FORUM "LES MOTS DU DEUIL"
Comprendre et vivre son deuil => Vivre le deuil de son conjoint => Discussion démarrée par: Yohann le 24 octobre 2012 à 18:42:02
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Bonjour,
Plus d'un an a passé maintenant.
Souvenez-vous de ce travail de deuil défini par C. Fauré : sans cesse faire ressortir les souvenirs, en parler, les exprimer ... et avec eux, faire apparaître l'émotion liée. Ces fameuses crises de larmes de début de deuil (pas que début d'ailleurs !) dès que la pensée se tournait vers l'amour disparu.
Avec pour objectif d'accompagner le processus de deuil par un travail de sape des émotions : tant et tant répétées qu'alors, elles finiraient par s'user !
Les souvenirs eux aussi ramenés en surface, restent par contre bien ancrés en nous, mais, en partie détachés de l'émotion qu'ils faisaient naître, ils deviennent dans un premier temps acceptables, puis doux !
Et il prend, rappelez-vous l'exemple d'un livre émotionnellement fort, si fort même que les larmes coulent en le lisant.
Ce livre, lu, relu, garde toujours sa belle histoire si émouvante, rien n'y a été changé, pas même une virgule et pourtant, il ne génère plus chez nous que beauté, mais plus de trace de larmes : l'émotion a été apprivoisée !
Beau schéma d'évolution du processus qui nous conduit du drame au vivable !
Vision idéalisée du deuil ou réalité ?
Qu'en est-il pour moi, après plus d'un an de ce traitement, que je me suis infligé, jour après jour ?
Que sont devenus ces souvenirs si larmoyants, cette douleur lancinante, ces angoisses ou peurs si brutales ?
Et surtout, le rappel de ces souvenirs laisse-t-il de côté ces fameuses émotions négatives, si dures à vivre ?
Le schéma décrit a-t-il bien donné le résultat que j'attendais ?
J'ai hélas parfois la sensation que ce sont les souvenirs qui s'estompent et qu'il me faut souvent avoir des rappels étayés par des photos pour qu'ils acceptent de resurgir.
Tout semble s'être effacé de ma mémoire pour n'être plus qu'un vague flou, effrayant tant il donne la sensation d'un grand vide, d'une grande solitude : plus rien ni personne !
Les émotions demeurent mais ont évolué.
La violence désespérée s'est amoindrie, mais l'émotion est bien présente et pas forcément douce.
Le point le plus important pour moi est le facteur de déclenchement de ces émotions qui s'est déplacé.
Avant, la réaction était simple sinon basique : une photo, un propos, un souvenir générait une émotion qui ne pouvait guère se maîtriser.
Maintenant, c'est une sensation bizarre d'inversion du processus : une émotion parfois violente vient brusquement m'envahir sans trop de raisons ... et alors, le souvenir apparaît !
Même des activités qui auparavant étaient un facteur d'apport de calme déclenchent des émotions si fortes que les larmes jaillissent !
Jusqu'où faut-il donc pousser, poursuivre les souvenirs pour que les émotions se tarissent et ne viennent plus me hanter ?
Ce sentiment de culpabilité qui m'habitait et duquel j'avais dit un jour qu'il s'était transformé en regret revient lui aussi au galop !
Pourquoi, alors que le temps a passé, ce sentiment si blessant, rongeant réapparaît-il maintenant, comme si le pardon était impossible ?
Crier, demander pardon ?
Mais de quoi et à qui, si plus personne n'est là pour entendre ?
Le vide !
Rien ne vient calmer en écho cette douloureuse culpabilité nourrie par la mort : n'avoir pas su, n'avoir rien dit, avoir été impuissant pour justifier la confiance accordée ...
Pourquoi tout resurgit-il ?
:'(
Yohann
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Cher Yohann
Même si pour moi cela ne fait que 2 mois que mon Étienne est parti , je comprend tes questions, je crois que jamais on pourra s'arrêter de s'en poser même si on arrive de temps en temps a avancer les émotions resurgiront toujours ...
