FORUM "LES MOTS DU DEUIL"

Comprendre et vivre son deuil => Vivre la perte d'un parent => Discussion démarrée par: Philippe99 le 19 avril 2021 à 15:48:26

Titre: Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 19 avril 2021 à 15:48:26
Bonjour à toutes et à tous,

J’ai découvert ce forum ce week-end et j’ai donc décidé à mon tour de témoigner.
Même si la peine ne se partage pas, chaque histoire et parcours étant différents, les personnes sur ce forum connaissent la douleur profonde que représente la perte d’un être cher. S’il y a une solitude dans cette souffrance qu’il faut vivre au quotidien, savoir que d’autres pourront la comprendre immédiatement permet, peut-être, de s’exprimer plus facilement.
J’imagine que, comme pour moi, chaque témoignage est difficile à lire car il ramène inexorablement à la peine que l’on connaît.

Avant de développer un peu, je vous présente le contexte général. J’ai eu 3 vies, celle que j’appelle la vie d’avant, avant le 14 juin 2013,  faite de joie et de bonheur (des soucis comme tout le monde mais au final sans gravité); la vie dure, injuste et cruelle remplie d’épreuves traumatisantes où la vraie liberté n’existe pas et ma vie actuelle où la liberté est désormais totale mais sans les personnes qui m’aimaient le plus au monde (et réciproquement). Mi-décembre 2020, j’ai perdu mon papa et six semaines plus tard, fin janvier 2021, c’est ma maman qui est partie. Ils sont partis tous les deux dans mes bras dans des conditions difficiles. J’ai 54 ans, mon papa avait 86 ans et ma maman 84.

Notre famille a été durement touchée il y a plus de 7 ans lorsque ma maman a fait un AVC, se retrouvant terriblement handicapée sur le plan physique et neurologique, totalement dépendante et sans pouvoir s’exprimer, ni complètement comprendre.
Alors que les institutions voulaient caser ma maman n’importe où, nous avons avec mon papa ramené ma maman à la maison car la place des personnes qui souffrent est auprès de ceux qui les aiment. Un cadre infirmier m’a simplement dit que je faisais cela pour me donner « bonne conscience ». Il a fallu, seul, tout organiser et constater que rien existe pour vous aider réellement. Trois année plus tard, c’est mon papa qui a commencé à décliner avec la terrible maladie de Charcot. Il était exclu pour moi qu’il ne reste pas la maison. Durant toutes ces années, comme de nombreuses familles, j’ai connu les hôpitaux avec des protocoles absurdes, les personnes incompétentes, minimalistes et ceux qui savent mieux que vous-même ce qui est bon pour vos parents. Bien sûr, par honnêteté, il faut rendre hommage à ceux qui font leur métier de manière remarquable et avec dévouement mais les structures brisent souvent la volonté de ceux qui veulent apporter toute leur humanité.
Avant les fêtes de Noël, mon papa est parti.
Trois semaines plus tard, alors que rien ne le laissait présager, ma maman étant en bonne forme, il fallu l’hospitaliser. Je savais alors que sa vie était en danger,  non pas pour la raison initiale, mais parce qu’elle avait besoin de beaucoup d’attention.
La première semaine, j’ai pu durant les visites lui donner à manger et à boire, tout se passait bien. En fin de semaine, cas Covid dans le service, fermeture de celui-ci et interdiction de toute visite. Ma maman s’est retrouvée seule, abandonnée, sans attention durant une semaine complète. A son retour à la maison, elle était  très dénutrie, très déshydratée et en état d’épuisement profond.
Ma maman est partie une semaine après son retour …
Je n’ai pas, aujourd’hui, l’énergie de développer tout ce que j’ai fait et vu en tant qu’aidant (j’ai horreur de ce mot), mais ceux qui connaissent cette situation savent le réel calvaire que cela représente au quotidien. J’ai réorganisé toute ma vie pour m’occuper de mes parents et je ne regrette en rien ce que j’ai fait car je sais que sans cela mes parents seraient morts depuis longtemps. Pour autant, il faut le vivre au quotidien …
Le départ de mon père était déjà difficile; j’avais encore maman qui avait besoin d’attention et le rythme de vie restait inchangé (infirmières,  intervenantes, kiné, …). Le départ soudain de ma maman m’a terrassé. Tout dans la maison est devenu si calme, si vide; cela accentue l’absence et renforce le côté définitif de la situation.
Parfois, j’imagine mes parents, à nouveau ensemble pour l’éternité, joyeux, souriants, enfin apaisés, retrouvant la sérénité qu’ils méritent tant.
Mais souvent, les images qui reviennent sont difficiles car je revois les derniers moments, terribles.
Les souvenirs des sourires sont aussi terriblement éprouvants car c’est sans doute ce qui me manque le plus.
Tout, autour de vous, continue comme si de rien n’était (et c’est normal) alors que l’on est dans une peine extrême, le temps s’étant arrêté.
Je sais que le temps doit faire son œuvre. Je suis aujourd’hui moins abattu mais tout cela reste fragile. Je savais pertinemment que leur départ serait difficile pour moi, mais on ne peut pas se préparer à cette étape ultime.

