Le chagrin est-il encore autorisé ?

On dérange en allant mal, car on renvoie vers la réalité de la condition humaine : la fin inéluctable, imprévisible qui peut toucher n'importe qui, n'importe quand.

Or, notre monde fait croire que tous les risques peuvent être assurés, que la possession de biens materiels apporte non seulement le confort de la vie matérielle, mais aussi le bonheur et la protection.

Et nous sommes là, portant sur notre visage les stigmates du chagrin, de la douleur, du manque, qui durent, qui durent..

Même à Noël, même pendant les vacances, même quand il fait beau, même avant le week end...et surtout à ces moments de rejouissances collectives imposés par les marchands du temple.

Nous gâchons la fête perpétuelle de la consommation. Nous rappelons la fragilité de la vie, nous rappelons que toutes les maladies ne se soignent pas, que la voiture tue, que les enfants se suicident dans notre société - si parfaite, si solidaire, parait- il... 

Il faut cacher ce que l'on ne peut pas voir et donc ceux qui vivent ce que l'on ne veut pas voir.

Non faik, tu n'es pas faible. Tu es vivante, humaine, portant le poids d'un immense chagrin qui ne disparaitra jamais car nul ne peut faire disparaitre l'amour que tu portes à ceux que tu pleures.

Et tant pis pour ceux qui se sentent mal à l'aise. Ils devraient te remercier de leur rappeler la fragilité de la vie et t'apporter leur réconfort, en se disant : le jour où mon tour viendra, Faik sera là pour moi.

Je t'embrasse.
Milou   

 

 

Oui, les gens sont bien intentionnés, certainement, mais dans un autre monde que le nôtre.  Je viens d'avoir un coup de fil d'un ami à nous qui est à l'autre bout du monde, et peut appeler rarement. Il voulait entendre ma voix pour se rassurer .... et quand les paroles qu'il m'a dites m'ont mises en pleurs, il a raccroché très vite. Il me disait "c'est la vie", il faut se remettre.. La peur, la peur de notre chagrin, la peur de la mort, notre état, comme si c'était contagieux ! ça m'est égal, je suis bien dans mon monde, où ce matin encore je me demandais si "mourir de chagrin" n'était qu'une expression ou si c'était possible ? et ceux qui ne comprennent rien tant pis pour eux.
Une tendre pensée pour vous tous.
Noëlle

Plutôt que la résilience, revendiquer le droit au chagrin.

Je ne crois pas non plus à la résilience, et surtout pas dans le deuil d'une personne "majeure " à notre vie. Une vie bouleversée à jamais.

Ce n'est pourtant pas faute de se battre contre ce " plus jamais ", contre ce que nous considérons comme une injustice, marchander, supplier, ne pas vouloir croire que rien ne sera plus comme avant, que le bonheur est terminé.
 
Puis baisser les bras, et ce n'est pas une défaite, bien au contraire.

Afficher aux yeux des autres notre chagrin, le revendiquer fièrement, même si les portes se ferment, même si nous ne sommes pas d'assez" bonne compagnie "pour nous joindre à eux, même si nous ne sommes plus capables d'apprécier LEUR bonheur.

Vivre dans l'instant, sans injonction à aller mieux, sans rien attendre, et accepter cette idée avec soulagement.
Accueillir avec humilité les moments d'accalmie qui nous sont donnés, les mains tendues, les regards attentifs à notre souffrance.

La seule parole d'un psychologue qui m'ait vraiment aidée, parce qu'il a reconnu, et m'a reconnu le droit au chagrin éternel   :

 " Le deuil vous condamne à perpétuité, mais, comme dans toute condamnation, il y aura des aménagements de peine ".

A presque 15 mois de son absence je ne vais pas mieux -je n'irai jamais mieux - , je vais différemment.

Le chagrin est toujours là, le manque cruel, le souvenir de sa souffrance et de sa mort viennent toujours  régulièrement me couper le souffle.
Mais "quelque chose " vient me réchauffer le coeur de temps en temps, comme un amour secret,  doux, intime, une certitude qu' il sera toujours avec moi...

Je vous embrasse, Faïk et Milou, je pense à vous. ( et Noëlle qui a posté entre temps ...)

Nora

On ne meurt pas de chagrin.
Mais on peut se laisser mourir de chagrin.

On peut aussi vivre de chagrin.

Un chagrin qui plonge au plus profond de soi même, là où l'on est totalement et absolument seul.
 
Nul ne peut vraiment partager cette solitude.
Et beaucoup s'en éloigne avec effroi pour ne pas s'interroger sur le sens de leur propre vie.  Comme si la question fondamentale que nous posons était trop effrayante. Comme si les êtres humains étaient devenus immortels  et pouvaient défier la mort en s'éloignant de ceux qui en portent le poids.

La mort n'est pas contagieuse...elle est inéluctable...
Ceux que la mort des autres effraie ne font que courir les yeux fermés au bord du précipice.  Ils seront forcément rattrapés car nous sommes tous mortels et nul ne sait ni le jour, ni l'heure, ni la cause de sa propre mort. C'est cette terrible question que nous portons et qui effraie tant. La terreur fondamentale de l'être humain au coeur de laquelle nous sommes plongés et dont beaucoup ne veulent pas s'approcher, par peur de l'effroyable vacuité de leurs  vies, obsédées par les possessions  matérielles et  dans l'illusion que tout se guérit ou s'assure.

Notre chagrin n'est pas contagieux et  ceux qui nous aiment vraiment prennent le temps de le respecter car ils s'interrogent en même temps sur leur propre vie. Ce temps de recueillement peut être simple et sans mots ( une promenade ensemble par exemple.) , encore faut- il accepter de faire une petite pause avec nous, hors du temps et de la course quotidienne aux loisirs, à la  consommation, à la perfection, à la compétition...

On perd le sens de la vie en perdant le sens de la mort.
Je vous embrasse.
Prenez soin de vous. Vivre de chagrin est possible. Soyons en tous certains pour avancer jour aprés jour.
Milou
 

    Coucou les filles,

    Cette nuit j'ai pondu un petit poème qui rejoint je crois vos douloureuses expériences :

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    Il s'est déversé des soirs et des nuits
    Et des journées noires où le soleil brille
    A me sentir choir à penser à lui
    A ne plus rien croire des choses de la vie.

    Debout sur le fil des morts impossibles
    Epuisée docile au sort d'animale
    Mais souffrant si fort de l'inaccessible
    Sensation fragile à l'accent fatal.

    Risible mendiante de l'éternité
    Dans la vie présente ne trouvant refuge
    Il n'est plus d'idées auxquelles m'accrocher
    C'étaient des folies et des subterfuges.

    Il ne tient qu'à moi d'encore inventer
    A partir de choix purs et colorés
    Naturel essor de simplicité
    Technique aventure de joie recréée.

    Paradoxe enfin de la liberté
    Vivre sans choisir et pourtant aimer
    Aimer d'un amour sans loi limité
    Sans autre retour que d'imaginer.

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    Bien avec vous toutes, Martine.

   
   

Tout simplement magnifique.....merci

Oui merci Souci d'être passée ici et de nous avoir fait ce joli cadeau,

Faïk

J'aime ta façon d'écrire Faik, je vois les images dans ma tête, et c'est beaucoup.
J'aime aussi tes dessins toujours dans le mille
Amitiés