Oui, Nathalie, tout est tellement dur, tout est tellement injuste.
Cet Amour qui vous unit, toi et ton mari, il nous unit aussi à nos compagnons, à nos compagnes. Un Amour si fort que l’on a presque l’impression d’être unique.
Malgré le chagrin de voir encore arriver de nouvelles détresses, de nouveaux désespoirs, je suis émue de constater que l’Amour vrai existe, celui qui passe avant tout, celui qui rend tout acceptable, supportable.
Oui, Nathalie, notre vie est dévastée, plus de repaires, plus de joie, plus de projets. Mais nous sommes vivant(e)s. Et parfois, les enfants nous obligent à le rester, parfois, c’est l’instinct de survie, parfois c’est… on ne sait pas quoi, mais nous sommes vivants.
Pour quoi ? Pour qui ? Eternelle question… Pour les enfants (toujours eux), pour ce que nous avons construit avec lui (ou elle) et qui ne doit pas disparaitre, pour faire un pied de nez à la faucheuse, pour transmettre notre amour qui nous a rendu fort(e), ne pas le garder, ne pas le mettre en cage, mais le distribuer à d’autres qui en manquent cruellement, pour qu’il (elle) soit fier(e) de nous... Il y a tant de raisons pour continuer à avancer sur ce chemin plein d’embûches et d’écueils.
Aucun de nous n’aurait imaginé raconter sa vie, sa douleur, son drame ainsi, sur la toile, devant un écran, à des inconnus. Et nous sommes là, à compter les uns sur les autres à attraper des mains tendues ou à aider ceux qui se laissent soudain couler dans la tempête. Heureusement le radeau est vaste, malheureusement nous sommes nombreux dessus.
Une chose nous réunie et nous fait oublier tout le reste, la profonde douleur de l’avoir perdu(e).
Des larmes, des flots de larmes, des peurs, des aveux, des regrets, des questions, …
Le repli sur soi, l’envie d’abandonner, le « pétage » de plomb, les médicaments, l’alcool, l’abandon des « amis » d’avant, de la famille qui ne comprend pas, la crainte des répercutions sur les enfants, le travail impossible à assurer, à trouver, le manque de concentration, le manque soudain d’argent, de toit, les problèmes administratifs…
Et aussi, les rapports à la foi, aux autres, aux psy, aux médecins, à la justice…
L’au-delà, la « présence », les signes, les rêves, le besoin de tout garder, de tout jeter, d’aller au cimetière ou de le fuir…
Nous abordons tous les sujets avec sincérité, honnêteté, franchise.
J’imagine qu’avant de venir ainsi nous rejoindre, tu as lu certains messages. Tu sais donc que nous sommes tous là par la volonté de quelques uns, quelques unes qui travaillent dans l’ombre à nous aider. Il y a les vidéos, les livres, les sites. Tout est important quand plus rien d’autre que sa douleur ne compte.
Mais je voudrais te donner un espoir avant de terminer.
Dans 17 jours, cela fera 2 ans que mon mari est parti. Cela a été cataclysmique pour moi, irréèl, inimaginable, inacceptable, le désespoir, l’horreur, la douleur physique, …
Je devais mourir, je n’avais plus d’oxygène, plus de raison de vivre.
J’ai survécue.
Je suis là, vivante et calme.
Pas heureuse, mais pourquoi pas un jour retrouver des petites joies et des petits bonheurs, puisque j’ai réussi à survivre, je dois bien pouvoir trouver un peu de sérénité dans ce monde.
Il faut du temps pour tout réapprendre, comme un handicapé privé d’un membre, d’un sens, voir autrement qu’avec les yeux, réapprendre le gout du sucre dans un gâteau, retrouver le petit plaisir d’un café bien chaud, en regardant le jardin, sourire en voyant des chatons faire des cabrioles, photographier les enfants qui savent bien mieux que nous le gout de la vie.
Je ne vais pas te dire que c’est facile, mais on peut y arriver.
Alors, reviens nous raconter, encore et encore.
Je t’embrasse.
Marina