Je pense que certaines/certains d’entre vous se reconnaîtront, en tout ou partie, dans mes propos.
Je n’aime pas la formule « bon courage » car lorsque tous les soirs l’infirmière me disait ‘bon courage’ , cela signifiait pour moi que je me retrouvais seul à affronter les difficultés qui allaient se présenter, mais je nous souhaite de trouver la force nécessaire pour affronter cette peine et de retrouver un peu de sérénité.

Merci d’avoir pris le temps de me lire.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: chris le 20 avril 2021 à 18:26:27
Bonjour Philippe,
Vous avez bien fait de venir sur ce forum ou chacun peut partager son histoire et être compris car nous partageons hélas tous des moments de souffrance ici.
Votre notion de plusieurs vies me fait écho  , qui pour ma part sont un peu différentes .
Celle comme vous ou  je profitai du bonheur en toute insouciance,  puis lors dés  premiers symptômes  de la maladie d’Alzheimer de mon papa à 60 ans .
Habitant dans le même village , j'ai pu le soutenir ainsi que ma maman .Nous avons affronté ses premiers oublis , tout doucement au début puis tout s'est enchainé , les moments les plus durs ou il a  fallu qu'il cesse d’être président de la société du village,  et surtout lui dire qu'il ne pouvait plus conduire (il conduisait de l'autre coté de la voie), et même plus possible de partir à pied car son repère était la bande blanche du milieu pour marcher. Quelques années se sont écoulées et le physique n'a plus suivi et il est décédé à 67 ans en 2000.
La vie a repris son cours ,  toujours présente pour maman qui a accumulé des soucis de santé , cardiaque , rénal et pulmonaire. J'ai été à ses cotés pour le quotidien en supplément des infirmières, toilettes repas car elle ne se déplaçait plus . Elle a été hospitalisée 15 jours il y a 7 mois  mais  se voyant si mal, elle ne voulait pas de ma présence pour m'épargner. Je l'ai donc vu très peu et elle est décédée à l’hôpital .
Aider mes parents pour moi était une priorité tout comme vous mais  vivre  leurs difficultés au quotidien  a été des moments tellement forts en émotion  que je vous comprends .
Une nouvelle vie sans ses parents , c'est tellement difficile mais il faut se concentrer sur les bons souvenirs et penser qu'ils sont réunis et surtout qu'ils ne souffrent plus.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 21 avril 2021 à 11:19:16
Oui, Chris, nous avons des parcours de peine qui se rejoignent et vous connaissez sans doute, malgré tout l’encadrement que vous citez (infirmières, ...), les moments de solitude profonde lorsque que l’on réalise la situation. Je me souviens de petits moments de légèreté, suite à un sourire de ma maman et immédiatement après le constat terrible que l’on se satisfait finalement d’une toute petite chose dans un océan de difficultés et que l’on ne pourra rien changer.  On se contente de petits bonheurs, vite écrasés par l’ampleur de la souffrance vécu. Je m’efforçais de faire sourire ma maman en faisant tout le temps le clown,  alors que derrière le masque, je pleurais …
Je n’ai aucun regret de mettre impliqué autant auprès de mes parents, c’est pour moi tout à fait normal. Ce qui me fait le plus de mal n’est pas de revoir toute les épreuves auxquelles il fallu faire face seuls, mais de me dire qu’après toute une vie de travail au moment où tout un chacun a droit à profiter de sa retraite, mes parents à ce moment là n’ont pas eu cette chance. Je rêvais pour eux d’une vie tranquille sans trop de soucis, ce qui me protégeait aussi par ricochet. Nous avons connu tout l’inverse. C’est ce qu’ils ont vécu qui me fait le plus de peine.Le fait que mes deux parents soient aussi durement touchés l’un comme l’autre est aussi difficile à accepter; se rajoute aussi le fait qu’ils soient partis ensembles, comme si rien ne pouvait les séparer même dans les épreuves.
Vous avez raison, je me dis aussi qu’ils ne souffrent plus et continuent ensemble de faire leur chemin dans la sérénité (62 ans de vie commune). Mais, comme toujours, au-delà des mots, tout le monde est confronté au deuil un jour, mais il faut la vivre cette situation et c’est bien le plus difficile.
Concernant les  vrais bons souvenirs, d’abord ils sont loins pour moi car les bons souvenirs les plus récents remontent à plus de 7 ans et ce long tunnel de peine est tellement impactant que ce sont les mauvais moments  qui reviennent plus directement ; et surtout lorsque je pense à ces bons moments, pour l’instant c’est extrêmement difficile car ils sont le témoignage de ce qui n’arrivera plus et renforce le fait que la vie a définitivement changé. Les mauvais moments reviennent alors que l’on ne s’y attend pas. Hier soir, alors que tout allait bien, subitement j’ai revu l’image de ma maman dans son dernier moment et j’ai revu avec exactitude tout ce qui s’est passé, les mots du médecin, chaque seconde … cela me hante régulièrement et on revit son impuissance, son incapacité  à faire quoi que ce soit alors que la vie est en train de changer irrémédiablement.
Oui, la vie reprend son cours, la peine est peut-être moins terrassante, mais c’est fragile …

