Auteur Sujet: Le rapport au conflit  (Lu 5728 fois)

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Lauren

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Le rapport au conflit
« le: 12 janvier 2012 à 10:29:42 »
Bonjour à tous,

Ma fille est ch.. comme beaucoup d'ados, elle a décidé de prendre mon appartement pour un hôtel, genre "ya plus rien à manger!" alors qu'elle n'a pas eu cours de la journée et que je rentre à 21h ( 18 ans, elle est capable de faire les courses, le ménage, le repas, de temps à autres, mais rien). Elle est partie chez son père furieuse parce que je lui ai dit d'aller faire les courses et que ce n'était pas une option, et il va falloir que je mette les choses au point quand elle reviendra et ça me fatigue.

Le moindre conflit, la moindre remarque un peu sèche de la part d'un de mes patients, une personne de l'administration qui est désagréable au téléphone et ça y est, je suis anéantie, la grosse vague de tristesse me retombe sur la tête, je voudrais un gentil monde de bisounours depuis qu'il est mort et ya pas sur cette terre.

Tous les sentiments, toutes les émotions multipliés par 10, exacerbés, impossible de m'assouplir, de plier et de laisser passer les mini-orages. Je n'encaisse plus, et personne ne comprend. J'ai envie de leur dire: ne me cherchez pas en ce moment, vous m'écrasez, je n'y arrive pas. Je l'ai dit une ou deux fois et les gens me regardent complètement hébétés.

Le deuil ce n'est pas seulement la tristesse et le manque, c'est aussi une fragilisation immense, enfin pour moi, et ça me fatigue d'être devenue perméable à tout.

Si vous avez un avis sur la question...

Je vous embrasse fort tout. Lauren

aeris

  • Invité
Re : Le rapport au conflit
« Réponse #1 le: 12 janvier 2012 à 11:15:11 »
Bonjour Lauren,

Comme je te comprends !!
J'en ai souvent pleuré de ces situatons. On est très fragile et en même temps on espère que le deuil que l'on vit, qui nous change, fera que les personnes seront gentilles (monde de bisounours  ;)). Mais non ! La vie continue pour tout les autres et leur mesquinerie (pour certains) n'a pas de limite, ni leur bêtise d'ailleurs.

Je pourrais écrire un livre de toutes les méchancetés, banalités que j'ai pu entendre et qui m'ont fait souffrir. De tous les combats que je dois mener alors que je suis épuisée.
Je pense que je le ferais. Pourquoi pas publier ce genre de chose ? Cela pourrait faire sourire certains, réconforter d'autres qui vivent la même chose.

Le deuil nous transforme en une pièce faite d'allumettes. C'est beau, ça à l'air solide mais il suffit d'un souffle pour que tout s'écroule...

Ce qui me permet de tenir face à tout ça : me dire que les gens, heureusement pour eux !, ne connaissent pas notre souffrance. Je les envie même parfois  :P

Bises.


carolineb

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #2 le: 12 janvier 2012 à 11:21:22 »
Lauren,


Tu peux inverser la tendance. Tu te dévalorises inéluctablement en te laissant atteindre par les contrariétés quotidiennes des crétins (je ne parle pas de ta fille) qui sont dans la médiocrité de leur vie plan-plan. Quand Olivier est mort, je me suis vue passer ma vie à raser les murs comme si, ouais, parce que j'étais seule, abattue, laminée, ma voix et mon avis ne valaient plus que pouic. Mais rien du tout. Je suis comme toi, je réagis au quart de tour, mais je mets un point d'honneur à ne surtout pas me laisser entrainer dans la tristesse par des abrutis extérieurs au problème!
Eh Lauren, transforme ce désespoir en force. Tu es forte de ton histoire, on l'a dit mille fois, lyriquement ou crûment sur ce forum.
Ta fille? La mienne a 16 ans. pour te dire, le diner plateau d'hier soir est toujours sur la table du salon, papiers et pots de yaourts vides en prime. les chats vont jouer avec et c'est sûr, archi-sûr, ce soir ça va être disco.
Mais crois-moi, en deuil ou pas, on vivrait la même chose!
Au début, j'étais tellement fragile qu'ouvrir la boîte à lettres c'était un cauchemar. Maintenant je l'ouvre, je regarde, et telle l'autruche quand je pense que je vais être contrariée, je laisse les enveloppes dedans!!!
Bon, pas de méthode miracle...il nous en faut de la gnaque pour y arriver.
Je t'embrasse Lauren!
Caroline

Lauren

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #3 le: 12 janvier 2012 à 11:53:25 »
 
Bonjour Caroline ça fait plaisir de t'entendre :D

Ben depuis que j'ai laissé ce message je me suis dit que, probablement, peut-être, je suis devenue cassante quand je parle, et que je ne m'en rends pas compte. Faut être honnête :-\

Mais quand même, j'aimerais que le monde me berce parfois, me chante des chansons douces et me raconte des histoires le soir avant de m'endormir  8).. Régression? Retour au ventre maternel?

