en répondant sur une autre file je réalise que je ne peux pas être sans y penser
le plus souvent c'est avec moins de souffrance parfois sans même :
quand je sens sa présence ou avec des souvenirs heureux
aussi quand je suis avec notre petite fille
dans quelques conversations avec des ami(e)s (les actuels)
c'est toujours en toile de fond
je me demande d'ailleurs comment pourrais je faire pour rester plusieurs minutes sans l'avoir en fond ?
J'étais depuis si longtemps, si habituée à partager ou à prévoir de partager ... ce que je voyais, lisais, entendais, faisais ...
Je disais à ma psy je ne me sens pas entière : toujours explosée par le deuil et survivant en mode facette, secteur jamais en entier !
Je me sens vivre dans plusieurs mondes si différents ... Avec lui dans ce nouveau lien en pleine construction, dans le quotidien classique et parfois encore dans un monde dont je me sens très distante !
Je comprends que j'ai petite mine vu les questions des clientes ... alors j'ose dire que les livres et les témoignages de veuves et veufs de mon entourage me montre que c'est normal d'aller mal longtemps et bien au delà de quelques mois ou un an ... que le deuil c'est des phases qui s'entrecroisent et durent, que l'on a aucun moyen de les éviter même si on se distrait ... (ça c'est par rapport à mes absences le WE ou certains jours).
Et oui je réalise qu'il faut bien faire comprendre que jamais ce ne sera comme avant pour moi ...
Que se distraire fait du bien mais n'évite rien ! du moins pour moi
Sans savoir des personnes me disent "avec le printemps ça ira mieux"
et là obligée d'expliquer que non
Tout le printemps me saute à la figure avec douleur ... culpabilité et rappel de Jean qui ref à la chanson de Brel disait c'est dur de mourir au printemps ... printemps symbole de promesse mais pour moi rempli de douleurs !
et pour en avoir parlé avec mes clientes veuves ... ne pas espérer que les saisons me soient plus douces ... avant
Très longtemps ... l'été sera comme l'an passé difficile à vivre ... etc ! encore
oui intégrer le veuvage ne sera pas simple
car le veuvage c'est pour toujours ... alors que j'en suis à m’accommoder de survivre au jour le jour au rythme des saisons !
et bien d'autre choses ...
La lecture du dernier livre lu par Jean (un roman épique fable intemporelle) me plait beaucoup j'y vois une symbolique aussi en partie : là je m'y retrouve ... jetée sur une route inconnue dans un pays hostile, et le but secret à "défendre" est de retrouver une réalité d'un "pays" détruit, oublié dont même le nom a été placé dans l'oubli ... : notre vie passée
etc ...
J'ai vidé mon sac chez la psy ça fait du bien : tous les ennuis qui s'ajoutent au quotidien, toutes les souffrances ... pouvoir dire que oui "ras le bol" de gérer seul un coup un dégât des eaux, un coup une canalisation bouchée etc ...
là pas besoin d'entendre ce n'est pas grave ... blabla
oui ce n'est pas grave, oui ceci ou cela
mais NOOOOOOOOOOOON je sature c'est tout ! mais personne pour le comprendre.
A force de devoir faire celle qui assume, sait intellectualiser les degrés des ennuis certes avoir un endroit où dire je n'en peux plus (sous entendu émotionnellement) et craquer ça fait du bien !
Même si je continue pour ma fille etc
Oui j'ai été forte (comme vous toutes et tous) à me battre à aider, accompagner, ça aurait encore pu durer oui mais là je n'ai plus de force, plus envie de me battre et ne sais pas me battre contre cette douleur qui est utile, lâcher prise ? c'est quoi se laisser balloter par les pics de souffrance ? ce lâcher prise ne fait pas éviter ces pics !
Laisser passer ? oui pas d'autre choix, même si la colère contre cet état vient !
pas de soin de remède à cette douleur !
Oui la nature et bien des choses sont belles mais ce beau je ne peux plus en parler échanger avec l'être cher et donc ça n'a plus de sens ! Qui peut comprendre ?
Ce n'est pas que continuer sans la présence de l'autre c'est se retrouver différent, à vivre par force dans un monde hostile (ref au livre de Joyce Carol Oastes
http://abrideabattue.blogspot.fr/2012/04/jai-reussi-rester-en-vie-de-joyce-carol.html) et ça à part celui qui la vécu qui peut l'imaginer ? le comprendre ?
Là je suis mal du manque d'échange : je peux parler à mon défunt, sentir sa présence, mais je n'ai pas, n'aurai pas, plus jamais, de réponse et d'échange et ça c'est ce qui me fait terriblement souffrir en ce moment.
Celle que je deviens à cause du deuil n'est pas non plus vraiment celle dont mon défunt a favorisé l'éclosion
(cf
http://forumdeuil.comemo.org/vivre-le-deuil-de-son-conjoint/depuis-le-23-avril-2014/msg54501/#msg54501)
et je crois que pour être celle là j'ai beaucoup de travail à faire ... si tant est il que ce soit possible !
Comment se reconnaître du coup ? avoir confiance ... je ne réagis pas comme avant, je ne sais même pas comment je vais réagir bien souvent ...
Que c'est dur et complexe !
je vous embrasse