Bonne journée
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Laure-Leïla le 25 avril 2021 à 22:44:22
Bonsoir,

J'ai été très touchée par vos témoignages, qui m'ont donné les larmes aux yeux...Je suis fille unique, et toute ma vie j'ai été très proche de mes parents. Ils étaient plus que ça pour moi : mes guides, mes confidents. Mon père est mort le 30 octobre, ma mère est encore en vie mais c'est l'ombre d'elle-même (elle est en dépression profonde, placée en EPHAD depuis l'hospitalisation de mon père il y a presque un an). Ces dernières années ont été horribles : à eux deux, ils ont vécu 3 cancers, et le second de mon père l'a tué. J'ai fait de mon mieux (je les ai fait transférer près de chez moi, sans aucune aide de personne), mais je me sens toujours coupable : j'aurais voulu être près d'eux pendant le premier confinement, les prendre chez moi, aller les voir chaque jour à l'hopital, mais j'ai un travail et 2 filles de 11 et 8 ans qui ne vont pas bien suite à tout ça... Et comme vous, je me sens souvent submergée par certaines images - le calvaire de mon père resté hospitalisé alité sous oxygène 5 mois, la déchéance de ma mère qui a fait 2 séjours en HP, la maison soudain vite. Comme vous, j'ai été traumatisée par l'inhumanité de certains soignés, et l'impuissance face à ce qu'ils ont vécu (et que ma maman vit encore) me hante. Malgré mon mari et mes filles, je me sens seule sans mes parents, et j'ai souvent l'impression que cette douleur immense ne s'apaisera jamais.
Je pense à vous, à la force dont vous avez fait preuve pour accompagner vos parents.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 avril 2021 à 11:25:24
Merci pour votre soutien Laure-Leila.
Je comprends tout à fait la peine qui vous accable. Je connais bien ce sentiment d’impuissance et de solitude alors que l’on fait le maximum pour aider nos parents.  Personne ne détient la solution parfaite face à ces épreuves. Je suis sûr que vous êtes le rayon de soleil pour votre maman lorsque vous allez la voir. Vous avez toute ma sympathie.

Aujourd’hui, cela fait exactement 3 mois que ma petite maman est partie et 4.5 mois pour mon petit papa. Je suis trop triste pour développer plus.
Merci à eux d’avoir été des parents exceptionnels.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 28 avril 2021 à 11:36:50
vous vivez deux drames en si peu de temps philippe et quels drames! devenir orphelin de père et de mère représente un grand changement de vie, où on devient adulte d'un coup
un pas après l'autre...
Prenez soin de vous, reposez vous les deuils de ce type épuisent moralement mais aussi physiquement
Quand vous aurez le temps, venez si vous le voulez crier votre peine, parler de vos parents, les faire vivre ici
on vous écoutera
amicalement
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Laure-Leïla le 28 avril 2021 à 21:06:57
Bonsoir Philippe,

