Bonjour,
Bien sûr, il y avait la colère.
Tellement difficile d'accepter cette injustice qui m' a enlevé ma joie de vivre, mon bonheur, mes rêves, mes projets, ma raison de vivre.
Et pour les mêmes raisons, il y a eu la culpabilité, qui m'a rongée parce que je pensais que je n'avais pas fait assez, moi , j'étais toujours là. Je n'ai rien vu venir et je n'ai pas cessé un jour d'espérer , tellement d'espoir que j'ai pensé ne pas avoir été assez prudente, ne pas en avoir fait assez.
je pensais pouvoir le sauver, je me croyais toute puissante, ma volonté ne m'avait jamais trahi.
Mais.... C'était moi ...
Je l'ai tant retenu , il a temps résisté d' avoir peur de me voir souffrir.
Je lui ai raconter tant d'histoires d'espérance, je l' ai caressé de mots d'Amour, j'ai pensé le soigner avec toute ma tendresse.
j'ai prié un dieu qui ne m'a pas entendue, un ciel qui est resté fermé, je me suis démenée, débattue, battue toutes griffes dehors,
J'ai hurlé, pleuré, fait des caprices,du chantage avec les dieux, j'ai imploré le ciel et les images dans les églises,j'avais peur de le perdre, une peur viscérale de la douleur que j'allais avoir, cette peur durait un instant, je la chassais avec la force de l'espérance. Je n'imaginais pas un instant que j'échouerais .
J'étais bien égoïste, je n'ai pas voulu voir qu'il était fatigué de lutter, je me suis surestimée.
Et puis , la violence de sa souffrance m'a fait lâcher prise, je me suis faîte sereine, douceur, paix apparente, je voulais qu'il se tranquillise, qu'il n'ait plus peur.
Un mois et demi d'incompréhension, de violence physique pour lui, de déchirement, et je m'en voulais d'être impuissante.
Oui, je me sentais coupable d'être en bonne santé, d'être vivante que mon corps me supplie de dormir, qu'il crie sa faim et que lui étais là si maigre et si fragile .
Et le 31 décembre, je lui disais combien je l'aime et combien je lui espérais ce qu'il y avait de mieux pour lui, en quittant la chambre des soins intensifs, je me retourne et au fond de moi je sais , et je chasse ce pré-sentiment. Toujours cette peur de la séparation, cette culpabilité mal définie de ne pas en avoir fait assez.
Son corps a lâcher dans la nuit, il savait que je n'étais pas seule du moins je l'imagine. Son âme s'est accroché encore le temps que je me rende à son chevet, il a attendu d'être entouré de ceux qu'il aimait et il s'en est allé.
Je n'avais plus peur , la séparation était là, avec toute sa violence . L'esprit anticipe , je n'arrive pas à le faire taire.
je dois être forte, ne pas s'effondrer.
Créer une bulle, une bulle de nous, comme pour le retenir encore un peu.
Je me suis éteinte, j' étais couchée dans le canapé face à sa photo entourée de bougies. C'était hypnotique, je sombrais, cette culpabilité me rongeait, je n'avais plus de colère..Mes parents sont venus vivre avec moi dans ma grande maison, et le 11 mars aux infos , mon attention est attirée par les images d'une femme marchant sur des décombres, mes yeux s'ouvrent, mes oreilles entendent... une catastrophe, un tsunami au japon, cette femme cherchait ses fils et son mari dans un mélange de matières qui devait être sa maison, ces images me faisait penser au chaos en moi.
Je ne peux pas expliquer pourquoi, mais cette femme m'a ramenée doucement à la vie.
Je n'ai pas dit que c'était facile, les émotions sont revenues, la colère aussi, je sortais de notre bulle enfin de la mienne parce que tu n'étais plus là.
Maintenant , 9 ans après je sais que j'ai fait ce que j'ai pu au moment où je le vivais , et que chaque fois que je revenais en arrière en me disant tu aurais dû, ou j'aurais pu, ou si j'avais su... Tout cela ne faisait que nourrir cette culpabilité... Mais de quoi est-on coupable? Personne n'est préparé à ce genre d'épreuves, même si c'est une dure réalité de la vie.
La colère s'en est allé quand je me suis pardonnée, ou plutôt rendue compte que j'étais en colère contre moi , en colère de ne pas avoir su te retenir, de ne pas avoir su vaincre ta maladie..
Je pourrais encore écrire longuement mais je vais en rester là..
La colère et la culpabilité sont là pour tous, nous les vivons chacun à notre façon. Ceci est un bout des miennes, je sais a quel point elles peuvent être dévastatrices.
Garder votre joie de vivre, la vie est belle et puis nos chères Amours ne voudraient pas nous voir triste.C'est aussi pour ça qu'ils nous ont laissé une part d'eux- mêmes.
Je vous embrasse .
Pascale La Louve