FORUM "LES MOTS DU DEUIL"

Comprendre et vivre son deuil => Vivre le deuil de son conjoint => Discussion démarrée par: ppo le 20 mars 2013 à 18:35:22

Titre: 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 20 mars 2013 à 18:35:22
Je ne sais pas comment commencer, je ne sais pas ce que je cherche en écrivant ...peut être comme ce que j'ai pu lire m'exprimer tout simplement à l'heure ou le quotidien de tous reprend son cours...ou presque que pour tous. Mais m'exprimer sur quoi, exactement je ne sais pas.
Je ne veux pas que mon quotidien reprenne... de toutes façons mon quotidien n'est plus....il faut maintenant réinventer une vie a deux avec notre fils de 5 ans...le deuil, ma tristesse, mon angoisse sur son éducation, tout ce que son père ne pourra lui apporter
La maladie nous l'avions niée longtemps (même toujours, jamais nous n'avons eu de longues discussions sur la gravité que peut être un cancer. aujourd'hui dans la tête de beaucoup les cancers se soignent alors comme celui ci touche notre foyer on le prend comme une mauvaise passe pas plus) pour continuer à vivre "normalement" au rythme des chimios, hospitalisations et de sa fatigue. Aujourd'hui je ne veux pas nier ma tristesse, je veux vivre ce deuil...mais quotidiennement des "obligations" s'imposent, c'est dur.
C'est confus dans ma tête alors il m'est difficile de retranscrire mon état, ma douleur, mes impressions.
Peut être que je suis la tout simplement pour rencontrer des semblables...
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Yohann le 20 mars 2013 à 18:57:54
ppo,


Je crois qu'il ne faut pas vouloir avoir les idées claires, dans ces circonstances, pour commencer à parler.

Parler de ses ressentis, seulement 5 semaines après une telle situation est toujours difficile et en même temps, c'est indispensable pour tenter d'évacuer tout ce qu'on a sur le coeur !

Ne pas se sentir seule; parler de tout ce qui te vient pour le moment; parler de ce qui s'est passé.
Sans doute aussi pleurer en pensant ou parlant, ... suivi d'un peu d'apaisement.

Et puis, parler, cela signifie aussi avoir une écoute en face qui peut comprendre parce que dans la même situation de deuil.
Ici, c'est le cas.

Il ne faut pas que le quotidien te reprenne en t'empêchant de vivre réellement ton deuil.

Tu sais, tous, nous sommes passés par une période de déni ... de la maladie, de sa gravité, puis du décès, simplement parce que c'est trop dur à accepter d'un coup !

Oui, il va y avoir des obligations, mais oui aussi, il ne faut pas rester seule à affronter cette situation.

Venir en parler ici, ou avec des proches qui peuvent comprendre, c'est recevoir un peu de compréhension, de soutien et d'aide.
Comme se sentir moins seule à partager ces instants difficiles.

Alors, non, tu n'es pas confuse, il faut seulement que tu puisses expliquer doucement, avec tes mots, ce qu'il s'est passé et comment tu te sens en ce moment !

Et nous serons là avec toi !


 :-*

Yohann
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 20 mars 2013 à 20:08:59
Deja merci, pour vos réponses. j'ai lu sur le forum quelques une de vos interventions...merci à vous pour moi, pour nous

L'heure du coucher de mon fils approche...je visualiserai les liens

J'espere trouver les mots pour partager mon histoire, mes émotions...

PPO c'était en quelque sorte la signature familiale sur les cartes postales, les mails, les albums photos... Notre surnom
P pour Peggy
P pour Philippe
O pour Oscar notre fils

A travers ce sigle je continue à le faire vivre... c'est un peu comme son foulard que je porte nuit et jour depuis 5 semaines et un jour!
Peggy
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Caroline3 le 20 mars 2013 à 20:12:15
Bonjour Ppo,

Ce que tu as  vécu, je sais bien que pour ma part (oublier que le cancer tue), je l'ai vécu exactement comme tu le décris: on va s'en sortir, on s'en est toujours sortis.

Élever une petite de 7 ans sans son père, c'est presque impossible  à y croire, lorsqu'on regarde l'homme dépérir. Un papa, un conjoint... on peut s'en séparer, mais on ne peut pas le faire incinérer!