Je pense bien à vous pour ces terribles anniversaires. Pour mon papa, l'anniversaire  des 6 mois est dans deux jours, alors forcément je comprends...Chaque mois, le jour anniversaire nous fait si mal...Une amie qui a perdu ses deux parents m'a dit que l'on réalise qu'on va mieux lorsqu'on cesse de compter les mois...Vous et moi en sommes très très loin...
Vos parents ont eu énormément de chance de vous avoir : malgré la douleur, soyez fier de vous, de ce que vous avez accompli pour soulager ce qu'ils vivaient. Je sais que vous pensez ne pas avoir fait assez, car on ne supporte pas l'impuissance face à la maladie, mais vous étiez auprès d'eux et c'est ça qui compte. Ne pas les laisser partir seuls est un merveilleux cadeau que vous leur avez fait. Mais voilà, cet investissement fait que la mort est encore plus terrible : je me suis sentie inutile après la mort de mon papa, ne sachant plus quoi faire de ce calme après des mois à l'appeler, lui envoyer des photos et des messages, aller le voir à l'hôpital tous les vendredis.
Je pense à vous et à cette peine inimaginable que nous avons en commun...
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 29 avril 2021 à 19:08:51
Merci Laure-Leila, merci Katrinap,

Vous avez parfaitement décrit la situation.
Les tiers me parlent en effet de la fierté qu’il faut en retirer et de la beauté de pouvoir accompagner ses parents. Si je comprends très bien ce qui est évoqué, je le dirais moi-même volontiers à une personne dans le même cas, je trouve que ces belles images apparaissent seulement aux autres qui ont le recul nécessaire vu de l’extérieur. En vivant la situation de l’intérieur, vous savez bien que l’on est absorbé par le quotidien (ce qu’il y a à faire, à organiser, l’attente de bonnes nouvelles et surtout pour moi des nouvelles qui vous enfoncent encore plus, …), et qu’après tout ça, pour le moment, je considère que ce que j’ai fait était normal (dans un contexte complètement hors norme).
La fierté absolue aurait été de pouvoir les sauver réellement et mettre fin à tous ces malheurs, ce qui bien sûr est impossible. Au final, j’essaie de ne pas trop réfléchir à ça, pour ne pas tomber dans le « tout ça pour ça ».
 Les infirmières m’ont dit que sans moi mes parents seraient décédés depuis longtemps. Je sais que c’est exact. Ma maman, après son AVC, est restée quotidiennement à mes côtés  durant 7,5 ans et il a fallu 15 jours à l’hôpital, seule, pour qu’elle parte une semaine après.  Après des fausses  routes, j’ai réanimé mon papa à 6 reprises alors qu’il était inconscient, totalement cyanosé; l’urgence absolue vitale vous pousse à faire des choses impensables. Mais, si effectivement je lui ai sauvé la vie, je n’y vois aucune beauté mais plutôt le signe terrible d’une situation qui s’aggravait irrémédiablement et l’obligation de trouver, seul, une solution (à savoir la mise en place d’une sonde entérale, donc d’autres difficultés à gérer). Ces efforts pour s’accrocher à la vie, sans aucun acharnement, mais avec la volonté absolue de maintenir un confort de vie maximal et sans souffrance, restent pour moi  des images dures et pour les tiers le signe de l’attachement que j’avais pour mes parents.
Aujourd’hui, j’allais très bien, puis en rangeant machinalement ma carte bancaire dans mon portefeuille, j’avais oublié que j’avais glissé une photo de mes parents, et elle est ressortie. Cette photo est le dernier souvenir de mes parents, dans une vie normale, c’est eux qui avaient pris cette photo, pour moi, pour me faire savoir qu’ils étaient biens. Revoir leur vrai visage ,naturel, non marqué par la maladie, m’a fait beaucoup de peine.
Même si chaque histoire est différente, il y a un fil conducteur commun, avec la même peine d’avoir perdu un être cher et de ressentir un vide terrible .
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Laure-Leïla le 29 avril 2021 à 22:29:17
Cher Philippe,

