore un jour arc-en-ciel entre pluie de larmes et retour du soleil.
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 26 octobre 2017 à 14:43:47
Tu as raison de venir écrire les paradoxes du questionnement que tu vis
cela sert toujours aux autres
 en validant qu'elles sont comme toi ...
dans des paradoxes et que ça dure
et qu'il n'y a pas de réponse !

La période de reconstruction dont les début sont flous et où il n'y a jamais de fin est très compliquée aussi
bien peu ose s'exprimer sur cette partie ... sujet tabou dans le tabou du deuil ...

bien affectueusement
Titre: Re : En décalage
Posté par: Federico le 26 octobre 2017 à 15:58:42
 
Chère Alexandra,

" - Et voilà qu’une nouvelle guerre des tranchées commence, entre deux routes à prendre et qui chacune prennent racine dans l’absence de Tom. Un carrefour effrayant entre le refus de laisser partir Tom, ce qui aurait dû être notre vie, et le besoin physique de remplir le vide.
Et pourtant, en même temps, j’ai ressorti ma collection de robes du placard, j’ai pensé à ce que ce serait de continuer à aimer Tom tout en faisant une place à quelqu’un d’autre."


Un Grand Défi... TON CHOIX.

Je te rassure ... moi, aussi, j'ai ressorti ma collection de robes du placard (hihihi) ! je comprends... je ne suis pas "un amoureux"... je suis juste en silence un papa qui souhaite également laisser une place à quelqu'un d'autre... parce qu'aussi mon ex-compagne est partie voir d'autres horizons...

J'éprouve également ce besoin physique de remplir cet immense vide affectif !

J'ai besoin de serrer une main, d'embrasser une bouche, une nuque, de caresser des seins, de toucher un corps de femme, de sentir une odeur, un parfum féminin, d'entendre un soupire, un cri, d'écouter une voix, de voir un sourire, de ressentir un désir, une émotion, un nouveau sentiment...

C'est normal, c'est naturel, c'est humain .....

Je t'embrasse Alex.
Federico
Titre: Re : En décalage
Posté par: malex le 27 octobre 2017 à 18:49:53
Alexandra,
Tes questions ne sont pas absurdes c'est le pays sur lequel tu viens d'atterrir qui lui  se nomme Absurdie!
 Pays terrible qu'un pays sans réponse , sans repère . Un pays plein  de vide. On y vit comme on peut et parfois on y rêve de bras qui nous réconfortent mais on sait au fond de nous que les seuls bras capables de nous réconforter ne sont plus....
Prends soin de toi Alexandra. Tom   a une place en toi  qui ne sera jamais prise même si quelqu'un  vient un jour ou l'autre faire un bout de chemin avec toi.
Merci pour ton partage.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Denpaolig le 27 octobre 2017 à 23:02:01
Te rends-tu compte Alex que tu as parlé de couilles ici sur le forum ! J'ai explosé de rire en lisant le post concerné parce que tu as toujours dit (et j'ai tout lu venant de toi depuis ton accueil chaleureux à mon arrivée ici) est tellement profond, clair, pertinent, sensé que là, je ne m'y attendais pas ! Bon, trêve de plaisanterie, tu sais ce que je pense de cette culpabilité devant l'argent de l'assurance vie. Tu la remises au placard et si ton rêve est toujours d'acquérir une maison en Bretagne et bien, FONCES comme te disait Federico. Ne le fais pas pour Tom parce que c'était votre souhait mais fais-le véritablement parce que tu en as envie. C'est de toi qu'il s'agit, Alex. Tom sera toujours dans ton cœur mais il ne doit pas te dicter ta conduite. Toi et toi seule possèdes les clés de ta vie, Alex.

Je t'envoie toute ma tendresse

Muriel.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 02 novembre 2017 à 12:28:15
Destructuration, restructuration… Oui décidément c’est la phase de « l’arc-en-ciel », mi-sourire et mi-tempêtes de larmes. Une dernière fois, je voudrais te parler comme si tu étais là, comme si je n’essayais pas de me convaincre que je ne t’ai pas complètement perdu. Une dernière fois me réveiller près de toi, juste une dernière fois. La maison de nos rêves a été vendue. Il fallait se rendre à l’évidence, c’était la maison de nos rêves, mais tu n’es plus là pour les vivre avec moi. Trop grande, trop pleine de travaux que tu aurais su faire mais pas moi, trop symbolique des rêves que nous ne ferons plus.

Si tu savais comme je t’aime encore, si seulement j’avais la certitude que tu savais que je t’aimais, si seulement j’avais fait tout ce que j’aurais voulu faire pour te raccrocher à la vie… Alors peut-être que je ne serais pas bloquée entre destructuration et restructuration aujourd’hui. Peut-être que je pourrais accepter les envies qui reviennent, de continuer nos rêves mais juste pour moi et pourtant avec tout l’amour qui les avaient créés en toile de fond.

Peut-être mais j’ai mal de te perdre encore. De réaliser que parfois je me réveille et ce n’est pas à toi que je pense. De réaliser que je ne sais pas si j’ai envie d’aller là où il y a tes cendres, parce que ce ne sont que des cendres et pas toi. De réaliser que même nos rêves sont morts avec toi et qu’eux aussi il faudra accepter de les refaçonner sans toi. Tout en sachant au fond de moi que j’ai merdé, que je ne t’ai pas aimé comme je le voulais, que je n’ai pas fait tout ce que je pouvais pour que tu sois encore là, que j’ai eu envie de m’enfuir quand tu es tombé malade et que je n’arrive pas à m’autoriser à vivre en me sentant si responsable du fait que toi tu ne vis pas.

