FORUM "LES MOTS DU DEUIL"
Comprendre et vivre son deuil => Vivre le deuil de son conjoint => Discussion démarrée par: QUENOUILLE87 le 20 juin 2012 à 10:50:38
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Pas très grave, mais coup de gueule quand même contre cette vie qui devient de plus en plus difficile au niveau de l'organisation. Ce matin, je travaille à la maison avant de courir à 13 h au bureau. Donc, dossiers pour le bureau, puis je décide d'aller à la dechetterie car la remorque est pleine d'épines de pins et de taille de haies. Seulement, quand j'ai rempli la remorque, je n'ai pas pensé qu'après qu'elle soit pleine, il faudrait traverser le jardin pour l'atteler à la voiture. Un poids énorme à tirer, avec tendinite de l'épaule..... Puis, une fois attelée et arrivée à la déchetterie, je ne sais pas manoeuvrer, donc le gars de la déchetterie s'énerve car il me demande de reculer et je ne sais pas. Je m'arrête tant bien que mal, détèle la remorque, l'amène jusqu'à la benne de déchets verts (personne pour m'aider !!) et là, impossible de soulever les sacs d'épines, trop lourds. Le garçon en gilet orange me regarde m'acharner à soulever ces sacs, mais toujours rien !!! J'ai dû vider la moitié du sac à la main, avant de pouvoir le soulever pour vider le reste.
Et voilà, retour à la maison, enlever la remorque, la ramener au fonds du jardin, la nettoyer. Et là, je m'attaque au ménage, aspirateur, poussières, serpillère, grignoter vite fait et aller au bureau. Assurer, toujours assurer, physiquement, moralement, assurer aussi le moral des enfants qui à 10 ou 650 kms ne vont pas bien. C'est épuisant.
Je suppose que c'est le lot de vous tous qui vous retrouvez seul(e). Il y a des moments où je le supporte, et d'autres où le vase déborde. J'avais besoin de le crier aujourd'hui.
Heureusement, en allant à la déchetterie, j'ai traversé les champs de blé, de coquelicots et de bleuets. Petit rayon de soleil.....
Douce journée à vous
Nathalie
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Bonjour Nathalie,
Simplement pour te dire que je comprends ton "énervement" quand, en plus d'avoir aujourd'hui à faire seul(e) différentes tâches, parfois éprouvantes (que l'on faisait auparavant à deux), on se trouve confronté(e) à un manque de solidarité, d'humanité, lorsque l'on est dans la difficulté.
Heureusement qu'il y a ce site où l'on peut s'exprimer librement et s'entraider.
Bon courage, Nathalie, mais aussi à toutes et tous.
Cordialement. Daniel
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Ah, Nathalie ! J’en ai fait des trucs comme cela, ne pas prévoir que l’on n’a pas la force de notre homme qui semblait faire tout avec une grande facilité, se sentir ridicule devant des observateurs amusés et peu solidaires, j’en ai fait et moi aussi à la déchetterie j’ai pas mal cafouillée.
Un jour, j’ai dit au « bonhomme en jaune » : « Il va falloir m’aider, sinon, je dépose tout par terre et je m’en vais ». Il a du sentir que j’étais à cran. En partant je l’ai remercié et donné un petit billet. Maintenant il vient m’aider systématiquement et de temps en temps je le remercie avec ses papiers de couleurs différentes qui font courir le monde et rendent les humains, inhumains … à moins que cela ne soit l’inverse.
Coup de gueule ! Tu as raison.
Heureusement que la nature t’a apaisée. Comme toi, blé, coquelicots et bleuets… Pas mieux pour me faire sourire. C’est trop beau !
Et puis, je préfère un bon coup de gueule, qu’une grosse crise de larmes.
:-*
Marina
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Et oui Nathalie, on a tous ces petits moments où on a simplement envie de dire "Putain, fais chier, Merde" :)
Oui je sais c'est pas joli mais qu'est ce que ca fait du bien.
Moi c'était y a deux semaine dans un célébre magasin suedois, j'ai eu envie de jurer comme un charretier, tellement je n'en pouvais plus (une porte de 40Kg a mettre toute seule dans le charrio et la voiture et petit clin d'oeil Nathalie tendinite a répétition de l'épaule depuis le décés de Johan ainsi qu'arthrite à la cheville à 33 ans que demande le peuple!!!: Le Bonheur) et j'ai fini par pleurer en attendant à la caisse. Oui je sais la c'est la grande classe les amis.