Cinq semaines, c'est trop court, pour faire la part des choses et tu le dis bien: tu veux vivre le deuil, tel qu'il est: une immense tristesse, une "job" à n'en plus finir, avec un jeune enfant... des responsabilités qui, quelque part, semblent à la fois inutiles et une obligation, puisqu'on est seule.

Personne d'autre ne viendra payer nos dettes, personne pour faire les tâches quotidiennes, personne pour éduquer l'enfant.

Ce deuil est terrible. Reste qu'il faut absolument croire, même au pire de la douleur, que nous allons y voir plus clair, qu'il y aura quelqu'un qui nous aidera.

C'est promis :)

À +

Tendrement, Caroline à Québec
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Caroline3 le 20 mars 2013 à 20:14:11
Un vidéo magnifique, du site:

http://www.inrees.com/videos/190/

Ça m'a plus qu'aidée: ça m'a sauvée.

Caro
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Yohann le 20 mars 2013 à 21:16:45

Peggy,

Ce déni du cancer, je l'ai vécu à tous ses niveaux, pour croire et surtout convaincre qu'on peut vaincre cette maladie.

J'avais convaincu Monique ... et moi aussi, et on a presque gagné, oui, gagné !

Quelques mois plus tard, la réalité nous revenait en pleine face : métastases.

Alors, comme un fou, j'ai voulu convaincre pour empêcher sa peur de revenir.
Je savais que tout était perdu et pourtant, j'ai réussi à la convaincre de se battre pour encore gagner.
Et ... à me convaincre, moi aussi !

Sans pouvoir repousser l'inévitable ... :'(
Mais elle ne l'a jamais su et a eu confiance jusqu'au bout !


 :-*


Yohann

Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Yohann le 20 mars 2013 à 21:20:01

Caroline,

Ce deuil est terrible. Reste qu'il faut absolument croire, même au pire de la douleur, que nous allons y voir plus clair, qu'il y aura quelqu'un qui nous aidera.


Oui, on s'est tous aidés et on a tous avancé sur le chemin, même si nous n'en avons pas encore atteint le bout, là où la clarté apparaîtra !


 :-*

Yohann

Titre: Re : Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 20 mars 2013 à 21:49:53
Quelques mois plus tard, la réalité nous revenait en pleine face : métastases.

Oui voila le mot est lancé, pire que la découverte d'un cancer se sont les métastases.
Avril 2011, une cancer du rectum a été diagnostiqué à Phil... traitement, opération en quelques je voyais l'affaire soldée
un an plus tard, des troubles de son bras gauche l'ont inquiété, ce soir là il m'a dit (et c'est la quasi seule fois que nous avons évoqué la gravité de la situation) "Je le sens pas" c'était au retour d'un week end de Pentecôte passé à la mer
et en effet des métastases c'étaient développé au cerveau
Paniquée à l'annonce du diagnostic, Phil m'a rassuré et a essuyé mes larmes. Devant sa sérénité, j'ai accepté peut être naïvement cette situation. Jamais je ne me suis renseignée sur Internet (peut être aussi par peur je pense)...

Peggy


Yohann


[/quote]
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: serafina le 20 mars 2013 à 22:03:12
Peggy,

Je suis de tout cœur avec toi. J'ai perdu mon conjoint début février. Ce n’était pas un cancer mais une sale maladie rare.
On a pas demandé au docteur quel était vraisemblablement le futur que cette maladie lui réservait. On le savait à peu près. On avait lu les informations sur une autre maladie qui était similaire à la sienne.  Peut-être qu'on avait peur de savoir, peut-être qu'on ne voulait pas savoir, ne pas être une autre statistique, vouloir se battre jusqu'au bout, courageusement. Tout va bien aller qu'il disait. Au fond de moi je savais mais je ne voulais pas savoir.. de toutes manières, qu'on sache ou pas, c'est dur.

Je te souhaite beaucoup beaucoup de force. J'ai aussi 2 enfants en bas age. On va s'épauler. Se dire quand ça va pas et aussi quand ça va... se soutenir.. C'est pour ça qu'on est là, pour se donner la force de continuer. Un jour on ira mieux, c'est sur, même si on ne peut pas l'imaginer maintenant, un jour çà sera différent...