Tu as raison les émotions sont toujours la mais elles évoluent , même si tu as l'impression que tous les souvenirs s'efface je pense que c'est juste ton évolution qui fait ça mais au fond ils sont toujours la et ne te quitteront jamais .
Je ne trouve pas les mots pour t'aider , mais sache que j'ai de gros pensée pour toi .
Je t'envoie pleins de tendresse et de réconfort
Marika
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bonsoir johann
ce jour cela fait un an que mon mari est parti, je suis dans le même état d'esprit que vous, les mêmes questions
et la douleur est toujours aussi intense, les souvenirs reviennent sans cesse, je me suis rendue dans des endroits
où j'étais allée avec lui la dernière fois, cela fut très difficile, et aujourd'hui je suis très seule, tout le monde a repris
sa vie d'avant, même ma fille, je n'arrive plus à communiquer avec elle, elle ne va pratiquement jamais au cimetière et pour
les fleurs, rarement, pourtant son père a tant fait pour elle, il ne me reste que ma petite fille de 6 ans avec qui chaque jour
on parle de son papou, je trouve que le chemin est long long pour retrouver un peu de lumière
je nous souhaite ainsi qu'a tous beaucoup de courage pour continuer, mais dieu que c'est difficile,
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Bonsoir à vous,
j'interviens sur de fil bien que je n'aie pas perdu mon mari ou compagnon, mais mon unique soeur il y a plus de 14 mois. Tout comme beaucoup d'entre vous, j'ai usé mon chagrin à penser à elle, évoquer de bons souvenirs, des terribles comme sa longue agonie…J'ai pleuré, pleuré, puis les larmes se sont espacées. Et depuis quelque temps, c'est un état de tristesse profond et durable qui s'empare de moi, malgré mon désir de vouloir continuer à profiter de la vie. Cet état s'est abattu sur moi, comme au mois de juin, avec une incroyable impression de régression. Je me suis inscrite sur ce forum début juillet, y ai trouvé du réconfort, en ai donné, et à nouveau, je suis attaquée par des vagues de tristesse même pas déclenchées par un souvenir particulier. C'est comme si j'entrais en dépression, et ça me fait peur. Comme si j'avais réussi à tenir le coup, mais que je m'étais menti à moi-même. Et que maintenant, je devais prendre toute la teneur de la réalité de la mort de ma soeur. J'ai vu un médecin cet après-midi pour ma fille cadette qui souffre de scoliose, et je lui ai fait part de notre deuil. Il m'a demandé de m'allonger sur la table, m'a piqué l'oreille à deux reprises et m'a dit "maintenant, regarde le ciel, et laisse partir ta soeur". J'ai sangloté devant ma fille qui s'est mise à pleurer à son tour. Ca a été une séance très dure mais nécessaire, je pense. Nous avançons, régressons, avançons, régressons, jusqu'à ce que les épisodes de régression s'espacent. Une chose est certaine, pour nous en sortir, nous devons vivre pleinement ces épisodes douloureux où nous avons l'impression que nous ne nous en sortirons jamais. Ne nous voilons pas la face, et n'étouffons pas nos défunts avec notre chagrin. Cet après-midi, pour la première fois, j'ai réalisé que je pouvais nuire à ma soeur, l'empêcher d'évoluer dans une autre dimension, parce que je ne supporte pas sa mort. J'espère que je l'ai libérée, et que je me suis un peu libérée aussi.
Voilà ce que je voulais partager avec vous. Bon courage dans votre cheminement vers l'apaisement,
Madâme
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Bonjour Yohann,
Ton message m'a bouleversée !
Lire que malgré ton application à user ta souffrance, tu as l'impression aujourd'hui de ne pas avancer... Quel constat ! Nos efforts sont ils donc vains ?
Tu dis "jusqu'où faut il pousser les souvenirs ?". Et si tu t'accordais une pause dans cette poursuite ? Si tu les laissais venir à toi, comme ils le font en ce moment, même de cette façon qui te semble illogique puisqu'ils sont précédés par une émotion forte ? Nous voilà revenus sur ce fameux "lâcher prise".
Nous savons que le chemin est long à parcourir, tu nous en montres la pénibilité, les incessants retour en arrière, et ta culpabilité ou tes regrets ne sont pas faits pour rendre ce chemin linéaire et prévisible.