Oui en ce moment ça va « mieux » mais je ne veux pas. Et maintenant je fais quoi ?
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 02 novembre 2017 à 16:59:43
Citer
Et maintenant je fais quoi ?
oui question que l'on se pose ...
apprendre à accepter de faire pour soi, de prendre soin de soi ... de faire que pour soi ...
alors qu'on n'a qu'une envie partager, exister dans et par le partage ...  :-\
Titre: Re : En décalage
Posté par: Stana le 03 novembre 2017 à 14:50:05
  Passer du rire aux larmes, des larmes au rire, et recommencer...oui je ne sais que trop ce que c'est, ça peux même arriver sans transition aucune, comme ça, sans crier gare...on ne sais pas  quand on se  sentira mieux la prochaine fois et combien de temps ça durera, et inversement  :) :'( c'est fatiguant quand ça arrive plusieurs fois dans la journée. Pendant longtemps, j'ai connu de ces cycles, parfois extrêmes, à peu près tous les jours, pour ne pas dire tous les jours. Quand une embellie, même minuscule, survenait, j'ètais angoissée à l'idée qu'elle allait prendre fin d'un moment à l'autre, d'un instant à l'autre.
  Ca m'arrive encore régulièrement, et quand c'est le cas, les moments où je me sens mieux ou bien sont d'autant plus précieux, j'ai appris à les avourer d'autant plus qu'ils peuvent être éphèmères  :) ce n'est pas toujours facile de  se dire ça, nous n,e sommes par des surhommes ou des surfemmes...
  Douces pensées  :-*
Titre: Re : Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 03 novembre 2017 à 17:35:36
Ca m'arrive encore régulièrement, et quand c'est le cas, les moments où je me sens mieux ou bien sont d'autant plus précieux, j'ai appris à les avourer d'autant plus qu'ils peuvent être éphèmères  :

Merci beaucoup Qiguan et Stana d'être venues partager ça avec moi ici ou ailleurs sur le forum, cet état "dissocié" dont parlait Qiguan aussi. Ce que je me demande, c'est comment on fait avec l'envie de retenir le chagrin? J'ai l'impression que c'est mon dernier lien avec Tom, que quand il n'y aura plus le chagrin, alors je l'aurai tout à fait perdu... Je dis ça parce que les souvenirs s'effacent vraiment, ceux qui restent sont ceux que j'ai pris le temps d'écrire (pour les jolis souvenirs) ou les souvenirs traumatiques (qui eux bien évidemment sont inscrits au fer rouge).

Parfois je me demande si les souvenirs reviendront quand j'aurai moins de chagrin, peut-être qu'ils sont là mais que je ne peux pas les mobiliser parce qu'ils me montreraient tout ce que j'ai perdu? Et en même temps je me demande si en laissant partir le chagrin, ils ne sont pas en train de s'effacer de façon irréversible. La seule façon de le savoir serait en théorie d'accepter que le chagrin s’atténue un peu, comme il est en train de le faire que je le veuille ou non, mais j'ai trop peur de perdre encore Tom.

Voilà, je ne sais pas du tout quoi faire de ces questionnements qui m'angoissent terriblement. Est-ce que d'autres ici traversent / ont traversé le même genre de choses? On fait quoi dans ce cas là, quand on n'a pas envie "d'avancer"?