Bises L


carolineb

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #4 le: 12 janvier 2012 à 12:08:29 »
Lauren!

Tu sais quoi...j'étais libraire jeunesse, des histoires j'en connais plein!...et bien, tu serais étonnée, y 'en a beaucoup qui finissent mal.
Promis, quand on se rencontre, je t'en garde une toute douce et rassérénante.
BIZES

Hors ligne Pascale

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #5 le: 13 janvier 2012 à 00:55:14 »
Je vous lis toujours attentivement, pour ta fille Laureen fait toi confiance , ne réfléchi pas trop, vas-y a l'instinct c'est comme ça qu'ils fonctionne , les ados sont encore assez sauvage et puis parle lui franco... Meme si elle te sort une vacherie..
Enfin il n'y a pas de recette, petite étranger que l'on met au monde souvent on essaie de les apprivoiser pour garder intact l'amour qu'on leur a donne tout petit mais voilà ça poussée ces affaires la.. Et puis ça a du caractère enplus et il ne se laisse pas faire et c'est là qu'on comprend qu'on est la pour les guider au mieux et les aider mais surtout en se faisant respecter...
Bizz a vous...
j'aime les ados ils me surprennent toujours et meme parfois dans leur cruauté.
Pascale la Louve

Lauren

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #6 le: 13 janvier 2012 à 08:55:05 »

Bonjour à tous, Aeris, Caro, Yohann, Pascale,

Et ça continue, hier bombardée de SMS par ma fille : "tu es égoïste, je suis pas ta bonne, je fais tout pour toi,.." auxquels je n'ai pas répondu. Je connais ma fille: c'est une crème de môme, mais quand elle est en rogne, tous aux abris, je ne parle plus, jusqu'à ce qu'elle soit dans de meilleures dispositions. Inutile de polémiquer, elle aime trop ça, je ne vais pas lui offrir ce plaisir. 

Bof, des ados j'en ai eu 3 dans les pattes, je ne discute pas. Ils savent parfaitement qu'ils sont en train de déc.. Et puis j'ai horreur, le mot est faible, des engueulades stériles. On parle quand l'orage est passé.

Bon pour parler d'autre chose, Caroline, le positivisme dont tu t'es fait une religion ;) me laisse pantoise.

Bises à tous L


carolineb

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #7 le: 13 janvier 2012 à 09:22:06 »
Ouh la la! Pas de religion! Tu me connais! Tout ce qui entrave ma liberté ...non merci!
Pas de positivisme non plus, simplement de la confiance. Parfois j'en fais des excès, mais dans l'ensemble ça me convient.
Ce qui me permet d'avancer...c'est d'ouvrir les yeux sur le reste du monde: ne pas être enfermée dans ma peine, mais la remettre en perspective.
Ma fille s'en est pris une secouée hier soir, et le pire, le pire! c'est que j'ai eu l'idée saugrenue de sortir avec un ami avant-hier soir, ciné et débat, et qu'elle m'a attendue assise dans son lit jusqu'à 2 heures du mat. et donc j'ai eu droit à une remontée de bretelles!
Non, mais, je te le dis Lauren, les valeurs ne sont plus ce qu'elles étaient!
Je t'embrasse fort fort
J'ai hâte de te rencontrer
Caroline

Hors ligne Marina Saboya

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #8 le: 13 janvier 2012 à 10:02:59 »
Ah, les filles, vos histoires d'ado me font penser ... que finalment ce n'est pas un drame d'être stérile!
Non, je ne le pense pas, je vous rassure, mais quand même, dans ces moments où vous avez besoin de douceur et de câlins! Quelles vaches ces gamins!

Engueulades ou silence réprobateur... Tout cela, n'est-ce pas un peu aussi pour vous provoquer? Ou pour montrer avec pudeur leur propre souffrance?

En tout, ce n'est pas facile.
Moi, j'ai mes parents à la maison. Octogénaires, handicapés... et je peux vous dire que la vieillesse est aussi égoïste que la jeunesse.
Et beaucoup moins gaie!

Bises.

Marina
PiMa

Mieux vaut souffrir d'avoir aimé que de souffrir de n'avoir jamais aimé.

carolineb

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #9 le: 13 janvier 2012 à 10:48:26 »
Marina,

Je crois que la leçon c'est, on porte chacun notre croix! Lol. On adore nos enfants, on adore nos parents mais on a aussi le droit, à certains moments, d'en avoir ras la pastille!
C'est si compliqué de tout concilier...
Je t'embrasse fort
Caroline

Marico

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Re : Le rapport au conflit
« Réponse #10 le: 13 janvier 2012 à 11:57:49 »
Oui, Lauren, le deuil est une "fragilisation extrême", je suis bien d'accord avec toi.