Je ne peux que te comprendre, t'envoyer ma force, ma tendresse et mon espoir dans une vie apaisée.
A bientôt Yohann, mille baisers pour toi
Cathy
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Bonjour Yohann,
La mort de son conjoint représente probablement l'expérience la plus dévastatrice que nous puissions connaître.
Après 4 mois de douleur, j'imagine le chemin de croix qu'il me reste à faire .
Courage mon ami.
Charly.
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Bonjour Yohann,
Tu décris parfaitement tous ces ressentis que nous éprouvons le suns et les autres.
User la soufrance, jusqu'à ne plus la ressentir, et ne garder que les bons moments et souvenirs partagés avec notre Amour.
Pour ma part, j'en suis incapable. Je ne sais par quel bout commencer.
Toutes ces journées de souffrances subies par Claudine, je n'arrive pas à les chasser de ma mèmoire. Bien sûr, il n'y a que 20 semaines qu'elle n'est plus présente à mes yeux, mais comment user une telle haine de la maladie, de ces médecins bardés de diplômes et dans l'impossibilité de soigner une pathologie (cancer du sein) soi disant guérissable. Oui je leur en veux, et il m'est
incroyablement difficile de leur pardonner leur incompétence.
J'ai besoin de supports pour faire ressurgir des souvenirs, et parfois, une pensée fugitive me mets dans un état pitoyable.
Je ne sais si la méthode du Dr Fauré est la bonne, mais ce que j'espère, c'est qu'elle nous mène en bon état au bout de ce long chemin qu'est notre deuil.
Pousser les souvenirs? En avons nous réellement envie, car ce ne sont je pense que les tristes qui jaillissent en premier.
Pour les bons moments passés c'est là qu'il nous faut un support. Une simple photo nous permet de revoir tout un épisode de notre vie heureuse et passionnée. La passion se nourrit et s'alimente de ces souvenirs enregistrés. La mèmoire seule ne peut se permettre de répertorier tout. Il lui faut un coup de main, genre manivelle pour faire démarrer le moteur de l'enregistrement. Une fois ce moteur lancé, alors oui nous nous souvenons de ce qu'il y a de meilleur, le moins bon est parfois occulté.
Je n'espère qu'une chose en ce jour, c'est d'être sur tes traces d'ici un an, et pouvoir me retourner pour vérifier ces lignes écrites parfois maladroitement mais toujours sincéres.
Amiti
Marcelés
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Yohann,
Oui, l'origine du mal est la même, sauf que dans le cas de Claudine, la rémission a durée 6 ans.
La récidive, en 2003, je pense la connaître: brouille avec sa soeur( en 2000), prise de partie dans cette facherie de la part de ses parents sans en connaîtrele pourquoi( nous le l'avons sû que bien plus tard, et en plus un mensongeéhonté), difficultés dans son travail dues à sa maladie(stress+dépression), et pour finir cancer du pancréas de sa mère décelé en octobre 2002. La suite je l'ai raconté, opération le 10 février 2003 pour analyse du ganglion, et ablation du sein le 14 (St Valentin le patron des amoureux ???).
Depuis cette date cela a été une lutte permanente, avec quelques périodes de répit jamais supérieures à 6 mois, chimios.....jusqu'à la découverte de métastases osseuses en 2008 sur pratiquement tout le corps. En 2010 métastases hépathiques, et toujours ce combat inégal. La fin le 4 juin à 14h00.
Ce n'est pas que je mette en cause les traitements, mais je mets en cause les médecins qui n'ont pas pris en compte lors de l'apparition des premières douleursles souffrances de Claudine. Elle a commencé à se plaindre de douleurs au tibia en 2007. Il a fallu attendre un an pour qu'elle passe une IRM. C'est peut être aussi de ma faute. J'aurais dû insister auprés du médecin traitant afin d'aller directement consulter un oncologue dans un centre Toulousain. Le retour en arrière est impossible, malheureusement, et j'assume, mais difficilement ce fait. Le destin a fait son oeuvre.