Je sais que ce ne sera ni la dernière ni la première mais c'est lourd d'être déjà quand on est en deuil alors d'être une superwoman...
Courage à vous tous
Bises
Elodie
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OUI faire tout toute seule : tondre, accrocher une remorque, déboucher l'évier, emmener la voiture au garage car on n'y comprend rien au moteur, faire ramoner la cheminée etc
Ma belle-fille me disait l'an dernier "le jour où j'ai dû sortir le contenair à poubelle sur le trottoir, j'ai compris que j'étais définitivement seule" C'était Antoine qui le faisait !
Courage à vous toutes qui devez TOUT faire, tout décider seules
Marithé
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mon experience à moi, pas plus tard qu'hier soir.
J'ai mis mon buffet en vente sur internet. 2m50 de long en merisier massif, les copains s'y sont mis à 4 lorsque nous avons emmenagés!
donc hier soir un acheteur vient le voir et me dit "je le prends, j'ai ma camionnette" et il ajoute "il peut pas me donner un coup de main votre mari???" ;D ;D
ben non mon coco, va falloir faire avec juste avec le petit bout de femme devant toi.
j'ai essayé , j'ai pas reussi ( et dit la meme chose qu'Elodie >:( il reviendra demain avec un copain
sofi
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J'ai souvent été seule, mais je n'avais pas de maison à m'occuper. Je comprends très bien la "peur" de se faire mal durant des manoeuvres pas si faciles.
J'ai un peu abandonné certaines tâches que je ne pouvais pas assumer... ou payer un "homme". Défaire un cabanon en métal, refaire le toit, tous les gros travaux d'ébénisterie, de construction... ça coûte une beurrée... surtout que je me fais avoir. Y'a plein de compagnies qui doivent sentir les femmes seules et qui ambitionnent.
Mais cette semaine, j'ai acheté un meuble en coin et en le sortant de ma Jeep, il est mal tombé et le bas a craqué et brisé complètement... tant pis, je l'ai rafistolé, ça ne paraîtra plus. Hier, j'ai aussi installé seule un auvent en forme de toile de bateau, c'est magnifique et j'étais fière.
Là, je vais m'occuper de mon jardin.
Ce que j'ai "peur" de faire: installer une gouttière. C'est pourtant pas sorcier, mais j'ai peur.
Quand j'ai des travaux à faire et que la compagnie que je paye voit qu'il reste quelques éléments à rajouter, j'entends "Vous avez pas un chum, un ami, un frère?" Non, 1) yé mort, 2) sont occupés 3) yé maniaco.
Reste que je crois qu'il faut s'organiser et demander de l'aide, tant pis si j'ai l'impression de quémander. Mais je ne suis pas encore rendue là...
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Eh oui Nathalie maintenant on se retrouve à tout gérer. C'est sûre que la force physique va nous manquer, comme le dit Caroline il nous reste la débrouille. L'autre soir avec ma copine on a voulu ouvrir une blle de champagne et bien on a mis du temps mais on a pu le déguster....
Nous apprendrons à nous en sortir avec le temps, je te souhaite bon courage.
Cordialement LILIAS
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Caroline, tu es un rayon de soleil, quand enfin le chagrin te laisse quelques instants!
Bonheur pour nous de te lire!
;D
Marina
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Bonsoir a tous
la force physique est une chose,mais il y a aussi le coté organisation et l intuition feminine qui me manque a moi un homme,ma femme faisait aussi tout ce qui se rapportait a notre vie de couple,j ai du mal a gerer le linge , le fer a repasser pour moi est un objet bien etrange a maitriser comment enlever les plis d un cote sans en faire de l autre...ne manquer de rien toutes ses petites choses utiles a la bonne tenue d une maison, je donnais bien volontier un coup de main pour les taches menageres en ecoutant les directives de ma femme, tire le fauteuil, demonte moi les rideaux ,pousse toi tu me genes....et aujourd hui je suis triste je n entends plus tout cela,j essaye de faire le maximum pour que tout reste propre pas facile mais j y arrive.
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Mesdames et chères amies,
Comme le suggère Thierry, merci d'avoir aussi une pensée pour ceux qui ne sont vraiment pas doués pour la cuisine, la lessive, le repassage et autres travaux ménagers dans lesquels les femmes sont plus habiles.
