Chers tous,
Je voudrais juste vous apporter mon humble témoignage.
Tout d’abord, j’ai trouvé sur ce forum le réconfort … et une façon d’avancer sans me sentir absolument seule. C’est précieux. Vous m’êtes si précieux …
En écho au post de Yohann qui a initié ce fil…
J’ai vécu il y a 10 jours, le jour J+1 an. Terrible épreuve.
Impossible de penser, de croire, que j’ai tout fait et bien.
Juste impossible. Mais n’avons-nous pas tout fait quand nous avons fait le mieux possible, avec nos maigres moyens, mais avec tout notre cœur. Même si nous n’avons pas vu, pas entendu, pas compris ou pas voulu voir, entendre, comprendre. Pour ma part, je suis sûre que j’aurais de quoi faire un procès pour non accompagnement d’un mourant. Maintenant, à quoi ça sert ? Ça pourrait servir aux autres … c’est pourquoi j’ai écrit à la direction de l’établissement où mon mari séjournait. Je n’ai pas eu de réponse, bien entendu. Au moins, même si c’était trop tard, j’ai dit ce que je pensais, j’ai « accusé » le système (pas une personne en particulier, c’est ce qui rend la situation encore plus délicate). Et je pense que mon mari serait fier de moi de l’avoir fait.
N’empêche … Je refuse et je refuserai toujours de considérer que je n’ai pas voulu voir, ni entendre ni comprendre. Trop facile pour le corps médical !
Ceci étant dit, que faire de tout ça ? Que faire maintenant ? La souffrance est toujours là. Peut-être d’une intensité moindre. Au moins par moment.
Depuis « longtemps », j’ai l’impression d’être dans un ascenseur incontrôlé qui me fait passer d’une étape à l’autre. Si bien que je me libère puis je dégringole puis je vais mieux puis ça empire. Et je suis dans ce cercle infernal, cette spirale sans fin … Ce n’est pas linéaire du tout ! Et les contradictions sont telles par moment … Je ne remets pas en cause l’approche « Fauré ». C’est un bon cadre. Ça permet d’avancer. Mais j’ai l’impression qu’il y a plein de variantes. J’espère ! Sinon, ça voudrait dire que je n’ai quasi pas démarré le travail ! Alors que je me sens tellement usée.
Je constate qu’un an après, j’ai réussi à me fracturer une phalange, me fouler un genou et me faire une vilaine entorse à la cheville. Et je tousse … sans avoir ni rhume ni pharyngite ni bronchite … Si ca ne veut rien dire !!! J’ai gagné quelques certitudes, ou plutôt une conviction : je ne pourrai pas recommencer ; je ne pourrai jamais revivre ni la beauté de notre amour, ni les derniers jours, ni les dernières heures, ni rien corriger … Le lâcher-prise, que le psy a évoqué une seule fois, je ne sais toujours pas ce que c’est. J’ai essayé d’en trouver une définition pour pouvoir prendre cette voie. Je crois qu’on l’emprunte tout de même sans le savoir. Alors peut-être qu’en écrivant « je ne pourrai jamais revivre (…) les derniers jours, ni les dernière heures, ni rien corriger », c’est une façon de lâcher-prise. Sinon, je pédale à l’envers … ce qui, sur certains vélos, sert juste à freiner … et donc à s’arrêter net.
Il est avec moi, l’Ange de ma vie. Il ne reviendra pas mais il est toujours là. Je lui chante toujours sa petite chanson, le soir, en me couchant. Parfois je fonds en larmes, parfois je suis juste heureuse d’avoir pu la lui chanter. J’ai parfois l’impression d’oublier le meilleur quand je cherche à me défaire du trop plein de douleur. Pourtant, même s’il faut que je me raccroche à une photo, une musique, un visage, …, il est bien en moi.
Le quotidien reste un combat. Ça aussi, c’est douloureux car en complet désaccord avec mon être, mes sentiments, mon moi profond. Le métronome de la vie qui passe, de ce quotidien, est inadapté à ma vie intérieure. Ça me donne l’impression d’être « en morceaux », d’être écartelée entre deux extrêmes. Douleur. Combat qui me semble perdu d’avance car je ne suis pas armée. Je suis même complètement désarmée. J’ai des sursauts d’énergie. Tout de même. Je pense à Jean-Louis qui m’avait dit : « Tu crois que la vie est pas un long fleuve tranquille ! Mais non. Il faut te battre. Toujours ». Il avait raison.
Alors je n’ai plus qu’à mener ce combat du quotidien. Je ne parviens pas à penser à demain. Quand, à l’approche de la date « anniversaire » du décès de Jean-Louis, l’une de mes belles-filles m’a dit : que vas-tu faire à Noël ? Tu vas chez tes parents ? Je me suis trouvée sans voix, arrêt total de mes neurones ! Alors inutile d’y penser. L’an dernier, pour Noël, j’ai acheté un sapin. J’ai fait l’aller-retour en voiture (1200 km dans la journée) jusqu’à sa tombe pour l’y déposer. Rien d’autre.
Bien affectueusement
Angela