Oui, je vois ce que vous voulez dire : je culpabilise énormément, j'ai l'impression de ne pas avoir fait assez pour eux...car j'aurais voulu les sauver, et même prévenir leur maladie... Dans ma tête, beaucoup de "et si" tournent en boucle. Les psy disent que les enfants jouent instinctivement ce rôle de sauveur de leurs parents, ça explique sans doute ce que nous vivons...Rationnellement, je comprends que j'ai fait le maximum, mais émotionnellement je bloque encore. Pour ma mère, j'essaie de faire ce chemin: je ne la sauverai pas de sa terrible dépression qui l'empêche quasiment de vivre, mais je l'accompagnerai. Je dis ça, mais souvent je me prends à penser "et si elle avait pris des anti-dépresseurs avant", "et si je la prenais chez moi". Bref, je crois que seul le temps apaisera ce sentiment de ne pas avoir été à la hauteur. Il ne faut pas négliger un autre aspect : le traumatisme pour les aidants qui font face jour après jour à la déchéance du corps et parfois de l'esprit. Ce que vous avez vécu pendant plusieurs années est terrible. Mon père était hospitalisé, donc ce n'est pas pareil, mais le voir diminué, si maigre, respirant difficilement et dépendant du personnel médical est ce qui a été le plus horrible pour moi. J'ai peur que cela efface l'homme qu'il était avant...Et je culpabilise de ne pas être restée auprès de lui jusqu'à son dernier souffle : il était sédaté, je savais que c'était la fin mais je savais aussi que mes filles m'attendaient en pleurant chez moi. Il est mort une heure après mon départ. Pour l'instant, je n'arrive pas à trouver d'apaisement même si je commence à être un peu moins effondrée. Ca fera 6 mois demain...Courage à vous.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 30 avril 2021 à 11:11:45
Laure-Leïla,
Vous avez raison, en refaisant le film des derniers instants de mes parents, le « et si seulement  » est tellement présent. Si je m’étais levé une heure plus tôt, comme d’habitude, j’aurais pu être présent avant que mon père ne s’étouffe et tombe dans le coma. C’est pire pour ma mère, pourquoi je ne suis pas rentré 1 heure plus tôt, elle était faible, si j’étais resté, je l’aurais entendu tousser et comme d’habitude je serais venu voir et j’aurais pu gérer cette simple régurgitation. De plus, vu sa dénutrition à la sortie de l’hôpital, c’est moi qui ai  insisté pour que l’intervenante donne une collation à 16h pour la rebooster … cette décision a entraîné la suite …
L’expression ‘ la vie ne tient qu’à un fil’ me hante car après avoir évité ou géré de nombreuses situations complexes durant toutes ces années , je me dis qu’il a suffit de très peu pour basculer dans le drame. Je sais que l’on croit toujours que l’on aurait pu faire quelque chose pour changer ce qui s’est passé, mais en l’espèce, ne serait-ce que pour ma maman, c’est un fait, si j’avais été là, elle ne serait pas partie.
On essaie de trouver une explication que l’on aura jamais et qui pourrait peut-être nous rassurer sur le fait que l’on y est pour rien, que l’on a fait exactement tout ce qu’il fallait, un peu comme si mes parents me disaient « ne t’inquiète pas, tout va bien, tu peux être tranquille ».
Je sais que la solution idéale n’existe pas et que l’on fait toujours au mieux avec nos contraintes, mais cela n’empêche pas d’imaginer une situation meilleure si on avait fait d’autres choix. Je comprends tout à fait votre tiraillement entre votre famille qui a besoin de vous et votre envie d’être encore plus auprès de votre maman, tout en sachant que l’équilibre idéal est difficile à trouver car la vie autour de vous continue. Malheureusement personne ne peut donner de conseils,  j’en ai trop entendu de personnes ne sachant pas ce que c’est de vivre réellement cette situation et qui pense que finalement nous manquons de bon sens  (vous devriez …, il ne faut pas …, vous ne devez être que le plan B, …). Il y a vraiment des gens, et je pense notamment au milieu médical, qui ne savent pas ce qu’est la peine profonde. Pas le souci, même important, qui ne sera que passager et qui au fond ne change pas la vie, non, l’impuissance terrible face à un événement qui de toute façon bouleversera votre vie de façon irrémédiable.
En effet, le fait d’avoir vu nos parents frappés physiquement par la maladie est un traumatisme profond car c’est aussi le témoignage que la vie que l’on a connu s’en va. Comme moi, vous avez dû connaître ce sentiment que l’on est au fond du trou, alors que l’on va s’enfoncer encore et encore. Non seulement on est touchés au quotidien durant toute cette descente, mais après le départ de nos êtres chers , on continuera à être impacté longtemps. Le fait qu’ils soient partis dans mes bras est aussi très durs. Je comprends votre regret de n’avoir pu être présente pour votre papa, j’aurais été dans le même cas. D’un côté,  je me dis que j’étais là lors du dernier souffle (que j’entends encore pour les deux), mais de l’autre j’ai vu l’ultime cheminement vers ce dernier instant de vie et j’ai lutté désespérément pour détourner cette route; c’est très douloureux et traumatisant.
Personne ne mérite ce qu’ils ont vécu au lieu de profiter d’une retraite heureuse et paisible; personne ne mérite ce que nous, enfants, avons vécu et vivons encore.
Je suis un peu moins anéanti dans la durée car je m’efforce de m’occuper l’esprit, malgré tout c’est fragile car quoi que je fasse je ne peux m’empêcher d’y penser, d’imaginer ce qu’ils auraient dit ou fait, de ce que j’aurais pu leur raconter …
Je vous souhaite un week-end le plus apaisé possible.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Laure-Leïla le 30 avril 2021 à 15:54:08
Merci beaucoup Philippe pour vos mots, en cette journée particulière pour moi.
Merci de simplement écouter, partager votre expérience sans donner de conseils. Seuls les gens qui sont passés par ces moments terribles savent qu'il n'y a rien à "dire", qu'aucun conseil ne soulagera notre peine : seule l'empathie importe.
Aujourd'hui, je retourne en arrière et revis la dernière journée de mon père, et j'aimerais pouvoir changer le cours des choses...Je sais qu'il voulait en finir, car la vie était devenue trop dure pour lui depuis quelques jours (il n'arrivait plus à respirer), mais il me manque, tout simplement.
Accepter ce manque, accepter toutes les épreuves traversées est un long processus. Moi aussi, j'ai des moments où ça va et je repense au moment où mon père, qui venait de comprendre la gravité de son cancer, m'a regardé dans les yeux et m'a dit "la vie continue, tu m'entends". Alors je le fais pour lui, je fais les choses qu'il aimait faire. Mais parfois la vie me semble si lourde...
J'espère avoir la force ce soir de lui rendre hommage, avec mes filles qui étaient ses soleils, et de penser à l'homme extraordinaire qu'il était, en laissant de côté les images de la fin.
Courage à vous!
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Titi le 07 mai 2021 à 18:43:02
Comme je vous comprends Philippe99.

