Auteur Sujet: culpabilié  (Lu 10088 fois)

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Ghislide

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Re : culpabilié
« Réponse #15 le: 20 février 2012 à 15:32:54 »
Oui Marina... ces quelques mots résument tellement une partie de nous-mêmes...

nina

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Re : culpabilié
« Réponse #16 le: 20 février 2012 à 19:03:40 »
Bonsoir Suzy,

J'ai longtemps caché mes larmes et aujourd'hui je me lâche un vrai déluge.
Comme ça fait du bien
Je t'embrasse
Nina

suzy

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Re : culpabilié
« Réponse #17 le: 20 février 2012 à 20:05:20 »
Oui Nina, oui Ghislaine, oui Marina, oui Yohann,

Même s'il " est des douleurs qui ne pleurent qu'à l'intérieur...", je sais moi, je suis convaincue que ça me ferait un bien fou de me lâcher une bonne fois pour toutes!!! Mon immense chagrin n'a pas pu être extériorisé...Pourquoi est-ce que je ne parviens pas à quitter cette image que je donne aux autres ? Cette image de femme forte qui va de l'avant, qui gère tout chez elle, qui, en apparence, assume sa solitude...Pourquoi est-ce que je ne parviens pas à donner la parole à mes émotions ? Me montrer simplement " humaine" , laisser mes larmes couler devant mes enfants qui sauront sûrement me prendre dans leurs bras. Ou devant mes amis qui , même s'ils se sentiront sans doute mal à l'aise, sauront sûrement trouver des mots qui me feront du bien.
Au décès de mon père non plus, je n'ai pas versé une larme...Et pourtant, qu'est-ce que ça m'a fait mal ce départ...Mon papa, c'était un homme exceptionnel pour moi...Lorsqu'il est parti, j'avais envie de lui crier. " Non, papa, non, ne pars pas...pas maintenant..." Et il m'a fait un dernier sourire et il s'en est allé sans bruit...de la même manière dont il avait vécu...Et moi, je suis restée là, à côté de son lit, figée, hébétée, incapable de verser une larme...
Oui , il est des douleurs qui ne pleurent qu'à l'intérieur..., mais alors oui Yohann, qu'est-ce qu'elles font mal...
Suzy

Hors ligne Marina Saboya

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Re : culpabilié
« Réponse #18 le: 20 février 2012 à 21:01:54 »
Va Suzy, ce n'est pas pour rien que tu pars, que tu quittes ce continent où tout est calibré, programmé, organisé, prévu ... pour un continent ou règne la spontanéité, le désordre et le naturel.
Ce carcan t'étouffe et te bride.
L'Afrique t'apportera ce que tu en attends et tu apporteras à l'Afrique ton coeur, ta volonté et ton amour.
Bel échange.

Les larmes ne sont pas forcément preuve de chagrin, les douleurs interieures sont insupportables et invisibles.
Il faut souvent apprendre à pleurer, tout petit, on nous apprend à ne pas pleurer.

Je t'imagine bien, dans un cour sableuse et poussiéreuse, avec un vent qui fait fermer les yeux, deux ou trois enfants accrochés à ton jean, un autre posé sur la hanche. Tu transpires. Les mouches se posent sur leurs yeux, tu les chasses d'un mouvement doux de la main, tu leur souris, ils rient de toutes leurs petites dents blanches dans leur figure noire et sale. Le temps ne passe pas de la même manière qu'ici. Le soleil est dur et la pluie violente. Mais on prend le temps de se regarder et de s'aimer.

Ta peine, tu ne la pleureras pas, tu la canaliseras en cadeaux d'amour, à tous ces enfants qui t'attendent sans le savoir.
Et ton Jean-Da, "qu'est-ce qui va êtes fier de sa maudite p'tite femme" !

Va Suzy, tu es sur le bon chemin.

 :-* :-*

Marina
PiMa

Mieux vaut souffrir d'avoir aimé que de souffrir de n'avoir jamais aimé.

Hors ligne Marina Saboya

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Re : Re : Re : culpabilié
« Réponse #19 le: 20 février 2012 à 21:37:33 »

Et puis un jour, ou plutôt après une certaine période difficile, cette carapace a craqué volontairement.
Volontairement car j'ai choisi.
J'en ai eu marre de ce que je paraissais et que je n'étais pas.
J'en ai eu marre de ce que ma jeunesse et ma vie professionnelle m'avaient imposé.