Je suis avec toi, Peggy... 
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: LILI0824 le 20 mars 2013 à 23:12:52
Bonsoir Peggy,

je n'ai jamais voulu croire que mon mari allait partir, pourtant les médecins me l'ont dit au bout de quelques semaines. Métastases partout. J'ai gardé pour moi.  Et je me suis convaincue aussi. Nous n'avons jamais eu de grandes discussions, jamais parlé du partir, et  ça ne l'aurait pas aidé. Avant lui,  je ne connaissais pas le cancer, et n'ai pas eu le temps de regarder sur internet comment gérer.

Il y a eu si peu de temps entre le diagnostic et sa fin de vie, que je n'ai pas eu le temps de penser à ce qui était bien ou mieux. J'ai fait comme je l'ai senti. J'ai fait comme si tout était normal, pour lui.

Que l'on ait du temps, beaucoup, peu, c'est difficile, au-dessus de nos forces. On fait de notre mieux , on tient, c'est tout.

Ce forum est une bénédiction. J'y ai trouvé et y trouve  de la consolation,  de la compréhension et un peu d'apaisement.

N'hésite pas à dire tes ressentis, il y aura toujours quelqu'un pour toi. 5 semaines, c'était hier. Tu as l'impression d'être confuse, ce n'est pas grave. Tu seras comprise.

Je suis de tout coeur avec toi.

Tendrement.



Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ROUBOU35 le 20 mars 2013 à 23:40:23
Bien que nous ayons eu connaissance tous les deux de l'état de Philippe et de chaque évolution du cancer, il y avait une sorte de dédoublement dans notre cerveau, un déni et même lorsque le cancérologue nous a dit qu'il n'y avait plus rien à faire, nous sommes allés au bord de la mer, et pensé que nous pourrions faire encore des sorties en pensant qu'il n'aurait plus de chimios , donc plus de nausées et donc plusieurs mois de bonheur à vivre ....

Lorsque nous sommes allés aux urgences le dernier soir parce qu'il avait vomi (il est resté à la maison jusque là), mon esprit refusait encore de croire que c'était peut-être la fin, je n'y pensais même pas.
Tous nos amis et la famille savaient, nous savions objectivement mais ne voulions pas y croire et le savoir.

Quelle folie mais c'est peut-être ce qui permet de tenir jusqu'au bout ?? Et ce déni dure encore après ...

5 semaines, c'est peu. Prends soin de toi Peggy, essaie de te reposer et tout ce que tu peux ressentir, n'hésite pas à l'exprimer ici, rien de ce qui te semble bizarre ne l'est pour nous, nous avons vécu cela et te comprenons si bien.

Je t'embrasse affectueusement et le petit Oscar aussi
Dominique
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: *Ephémère* le 21 mars 2013 à 08:02:22


Bonjour Peggy,

Chercher à savoir (ah internet....) ou non ; entendre ou lire l'abomination à venir, et ne pas croire ; songer "pas lui, non, pas lui..." face à  l'évidence insoutenable .....
Mon silence pour le protéger, son silence pour m'épargner.
Le fichu tabou respecté ; pourquoi ?
Mon refus d'envisager un avenir sans lui ; son refus d'imaginer la fin de cette vie qu'il aimait tant.

Et le silence.

Et le matin qui se lève.
Malgré lui qui ne voulait pas partir, malgré moi qui n'ai pas demandé à rester.

Tu as raison, Peggy, nous sommes semblables par cette épreuve qu'il nous faut traverser ; par ces éprouvés et ces émotions que nous devons affronter.

Je t'offre en partage, ma certitude que le temps, inexorablement, usera notre peine.

A bientôt, Peggy.




Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: chrisam le 21 mars 2013 à 08:58:39
Moi non plus, je n'ai pas compris ou voulu comprendre qu'elle allait partir.
La veille au soir, j'y croyais encore ou je n'ai pas réalisé, bien qu'on avait commencé les piqûres de morphine., on me disait qu'on allait la transporter 2 étages plus haut, aux soins palliatifs.
Je n'ai pas compris ou voulu comprendre, les médecins ne m'ont rien dit non plus.