Cordialement Daniel
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thierry, daniel
vous avez raison, ça tournait a l'ambiance "club feminin"
mais en substance, nous nous retrouvons tous amputés de notre moitié, nous formions tous une equipe bien rodée... et nous sommes aujourd'hui tout bancal
à tous les courageux, bonne soirée
sofi
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Ben oui les ami(e)s, tout ça c'est une réalité...Depuis que je suis seule, c'est une lutte quotidienne pour tenir tout à jour. Tout ce qui touche à administratif, à la finance...pour moi, c'est le cauchemar...! il m'a bien fallu une année pour gérer vraiment les paiements par ebanking! Mais bon, j'ai fini par comprendre...Et puis, tout le reste: l'entretien du jardin, le déblaiement de la neige, pour cela j'ai de la chance, ya mon fils qui m'aide , mais pour les petits trucs courants comme attacher les journaux, aller à la déchetterie..., ben si je le fais pas , personne n'y va...Mon fils et ma fille vont bien dire au passage : " Tiens, maman, il y a pas mal de b... dans le réduit, mais ça s'arrête là...
Maintenant que je suis en plein déménagement, je réalise la masse de travail que j'ai abattue toute seule!! Vider une maison de 7 pièces avec d'énormes dépendances ( cave, combles, galetas...) , trier, emballer, jeter, donner, aller à la déchetterie...Il y a quelques semaines mon fils m'avait dit qu'il rangerait la cave extérieure. Finalement, les jours passaient et il n'avait jamais le temps...ll me racontait toujours qu'il avait trop de travail, qu'il était débordé et...ne me parlait plus de cette cave à ranger. dimanche passé, il faisait beau, ma fille préparait ses examens ( donc , ne pouvait m'aider...), et j'ai décidé de m'y mettre. J'ai donc sorti tout le mobilier de jardin, trié des outils, entassé du bois, balayé, tout remis en place...je n'en pouvais plus! Après j'ai rangé l'armoire de la terrasse, une armoire avec tout le nécessaire à grill...Je me suis demandée pourquoi mon amour n'avait jamais mis un peu d'ordre là-dedans ! Je l'ai même engueulé un peu , je crois...C'était tellement gras et plein de suie... Toujours est-il que j'ai vécu un grand moment de solitude! C'est vrai, un déménagement de cette envergure, normalement , on le fait quand on a un mari...Avec un mari, on peut se plaindre à deux de nos grands enfants qui sont incapables d'aider, de prendre une initiative...On se plaint à deux, mais ça fait du bien...Et on est malgré tout deux pour finir le travail...
Je suis aussi allée des dizaines de fois dans mon nouvel appartement pour y amener des cartons. Lorsque je passais devant les ouvriers qui travaillaient sur le chantier en portant des cartons super lourds, ils me regardaient tous bêtement, mais jamais la moindre proposition d'aide...La dernière fois, j'ai fait au moins 10 voyages et je me suis quand même permis de demander à l'un d'eux s'il pouvait me coincer la porte avec une pierre pour me faciliter le passage...
Ce soir, je suis complètement OUT. Il n'y a presque plus de meubles chez moi et demain, il faudra faire tous les derniers cartons. Y ranger tous les petits trucs qui traînent un peu partout, la vaisselle, les ingrédients culinaires, les provisions, les habits...Ca n'en finit pas! J'ai encore dû aller chercher 10 cartons supplémentaire chez une amie! Un vrai cauchemar!!!
Demain soir, tout devrait être prêt à être transporté et vendredi, on nettoie... OUF!!!
Suzy
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Eh oui, nous nous retrouvons seuls à gérer ce que nous faisions à deux,
double à faire, de plus fatigué par ce deuil,mauvais sommeil, besoin de s 'occuper de soi, des proches, de se poser pour faire son deuil et toutes les démarches
alors ras le bol je laisse courir et tout s'accumule,
puis cerise sur le gâteau l'évier qui se fissure, le lave vaisselle tombe en panne, la voiture abimée par un coup de pied volontaire, etc... mais ce n'est que du matériel, c'est pas si grave. Ca en devient risible
IL faut être vigilant: Le beau père qui décompense sa maladie cardiaque, le convaincre de se faire soigner car oedèmes , conseiller,surveiller , vérifier le semainier des médicaments, faire les papiers
quand je pense à ceux et celles qui ont des enfants en bas âge, quelle énergie, quel courage ils doivent développer
amicalement
Orchis
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Que ce soit le meuble ou le fer à repasser à lever, on reste avec la même souffrance: je suis seul(e).