Mais on ne peut pas faire plus que ce que vous avez fait ...
j'ai perdu aussi mes 2 parents en qq semaines (22.02 et 06.03 de cette année).
Moi aussi, je me suis organisée pour eux, papa mort dans mes bras, maman à l'hôpital, mais entourée de ses 3 enfants tant qu'elle a été consciente.

Je n'ai pas vécu la situation aussi lgtps que vous, je ne sais pas si c'est plus ou moins difficile qd ça dure, moi j'aurais aimé encore un peu de temps, avec papa, comme avec maman.
On a eu le temps de se parler vraiment, c'est ce qui rend la "chose" un peu moins douloureuse, pour papa du moins.
j'aurais aimé avoir du temps, après, pour chouchouter maman, ça n'a pas été le cas.
je m'en veux, et je vous comprends, tous dans tout ce que vous dites, mais je pense que l'on ne peut malheureusement pas changer le fait qu'un jour, on disparaît, tous .... et, phrase que je déteste ... je crois qu'on a chacun nos trucs qui ne passent pas, c'est que "c’est l'ordre des choses de perdre ses parents". Personnellement, parent, enfant, neveu, c'est pareil, et l'âge, c'est pareil, je suppose qu'on n'a pas la même souffrance car adulte, on est censé s'être construit (je ne ^pense pas que ça soit mon cas, mais bon, c'est un autre sujet  ;)) mais la tristesse est là, l'absence est juste horrible ... ce silence dans la maison, plus aucun pied qui traîne, plus le tac tac de la canne, plus de petits gémissement, pas de machine à oxygène ... je trouve que c'est pire qd ça s'arrête que qd on le met en place ... peut-être que le temps aidera ... pour le moment, pour moi en tout cas, je trouve que les sentiments changent, certes, mais ils sont toujours aussi douloureux.

Philippe99, je pense que vous avez bien raison de venir déposer ici voter peine, on la connaît tous ici ... oui, elle est immense, abyssale ... et revivre en boucle certains des derniers moments, c’est vrai que ça arrive très très très souvent ... j'essaie de me forcer à orienter ma pensée vers des "derniers moments" les plus acceptables qd c'est comme ça ... par exemple, le sourire de papa qd je lui ai coupé les cheveux. On a fait des photos, je les regarde parfois, mais c'est curieux, alors que je ne le voyais pas comme malade à ce point, sur les photos, ça saute aux yeux ... comme quoi qd on aime et qu'on s'occupe des siens, on ne veut pas les voir vieux et malade, peut-être.

Je pense que le courage, on en a pour faire ce que vous avez fait, et, effectivement, ça n'est peut-être pas ce qui vous aurait aidé le plus, un "bonne soirée", ou juste "à demain" ...
Merci en tout cas de le dire, car je m'apprête à essayer de trouver une association pour être aux côtés des personnes en fin de vie ... donc, je prends bien note de ce qu'il vaut mieux éviter de dire. C'est vrai ... On ne pense pas toujours comme il faudrait même qd on veut faire du bien.