Et puis, à 9h30, le matin, elle s'en est allée
Et la, j'ai pris cela comme si je prenais un mur de face à 200km/h
Je ne crois pas être dans le déni, je sais qu'elle est partie.
Mais je m'en veux de ne pas lui avoir parlé, lui dire combien je l'aimais, lui crier tout mon amour dans les dernières heures.
Après 5 mois, toujours effondré, je pleure, parfois envie très forte de la rejoindre
Vous allez écrire qu'il faut du temps, que la 1ère année est la plus dure.

Je sors du psy ou d'un groupe de paroles, 1 heure après, de nouveau effondré.
La tristesse a envahi mon corps, il transpire la tristesse, je sens la tristesse.

J'aimerai donner du courage aux autres personnes sur le forum, mais impossible.
Je lis le forum, plusieurs fois par jour, mais j'y écris moins qu'avant, même pour un appel au secours, je m'enfonce.
J'avais lu, soit sur le site, soit sur le livre de Chr Fauré, après 6 ou 8 mois, c'est encore pire, car presque plus personne ne s'intéresse à la personne décédée.
Et il avait raison, juste quelques personnes.
Je n'en veux pas aux autres, mais c'est triste, et ça n'améliore pas mon état.
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: *Ephémère* le 21 mars 2013 à 09:02:29


Christian, pour toi, tout spécialement, je fais glisser sur le fil le soleil qui réchauffe, enfin,  le paysage ce matin.

Et mon soutien ; et mon espoir que bientôt ta peine se fasse moins lourde.

Je t'embrasse.


Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: chrisam le 21 mars 2013 à 09:07:17
Ephémère,
Merci, mais j'espère ne pas tomber dans le deuil pathologique
Tu as écrit dans un autre fil de discussion : "le temps use la peine"
...
oui, 5 mois, c'est long et court
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Laurent48 le 21 mars 2013 à 09:50:32
Chrisam, quand je te lis, je me dis que ce pourrait être moi qui les ai écris. Hier, ça a fait trois semaines que mon amour est parti. J'ai les tripes en lambeaux et moi aussi je pense combien j'aimerai aller le rejoindre. Mais ce n'est pas ce qu'il aurait voulu... Mais comment faire pour s'habituer à cette solitude forcée à un àge où on pensait avoir la vie devant nous? Il avait vaincu aprés un combat de plusieurs mois son cancer pour finalement mourir d'une fibrose pulmonaire. Comment rebondir, recommencer? Parfois, lorsque je fais des choses ordianaires comme jouer avec ma petite chienne où manger un bout de chocolat, je me dis: mais enfin, comment tu peux faire ça alors qu'il vient de mourir? Et en même temps, je me dis que je ne peux pas non plus m'assoir sur mon canapé et me laisser mourir... Le deuil est fait de paradoxe, de culpabilité et de questions. Comment faire? Les modules, je les ai vu, mais et aprés? Il ne me reste que cette insoutenable solitude, cet avenir que je ne veux pas... Ces nuits où je sombre sous les somnifères et qui me laissent angoissé au réveil. Merde! Je ne veux pas vivre cette saloperie d'expé rience, je veux juste mon bébé!!! Il était ma vie, mon soleil, ma raison de vivre, mon coeur...
L.
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Antje le 21 mars 2013 à 11:10:39
Ah, ces jours, ces semaines, ces mois... Que l'on égraine, que l'on ne peut s'empêcher de compter, encore et encore...

Les dates nous font mal, et pourtant on continue à compter, un peu incrédules devant ce temps qui nous éloigne de plus en plus de notre Amour et en même temps nous fait progresser dans notre deuil... Ce temps qui passe désormais sans nous.

Je pense fort à vous tous, et spécialement à toi, Peggy. Que votre journée soit la plus sereine possible.
Titre: Re : Re : 5 semaines et un jour
Posté par: chrisam le 21 mars 2013 à 11:37:47
Ah, ces jours, ces semaines, ces mois... Que l'on égraine, que l'on ne peut s'empêcher de compter, encore et encore...