Ce qui me fait peur, pour plusieurs, c'est que les responsabilités peuvent s'accumuler, puisque les autres (beau-parents, parents) aussi peuvent avoir des maladies mortelles.
Bisous, Caro xx
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Une fois encore, nous sommes tous d’accord.
Que ce soit pour faire démarrer la tondeuse, vider le grenier, faire notre nouvelle déclaration d’impôt, parfois deux ou repasser le linge qui s’accumule, ce n’est pas tant la tâche qui épuise et démoralise, c’est le fait d’être seul(e), devant, à se demander par quel bout la prendre.
Oui, on finit par y arriver, souvent par la force des choses, mais que de stress et que de larmes en plus de la sueur !
C’est cela AUSSI, perdre son double. Ce n’est pas qu’affectif, comme souvent les gens le pensent. C’est sans doute parce qu’il limite cela à la perte sentimentale qu’ils en oublient de vraiment venir nous aider pour l’autre facette de cette perte : le quotidien.
Et puis, c’est tellement facile d’être « très occupés en ce moment », « tu n’imagines pas, mes enfants sont en plein examens », « je fais des travaux chez moi, c’est l’enfer », « çà tombe mal, mon patron m’a filé un dossier énorme à traiter en urgence », « tout le monde est en vacances, je suis seul(e) au magasin », « je me suis fait un tour de rein au golf, ou au foot la semaine dernière », « on ne peut pas on a un week-end chez des amis, prévu de longue date »…
Bref, débrouilles toi tout(e) seul(e), chacun ses problèmes.
Ajoutons les enfants, jeunes, les ados révoltés ou trop silencieux, les parents pas très en forme, les beaux-parents déphasés…
C’est aussi le cela le deuil.
Alors pour surmonter tout cela, oui, il faut être surhumain, et quand on y parvient, quand on a trouvé des solutions, quand on a vidé sa maison de 7 pièces, trouvé du temps pour emmener papa à l’hôpital et de discuter avec les médecins, décoder le mode d’emploi du fer à repasser, remplacé la machine à laver et affronter la déchetterie, oui, nous sommes des super men et des wonder women…
Mais que d’énergie et de fatigue !
Marina
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Marina,
C'est exactement cela, ta déscription est juste.
Pour ma part j'aimais faire toute ces choses : cuisine, pelouse, taille de haie, bricolage......... et j'en passe. Maintenant c'est devenu des obligations. Pourquoi?
Notre duo n'est plus, toutes ces choses étaient notre vie à deux. Depuis quelque semaines je me dit, qu'il était mon énergie, la machine est toujours là, mais elle fonctionne au ralenti.
J'aime prendre cet exemple, car je me dit, une machine au ralenti n'est pas complétement inutile. Un jour viendra qu'elle retrouvera de l'énergie (petit-enfant ;) ;) ;) ;)). C'est un peu infantile mais actuellement c'est comme cela.
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24 juillet 2012.
Dimanche, cela a donc fait 2 ans que mon Pierre est parti.
Vous êtes nombreux à m'avoir envoyer un mot, une pensée et ce fut doux. Je vous en remercie encore du fond du coeur.
Je n’attendais rien de cette journée, ni d’être « mieux », ni plus malheureuse que la veille ou le lendemain. Mais je dois l’avouer, inconsciemment, j’ai été fébrile et à fleur de peau. Tandis que je m'y refusais énergiquement, j'ai quand même revécu ces heures épouvantables de juillet 2010. A force d'y penser, et d'y repenser, je les intègre à mon livre de souvenirs et elles me brûlent encore mais ne m'anéantissent plus.
Ce dimanche de 2012, le soleil était présent enfin, et le jardin resplendissait. J’étais contente, je sais qu’il l’est aussi quand il voit sa maison et son jardin. Je sais aussi qu’il est tout indulgence et que si je fais mal ce qu’il aurait fait bien, il me sourit en se disant, ce sera mieux la prochaine fois. Il n’était déjà qu’Amour ici bas, avec nous, alors là où il est maintenant !!!!!!!!!