Ce qui est certain, c'est qu'avec les années, la fragilisation -si elle est toujours là- ne dévoile que la force qu'elle a malgré nous créée. On se blinde, on s'endurcit, on met la tête dans le guidon et on avance, contre vents et marées et on laisse sur le bas-côté ceux et celles qui ne nous apportent rien ou qui nous blessent même sans le savoir. On ne perd plus de temps, on n'a plus de pitié pour les cons.

J'ai appris une forme d'égoïsme à trop avoir été déçue ou abusée par les "nonendeuils", je m'inquiète en priorité de mes enfants, et depuis peu, un peu plus de moi. Mais je me ferme à la douleur des autres, à leur opinion...

J'ai moi aussi une ado de 16 ans (et un fils de 12 ans), copie conforme de tous les ados du monde... piles d'assiettes dans sa chambre, culottes sales sur le sol, lit pas fait, trognons de pomme sous le lit... j'ai trouvé la parade... 1€ de moins sur son argent de poche, chaque fois que je rentre dans son antre et que je vois le foutoir... (je n'y rentre pas tous les jours, ce qui m'enrichirait sûrement mais limiterait très vite les finances de ma fille... alors je menace et je préviens au moins une fois par semaine de mon prochain coup de balai... et ça marche !...)

Quand mon mari est mort, mes enfants ont été odieux. Je ne comprenais pas, ils étaient dans la révolte, dans l'opposition, ils faisaient des conneries et me rendaient la vie impossible. Ca a été très dur. Ils me voyaient prostrée sur le sol de la cuisine... Ils devaient être terrifiés. J'ai réalisé qu'en plus de leur propre douleur, il avaient peur de me perdre moi aussi et leur comportement, c'était une façon de m'obliger à tenir debout, à faire face... Grâce à eux, je n'ai jamais pris d'antidépresseurs, ils ont été mieux que ça !... Je dis toujours qu'ils sont mes "coups de pieds au fond de la piscine". Quand je vais mal, ils sont là, ados et chiants et heureusement, et quel bonheur de les avoir !...

Oui, ils sont égoïstes, cossards, égocentriques, cra-cras, leur musique casse les oreilles, leurs centres d'intérêts aussi, ils ont des copains et beaucoup trop, ils ne pensent qu'à eux, vident le frigo et gèrent notre emploi du temps comme s'il était le leur (on est à LEUR disposition !), mais ça prouve qu'ils sont dans la vie, et qu'ils avancent en dépit de leur chagrin. Et c'est tant mieux. Ils nous rappellent qu'on doit en faire autant et que seul demain compte. Hier... les souvenirs... la nostalgie, c'est pas leur truc et moi je vis comme un immense privilège d'être mère d'enfants jeunes aujourd'hui. C'est dur souvent, j'ai des pulsions infanticides au moins une fois par jour (et encore plus maintenant que mon fils est déscolarisé !) mais je les aime même si les élever me demande une énergie phénoménale !

Je laisse passer les orages quand ils éclatent, on en rediscute ensuite.
J'ai instauré des cadres dans lesquels je laisse une certaine liberté.
Je demande à mes enfants de respecter les règles et en contrepartie, je suis plutôt cool pour les choses moins importantes. Une règle non respectée et c'est une sortie qui saute... ma fille ne s'y risque pas, elle sait que je suis intransigeante et que je me fiche de l'opinion de ses copains. Mais à 16 ans c'est encore gérable. A 18 beaucoup moins, évidemment...

En tous cas, courage à toi Lauren. C'est vrai que notre fragilité est infinie, on apprend peu à peu à ne plus l'exposer à personne, même à nos propres enfants. C'est une question de survie !

Je t'embrasse.
M.


Lauren

  • Invité
Re : Le rapport au conflit
« Réponse #11 le: 13 janvier 2012 à 12:59:36 »

Bonjour Marico, Marina, tout le monde,

En fait Marico, pour être honnête, j'ai multiplié mon boulot par 2 depuis septembre, pour oublier probablement. Ma fille fait souvent les repas, je rentre à la ramasse et je ne dis pas que le repas est réussi. Mais vu que je suis d'une mauvaise foi insigne, comme tout bon parent qui se respecte, je vais lui préciser fermement ce soir qu'elle n'a pas à me parler comme elle l'a fait, avant de glisser à la fin du repas qu'elle aura préparé que c'est délicieux. Faudrait quand même pas qu'elle croie qu'elle peut tout se permettre!

Caro ton petit chaperon de 16 ans veille sans doute scrupuleusement sur ton célibat. Petite ado attentionnée et prévoyante..

 :-* L