Je ne connais pas la façon de sortir de cette boucle souvenirs-émotions. Qui va user l'autre afin de se libèrer? il est certain que le temps estompe les uns et les autres, et pour ma part, j'ai peur que les souvenirs s'usent plus vite que les émotions, qui elles ne manquent pas de jaillir pour un mot, un geste qui marquent l'absence, une absence dont je ne peux me défaire.
Quant à lacher prise, cela signifie quoi? Je n'ai pas encore compris? Le deuil est peut être trop frais?
Je ne peux me résoudre à oublier toutes ces bonnes choses vécues ensemble (comme les mauvaises). Tout est l'ensemble de notre vie commune, et je ne lacherais rien, tant que je pourrais le retenir.
Comme le dis Marika, laissons faire la boucle, et attendons la mise sur orbite.
Amitiés
:-* :-*
Marcel
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Bonjour Yohann,
Très peu à dire, puisque je n'ai que peu de temps.
Seulement: un an, c'est peu. Ça fait juste un an que ta Monique est partie et le processus (la paix intérieure) prend plus de temps.
Tu es sur la bonne voie.
Le lâcher prise se pratique petit à petit. Commence par lâcher prise sur ce que tu peux (ça peut être un objet précieux, mais inutile). Tu comprendras que ce n'est pas un vain mot, que c'est une expérience physique. Après, c'est comme le vélo. On peut recommencer autant qu'on le veut. Pas facile, mais faisable.
Je pense à toi, à ton intelligence si vive, à ton aide précieuse, à tes mots, qui eux, ne sont pas vains, mais bienfaisants.
Caroline
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Yohann,
La premiére année est d'autant plus cruelle qu'on sait ou qu'on nous inculque que c'est un cap, c'est vrai que c'est le début du deuil silencieux, on ose moins en parler, mais il est bien là, il n'est pas encore fini...
Je me suis dit après la première année passée, qu'il n'y avait plus que moi qui avait souffert, que lui n'avait plus mal, et que je devrais arrêter de me repasser un film dans lequel je me disais que j'aurais dû faire cici ou celà et que au moment où ça c'est passé j'ai fait tout ce que j'ai pu en espérant que la mort n'arrive jamais et elle est arrivé à son heure très vite et par surprise comme presque toujours...
Encore de la patience Yohann, c'est vrai que c'est un cap quand même où doucement la sérénité et la paix va s'installer...L'oubli ne viendra pas..
J'entame le compte à rebours de la deuxième année, mais je ne suis plus seule..
C'est une belle histoire sans oublier Jacques, il est présent toujours parmi nous...
Plein de force et de tendresse pour passer ce cap...
Je t'embrasse
Pascale
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Cool yohann....
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il y a un an je n'y pensais pas non plus. Et il y a un mois, non plus,je ne le concevais même pas
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Bonsoir ,
je me joins à vous pour cette notion de lâcher prise , qui me fait beaucoup réfléchir en ce moment. J'ai l'impression ( c'est une impression le temps confirmera si c'est juste ou non)de commencer à le vivre,
lacher prise= accepter ce qui est, ce qu'on ne peut changer?
mais accepter d'une manière profonde et de l'ordre d'une expérience physique comme le dit justement Caroline et affective
cela s'impose à soi et tout semble clair. cela demande , il me semble, un travail authentique sur soi
Amicales pensées
Orchis
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Orchis,
Ta définition du "lacher prise" parait juste et réaliste.
Effectivement, on ne peut changer ce qui vient de nous arriver. Mais lacher les souvenirs, les sentiments envers cet être qui était notre double, comment le lacher, comment desserrer les doigts et lui dire, va je n'ai plus besoin de toi!!!
Pour ma part, encore bien loin de votre vécu, je ne suis pas certain d'y arriver, et je ne suis pas prêt d'arrêter de ramer.
J'ai pratiquement l'impression qu'il me faudrait ajouter des roulettes à mon vélo pour m'empêcher de tomber.
C'est vrai que pouvoir décider de ce que l'on veut est incommensurable. Peut être d'ici un an à compter de ce jour y arriverais je?
Merci tout de même pour ce qui pourraitb être LA SOLUTION du lacher prise.