Ma sœur et mon beau-frère chéris sont venus déjeuner et papoter un peu avec nous sur la terrasse. Comme d’habitude, quelques soient leurs projets, leurs obligations, je peux compter sur eux les jours où… et cela depuis que la maladie c’est glissée sournoisement et méchamment dans notre foyer.
Mais de nouvelles des autres membres de la famille, point. Mon frère et sa femme, ma nièce de 18 ans qui m’appelle sans cesse pour me demander ceci ou cela, les sœurs de Pierre et leurs filles, largement adultes, mamans et responsables… Le silence.
2 ans à peine pour « oublier » ?
Les grandes phrases au pied de son cercueil : « Nous ne t’oublierons jamais. »
Les larmes et les sanglots.
Les « Tu peux compter sur nous ».
Mais Pierre mérite bien mieux que cela, c’est un grand homme, un bel homme, une âme exceptionnelle, une bonté, une générosité, une intelligence, une sagesse, une folie, un sourire, un rire irrésistibles, il savait tout faire, il savait tout sur tout, la nature, la photo, les étoiles, les lois de la physique, les mélanges chimiques, l’architecture (son métier), il peignait des aquarelles, écrivait des poèmes … chaque jour j’apprenais quelque chose avec lui, il était modeste de ses connaissances, il était… mon Pierre. Il rendait service à tout le monde, répondait au moindre appel de détresse ou d’aide.
2 ans à peine pour « oublier ».
Dans la solitude de cette soirée du 22 juillet, la colère est montée en moi.
Alors, devant mon clavier, j’ai écrit des brefs et secs messages à tout ce « vilain » monde qui m’avait tant déçu. Pas question que j’en reste là.
Et la journée d’hier, j’ai attendu et le temps passant, la déception c’est faite encore plus grande et c’est cette attitude qui m’a fait verser le plus de larmes, pas « l’anniversaire », mais l’indifférence.
Enfin, une réponse.
La femme de mon frère s’empêtre dans des excuses et finit pas admettre qu’elle a été nulle et regrette de m’avoir fait de la peine. Mea Culpa. Je prends, car elle est sincère.
Un peu plus tard, mon frère me fait une belle déclaration pleine de tendresse et de remords et nous pleurons ensemble au téléphone. Je prends parce que je l’aime.
Ma nièce de 18 ans me fait croire qu’elle a cherché à me joindre, en vain. Comme on sait mal mentir à 18 ans !
Le pompon, la sœur ainée de Pierre : « Chère Marina, nous pensons très fort à toi en ces jours difficiles. Nous rentrons d’un voyage en Espagne, ce fut formidable… magnifique… Bien reposés… en pleine forme… En août nous comptons faire… »
Mon pauvre Pierre. Il va falloir vous contenter de peu.
Tous cela pour dire que la mémoire des « autres » a une bien faible capacité.
Alors gardons notre amour et notre tendresse pour ceux qui le méritent et méprisons les « petits » qui ne font que nous blesser un peu plus.
Marina
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Bonjour Marina,
Nous ne nous sommes jamais encore parlées. Je me suis inscrite il y a peu mais partout ici tu es citée en exemple pour ton réconfort auprès de nous.
Deux ans, c'était hier, pour toi. Pour les autres pour qui Pierre n'était pas le quotidien, c'est un peu plus loin dans le temps. Le temps ne s'écoule pas de la même manière pour tout le monde...
Tout ce qui faisait nos jours et nos nuits avec nos bienaimés, n'étaient qu'à nous. Pour nous, c'est chaque chose de notre quotidien qui est bouleversée.
Jamais avant de vivre la perte de mon amour, je n'aurais imaginé rien qu'une seconde ce que cela représentait de perdre sa moitié. Ou alors j'y aurais pensé, comme ça, j'aurais compati et puis serais certainement retournée à ma vie, tout en ayant de la peine pour la personne. J'aurais été reprise par les problèmes du travail, des enfants, de la famille, de la maison...
Aujourd'hui, je vois les choses différemment, plus à fleur de peau, car je le vis.
Les gens qui me revoient pour la première fois depuis le décès de Bruno et qui font comme si de rien n'était. Ceux qui sont maladroits, la famille qui ne prononce plus son nom, qui parle de tout de rien, sans allusion à son existence.