Douces pensées à vous aussi,
Alex
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 03 novembre 2017 à 20:11:51
Cette peur d'aller mieux revient épisodiquement pour moi ...
Citer
peut-être qu'ils sont là mais que je ne peux pas les mobiliser parce qu'ils me montreraient tout ce que j'ai perdu?
je pense que c'est ça
mais comme moi j'ai travaillé dès le début par choix à activer, travailler la mémoire des souvenirs positifs les crises de désespoir liées à cela et au manque me sont passées inaperçues
c'est vrai que j'ai partagé longuement avec Jean 41 ans ... j'ai du stock
mais je cultive sans cesse les souvenirs c'est mon truc pour ne pas sentir que je perdrai un lien ... la psy dit que c'est un bon chemin
voilà mon simple témoignage
Titre: Re : En décalage
Posté par: Ela le 03 novembre 2017 à 21:45:15
Alexandra, je me retrouve totalement, mot pour mot dans ce que tu décris... Merci d'avoir pris le temps de poser des paroles sur ton ressenti, qui illustre tellement bien ce que je moi-même je ressens...
J'aimerais simplement te dire que moi aussi, j'entretiens un rapport très particulier avec mes souvenirs d'une part:  j'ai l'impression qu'ils m'échappent de plus en plus... et le fait de m'autoriser à vivre d'autre part, comme si cela signifiait, le perdre encore.
Ces angoisses sont encore très présentes... mais je dois dire aussi que petit à petit, j'entraperçois... autre chose. D'autres possibilités, d'autres ressentis qui viennent se mêler à tout ça... C'est encore tellement mouvant que je vais avoir du mal à poser des mots dessus, alors je vais tenter de faire au mieux et d'être brève...
Je crois, je ressens, j'avance... mue par l'idée que notre amour, l'amour qu'il y "avait" entre mon chéri et moi ne se conjugue pas au passé. Qu'il ne se cantonne pas à une carte postale sépia faite de nos souvenirs, de ce que nous avons partagé et ne retrouverons plus. Lorsque j'ai peur d'avancer, d'oublier... ce qui me rassure c'est de visualiser ce lien entre nous... au présent. De m'imaginer, vraiment, comme un lien, un ruban... qui part de moi et qui se perd quelque part dans l'invisible... mais je sais qu'il est à l'autre bout. Je me dis qu'il est toujours là. Vivant avec moi.
Sans que je m'en rende compte, une part de moi sait que je ne serai plus jamais la même. Celle d'avant notre rencontre. Il m'a inspiré et continue de m'inspirer... même si parfois j'aimerais faire plus, faire mieux... Même si parfois j'ai peur de le décevoir. Malgré toutes ces peurs, je le porte déjà avec moi, en moi... Je dirais même: que je le veuille ou non. Et quoi que tu fasses, quelle que soit la manière dont tu avances: c'est le cas pour toi aussi. Tu garderas toujours la marque de ton amour. De votre rencontre, de son passage dans ta vie.
J'aimerais, mais personnellement, je me sens incapable de contrôler mes souvenirs... Et même si je le pouvais, je n'ai pas d'emprise sur le fait que le temps les rendra peut être plus flous... Le temps ou qui sait un jour: un accident, la maladie... J'essaye d'apprendre à lâcher prise sur ça... D'arrêter de me sentir responsable de ce temps qui m'éloigne de lui tel que je l'ai connu. Qui m'éloigne du traumatisme de sa mort également. Mais en revanche, j'essaye chaque jour de me lever et de vivre ma vie, le plus pleinement possible... et de lui dédier les instants les plus précieux. J'ai conscience de vivre pour moi, mais aussi pour lui désormais... Souvent, c'est une prise de conscience silencieuse, intérieure... et parfois je lui dis ces choses là à haute voix. Que je l'aime, que je veux continuer à faire de mon mieux pour lui.
C'est une prise de conscience encore très vacillante... que je perds de vue, parfois, souvent... mais je voulais te la partager car je crois profondément que l'amour pour nos chéris peut s'exprimer dans le fait d'investir et d'assumer au maximum le moment présent... et non pas uniquement dans la fidélité au passé.
Je pense que parfois, comme moi, tu as peur parce que tu imagines Tom derrière toi, et que tu te sens emportée vers l'avant... Mais essaye d'imaginer qu'une part de Tom se trouve en toi. De l'imaginer, à tes côtés, et non pas derrière toi. Ce n'est peut être qu'une projection de l'esprit, une astuce... mais au fond, qu'en savons-nous?
Je me dis simplement, pour ma part, que si je mourrais demain, j'aimerais que mes proches me perçoivent ainsi... Comme une présence, bienveillante, non jugeante, encourageante... cheminant à leur côté... et non comme une ombre les tirant sans arrêts vers le passé. Je crois qu'Hanaël aimerait que je le perçoive comme ça et je m'avance peut être, mais dans le fond, sans doutes est-ce ce que Tom aimerait également pour toi.
Tu es en vie et tu n'as pas à te sentir coupable de l'être. Tu n'as pas non plus à te sentir coupable de te sentir coupable!! Ce satané cercle vicieux! Tu fais de ton mieux, avec tous ces paradoxes, ces ressentis qui nous désarçonnent, nous surprennent, nous font peur... Tu fais de ton mieux et tu peux être fière de toi, et Tom devrait l'être aussi. Il l'est sans aucun doute.
J'aimerais te dire aussi, que j'ai lu tes précédents commentaires. Tout comme toi, il y a des épisodes de mon histoire avec mon chéri qui m'attristent... J'ai l'impression parfois de m'être montrée lâche, de ne pas avoir réalisé la chance d'avoir auprès de moi un homme qui m'aime autant... J'ai parfois voulu prendre de la distance dans notre couple. J'ai pensé à partir. J'ai douté. Je m'en suis beaucoup voulue pour ça. Je m'en veux encore parfois... Et puis je me rappelle que lorsqu'il était vivant, tout comme depuis son départ: je demeure une humaine imparfaite. Avec des peurs d'engagement, d'abandon, des doutes, des problèmes d'ego... Mais tout ça ne parlait et ne parle toujours que de moi! En revanche, pas un seul instant je n'ai désiré, je ne désire autre chose que le bonheur, l'épanouissement, la félicité de mon aimé. J'ai peut être juste douté parfois d'être la bonne personne. La personne capable de lui apporter tout ça. Et je crois que toi comme moi, nous pouvons être en paix avec nous-mêmes par rapport à tout ça. A ces doutes, à ces peurs, ces erreurs... Elles ne disent rien de l'amour qu'il y avait, qu'il y a entre nous et nos aimés.
Finalement, j'ai à nouveau été plus longue que prévue, mais je tenais à te partager ces ressentis. Prends soin de toi Alexandra. Je t'embrasse.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Stefy le 04 novembre 2017 à 11:06:19
Je continue de me poser de temps en temps pour venir lire ici. Seul lieu où les mots me semblent vrais,  ou mon histoire résonne, où elle a toute sa place, où j'ai l'impression qu'elle n'est pas oubliée , contrairement à dehors même si je n'écris pas.  Plus de 3 ans......
C'est ton premier message que je lis  aujourd'hui Ela, depuis pas mal de temps. J'y verrais presque un signe....
Quelle résonance pour moi....
Ces souvenirs qui vont, qui viennent que l'on croit perdus puis qui ressurgissent au détour d'un presque rien,.....
Ces souvenirs que l'on voudrait graver  de façon indélébile de peur qu'ils ne s'effacent pour toujours.
Mais ils sont la, mais pas tous.....
J'avance aussi , avec cette peur justement d'avancer..... comment l'emmener dans le présent , mon présent où il n'est pas physiquement, sans me sentir coupable. Coupable , responsable aussi de ce temps qui passe..... coupable de le laisser m'éloigner de ce jour la.......et pourtant je n'y peux rien malgré tout,.....
J'essaie aussi d'apprendre à lâcher prise sur ca, c'est très compliqué
Une chose maintenant dont je sois sur est que cet amour et toujours la. J'ai eu tellement peur d'oublier......
Il est pour moi toujours présent, oui ce lien invisible est la, je Lui parle, très souvent. Il partage avec moi beaucoup de choses......
Des hauts, des bas......Il me manque toujours.....
J'oscille entre envie d'aller de l'avant et l'envie de rester la avec Lui....
J'oscille entre culpabilité d'aller mieux et culpabilité de ne pas aller mieux.....
Comment l'emmener réellement avec moi vers l'avant?
Pourtant je sais que si c'était moi qui était partie, j'aurais voulu qu'Il continue , qu'Il soit heureux......
Culpabilité de ne pas avoir fait tout ce que je pense que j'aurais pu/ du faire , et pourtant j'ai conscience que j'ai fait de mon mieux à ce moment..... si j'avais su..... mais je ne savais pas......et pourtant si j'avais su.....
Il me semble avoir 2 vies maintenant, une avec les autres ou j'ai retrouvé une place, et celle avec Lui. Parfois , et à des périodes souvent elles s'entremêlent et c'est très compliqué, très douloureux.....
Je me pose toujours cette même question depuis le début , même si  je ne suis plus dans cet immense chaos, comment fait on en vrai......
Je m'égare je crois ......
J'espère ne pas être trop à côté, des débuts du post....
Toujours personne à l'extérieur avec qui partager.....
J'avance ... doucement.... avec toujours des questions....des peurs....
Mais Il est la avec moi... même si je voudrais que ça soit autrement
Notre vie ne sera plus jamais la même ...qu'est ce qu'on en fait après?
Je vous embrasse fort
Stefy




Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 04 novembre 2017 à 22:35:55
ma chère Stefy je te serre fort dans mes bras
merci de ce partage
Titre: Re : Re : Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 10 novembre 2017 à 15:41:58
Parfois je me demande si les souvenirs reviendront quand j'aurai moins de chagrin, peut-être qu'ils sont là mais que je ne peux pas les mobiliser parce qu'ils me montreraient tout ce que j'ai perdu? Et en même temps je me demande si en laissant partir le chagrin, ils ne sont pas en train de s'effacer de façon irréversible.

Pour ceux et celles que cette question de l'oubli perturbent, je voulais juste partager avec vous une autre façon de voir le problème proposée par ma psy hier. Je lui ai parlé de cette peur d'oublier et du fait que Tom me semblait plus loin, comme si je le perdais de plus en plus.

Elle pense qu'en réalité les souvenirs "s'archivent" parce que le processus de deuil se fait "normalement". Le conscient et l'inconscient se remettent en phase, les souvenirs et les pensées ne sont plus envahissants comme ils l'ont été les premiers mois mais ils ne disparaissent pas. Au contraire, quand j'aurai fini de me mettre la pression pour que Tom soit présent sans arrêt dans mes pensées, tout sera là, disponible mais pas obsédant et aussi douloureux.

Je voulais partager cette proposition avec vous, parce que je trouve qu'elle peut soulager cette peur de l'oubli. Il n'y a pas d'oubli, c'est juste la bataille des émotions qui s'apaise et ça fait du bien de le savoir je trouve.

Je vous embrasse,
Alex
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 23 novembre 2017 à 15:06:45
Sur le conseil de Qiguan, je reposte ici ce que j'ai écrit ce matin dans une autre section... Au cas où ça aide!

------
http://forumdeuil.comemo.org/apres-la-grande-souffrance-la-reconstruction/vivre-une-nouvelle-histoire-comment-faire-avec-les-photos/

Bonjour à toutes et à tous,
Depuis quelques semaines, j’ai rencontré quelqu’un avec qui je sens que je pourrais avoir envie de vivre quelque chose. C’est extrêmement perturbant, parce que je passe la moitié de mon temps avec le chagrin d’avoir perdu mon compagnon et l’autre moitié avec la vie qui semble vouloir redémarrer. Mais malgré cette souffrance, j’ai envie d’essayer, je me sens prête à continuer d’aimer Tom tout en me faisant un peu de place pour moi et pour cette personne que je viens de rencontrer.

Il devrait venir passer quelques jours chez moi, je ne sais pas encore ce dont j’ai envie ou pas. Mais il y a une question que je me pose, celle de comment faire avec Tom qui est partout chez moi. En particulier, il y a dans ma chambre des photos de nous et autour de mon cou sa médaille de baptême avec lesquels je ne sais pas comment faire.