:-* :-*
Marcel
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Hé, Yohann, tu me mets un sourire dans notre futur hiver :)
Lâcher prise est intérieur. C'est passer à autre chose pour quelques secondes, puis quelques minutes et se donner le droit d'y revenir. quand l'angoisse est trop grande, c'est se dire que la solution n'est pas pour aujourd'hui, peut-être demain... C'est comprendre qu'on n'a pas de pouvoir sur certaines situations.
Se donner le droit et même l'obligation de régresser. C'est ainsi qu'on avance, sans aucun doute.
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Je regrette tant de ne pas être en France le 17... J'envoie de quoi par la poste via Claire, j'espère que ça arrivera à temps.
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Pour les incursions sur le net, elles vont au rythme de mes venues à la bibliothèque municipale. Sinon, niet! Mais ma "purge" sera faite en décembre et en janvier, je payerai de nouveau pour un accès Internet. Ici, au Québec, le téléphone, le net sont beaucoup plus chers que chez vous.
Je t'embrasse, bon week-end.
Caro
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Bonjour Caroline et vous tous,
Merci Caroline pour ton message, c'est tout à fait juste et je pense que la route est bonne à suivre. Par moment il y aura des impasses mais nous devons continuer à rouler seul(e).
Cela me redonne de l'espoir lorsqu'un entre vous va un peu mieux,
Cordialement LILAS
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Merci Caroline pour ce message, ce fameux lâcher prise ! Ta définition me plaît bien, et à te lire, on pourrait presque penser que c'est facile.
En tout cas, ça me montre que je suis sur le bon chemin... mais qu'il y encore du boulot
Hier soir, j'ai rencontré une personne qui a perdu son mari il y a environ 4 ans. Elle m'a dit "tu verras, il y a un après, et cet après est très doux, il faut juste ne pas le perdre de vue".
Connaissant ce qu'elle a traversé, je ne peux qu'espérer.
Toutes mes amitiés
CAthy
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Bonjour Cathy,
Que tes réponses sont douces et pleines d'espoir.
Mais que le temps m'apparait long. Faudra t il attendre autant de temps que cela pour retrouver un peu de sérénité? :-\
Bien sûr, que nous reste t il donc à faire d'ici là? Attendre, attendre des jours meilleurs en espérant de toutes nos forces pouvoir arriver sur la terre ferme sans trop de dommages, et certainement nous nous engagerons sur des voies sans issues. ???
Nous devrons rebrousser chemin et prendre la bonne bifurcation, puisque notre chemin n'est pas rectiligne( Cela aurait été tout de même plus facile) ;)
Bonne journée à vous tous(tes). Tendres pensées.
:-* :-*
Marcel
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Cathy,
Oui, c’est vrai, il y a un « avant » et un « après ».
L’ "avant " nous le couvons du regard, le berçons de souvenirs, l’enjolivons s’il le faut, nous en servons de bouée de secours éventuellement, bref il est en nous à jamais.
L’ "après " est une grande question, une énorme peur, et pourtant, la personne que tu as rencontrée t’a clairement dit que cet " après " était doux " il faut juste ne pas le perdre de vue ". C’est une très belle formule.
Et c’est tellement vrai. Parvenir à vivre avec la douceur de l’ »avant » et la promesse de l’ "après ".
" Le deuil, c’est mettre le défunt " à sa juste place ". Pas trop loin, car il n’est pas possible de tourner la page, mais pas trop près non plus, car il faut parvenir à s’assumer en restant l’héritier de ce qui a été vécu ensemble. "
Marcel, rien, ni personne ne pourra attendre de nous que nous lâchions la main de notre Amour et lui disant : Va, je n’ai plus besoin de toi. En revanche, notre Amour a peut-être envie de nous dire : Va, tu n’as plus besoin de moi.
Le temps, encore lui, te permet de prendre conscience tout doucement dans la douleur, puis dans la douceur, que cet " après " existe et qu’il n’est pas une somme de jours qui vont s’accumuler dans la tristesse et l’obscurité. Cet " après ", tu peux le construire grâce à ton Amour fort de cet Amour et pour ton Amour.