Les dates nous font mal, et pourtant on continue à compter, un peu incrédules devant ce temps qui nous éloigne de plus en plus de notre Amour et en même temps nous fait progresser dans notre deuil... Ce temps qui passe désormais sans nous.


ce temps qui nous éloigne de plus en plus de notre amour ...  tu me fais venir les larmes,
je ne crois pas que notre amour s'éloigne vis-à-vis de nous, je ne sais pas, je ne sais plus
suis trop dans les abysses

le temps use la peine ... mais à quel rythme ?
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 21 mars 2013 à 11:40:38
J'aimerai reprendre l'ensemble de vos témoignages car tout y est

L’impression qu'on ne lui a pas assez dit combien on l'aimait et tellement de choses. Phil est décédé le mardi, depuis le samedi il n'avait plus de réaction et depuis le vendredi il ne parlait ni ouvrait les yeux. Son dernier regard a été pour son fils. Je me souviens lui avoir dit le dimanche, je ne sais plus quoi te dire...alors qu'aujourd'hui je pourrais lui parler pendant des heures, comment ne pas savoir quoi dire à notre amour que nous savons condamné...

La culpabilité, quand la maladie s'est installée je parlais de mon envie de vie "normale", alors que j'avais la chance de me trouver dans le monde des biens portant alors que lui se trouvait dans celui des maladies.

L'insoutenable solitude, le monde avance et nous ne sommes plus de celui-ci. Aujourd'hui nous nous trouvons dans le monde des endeuillés alors que nos proches restent dans leur monde. Ne plus le toucher, l'entendre, le sentir, s'y réconforter, s'y confronter...

Agir comme il aurait voulu, mais dans les faits il est impossible de passer à l'action.

Pour moi, il est trop pour que le temps use cette peine. je la veux présente. Je suis en train de lire le deuil au jour le jour et j'ai visionné la conférence (merci pour ce lien, je pense à le faire circuler à mes proches), mais je ne veux pas user le "livre" qui chamboule nos émotions je veux pleurer à l’écoute de Barbara, Gainsbourg, Chopin, pleure sur le livre "un papa en or" qui recueille des témoignes, anecdotes sur Phil pour notre fils, pleurer en voyant les photos, pleurer en regardant notre placard...déjà je sens que je ne peux pleurer que seule. Mon entourage essaie de me changer les idées...je ne veux pas les juger, en effet si la situation n'était pas ce qu'elle est, comment aurais-je agit? Je parle à demi-mot de mon deuil on me parle des enfants, de leurs questions face au cancer...

Il y a quelques jours je ne décrochais pas mon téléphone quand les émotions étaient au plus haut mais hier je me se surprise à répondre comme un message "Je ne vais pas bien, je ne veux pas parler d'autre chose" et de ce fait la conversation a tournée uniquement sur le deuil...

Pleurer seule ou vous écrire en pleurant...
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Antje le 21 mars 2013 à 12:00:49
Oh, Christian, je ne voulais pas te faire pleurer...
Quand je disais que le temps nous éloignait de notre Amour, je voulais dire qu'il nous éloignait des derniers moments partagés avec lui, vivant. Mais non, lui il ne s'éloigne pas, jamais, au contraire il est bien au chaud dans notre cœur.

Peggy,
Tu as raison, pleure si tu en ressens le besoin, parle de Phil si tu en ressens le besoin. Le temps usera notre peine, oui, mais tout doucement, et il ne sert à rien de le brusquer. En attendant, on a besoin de la vivre, cette peine, c'est elle qui nous relie à notre aimé, c'est elle qui nous oblige à plonger au plus profond de nous-mêmes. Il ne s'agit pas de "tourner la page" ou de "passer à autre chose", bien au contraire.

J'ai lu ou entendu quelque part "La seule façon de surmonter son deuil, c'est de le vivre". Regarder les photos, lire les témoignages, écouter de la musique qui nous fait pleurer... On en a besoin, cela nous permet d'accueillir la souffrance, de ressentir pleinement nos émotions.
Ne te laisse pas dicter ta conduite, n'écoute pas ceux qui essaieront de te convaincre que faire des choses tristes t'enferme dans ta souffrance. Ils sont bien intentionnés, mais ils n'ont aucune idée de ce que tu vis. Toi seule peux sentir ce qui te fait du bien, ce dont tu as besoin.
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Yohann le 21 mars 2013 à 15:28:50

Peggy


L’impression qu'on ne lui a pas assez dit combien on l'aimait et tellement de choses. Phil est décédé le mardi, depuis le samedi il n'avait plus de réaction et depuis le vendredi il ne parlait ni ouvrait les yeux. Son dernier regard a été pour son fils. Je me souviens lui avoir dit le dimanche, je ne sais plus quoi te dire...alors qu'aujourd'hui je pourrais lui parler pendant des heures, comment ne pas savoir quoi dire à notre amour que nous savons condamné...