Et j'ai décidé qu'être un homme comportait la notion d'être humain avec sa sensibilité et ses émotions, et la volonté de les montrer.
Que les larmes d'un homme peuvent aussi être un signe de courage et non de faiblesse.

Et à partir de ce moment, mon image a changé, pour les autres mais ça, je m'en moque, et surtout pour moi !
Je devenais en fait ce que j'étais !

Et au décès de Monique, passée la période d'anesthésie de quelques jours, j'ai pleuré.
Et chaque fois, cela m'apporte le calme.
Je n'éprouve aucune honte, aucune gêne, y compris quand ces crises de larmes sont en présence de quelqu'un.

Et autant avant, comme toi, je ne me sentais pas anormal, autant maintenant, je me sens ... tout à fait normal et en paix avec moi-même ! :)

 :-*

Yohann

 

Yohann, je ne peux m'empêcher de faire un commentaire sur ce message que tu adresses en réponse à Suzy.
C'est un très beau message, d'une grande honnêteté, une analyse très saine et un choix formidable.

Comme tu as raison!

Et j'ai décidé qu'être un homme comportait la notion d'être humain avec sa sensibilité et ses émotions, et la volonté de les montrer.
Que les larmes d'un homme peuvent aussi être un signe de courage et non de faiblesse.


Et tu peux ajouter "d'un homme ou/et d'une femme".

Le hic, c'est que peu de gens sont préparés à recevoir ces larmes.
Gène, malaise, peur... alors qu'il suffit d'un silence bienveillant, d'un mot tendre, d'un geste affectueux, une main qui se tend, un bras autour des épaules, pour que le chagrin s'apaise. Et l'instant devient doux.

En tout cas, pleurer ou ne pas pleurer, aucune culpabilité à avoir. JAMAIS.

Douce nuit à tous.

Marina
PiMa

Mieux vaut souffrir d'avoir aimé que de souffrir de n'avoir jamais aimé.

suzy

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Re : culpabilié
« Réponse #20 le: 20 février 2012 à 22:06:13 »
Chère Marina, qu'est-ce que tes paroles me touchent...Comment fais-tu pour capter à ce point ma sensibilité ? Tu as tellement bien compris pourquoi je quitte ma petite vie bien organisée pour le capharnaüm de l'Afrique...Capharnaüm, peut-être, mais si on sait regarder au-delà, on y puise une chaleur, un amour sans pareil...
Je t'imagine bien, dans un cour sableuse et poussiéreuse, avec un vent qui fait fermer les yeux, deux ou trois enfants accrochés à ton jean, un autre posé sur la hanche. Tu transpires. Les mouches se posent sur leurs yeux, tu les chasses d'un mouvement doux de la main, tu leur souris, ils rient de toutes leurs petites dents blanches dans leur figure noire et sale. Le temps ne passe pas de la même manière qu'ici. Le soleil est dur et la pluie violente. Mais on prend le temps de se regarder et de s'aimer.

Quand je lis ça, j'avoue, ça me fait des frissons... Oui , c'est exactement ça que je veux, chère Marina, et je sais que là-bas, loin de ma petite vie propre et bien rangée, je trouverai d'autres valeurs...Et mon Jean-Da continuera de me guider, de me soutenir, de m'approuver...Qu'il me tarde d'y être...
Je t'embrasse et merci pour tes paroles bienfaisantes. Là, je vais t'avouer...tu as réussi à m'arracher une larme  :)
Suzy

Hors ligne angelik

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Re : culpabilié
« Réponse #21 le: 20 février 2012 à 22:28:51 »
Bonsoir Suzy
je me suis totalement reconnue dans ton message. Je ne pleure que seule, impossible de me lâcher en public et j'ai souvent l'impression que l'on me prend pour quelqu'un de fort et dur. Mais ce n'est pas le cas... Comme le dis la chanson, "il y a des douleurs qui ne pleurent qu'à l'intérieur" et on ne le contrôle pas.
Je ne sais pas si c'est anormal, et je n'ai pas eu une éducation stricte avec l'interdiction de pleurer mais  je crois que les choses difficiles que j'ai vécu m'ont amené à me construire une carapace pour me protéger, enfin je crois...
Comme toi, j'aimerai pouvoir extérioriser mes émotions plus souvent, que ce soit dans la peine ou autres. Mais j'en suis bien incapable.
Je pleure aussi sur des chansons que je mets pour ça ou en regardant les photos. Et dès que quelqu'un arrive, je me reprend vite pour ne pas laisser voir mon chagrin.
Tu n'es pas la seule. Nous sommes déjà deux à être "hors norme".
bonne nuit à tous
chaque fois que tu sentiras le vent sur ton visage, c'est moi qui vient t'embrasser...