Bonne fin de journée.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 10 mai 2021 à 11:22:20
Merci Titi pour votre soutien.
Vous avez aussi perdu vos parents très récemment et en très peu de temps. Nous connaissons cette même violence de tout perdre en quelques semaines. Moi aussi, je comptais soulager ma peine en m’occupant encore plus de ma maman …

Je vais globalement mieux car j’essaie de m’occuper l’esprit le plus possible et heureusement j’avais mis en place certaines choses qui me le permettent  (à un moment où la situation avec mes parents étaient un peu stable), et cela s’avère salvateur. Heureusement car je n’aurais pas eu l’énergie suffisante aujourd’hui.
Pour autant, j’y pense tout le temps et au hasard d’une situation, je reviens à la réalité … ils ne sont plus là et là c’est très violent car tout ce que je fais me paraît futile et sans saveur.  Je pense à ce qu’aurait dit mon père, au sourire de ma mère, à ce que j’aurais pu partager avec eux, aux petits moments simples de la vie qui n’ont plus jamais lieu et qui étaient si précieux. Je  me surprends parfois, par réflexe, à regarder l’heure et à me dire, attention, il faut rentrer pour les parents …

Le temps fait  son œuvre au rythme de chacun, mais la blessure reste béante …
Bonne journée
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Titi le 10 mai 2021 à 12:22:51
Bonjour Philippe99,

Ce forum est vraiment sympathique, et j'avoue que les personnes avec qui je dialogue m'aident énormément dans ce long cheminement. C'est vrai qu'on a tous des histoires différentes  mais en même temps, il y a vraiment des similitudes étonnantes parfois, dans ce que l'on ressent.

C'est grâce à un message dans une autre discussion que j'ai eu le déclic hier, du moins, j'ai mis en place hier le projet qui a germé vendredi ou samedi. je voulais le faire, mais en "théorie", intellectuellement, j'avais même dit à mes frères que j'utiliserai la voiture de papa ... sauf que je ne conduis même pas la mienne sans être morte de trouille  ;D
Mais, un partage, des ressentis identiques, et c'est parti ... et pour la première fois depuis des mois, j'ai ressenti une émotion positive, et les larmes n'étaient plus vraiment de la peine, bien sûr, elles en restent teintées, il ne faut pas rêver, mais je me suis sentie comme terriblement apaisée.

Comme vous, les premiers jours, j'en étais encore à raccourcir mes séances de kiné ... au cas où ... ou, comme avant, pour être rentrée et avoir le temps de partager un café avec maman.
Aujourd'hui, je ne l'ai pas fait, j'ai même agit normalement, comme conseillé et comme ça me convient d'ailleurs, cad que j'ai fait un grand détour pour rentrer de façon à marcher ma 1/2 h ... comme il pleut je ne pense pas avoir le courage de marcher ou courir dans la petite forêt, peut-être aurai-je tout de même le courage pour un peu de jardinage, mais au moins j'ai permis à ma séance de bien se terminer comme il faut, pris du plaisir à marcher ...

C'est qqch qui semble assez commun à tous, il me semble, tout comme se dire qu'on aurait pu, qu'on aurait dû ...

Si cela n'est pas indiscret, que faites-vous pour vous occuper l'esprit ?
Je vois que vous, vous avez su anticiper, je n'en ai pas eu le temps, et je comprends à présent que, à la limite, j'en veux presque à mes frères d'être restés après l'enterrement de papa, de ne pas m'avoir laissée seule à chouchouter maman, mais avec ces qq semaines de recul,; qui paraissent malgré tout une éternité, ça n'est pas de leur faute, c'est maman qui a eu la force d'attendre le décès de son mari chéri, de ne pas lui imposer son départ à elle alors que lui se savait condamné, peut-être également a-t-elle tenu bon pour profiter de lui au maximum et être là au moment crucial.
C'est moi qui suis égoïste là, mes frères étaient là, et c'est en réalité une très bonne chose car je n'ai pas été seule pour prendre la décision d'hospitaliser maman.

C'est curieux, écrire et parler d'eux amène les larmes, pour autant, tout à l'heure, j'ai réussi à me concentrer sur le dossier d'assurance vie, sans m'énerver contre toutes ces difficultés qu'on nous ajoute alors qu'on est dans la peine la plus profonde. C'est la 1ère fois depuis décembre que j'y parviens.

Vous avez certainement raison, avec le temps, on les garde en nous, mais avec la distance nécessaire pour avoir une petite place pour faire d'autres choses.