Oh, cette phrase, ta phrase !
Comme je me reconnais dans tout ça !

Ne pas avoir dit, ne pas avoir pu dire tout l'amour qui nous habitait, simplement parce que, bien que connaissant l'issue fatale, j'avais réussi à la convaincre qu'elle guérirait comme le coup d'avant.
Et donc, ne plus pouvoir lui parler, ne pas dire Au Revoir, pour ne pas alarmer.

Et puis, la veille, un espoir fou, un miracle : tous les bilans étaient redevenus normaux.
Elle allait vivre, je rêvais et elle riait au téléphone en me disant de venir payer la télé, le téléphone, ... !

Le lendemain matin : "Il ne reste plus que quelques heures à vivre !"
Pourquoi ?  :'(

Alors maintenant, je lui parle, je lui demande pardon d'avoir menti, mais plus rien n'écoute !
Et je reste seul avec ou plutôt face à moi-même.


 :-*

Yohann

Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 21 mars 2013 à 17:15:40
A vous,

Voila pourquoi mes amis ne me manquent pas (je n'aime pas dire cela...), VOUS savez trouver les mots. Des mots qui me parlent, qui vous parlent, qui nous interpellent, des mots que nous comprenons, des situations que nous avons vécu avec nos tripes...et que nous vivons sans cesse dans nos mémoires.

Vous lire me fait du bien (bien que je n'aime pas non plus ce terme..) ou plutot n'empire pas mon mal

Merci
Titre: Re : Re : 5 semaines et un jour
Posté par: chrisam le 21 mars 2013 à 17:28:50

Assez rapidement moi aussi je n'ai pu que pleurer seule. C'est pour ça aussi que l'entourage à du mal à percevoir notre réel état émotionnel. On apprend petit à petit à mettre ses émotions en mots.


Pratiquement qu'il faille dire à l'entourage que ça va si on ne veut pas passer pour un ? ? ?


Désirer moins souffrir tellement c'est une torture mais aussi être consterné des premiers instants de mieux, d'un sourire, d'un rire, de cet humour qu'on utilise. C'est pas possible que je survive alors on replonge dans chagrin qui fait des pics comme des contractions.
Mais ça va à l'envers. D'abord si rapprochées qu'on ne peut reprendre son souffle puis peu à peu plus espacées et moins longues.


Tu as décris exactement ce que je ressens, pour le peu de COURTES périodes de mieux que j'ai


D'efforts en souffrances nous revenons peu à peu à l'essentiel, à l'origine de notre amour qui a construit tout le reste.
Un jour nous ne ferrons à nouveau plus qu'un et se sera une plénitude.

Véronique

Oui,mais quand ? ? ?
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: chrisam le 21 mars 2013 à 21:38:47
Malheureusement, on peut écrire que les jours se suivent et se ressemblent ...
Titre: Re : Re : 5 semaines et un jour
Posté par: LILI0824 le 21 mars 2013 à 22:28:55
Citation de Yohann

Alors maintenant, je lui parle, je lui demande pardon d'avoir menti, mais plus rien n'écoute !
Et je reste seul avec ou plutôt face à moi-même.

Yohann


Yohann,
Les médecins m'ont dit qu'il n'y avais pas d'issue, et ils m'ont laissée. Je suis retournée vers mon mari et il m'a dit : il voulait quoi ? J'ai dit : rien, c'était juste des papiers à compléter. Il m'a regardé fixement, puis à détourné son regard, et n'a rien dit.

Et à partir de cet instant, et jusqu'à son dernier souffle, j'ai eu le sentiment  de l'avoir trahi. Et à cause de ça, je ne lui ai pas dit au revoir moi non plus.

Mais ce n'est pas à nous n'est ce pas de dire des choses pareilles ? C'est déjà impossible à penser. 

Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 21 mars 2013 à 22:50:43
Quelques jours avant, Phil a dit à un ami 'il est temps que ça se termine", pourquoi rien a moi, pourquoi a-t-il souhaité allumé la télé quand j'ai abordé le fait qu'il m avait caché des infections aux poumons??
Certainement pour me protéger une fois de plus, je lui en veux pas mais je m'en veux à moi de ne pas avoir aborder plus profondément la gravité de la situation dans laquelle nous nous trouvions...par pudeur et pour ne pas éveiller les soupçons je n'ai pas osé lui répéter jour après jour combien je l aimais...car en plus après avoir vécu 2 ans la maladie, notre relation amoureuse était différente de celle d'un couple en bonne santé
J'ai seulement pu lui chanter "quand reviendras-tu"...au fond de moi je connaissais la réponse et lui également...mais comment lui a vécu cette période, dans quelles conditions est-il parti?
Physiquement, je le sais il est parti à la maison, le jour ou nous (avec sa soeur et notre dr) avions pris la décision douloureuse d’arrêter l'hospitalisation à domicile. A l’arrivée de l'ambulance il a fait une pause respiratoire; nous avons donc pris la décision de ne pas organiser le transfert.
Mais psychologiquement, comment avoir la certitude que nous, je, avons fait le mieux pour lui...
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 21 mars 2013 à 23:14:46
Et toi, dis-moi comment tu vis
Dans quel village, dans quel pays
Abri de paille ou de béton
À quoi ressemble ta maison

voila ce que mon fils apprend à l'écoute...en la ré écoutant sur soir j'ai pensé à son papa..
Titre: Re : Re : Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 21 mars 2013 à 23:23:34

[/quote]

Mais ce n'est pas à nous n'est ce pas de dire des choses pareilles ? C'est déjà impossible à penser.
 


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Non ce n'est pas à nous, et à l’hôpital je trouve que nous sommes faces à ces questions sur le respect de la dignité des malades (les dr ne se mouillent pas).
Peut on réellement parler de soins palliatifs dans les hôpitaux, dans certains peut être mais pas dans tous
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Yohann le 22 mars 2013 à 13:33:06

Peggy,


Je ne sais pas à qui il appartient, affectivement, de faire ce pas.

J'avais parlé au cancérologue le premier jour et lui avais demandé clairement la situation, qu'il m'a donnée : pas d'espoir !
Alors, nous devions nous voir le lendemain tous les 3 avec Monique, pour en parler ensemble, dans sa chambre.

Quand le lendemain est arrivé, nous avons parlé tous les 3, ... mais pas de la gravité de la situation, au contraire, de l'espoir !
J'ai été suffoqué !

En sortant, j'ai discuté avec lui; sa réponse a été droite et honnête : "En mon âme et conscience, à ce moment-là, j'ai su que je n'avais pas le droit de lui ôter l'espoir. Cet espoir peut faire des miracles, je n'avais pas le droit de la priver de cette minime chance !"

Avec cette réponse et son absence de position avec Monique, il me rendait prisonnier de mon mensonge. Moi aussi, je devais continuer à lui faire croire !
Je l'ai fait jusqu'au bout, en souffrant, moi qui avais toujours dit : "Je ne te mentirai jamais !"


 :-*

Yohann

Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: poetjebobble2 le 26 mars 2013 à 22:43:44
Bonsoir Peggy,
Je reviens de temps à autres sur le forum. Pour ma part, 8 semaines et 1 jours depuis que cette maladie l'a emportée, après 5 années de combat.
Je n'ai " que " 3 semaines d'avance sur toi. Le moral en dents de scie, des regrets de ne pas avoir fait encore davantage, nous les connaissons tous ici. Des proches qui s'éloignent peu à peu, qui ne comprennent pas notre " maintien " dans la tristesse, qui voudraient que nous avancions, ... et nous n'y parvenons pas.
Certains matins sans envie ... en se demandant pourquoi et pour qui ? Et d'autres matins, un peu plus d'entrain pour parfois retrouver un peu plus de tristesse le soir. Oui, tu as frappé à la bonne porte pour exprimer tes ressentis et être comprise.
Aujourd'hui, j'ai eu une grosse joournée de boulot pendant laquelle j'ai eu la chance de rencontrer des gens hyper sympas. Il y a même eu une personne qui a réussi à me faire rire et je suis rentré chez moi plus serein que les autres jours. Cela t'arrivera aussi et je tenais à t'en faire profiter. Saisis tous ces petits moments d'évasion que tu peux avoir. Un jour à la fois. Patience. Tu y arriveras.
Bon courage.
Marc
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: ppo le 27 mars 2013 à 12:02:00
Bonjour Marc, Bonjour à tous,