Je n’ai pas envie d’imposer le « fantôme » de Tom à cet homme qui est en train de rentrer dans ma vie. Il sait, il connait mes doutes et mes craintes, je ne lui ai rien caché. Mais je ne veux pas poser mon deuil sur ses épaules, je trouve ça extrêmement malsain. Et en même temps, je me sentirais coupable d’enlever les signes de Tom de là où ils sont, c’est symboliquement dérangeant de me dire que je le range dans un placard le temps d’un week-end. J’ai pensé à déplacer les photos dans une autre pièce, mais quoi que je fasse, elles seront visibles.

Est-ce que d’autres d’entre vous ont vécu ce questionnement ? Comment est-ce que vous avez fait de votre côté avec les photos et les souvenirs qu'il y a chez vous?
Titre: Re : En décalage
Posté par: Noëlle le 23 novembre 2017 à 19:09:55
Bonsoir Alex,
J'ai perdu l'amour de ma vie, mon Trésor, le 19 décembre 2015 .....Je témoigne peu aujourd'hui, je lis de temps en temps. Je te parle ici de mon expérience ; j'ai moi aussi " rencontré quelqu'un", dans de drôles de circonstances. Pendant des mois notre relation a été purement virtuelle, mais m'a néanmoins transportée ! Je ne cherchais pas du tout une relation amoureuse, je n'en aurai pas voulu d'ailleurs; juste des rencontres de personnes intelligentes, cultivées, bienveillantes pour m'enrichir .... tellement en dehors du vide affectif que je ressentais, ma vie était devenue vide de toute intelligence, de tout échange, vide d'intérêt, vide de tout. Et cette personne comprenait ce que je ressentais, me lisait, était semble t -il clairvoyante, tellement elle avait d'empathie, et m'apportait cette "intelligence" dont j'avais tant besoin ; elle m'écrivait avec une éloquence, un verbe, moi qui suis très littéraire qui suscitait de l'admiration.  Nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises, mais semble t il nous n'avions pas les mêmes intentions, moi je ne voulais que combler un vide, et lui était peut être amoureux, mais très effrayé par ma souffrance. Il y a eu moult rebondissement dans cette "aventure", nécessaires, à mon avis, pour me permettre d'évoluer. Lorsqu'il est venu la première fois à la maison, sur les conseils d'une amie, j'ai enlevé toutes les photos, et la maison en regorgeait. Je les ai toutes mises dans une pièce à part. Ma douleur était suffisamment présente pour que j'impose encore ces images de notre couple heureux à cette personne, alors qu'elle de surcroît n'avait connu que des échecs sentimentaux, et non pas la perte de l'être cher suite à son décès. Très vite, sur les conseils d'une autre amie, j'ai enlevé mes alliances (la sienne et la mienne que j'avais fait soudées par le bijoutier). Les personnes qui m'ont conseillées m'aiment, et ont été témoins de mon anéantissement, Je suis contente d'avoir choisi de faire ainsi.  C'est mon histoire et elle m'appartient. J'ai ouvert une autre page, une nouvelle histoire. Je suis amoureuse aujourd'hui de cet être qui a su me remettre dans la vie, quelqu'un d'exceptionnel. Néanmoins, depuis cet automne je suis aussi submergée par le chagrin, le manque de l'amour de ma vie, les souvenirs de cet accompagnement, il y a deux ans.  Mon  "amoureux" est extra sensible et sensoriel et ressent ma douleur même non exprimée et en souffre dans toute son impuissance.  Depuis quelques jours je parviens à penser à l'autre et moins à moi et à m'imposer d'accepter ces moments heureux afin d'éloigner cette tristesse qui m'envahit, nous envahit. Aujourd'hui, je n'ai aucun signe extérieur d'un lien indéfectible avec mon mari et dans la maison non plus. Et pourtant, c'est l'amour de ma vie,  et notre maison, c'est la sienne, que nous avons construite petit à petit,  une maison à notre idée, notre antre ; chaque endroit, chaque pierre du jardin, chaque arbre .... c'est lui. Moi je le sais, mais pas cette personne que j'ai rencontrée... Et ça me va très bien ! C'est moi choix, Alex.
Chacun fait comme il veut, et comme il peut.
Je souhaite que tu trouves la voix qui te convienne et te permette d'accéder à des moments ..... de félicité.
Une pensée pour vous tous.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 25 novembre 2017 à 00:28:29
Merci Noëlle, merci Alexandra pour vos témoignages, pour vos partages
ce n'est pas facile d'en parler et vous le faites
ça me fait du bien de vous lire