Douce journée.
Marina
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Marina,
Tu as sans doute raison. Notre Amour nous dit va tu n'as plus besoin de moi, mais c'est trop dur à écouter encore pour l'instant.
Mon rêve de cette nuit, et la colère de Claudine ressentie, peuvent en être une partie de réponse.
Que faire? :-\
Bonne et douce journée.
:-* :-*
Marcel
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Chers tous,
Je voudrais juste vous apporter mon humble témoignage.
Tout d’abord, j’ai trouvé sur ce forum le réconfort … et une façon d’avancer sans me sentir absolument seule. C’est précieux. Vous m’êtes si précieux …
En écho au post de Yohann qui a initié ce fil…
J’ai vécu il y a 10 jours, le jour J+1 an. Terrible épreuve.
Impossible de penser, de croire, que j’ai tout fait et bien.
Juste impossible. Mais n’avons-nous pas tout fait quand nous avons fait le mieux possible, avec nos maigres moyens, mais avec tout notre cœur. Même si nous n’avons pas vu, pas entendu, pas compris ou pas voulu voir, entendre, comprendre. Pour ma part, je suis sûre que j’aurais de quoi faire un procès pour non accompagnement d’un mourant. Maintenant, à quoi ça sert ? Ça pourrait servir aux autres … c’est pourquoi j’ai écrit à la direction de l’établissement où mon mari séjournait. Je n’ai pas eu de réponse, bien entendu. Au moins, même si c’était trop tard, j’ai dit ce que je pensais, j’ai « accusé » le système (pas une personne en particulier, c’est ce qui rend la situation encore plus délicate). Et je pense que mon mari serait fier de moi de l’avoir fait.
N’empêche … Je refuse et je refuserai toujours de considérer que je n’ai pas voulu voir, ni entendre ni comprendre. Trop facile pour le corps médical !
Ceci étant dit, que faire de tout ça ? Que faire maintenant ? La souffrance est toujours là. Peut-être d’une intensité moindre. Au moins par moment.
Depuis « longtemps », j’ai l’impression d’être dans un ascenseur incontrôlé qui me fait passer d’une étape à l’autre. Si bien que je me libère puis je dégringole puis je vais mieux puis ça empire. Et je suis dans ce cercle infernal, cette spirale sans fin … Ce n’est pas linéaire du tout ! Et les contradictions sont telles par moment … Je ne remets pas en cause l’approche « Fauré ». C’est un bon cadre. Ça permet d’avancer. Mais j’ai l’impression qu’il y a plein de variantes. J’espère ! Sinon, ça voudrait dire que je n’ai quasi pas démarré le travail ! Alors que je me sens tellement usée.
Je constate qu’un an après, j’ai réussi à me fracturer une phalange, me fouler un genou et me faire une vilaine entorse à la cheville. Et je tousse … sans avoir ni rhume ni pharyngite ni bronchite … Si ca ne veut rien dire !!! J’ai gagné quelques certitudes, ou plutôt une conviction : je ne pourrai pas recommencer ; je ne pourrai jamais revivre ni la beauté de notre amour, ni les derniers jours, ni les dernières heures, ni rien corriger … Le lâcher-prise, que le psy a évoqué une seule fois, je ne sais toujours pas ce que c’est. J’ai essayé d’en trouver une définition pour pouvoir prendre cette voie. Je crois qu’on l’emprunte tout de même sans le savoir. Alors peut-être qu’en écrivant « je ne pourrai jamais revivre (…) les derniers jours, ni les dernière heures, ni rien corriger », c’est une façon de lâcher-prise. Sinon, je pédale à l’envers … ce qui, sur certains vélos, sert juste à freiner … et donc à s’arrêter net.
Il est avec moi, l’Ange de ma vie. Il ne reviendra pas mais il est toujours là. Je lui chante toujours sa petite chanson, le soir, en me couchant. Parfois je fonds en larmes, parfois je suis juste heureuse d’avoir pu la lui chanter. J’ai parfois l’impression d’oublier le meilleur quand je cherche à me défaire du trop plein de douleur. Pourtant, même s’il faut que je me raccroche à une photo, une musique, un visage, …, il est bien en moi.