BB33

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Re : culpabilié
« Réponse #22 le: 20 février 2012 à 22:38:40 »
Merci de vos paroles. Je les lis ce soir alors que les larmes commencent à couler. Tout à l'heure vers 19h, je regardais la télé , c'était l'heure à laquelle Philippe rentrait d'habitude du boulot et j'ai entendu une porte de voiture, je me suis surprise à regarder par la fenêtre, attendant de le voir passer et rentrer à la maison et la douleur est arrivée brusquement. J'ai rejeté cette douleur, j'ai appelé mes fistons pour mettre la table et tous les 4, nous nous sommes installés dans le silence. Philippe était si bavard, si joyeux, ce n'est guère mon naturel à moi. Quel manque! Ma fille m'a appelée. Demain elle vient déjeuner avec Léna, ma petite fille de 5 ans, le rayon de soleil de son papi. Je vais garder Léna l'après midi alors je sais que ce sera un peu en dehors du temps.
Et ça me soule toutes les démarches. Philippe était cardiologue. Jusqu'à il y a 2 ans, il dirigeait un service de cardio à l'hôpital puis il en a eu marre des gardes, des astreintes et des contraintes administratives en tant que chef de pôle et de services, il n'avait pas fait médecine pour ça. Cela tombait bien, des amis cardio cherchaient un nouvel associé alors cela a été l'opportunité pour Philippe de changer et pour notre famille de le voir enfin un peu plus. Malheureusement, 8 mois après, le diagnostic est tombé alors que nous allions avoir une vie un peu plus douce, moins fatigante, nous autoriser à redevenir prioritairement un couple, les enfants étant plus grands. Nous avons eu la joie de marier notre fille cet été et on allait pouvoir un peu vivre pour nous, nous avions des tas de projets et là,  je n'ai plus rien; Bref..... le problème est qu'avec cette association de cardio, Philippe a pris en main tous les papiers (je gérais tout avant) et là, je me retrouve dans l'inconnu, des dossiers dont je ne sais rien, c'est un vrai bazar. Ce soir, ce qui a déclenché mes larmes c'est un mail reçu d'un des associés qui me demande des tas de papiers dont je n'ai aucune idée, il veut que j'aille vite mais là, je me sens si lasse, si lasse. J'ai envie de me coucher, regarder des conneries à la télé, qu'on m'oublie, qu'on me laisse tranquille avec mes enfants. C'est dingue toute cette paperasse, comme si la situation n'était pas déjà assez dure. Ouh là, je sens que ce soir, cela va être une soirée somnifère. Merci et je remercie la bonne étoile qui m'a amenée ici, je susi rassurée de voir que ce que je vis n'est pas si "pathologique" que ça  ;D

angel

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Re : culpabilié
« Réponse #23 le: 20 février 2012 à 23:11:20 »
Bonsoir Nicole,
je suis tout nouveau sur ce site. J'espère sincèrement apporté du soutien autant qu'en recevoir, comme vous tous qui me lisez.
J'ai perdu ma compagne il y a 16 mois d'un cancer. Elle avait 37 ans. Je l'ai accompagné dans son combat contre la maladie pendant deux ans avec toute mon énergie et ma confiance jusqu'à la naïveté de croire que mes sentiments pouvait faire pencher la balance.
Quand elle est partie, j'ai également ressenti cette culpabilité, causée de façon différente peut être de la vôtre mais le sentiment est bien le même. Cette culpabilité est peut être la conséquence que nous ne pouvons rien faire contre la mort alors que nos sentiments sont sources de vie. Nous sommes amputés et donc fragilisés, ce moment d'intense douleur qu'est le deuil charie tout un tas de sentiments négatifs bien difficiles à gérer en état de faiblesse.
Le changement que la perte de votre conjoint a occasionné dans votre vie, le changement d'habitation, les bons moments passés depuis sa disparition (heureusement il y en a), vous perturbe, cette culpabilité n'est que la plaie des sentiments que vous lui portez. Lorsque je ressens cette impression de trahir, je me dis que ma compagne partage ces moments là avec moi et que sans nul doute, elle préfère me voir ainsi. Seuls ne meurent ceux qu'on oublit.
Je pense qu'il faut vous laisser du temps, cette culpabilité veut peut être dire que vous n'avez pas accepté la mort de votre compagnon mais cela viendra. (accepter n'est pas oublier)
Quelques temps avant que ma femme ne soit emportée, nous avons discuté trés brièvement de l'aprés, elle souhaitait vraiment que je continue de rire, de rencontrer, de discuter, d'aimer, de vivre...c'est tellement facile à dire ou à écrire.
Je rejoins Marina, Yohann et les autres, vous n'êtes coupable de rien, dans votre histoire, on ne vous a pas demandé de faire un choix, il vous a été imposé.
Je ne sais pas si mon témoignage vous a apporté quelque chose, comme je l'ai écris plus haut, c'est la première fois mais si mes mots n'ont pas su vous appaiser, sachez que je vous soutiens de tout mon être.          

