Bonjour Lydia,
Merci de tes explications, j’y vois un peu plus clair… encore que
Tout ce raisonnement est basé sur l’imbrication du passé, du présent et de l’avenir, non ?
Je ne vis pas les choses ainsi, ma vie est une succession d’années, de mois, de jours, heureux et douloureux. Chaque jour pousse l’autre, comme une grande ligne sinusoïdale, en haut les joies et les bonheurs, en bas les tristesses et les douleurs.
Mais peu importe, nous avons chacun notre vision personnelle.
Je comprends bien que tu ne puisses imaginer retrouver calme et sérénité tandis que tu es en plein tumulte.
Je me disais, pas moi, je l’aime trop, je souffre trop, personne ne souffre autant que moi, jamais je ne serais plus vivante.
Je suis vivante, bancale, mais vivante. Il me manque encore la joie, l’enthousiasme, la foi, la confiance en l’avenir, mais j’ai le calme et le cœur apaisé, et c’est déjà inestimable.
Pierre ne quitte pas une seconde mes pensées, chaque geste, chaque pensée, chaque regard que je pose… tout me ramène à lui. Il est ailleurs, loin, très loin, ou bien il n’est plus rien, que cendres, ou bien il veille sur moi, je ne sais pas, son « existence » n’est plus entre mes mains, en revanche, je dois gérer la mienne, sans lui.
C’est difficile, mais faisable. Parce que ma vie est riche de tout ce que nous avons vécu ensemble, de tout ce qu’il m’a appris, de l’Amour qu’il m’a donné, des joies et des plaisirs. J’en ai un tel stock qu’il suffira à me faire sourire jusqu’à ce que cela soit mon tour.
Oui, dans ce deuil terrible, il faut savoir que la petite veilleuse de la vie ne s’éteint jamais, malgré les vents force 10, malgré les lames de fond, les tsunamis.
Tout doucement, le cerveau prend le dessus sur le cœur, et cette douleur qui vient du fond des tripes, devient une douleur cérébrale.
S’y mêlent alors soudain les questions, les angoisses du lendemain, aggravant encore si possible le sentiment douloureux, et puis peu à peu, le brouillard s’éclaircie, à peine, mais un peu, puis un peu plus et des ébauches de réponses arrivent, d’autres questions, d’autres peurs et encore des réponses… et le temps s’écoule…
Les pauses- chagrin sont plus nombreuses, même si les rechutes restent violentes.
La « vapeur » s’inverse insensiblement, les rechutes sont moins nombreuses, moins extrêmes…
Le cerveau se met enfin à tourner « presque » normalement.
Et le travail qui se faisait inconsciemment, se fait à présent, parce qu’on le décide, en prenant les décisions nécessaires, des petites ou des grandes décisions. Mais des choix personnels, et seul(e), surtout.
Je disais : Pas moi, jamais, je ne serais plus jamais vivante.
Je suis vivante et je souris en pensant à Pierre, tout le temps, je souris tout le temps (enfin dans ma tête!), et je commence même à me demander ce que je vais faire demain…

Marina