Le quotidien reste un combat. Ça aussi, c’est douloureux car en complet désaccord avec mon être, mes sentiments, mon moi profond. Le métronome de la vie qui passe, de ce quotidien, est inadapté à ma vie intérieure. Ça me donne l’impression d’être « en morceaux », d’être écartelée entre deux extrêmes. Douleur. Combat qui me semble perdu d’avance car je ne suis pas armée. Je suis même complètement désarmée. J’ai des sursauts d’énergie. Tout de même. Je pense à Jean-Louis qui m’avait dit : « Tu crois que la vie est pas un long fleuve tranquille ! Mais non. Il faut te battre. Toujours ». Il avait raison.
Alors je n’ai plus qu’à mener ce combat du quotidien. Je ne parviens pas à penser à demain. Quand, à l’approche de la date « anniversaire » du décès de Jean-Louis, l’une de mes belles-filles m’a dit : que vas-tu faire à Noël ? Tu vas chez tes parents ? Je me suis trouvée sans voix, arrêt total de mes neurones ! Alors inutile d’y penser. L’an dernier, pour Noël, j’ai acheté un sapin. J’ai fait l’aller-retour en voiture (1200 km dans la journée) jusqu’à sa tombe pour l’y déposer. Rien d’autre.
Bien affectueusement
Angela
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Décider est le maître-mot pour le lâcher-prise. Au début, ça ne marche pas trop, mais à ce stade (Yohann), la décision est intérieure et oui, authentique. Décider veut dire "je le veux". Et détourner la tête (mentalement) et penser à sa respiration. Pour toi, faire tes séances d'hypnose, ton cyclisme. Chacun ses moyens, ses forces, ses faiblesses.
Moi, c'est en lisant des livres, en ne faisant rien, moi qui ait couru comme une poule pas de tête durant des années, qui ait été désespérée de la situation, qui ne contrôlait plus rien du tout de ma vie....
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Hé, Yohann, je viens de lire ton dernier mot assez rigolo. C'est une décision importante que d'arrêter Internet (pour quelques mois). J'étais toujours dessus et je "faisais" encore moins qu'aujourd'hui... Ça fait 15 ans que je suis sur le Net presque à tous les jours. Assez, c'est assez.
Je ne couperai jamais avec le net, mais j'espère de résister longtemps avant que le net ne revienne à la maison.
Ce qui est dommage, c'est que ça me faisait du bien de vous lire, j'avais l'impression d'avancer plus vite. Là, je dois me débrouiller plus seule, ce qui, je crois, est une étape nécessaire à mon bon rétablissement.
Moi, ça fait 2 ans et demi et je considère toujours comme inutile le décès de Lowell. Il aurait dû vivre, il avait à s'occuper de nous. Je vis plus facilement, c'est clair, je ne vis ressens plus de découragements trop intenses.
Je veux avoir le joie de vivre en moi, et je ne suis pas encore rendue à cette étape, alors, là, pas du tout!
Je vous embrasse tous,
Caroline
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Bonsoir,
je relis vos réponses , si mon intervention a pu faire du bien à certains d'entre vous , j'en suis heureuse,
le lâcher prise se manifeste à moi en toutes petites touches,ce n'est pas obligatoirement vouloir ou décider, là il me semble être dans le contrôle, le lâcher prise est tout le contraire, il s'impose à moi suite à un travail de réflexion et d'analyse de mes sentiments et de mes ressentis, je pense que j'y accède d'autant mieux que je mène un travail corporel qui demande à lacher avec les habitudes des mouvements et attituses acquis tout au long de la vie. Et c'est sans doute de l'ordre du ressenti de Yohann avec les séances d'hypnose.
Un exemple: accepter ce que l'on ne peut changer, c'est accepter de ne pouvoir agir à la place de ... et donc de mes enfants , accepter leur travail de deuil, qui est différent du mien
Et, tout d'un coup c'est limpide jusqu'au prochain ...
