Bonjour Lilas,
Ayant été confrontée à deux décès, notre fils il y a 22 ans, et mon mari il y a à peine trois mois, je viens te donner non pas mon avis car chacun fait comme il peut, mais mon témoignage.
Quand notre fils est décédé subitement, je l’ai pris dans mes bras et mon mari et moi l’avons tout de suite amené à l’hôpital relativement proche de chez nous. Il n’y avait plus rien à faire, mais les médecins ont quand même tenté de le réanimer, sans succès. Ils l’ont posé sur un grand lit d’hôpital et nous ont demandé de rentrer chez nous. Le lendemain, ils ont pris contact avec nous pour les obsèques. Mon mari, dans sa douleur, a refusé toutes obsèques, a demandé aux pompes funèbres de s’occuper de tout, sans nous. Notre fils a été incinéré sans personne à ses côtés, donc pas de cendres à disperser ou à enterrer. Même si je pense (enfin, pensais car j’hésite) qu’il n’y a rien après la mort, et que le recueillement ne se fait pas devant une plaque, ou un coin de terre ou l’urne est enterrée, ce petit coin m’a énormément manqué les premières années suivant le décès de notre fils. Bien que je pensais à lui tout le temps, j’aurais aimé avoir un endroit où aller déposer une fleur, une bougie, emmener notre fille aînée, puis quelques années plus tard sa petite sœur pour lui expliquer qu’elle avait eu un petit frère avant elle.
Quand mon mari est mort brusquement en mars dernier, nous avons fait une cérémonie civile au crématorium. Je souhaitais disperser les cendres avec mes deux filles dans un endroit qu’il aimait, mais une de mes filles a souhaité qu’on enterre l’urne dans ce même endroit, qu’elle ait un endroit pour « venir voir » son papa. Nous avons refait une petite cérémonie entre nous et des proches (quasiment plus difficile à accomplir que les obsèques), planté des arbres, un rosier, des fleurs, bref on lui a fait un petit coin à lui. Malgré ce que pensait mon mari, j’ai fait aussi en fonction de moi et de mes enfants, de notre ressenti, de notre « bien-être ». Quand nous allons dans la région où l’urne est enterrée, nous amenons des fleurs, nous parlons de lui, nous pensons qu’il est bien au milieu des chênes avec les chevreuils qui traversent le pré. Je pense que si j’avais dispersé ses cendres, je n’aurais pas le même soulagement que j’ai quand je descends ce petit chemin de forêt pour « aller le voir ».
Mais encore une fois, c’est mon ressenti, et il est sûrement différend pour chacun.
Nathalie