Auteur Sujet: avancer c'est dur mais...  (Lu 13389 fois)

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Hors ligne tony36

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avancer c'est dur mais...
« le: 23 juillet 2018 à 15:03:05 »
Cela fait quelques temps que je ne passe que peu sur le forum.

Les histoires se suivent et se répètent dans la souffrance sans jamais se ressembler.  Il est temps pour moi de m'éloigner le plus possible de la souffrance, elle est déjà profondément ancrée en moi et me titille déjà assez souvent comme ça.

De mon côté, j'ai réussi à avancer péniblement, avec de l'aide et en me faisant violence. Je me rappelle à quel point le deuil est un enfer, à quel point la souffrance est inhumaine (ou peut-être tellement humaine), et je compatis pour celles et ceux qui passent malheureusement par là. 
Quoiqu'on en dise,  je crois qu'il n'y a pas de souffrance morale plus puissante que de perdre un être aimé, avec des circonstances plus ou moins aggravantes.

Je suis persuadé que les choses qui nous dépassent, Dieu ou les énergies,  ou je ne sais quoi, m'ont permis d'accéder à une seconde vie, comme une renaissance.  J'étais vraiment foutu, à moitié fou et seule la mort me semblait une issue à toute cette histoire dramatique.
Je ne comprends toujours pas pourquoi j'ai pu m'en sortir,  je ne vois pas en quoi je le mérite, d'où est venue la force, à moins que l'humanité soit devenue tellement minable qu'on accorde un tout petit peu de valeur à un être tel que moi.  Peut-être que je vais comprendre ces choses en avançant encore, peut-être que ce n'est qu'une déformation de l'esprit pour donner un sens spirituel à ce qui est arrivé alors que c'est purement la chimie de la vie et de la mort, peut-être un peu des deux.

N'oubliez pas que si vous êtes en vie, c'est qu'il y a encore des choses à accomplir, juste le simple fait d'être là pour ses proches. Alors, que vous pensiez qu'il y ait des raisons pour que vous viviez ou pas, autant continuer à faire des choses ou simplement à exister tant bien que mal dans le temps qui nous est imparti.
Puis, ce sera notre tour d'aller nous reposer et de quitter ce monde qui n'est pas si paradisiaque que ça. Après tout, ce ne sont que les proches qui font que ce monde vaut d'être vécu, pour le reste il tourne à l'envers... Quelques belles choses à voir par-ci par-là et pour certain(e)s des combats à mener.

La mort n'est qu'une étape, soit vers autre chose, soit l'étape finale après laquelle il n'y a que le néant et le retour à l'état  de poussières d'étoile (ce qui ne doit absolument pas faire peur vu qu'il ne se passe plus rien).
Tout dépend si vous croyez en l'âme ou pas, mais dans tous les cas, la mort n'est pas une chose si  horrible pour soi-même, ce n'est qu'une fin ou une transition.
Le but du jeu est d'arriver devant la mort serein, en se disant qu'on a fait ce qu'on a pu dans sa vie sur terre (ou dans cette vie), malgré les drames, d'où l'idée d'essayer de se relever dans le deuil, qu'on y arrive ou pas (c'est plus facile à dire qu'à faire, je le sais très bien, alors on essaye juste et on y parvient ou pas).
 
Dans le pire des cas, la mort peut-être un calvaire douloureux, mais ça n'est qu'un mauvais moment à passer et c'est surtout pour les autres que notre mort sera source de souffrance pendant longtemps. C'est pour cela qu'il ne faut pas la provoquer, surtout pas, même pour abréger ses propres souffrances insupportables. C'est sur les autres qu'on reporte la souffrance si cette décision est prise.

Concrètement oui j'ai pu me sortir du fond du chaos, car je fais des choses, je réalise des projets, même si je conserve des séquelles importantes : une certaine mélancolie durable comme une colère latente, et bien sûr, de la culpabilité, des regrets et tout simplement un grand manque.
Le manque de mon épouse, mon grand amour qui est mort soudainement en suffoquant cette année 2015.
10 minutes interminables à retenir son corps et à essayer de la faire respirer  jusqu'à l'arrivée des pompiers.  C'est gravé dans mon esprit et il ne se passe pas une journée sans que j'y pense.