Hier ça faisait 6...6 semaines....
Je n'ai pas encore repris le boulot, je me traine (je fais des efforts pour mon fils et encore je suis loin de la maman d'avant!)...peut être qu'aujourd'hui sera différent

Merci pour ton petit mot, merci à vous

J'ai passé ces derniers jours à me renfermer, à lire, à penser, à trainer....alors le réseau amical/familial s'est mis en alerte car inquiets....du coup j'ai reçu la visite d'une amie....de savoir que je n'allais pas, elle n'a pas essayé de me faire blagué, non avons pu parler de Phil, du père, du pote et du cheri qui l'était, de la colère qui m'habitait, de la façon dont les gens se conduisent etc....

Je ne voulais pas trop voir ceux que le quotidien avait rattrapé trop vite à mon goût, mais cette visite m'a fait beaucoup de bien. Certes notre entourage a parfois des difficultés à nous comprendre...mais il ne faut pas briser ce lien que nous avait rapproché à l'époque ou nous tous vivions la vie

Aujourd'hui c mercredi je vais essayer de rester dans la même dynamique pour mon fils...

Bientôt Pâques (bien que non croyant), Oscar associe cette journée, les chocolats, un bon repas, la belle table, déco de la maison...à une journée de fête...Première épreuve, premier pâques sans Phil...il va falloir tenir pour Oscar encore et même mieux car en plus j'ai un terrible sentiment d'être la mère que je ne voudrais pas... du coup d'ailleurs pour lui, pour qu'Oscar ne soit pas le souffre douleur de sa maman, je vais me mettre à la sophrologie...je ne le souhaitais pas pour moi, car je n'ai pas envie d'aller mieux...mais il faut que me douleur s'exprime différent

Allez aujourd'hui je vais me donner les moyens!!...

Peggy
Titre: Re : 5 semaines et un jour
Posté par: Toupie le 27 mars 2013 à 18:46:07
Bonjour,

J'ai perdu mon mari cela fait 23 jours. Il était sur une pente de ski et se préparait à donner des cours. Je suis arrivée au centre de ski plus tard car nous avions des amis à la maison. Bref, je n'étais pas là à son dernier moment sur la terre et je m'en veux tellement, mais je sais que cela est la destinée. Il était très en forme, ne buvait pas, ne fumait pas, faisait beaucoup de sport, Cela aurait fait 33 ans que nous sommes mariés cet année. Tout d'un coup, c'est le tsunami. Le rideau se ferme. Je perd mon rock de Gibraltar. Il était tout pour moi. Il faisait beaucoup d'activités caritative et sportives et était heureux comme cela. Moi, au contraire, je préférais demeurer à la maison et lire. Il avait beaucoup d'amis, moi très peu. J'ai la chance d'avoir eu deux magnifiques filles de 26 et 28 ans qui me supporte comme elle le peuvent.  C'est épouvantable, je m'ennuie de lui tellement. Aucun signe avant-coureur. Il avait passé des tests chez le médecin et tout était correct. Ma fille la plus vielle est revenue rester avec moi pour un an. Je dois m'occuper de tous les papiers, de vendre notre maison ou nous devions aller rester dans 2 ans.  J'ai milles questions sans réponses je le sais, mais je sent un bouchon à la place du coeur, et lorsqu'il y a un trop plein, cela sort un peu à la fois.  Je tente de rester courageuse pour mes filles qui aimaient tellement leur père. Il faisait des activités sportives avec chacune d'elle.
On dit que le temps, seulement le temps arrive à penser la peine.  Comme j'aimerais me geler l'esprit !  Je ne désire voir personne, mais me force  a rencontrer famille et belle-famille car mes filles et moi sommes invités dans la belle-famille pour Pâques.  Nous irons mais n'en avons pas le goût.

Merci de m'avoir lu.