je vous embrasse tendrement
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 11 décembre 2017 à 10:48:18
Mon Tom,
Aujourd’hui tu aurais du avoir 30 ans. J’ai décidé de te laisser partir, malgré la peine, malgré la colère, j’ai décidé de te laisser partir. Parce que tu es là partout dans chaque morceau de moi, parce que je ne veux pas retenir un fantôme mais les bribes de toi vivant qui m’ont faites moi vivante. Oui aujourd’hui tu aurais du avoir 30 ans et ça nous faisait marrer, c’était l’âge fatidique, celui à partir duquel on serait vieux. Mais toi tu ne seras jamais vieux mon Amour, et ça ne me fait plus du tout marrer. Alors aujourd’hui je veux te faire une promesse, je veux te promettre d’essayer de toutes mes forces de laisser partir ce qui est mort de toi, et ce qui est mort de moi avec toi, et de faire vivre ce qu’il reste de vivant. Pour que chaque parcelle de toi qu’il me reste donne du sens à d’autres vies comme tu avais donné du sens à la mienne. Pour que tu sois là toujours dans chacun de mes gestes, avec ta douceur et ta force, et tout l’amour que j’ai appris avec toi. Je t’en fais la promesse mon Amour. Je t’aime.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Mononoké le 11 décembre 2017 à 16:42:12
Alexandra,
leur anniversaire est une date si particulière
je t'entoure de toute mon affection
tendrement
Mononoké
Titre: Re : En décalage
Posté par: Stana le 14 décembre 2017 à 15:12:31
  C'est trés beau ce que tu dis à ton Tom Alexandra  :-* oh oui, comme dit Mononoké, les dates des anniversaires, ou de ce qui auraient dû être les anniversaires, de nos amours sont toujours particuliers. Ils peuvent provoquer en nous des réactions positives, négatives ou contradictoires en apparence. Ce n'est en tout cas jamais anodin  :( :) je pense trés fort à toi  :-*
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 29 décembre 2017 à 10:05:52
La phase de l’arc-en-ciel… Un jour oui, le lendemain non. Une seconde pluie, la suivante soleil. Je suis dans un entre-deux, trop douloureux. Une deuxième fois une année de plus va commencer sans toi, ça fait mal. Ton père a un nodule sur la thyroïde, pas malin, mais énorme. Et tes parents continuent dans le déni, il leur a fallu un mois pour le dire à ta sœur puis à moi. Ils n’ont pas appris du déni quand ils ne sont pas venus te voir tout de suite. Je suis triste ces jours-ci, tu me manques horriblement et je ne peux pas en parler à cet homme qui partage ma vie depuis quelques semaines. J’ai fait ce choix-là, de cloisonner, je me sens polygame et j’ai peur d’être obligée de te quitter pour vivre ça. Je ne peux pas m’y résoudre, je ne veux pas.

Il y a plein de bouquins sur le deuil mais personne qui nous explique comment on gère la phase de l’arc-en-ciel. On nous dit juste qu’il faut ne pas se sentir coupable et débrouille toi avec ça. Je ne me sens pas coupable pour une fois, pas pour ça. Juste paumée, dans un trop plein d’émotions entre aller mieux et souffrir encore monstrueusement. Et je ne sais pas comment le gérer, les crises de larmes et de désespoir, le manque de toi, sa présence à lui qui est un cadeau inespéré, le besoin qu’il y ait encore notre histoire à toi et moi à laquelle je ne veux pas qu’il ait accès. Je lui ai fait de la peine en le lui disant, je devais le faire, mais je lui ai fait de la peine.

Je suis complètement paumée et ces saloperies de fêtes n’arrangent rien. Noël sans toi, une deuxième fois, tu m’as manqué, je n’ai parlé que de toi. Dimanche soir qui arrive et moi je n’arrive pas à savoir si j’ai envie d’être seule ou de rejoindre mes amis. L’année dernière, j’ai refusé d’y aller, c’était vraiment trop tôt. Là je ne sais pas, je suis partagée. Être en sécurité avec ceux qui m’ont accompagnée mais aussi revoir ce dont je n’ai pas eu de nouvelles depuis ta mort. Minuit sans t’embrasser, les « bonne année » que je n’ai pas envie d’entendre, faire la « fête » alors que je hais ce symbole du temps qui passe et qui m’éloigne de toi.