Peut-être qu'un jour, le désespoir remontera à la surface et que je sombrerai de nouveau ou que je "péterai les plombs" car le combat contre la souffrance ne me semble prendre fin qu'à notre mort.  Il suffit d'une petite étincelle pour réactiver toute le mécanisme de la souffrance...  Mais en attendant, j'avance, du moins j'essaye, en gardant l'espoir. L'espoir de quoi ?
Simplement de faire ce que j'ai à faire pour mes proches tout en tenant le coup face au chagrin et à tous les maux de l'esprit.

Je voulais juste dire que, malgré tout cet enfer, on peut espérer un jour une amélioration dans la souffrance, peut-être même un certain bien-être, voire une autre vie, avec de la chance ou du travail, après quelques années parfois,  mais avec sans doute comme je le disais une certaine fragilité qui persiste et qui ne demande qu'à ouvrir la porte de nouveau au désespoir et à tous les maux de l'esprit. Je sais aussi que l'on peut définitivement sombrer et je ne jette pas la pierre à celles et ceux qui ne se relèvent pas de cet enfer pour vivre dans une petite mort.

J'ai bien vu que lorsque la vie était déjà bien entamée, une seconde vie est un concept bien utopique, comme j'ai constaté que le cataclysme de la mort d'un être aimé était plus difficile à accepter si ce n'était pas dans l'ordre naturel des choses et/ou si l'on n'y était pas préparé, qu'il était particulièrement insupportable. Que dans ce cas, notre esprit est profondément meurtri.
J'ai bien vu aussi sur ce forum et ailleurs que les croyances divergeaient quant à l'existence ou non de l'âme (avec différentes versions plus ou moins spirituelles ou religieuses), moi qui ne croyais absolument pas à "ces conneries" avant, et que ces croyances avaient une profonde influence sur la façon d'appréhender le deuil car le concept de mort prend soit le sens d'une transition  soit le sens d'une fin définitive de tout comme je le disais, même s'il devrait exister une convergence sur l'avant mort consistant à penser qu'il faut utiliser  au mieux le temps qu'il nous reste.

Au final, chaque histoire et chaque personne sont de toute façon uniques, avec un passé et un entourage différents comme des raisons de rester debout plus ou moins valables.
Chaque deuil est donc tellement différent qu' aucune recette de cuisine ne peut s'appliquer pour tenter de le surmonter au mieux.

Je souhaite à ceux qui sont dans la souffrance la plus sourde et aveugle de trouver un peu de mieux, d'avancer, il faut du temps, certains y arrivent, d'autres non et je vous souhaite sincèrement d'essayer d'avancer un peu pour vivre quelque chose de tolérable et peut-être même de vivable.

Hors ligne Bmylove

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Re : avancer c'est dur mais...
« Réponse #1 le: 23 juillet 2018 à 18:34:35 »
Un grand merci Tony pour ton témoignage sincère et sans fioritures.
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Hors ligne qiguan

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Re : avancer c'est dur mais...
« Réponse #2 le: 23 juillet 2018 à 22:45:35 »
merci Tony
quel chemin !
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Hors ligne maniaclik

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Re : avancer c'est dur mais...
« Réponse #3 le: 30 juillet 2018 à 00:09:49 »
Tout est dit...bon courage pour la suite! En espérant que les années qui passent apaiseront petit à petit ton âme! Je me retrouve tellement dans ton texte....
 

Hors ligne 3 pommes

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Re : avancer c'est dur mais...
« Réponse #4 le: 30 juillet 2018 à 12:01:09 »
Tu as raison Tony avancer c'est dur mais il le faut, pour eux, pour nous et pour notre entourage.
Je continue à lire chaque jour, je réponds quelquefois mais c'est vrai que c'est rester dans la souffrance du deuil.
Après 26 mois pour moi, mon chemin n'a pas été facile comme pour chacun de vous. J'avance mais je n'oublie pas.
Le manque est toujours là, parfois la résignation fait surface aussi.

Bonne route pour toi .