Bonne soirée
Orchis
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Bonsoir Pima,
C'est la première fois que je te lis, du moins je le pense. C'est vrai que je vais davantage sur le fil perdre un frère ou une soeur, puisque j'ai perdu ma soeur unique, je me sens davantage interpellée par ceux qui interviennent sur ce fil. Mais j'ai également discuté avec des mamans qui ont perdu leur enfant, ou des personnes qui ont perdu leur compagnon de vie. C'est juste que ta phrase "le deuil c'est mettre le défunt à sa juste place. Pas trop loin, car il n'est pas possible de tourner la page, mais pas trop près non plus, car il faut parvenir à s'assumer en restant l'héritier de ce qui a été vécu ensemble". . C'est justement ce qui résonne en moi depuis la mort de ma soeur il y a 14 mois, après celles de ma mère, puis de mon père. Je suis l'héritière de ma première famille, le seul témoin de nos rires, de nos larmes, de notre amour. Et effectivement comment être l'héritier, si l'on nage dans le chagrin et ressasse uniquement les moments qui ont précédé et suivi la mort? Je suis à un tournant. Je réalise pleinement que je serai à nouveau capable de vivre pleinement lorsque j'aurai lâché prise, comme tu le dis accepté l'inacceptable comme faisant partie de la vie, de ma vie.
Je remercie mon instinct d'être venue te lire ce soir, après un we où j'ai justement voulu vivre heureuse malgré la mort de ma soeur, où j'ai voulu revenir à la vie, sans pour autant l'abandonner, mais en lui dédiant mes instants de bonheur.
Je te souhaite une belle soirée,
Madâme
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Bonjour Madâme,
Je suis heureuse que ce we se soit passé calmement pour toi et heureuse que mes lignes t’aient apporté un peu de paix aussi.
Cette phrase n’est pas de moi, mais d’une psy, Nadine… (j’ai oublié ! ) et je l’ai entendu dans une vidéo postée sur le site et que je vais chercher.
Elle m’a paru tellement vraie cette phrase ! Nous sommes héritiers de tant de choses, nous avons le devoir de les transmettre et de donner à notre tour, ce que nous avons reçu. C’est une belle mission.
J’ai une sœur à laquelle je suis plus que profondément attachée. Tout le monde a toujours cru que nous étions jumelles alors que 4 ans nous séparent.
Elle m’a sauvé la vie après le départ de Pierre, il y a 27 mois, elle m’a soutenu la tête hors de l’eau, m’a écouté pendant des heures raconter toujours les mêmes choses et poser toujours les mêmes questions.
Elle s'est occupé de toutes les démarches administratives, et des obsèques, exactement comme je l'aurais fait.
Elle avait toujours sur elle des paquets de mouchoirs qu’elle me tendait un à un, et quand j’étais anéantie et silencieuse, c’est elle qui parlait, doucement, et elle me disait toujours ce que je voulais entendre, exactement ce que je voulais entendre. Pas une fois, nous n’avons pas été sur la même longueur d’onde.
Elle a veillé sur mon sommeil, quand il m’écrasait et sur mes insomnies quand elles me tuaient.
Elle a surveillé mes médicaments.
Et cela, tout en gérant son propre chagrin d'avoir perdu un beau-frère qu'elle adorait.
Aujourd’hui encore, elle sait immédiatement à mon « Allo » si je vais bien ou non, et débarque chez moi, malgré les kilomètres à avaler, s’il le faut.
Aussi, je souffre avec toi, lorsque j’imagine que je pourrais la perdre.
C’est un deuil aussi cruel que celui d’un compagnon, je crois.
Je t’envoie mon amitié et te souhaite de continuer ce chemin vers le calme, avec la force de l'Amour de ceux qui sont partis.
Marina
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yohann,
sans nouvelles de toi depuis un moment, toi qui nous égayais chaque jour de tes messages.Je sais que ces derniers temps tu disais avoir du mal à te sentir à ta place aussi parmis nous.Ton cheminement personnel t aurai t il poussé à l eloignement ou bien est ce devenu trop difficile?
En ce matin froid et triste pour beaucoup, je voulais juste que tu saches que nous ne t oublions pas et que certains se font du soucis pour toi.
Tendres pensées
tiobob