Je crois que je suis tellement dans un trop plein émotionnel que j’ai des flash de souvenirs atroces. Hier, je n’y avais pas repensé depuis tout ce temps, je nous ai revus dans l’ambulance qui t’emmenait à l’hôpital quand ton corps nous a lâchés. C’est trop tout ça, trop d’émotions positives comme négatives, j’y arrive pas avec cet arc-en-ciel. Tu me manques, je suis de nouveau en colère contre toi de m’obliger à tout recommencer à zéro sans toi, y compris le fait d’avoir quelqu’un dans ma vie, aussi merveilleux qu’il soit avec moi. Tu me manques mon Amour, je ne sais pas si je vais y arriver.
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 29 décembre 2017 à 14:39:17
Tu as raison Alexandra on ne nous dit pas comment faire ....
De plus cela semble tabou.
Je ne suis pas dans le même type d'expérience que toi. Ce serait bien que des anciens du forum passé par là témoignent.
Je sais que si ce type de période vient pour moi, je solliciterai plus ma psy ...
Prendre un peu de distance avec le trop d'émotions paradoxales en faisant la méditation des émotions de Christophe André ? (Voir dans boîte à outils).
Comment accepter cette dissosiation en soi que tu vis ? En acceptant de ne plus pouvoir fonctionner comme avant avec authenticité permanente avec une part toujours secrète ... Sans doute.
Ici tu peux t' epencher.
Reçois mes affectueuses pensées
Titre: Re : En décalage
Posté par: Anneso85 le 29 décembre 2017 à 17:38:59
Alexandra,
La phase de l'arc en ciel... c'est joliment dit... peut-être trop joli par rapport à ce a quoi ça renvoie  ;) comme toi et comme beaucoup ici je vois exactement de quoi tu parles et moi aussi je trouve ça épuisant ces montagnes russes émotionnelles et la gestion d'émotions contradictoires en simultané.
J'ai été galement beaucoup de mal à gérer cette dissociation permanente et l'impression de n'être jamais réellement fidèle à comment je suis réellement au fond de moi. Me laisser embarquer par les énergies positives de mes filles et par ma volonté d'avancer mais pourtant l'instant d'après me reprendre la réalité de l'absence  de mon Amour en pleine figure...
C'est la première fois que j'en parle ici, j'ai plusieurs fois eu envie de partager mais ne savais pas trop quoi dire... J'ai moi aussi une histoire avec un autre homme depuis quelques temps. Je n'ai pas de sentiment de culpabilité et, bien consciente de la nécessité de profiter de ce qu'offre la vie, je ne me pose pas de question. Mais, par ma faute certainement, ça n'a rien de la légèreté d'une histoire naissante. Volonté de cloisonner, de vivre autre chose qui soit très différent et non comparable? Probablement ! Mais je crois surtout que je suis incapable de me projeter, ni avec lui, ni avec personne d'ailleurs... Je suis trop habituée à vivre au jour le jour, et, pour tenir le coup, à  ne faire qu'un petit pas après l'autre.
Pas d'une grande aide, navrée...
Je t'embrasse
Prends soin de toi
Anne-Sophie
PS ca fait plusieurs fois que je voulais te l'écrire : je me reconnais tellement dans le titre de ton fi, c'est le reflet de mon état depuis maintenant plus de 2 ans (et même des presque 2 ans de maladie qui ont précédé aussi)
Titre: Re : En décalage
Posté par: Stana le 11 janvier 2018 à 22:01:27
  C'est très beau en effet, cette métaphore de l'arc-en-ciel, ça me parle et me touche beaucoup  :( :) oui, c'est exactement ça. Je n'y avais jamais pensé, mais c'est tellement évident! Nous avons tous des hauts et des bas, et lorsqu'une èclaircie, plus ou moins prolongée, survient, après toute cette pluie, il doit y avoir un arc-en-ciel symbolique  :)
  Je suis sûre que quoiqu'il arrive dans ta vie, il aura toujours une place à part dans ton cœur, une place importante, et qu'il n'y a aucun mal à cela si tu le vis bien.
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 12 janvier 2018 à 10:47:35
Un peu plus de soleil et moins de pluie ces jours-ci mais la pluie n'est jamais loin... Je fatigue de ce marathon du deuil, j'ai du mal à me reconnaitre aussi. Des mois entiers ont passé depuis cette amputation du cœur, celui qu'on m'a "greffé" à la place est encore fragile, il bat moins fort que celui que j'avais avant.

J'ai du mal à savoir si je peux écrire ça ici, au milieu de celles et ceux d'entre vous qui commencent à peine avec le chagrin. J'ai peur de heurter et à la fois j'ai envie de lever le tabou sur cette autre étape du deuil. Pas dans la partie "après la grande souffrance, la reconstruction" parce que ce n'est pas si linéaire, il y a en parallèle la "grande souffrance" et autre chose que je ne peux pas appeler de la "reconstruction". Une autre personne qui émerge, pas tout à fait différente d'avant, mais plus vraiment la même. Et en ce moment, cette étrange polygamie avec le fantôme de l'homme que j'aime et un homme bien vivant pour lequel je ressens des choses, mais en sourdine, comme des pas étouffés sur la neige.

Peut-être que c'est une étape à traverser seule, un de ces milliers de décalage vécus depuis que Tom n'est plus là. Décalage avec les autres, décalage avec notre vie d'avant, décalage avec ma famille, décalage avec la vie que je voulais et qui ne veut plus dire grand chose, décalage avec qui j'étais, décalage intérieur entre le deuil et cet "autre chose" qui émerge. Des milliers de décalages et des milliers d'arcs-en-ciel.

J'ai acheté des feutres et des coloriages, je tente l'art thérapie (peut-être un autre outil à glisser dans la boite ?) pour colorier mes arcs-en-ciel. J'aimerais bien découvrir de quelle couleur je vais être faite maintenant, jaune lumineux comme Tom, rouge amour ou rouge colère, vert comme l'espoir ou verte de rage, bleue de trouille ou bleu calme océan tropical ? J'aimerais bien oui. Que la greffe de cœur prenne aussi, j'aimerais bien.

Une pensée pour vous toutes et vous tous, pour toutes celles et tous ceux qui nous manquent,
Alex
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 12 janvier 2018 à 13:50:18
merci chère Alexandra de témoigner ici
quand tu veux tu iras témoigner sur le fil boite à outils de l'art thérapie comme tu vas l’utiliser
tu es en apprentissage dans cette nouvelle tranche de vie, il faut sans doute du temps pour apprendre
bien affectueusement
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 02 mars 2018 à 15:26:54
Mon amour,
Parfois j'ai encore mal sans raison. Parfois comme cet après-midi, je dois pousser la porte de mon bureau, j'ai besoin de t'écrire et de pleurer. Parfois comme hier soir, je pense que je vais te raconter quelque chose et je m'étonne de me tromper encore, oui tu es bien mort. J'ai peur d'être brisée définitivement, quelques mois et ça fera deux ans, ça m'obsède, ça m'angoisse. C'est tellement dur, je ne comprends pas pourquoi je suis obligée de vivre tout ça sans toi.