J'ai de la peine pour eux, ils ne savent pas comment agir avec nous : en parler ? ne pas en parler ? est ce vraiment de l'indifférence ? de la gêne ? peur de remuer le couteau dans la plaie ? un moyen de se protéger contre la souffrance ?
Oui, nous faisons du tri et celui là est bien sélectif ! Il y a ceux qui font partie du décors, ceux qu'on ne veut plus voir, et quelques uns qui nous restent vraiment proches.
Merci Marina, pour ce coup de gueule ! tu as raison ça fait du bien : n'as tu pas écrit que tu préférais un coup de gueule à une crise de larme... quoi que l'un n'empêche malheureusement pas l'autre !
Courage Marina, ton Pierre a ce qu'il y a de plus beau : ton amour, et aujourd'hui par delà les nuages de la vie. Qu'importe ces autres !
Il est en toi, pour toujours. Il est ton Pierre.
Bien à toi,
Claire
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Oui, Claire, tu as raison et ton message est aussi sage, que joli et gentil.
Une amie vient de passer et m’a demandé… comment j’allais. Je lui ai raconté mon coup de gueule et elle m’a exactement répondu ce que tu viens d’écrire : pudeur, gène et égoïsme.
Oui, je peux le comprendre bien que moi, je sois restée attentive avec ceux qui ont eu besoin de moi un jour. Aider c’est bien, maintenir la « surveillance », l’attention, le réconfort, c’est mieux. Mes parents m’ont appris cela très tôt. Et quand j’ai failli, je me suis senti mal très mal, et honteuse.
C’est vrai pour « eux », deux ans c’est une éternité, pour eux qui ont déjà rangé « cela » dans le passé, ils n’imaginent pas que c’est encore et pour longtemps notre quotidien. Mais l’amour là dedans ? L’amour pour un frère ? Un oncle ? L’amour aussi se range dans un coin ?
J’ai découvert un sentiment inattendu depuis le départ de Pierre, j’ai peur justement qu’on l’oubli, qu’il disparaisse des pensées comme son corps de ce monde, qu’on se dise un jour : « Mais si, tu sais, ce cousin, qui faisait de la peinture, je crois qu’il était architecte ? Ah, bin oui, c’est mon frère. Il est mort dans les années 2010 quelque chose comme cela. »
L’oubli est encore pire que la mort.
Et à cette vitesse là, il n’existera plus pour personne quand moi je serais morte. Alors je mets mon énergie à le faire vivre encore et encore.
Oui, il est en moi, pour toujours. Il est mon Pierre.
Merci Claire.
Marina
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Marina,
Dans l' Egypte antique, ne plus prononcer le nom d'un défunt, supprimer son nom des tablettes, des statues était un déni de son existence. C'est pourquoi, pour protéger leurs morts, les proches "cachaient" le nom dans les tombeaux royaux pour qu'ils ne soient pas oubliés.
Il y a une légende qui raconte qu'il suffit qu'une personne pense au défunt pour qu'elle continue d'exister.
Alors, continue à penser à ton Pierre, parce qu'il vit en toi, autour de toi.
A notre mort, d'autres penseront à nous, même si c'est épisodiquement, et alors, tout ce que nous avons "emmagasiné", continuera... ton Pierre, mon Bruno et tous ceux qui ont disparu et nous sont chers...
Je n'ai pas de réponse pour tes interrogations en ce qui concerne l'amour pour un frère, un oncle...
je sais que chacun ressens des choses différemment. Certains aiment. D'autres non. Certains "rangent dans un coin" pour ne pas continuer à souffrir. D'autres non. Pour d'autres encore, ils n'ont pas le "tiroir" amour, tout simplement. Nous ne pouvons pas les changer. Mais nous ne sommes pas obligés d'accepter.
Que l'on croit en un Dieu ou en autre chose, la vie est une continuité. Peut importe qu'on laisse une trace ou non. L'important, c'est l'amour reçu et donné. Je crois que c'est ce que tu fais et c'est beau.
"Et quand j’ai failli, je me suis senti mal très mal, et honteuse."
Il n'y a pas de quoi te sentir honteuse. Nous ne sommes que des êtres humains...
Nous avons nos faiblesses, c'est normal.
Courage, Marina, tu es sur la bonne voie, j'en suis certaine.
Claire