Ghislide

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Re : culpabilié
« Réponse #24 le: 21 février 2012 à 10:38:46 »
Cher Yhoann,

Au grand jamais, je n'associe ces mots "force" ou "faiblesse" à une absence d'émotion ! Loin de moi cette idée...
Dans le contexte où j'ai employé ce mot : force, c'était pour souligner, en fait, ce que la société attend de nous, mais pas ce que nous sommes en réalité...
Personnellement, je ne me reconnais pas (ou plus) dans ce monde d'apparences où l'image que l'on renvoie est plus importante que ce que nous sommes en réalité, où l’indifférence semble être de mise, dans ces "clichés"...
Il m'a fallu vivre des épreuves et le drame de la perte pour me révéler, me réveiller autre, parce qu'avant cela j'étais aussi dans ce carcan étroit du "conformisme"...
Avec Gilles, j'étais heureuse, c'était avant... donc moins à l'écoute du monde extérieur et de sa souffrance (petite ou grande s'il en est)... Tout ce que j'avais appris, engrangé sur mon chemin, j'ai tout laissé de coté pour ne vivre que de cet amour-là en oubliant de regarder autour de moi, à 'extérieur de mon monde à moi...
Le bonheur rend aveugle (et un peu égoïste aussi) et je suis la première sur ces rangs-là... et pas très fière de cela, je l'avoue.
Si je devais me sentir coupable, je crois que ce serait à ce niveau-là...

Pour en revenir à notre "vulnérabilité", oui, nous sommes fragiles et d'autant plus avec le deuil...
Oui, notre sensibilité est à fleur de peau...
Mais est-ce vraiment une faiblesse telle que l'on peut nous le renvoyer ?

Je pense, au contraire, qu'elle est notre force parce que grâce à elle nous nous révélons et elle nous rend cette capacité à nous dépasser ou (à l'image de Suzy) nous oublier un peu pour aimer sans réserve, de ne pas juger et poser des étiquettes... et tant d'autres belles choses dont les Hommes sont capables...

Certains font le choix d'assumer entièrement cet état, d'autres préfèrent se protéger, par pudeur ou, peut-être aussi, par peur de souffrir (une façon de se mettre "hors d'atteinte")...
Chacun fait ses choix (conscients ou non, d'ailleurs !) en fonction de ce qu'il se sent capable de supporter ou non, ou bien encore de ce qu'il a reçu (ou vécu) au cours de sa vie...
Tout est une question de ressenti... Pas de jugement, ni de "règle" en la matière... juste le cœur qui parle...

Bisous
Ghislane

m.s.m@free.fr

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Re : culpabilié
« Réponse #25 le: 21 février 2012 à 18:25:34 »
   


      Pour Angel, Nicole et tous ceux qui ressentent cette culpabilité, c'est à dire à tous,
C'est tellement injuste de perdre celui ou celle qu'on aime sans savoir pourquoi ça nous arrive à nous, qu'on cherche un responsable à cette tragédie. Et en l'absence de réponse satisfaisante on endosse cette responsabilité qui se transforme en culpabilité. On n'a pas fait ce qu'il fallait, ou on l'a mal fait, pas quand, ou comment il fallait le faire pour que cela n'arrive pas. Et si on avait été prévenu, on aurait pu empêcher cela. Et si cela était à refaire, on s'y prendrait mieux. Et est-ce qu'on l'a assez aimé(e)? Est-ce qu'on le lui a dit assez? Et on a tant de choses à se reprocher...Etc...etc.... Mais ça ne change rien toutes ces questions. Ça fait juste souffrir un peu plus. Essayez de répondre à chacune de ces questions par un souvenir heureux qui prouve le contraire de ces reproches que l'on se fait.