Je mène en parallèle ton absence et une histoire qui ne serait pas possible si tu étais encore là, déconnectée entre deux réalités qui ne se superposent pas, perdue entre ton absence et sa présence. Tu me manques encore tellement, j'essaie d'apprendre à revivre à ses côtés et à le laisser m'aimer. J'essaie de ne pas être en colère contre toi pour le chagrin qui ne me lâche pas, comme si tu m'empêchais de reprendre mon souffle. J'essaie de ne pas être en colère contre lui pour son envie que j'aille mieux, comme s'il cherchait à m'obliger à te laisser derrière moi.

J'essaie d'avoir le cœur assez grand pour deux, j'essaie de tenir ma promesse de continuer à porter nos rêves, j'essaie de ne plus refuser de vivre pour ne plus souffrir. C'est tellement difficile, si tu savais comme c'est difficile... Et si tu savais comme je t'aime et combien tu me manques...
Titre: Re : En décalage
Posté par: souci le 02 mars 2018 à 17:17:12

   Avoir le cœur assez grand pour deux,
   bravo Alexandra,
   tu as trouvé,
   ce que tu donnes à l'un n'enlève rien à l'autre ...
   Ce que tu reçois encore, même par le manque, de ton amour disparu s'additionne à ce que tu acceptes de recevoir de ton nouvel ami ...
   Et n'en vouloir ni à toi ni à personne parce que c'est comme ça ...
   Tendrement, Martine.
   
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 03 mars 2018 à 21:21:40
Alexandra
ce chemin est difficile encore merci à toi d'en parler car il serait facile d'ignorer ce type de difficultés
puisses tu trouver apaisement le plus vite possible
apaisement sans oubli, avec une douleur qui s'estompe, se transforme ...
affectueusement
Titre: Re : En décalage
Posté par: loma le 05 mars 2018 à 20:14:22
 "J'essaie de ne pas être en colère contre lui pour son envie que j'aille mieux, comme s'il cherchait à m'obliger à te laisser derrière moi. "

Alexandra, puis je te suggérer une autre façon de voir les choses ? Les hommes souvent cherchent toujours à tout réparer, le robinet qui fuit, la clôture cassée, le moteur de la machine à café ...  Et quand il s'agit d'un coeur brisé, c'est pareil, ils essaient de recoller les morceaux, de le réparer. Ne pas y parvenir, c'est un échec pour eux, une remise en cause de leur raison d'être, ils ont failli à leur mission de "super héros".
Quand tu sens une tension dans son attitude, c'est peut être cela, il s'en veut à lui même de ne savoir comment "réparer" tes sentiments.

J'espère que tu trouveras ton équilibre. Je te propose un peu de lecture, un rare témoignage sur plusieurs années d'une veuve qui a rencontré quelqu'un :
http://psychologie.aufeminin.com/forum/veuve-apres-24-ans-de-bonheur-fd2667063
tendrement
loma
Titre: Re : En décalage
Posté par: Alexandra le 06 mars 2018 à 10:29:18
Merci Martine, Qiguan, Loma.

Loma, j'ai lu cette histoire, merci. Les questions sont les mêmes, comme pour le début du deuil, c'est rassurant de savoir que pour cette étape là non plus, je ne suis pas plus zinzin qu'une autre.

Et bien sûr, tu as raison, il y a le syndrome du super-héros. Mêlé à une forme d'angoisse de sa part que rien ne soit possible parce que j'aime Tom, dans une peur irrationnelle qu'il y ait une compétition entre eux alors que Tom est mort. Et ça me coûte de l'écrire mais moi je sais que ça veut dire que techniquement, c'est fini, il n'y a pas de retour en arrière possible. J'ai du expliquer à celui qui partage ma vie maintenant qu'il n'y avait pas de compétition, parce que Tom est mort, que je le sais, et que lui est bien vivant. Terrible discussion pour commencer à vivre quelque chose ensemble.

Et c'est terrible de constater que j'ai admis que Tom était irrémédiablement mort et que malgré toutes les étapes, malgré la colère et la culpabilité qui s'effacent, malgré la maison que j'ai enfin trouvée et dont la recherche m'avait donné une raison de m'accrocher, malgré la greffe de cœur symbolique qui semble prendre parce qu'aujourd'hui je peux aimer Tom tout en aimant un autre autre, malgré tout ça j'ai toujours aussi mal. Moins souvent mais toujours aussi fort. C'est terrible et angoissant.

Tendrement à tous-tes,
Alex
Titre: Re : En décalage
Posté par: Eric38 le 06 mars 2018 à 11:02:46
Merci Alexandra pour partager tes ressentis.
Ce n'est pas forcément encourageant, mais c'est précieux d'avoir un témoignage sincère sur ces questions là.

Amicalement à toutes et tous.
Titre: Re : En décalage
Posté par: qiguan le 06 mars 2018 à 14:41:16
oui merci Alexandra  :-*
le temps semble diminuer le nombre de tempêtes ... et se donner l'autorisation de vivre des choses dans le monde des vivants va sans doute créer de nouveaux souvenirs et de nouvelles habitudes, de nouvelles imprégnations et un épanouissement d'une autre part de toi et en même temps tu continueras à aimer Tom ! bien sûr !