Vous avez raison, il faut vraiment s'occuper ... j'étais hyper active avant, je ne devrais pas manquer de choses, mais je ne me reconnais plus. Le jardin, ça me fait un bien fou, pourtant, je ne fais rien de particulier, je nettoie, je lutte contre le lierre, les pissenlits et les graminées, je tonds et taille ... mais je le fais pour eux, ça m'apaise de savoir que leur maison est belle à regarder, qu'on semble y voir la vie alors qu'elle est cruellement absente, ça suinte de tous les mures, de tous les recoins, et plus je range, trie et jette, plus l'absence prend de place. Mais ce matin, j'ai travaillé aux dossiers chez eux et ai aéré, bcp aéré ... ça remet un peu de vie dans ce vide.

Aujourd'hui, je franchis le pas, j'ai rdv avec l'assistante sociale et vais lui parler de mon projet de formation pour accompagner des personnes en fin de vie, que tout ce qui s'est passé ait un sens. Si l'on ne me juge pas capable, ça ne sera pas grave, je sais que je serais allée au bout, aurais formulé la demande, ça sera déjà pas mal.

Il me reste à vous souhaiter à vous aussi une bonne journée.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 10 mai 2021 à 15:17:43
Je ne sais pas si on peut parler d’une anticipation réfléchie, j’ai saisi une opportunité, un moment, sans savoir réellement à quel point aujourd’hui ce serait salvateur.
La longue descente que j’ai connue avec mes parents étaient faites de paliers. La situation s’est aggravée, on sait qu’elle va encore se détériorer, mais à chaque palier on souffle un peu car on sait que cela ne va pas durer, on fait un peu comme si tout allait  bien ou du moins comme si on avait  réussi à ralentir cette descente vertigineuse. A l’époque, une situation sous contrôle, un sourire de ma maman et le pouce levé de mon papa, et je retrouvais de l’entrain.
Je me souviens très bien  d’un soir, il y a un an et demi, j’étais content d’avoir un peu de calme depuis qq jours et je me suis mis à rêver projet immobilier, comme dans une vie normale, j’ai regardé des annonces, d’abord par curiosité et pour passer le temps. Puis, je me souviens précisément de mettre dit, si tu ne le fais pas maintenant, tu ne le feras jamais, à fortiori s’ils (mes parents) ne sont plus là. Et tout s’est enchaîné, dans la nuit j’avais trouvé plusieurs annonces, la semaine d’après les visites, la décision finale et la condition donnée au notaire « il faut impérativement que tout soit bouclé, remise des  clés en un mois, faute de quoi le projet pourrait être compromis et ma motivation anéantie par des impératifs ».  Je n’ai plus assez d’énergie pour faire cela aujourd’hui. Durant plus d’une année, l’appartement étant situé à une heure de route, je n’y allais seulement que le mercredi après-midi pour souffler un peu et faire comme si j’étais libre.
Aujourd’hui je partage ma semaine entre ces deux résidences. L’une où les souvenirs sont présents, l’autre où je n’ai aucun souvenir avec mes parents. Éloigné du lieu, que je ne quitterai jamais, c’est presque une autre vie. J’ai repris le sport, donc avec la rencontre de nouvelles personnes, qui ne sont au courant de rien. Évidemment, en permanence, je me dis que cela aurait beaucoup plu à mes parents; ce regret fait mal, mais je sais aussi qu’ils auraient été très contents pour moi.
Avec le recul, avoir fait ce projet dans mon contexte me paraît incroyable, mais parfois on fait des choses dont on ne doute pas de la portée.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Titi le 10 mai 2021 à 17:10:07
Quelle force de vie ...

Et oui, ils seraient très contents ! J'en suis sûre !!

J'aimerais avoir ce courage car la question se pose concrètement maintenant pour moi  >:(

D'un autre côté, c'est vraiment tout l'un ou tout l'autre, à un époque, j'avais entrepris de faire traduire mes diplômes pour aller vivre en ... Norvège, la porte à côté donc  ;D
Plus récemment, j'ai voulu déménager pour fuir, le voisinage, la douleur de la maladie, le confinement et tout ... en fait je comprends que c'était pour me fuir moi, sans aucun réel but.
Et quand papa s'est trouvé paralysé, je me suis félicitée de ne pas être en Norvège, même s'il me reste une certaine nostalgie pour ce pays fantastique. Je sais aussi que, dans de telles conditions, je serais revenue sans me poser de question si j'avais déménagé dans le coin, en France, pas loin d'ici ou même loin d'ailleurs ... je ne travaille plus ...

Mais je comprends parfaitement cette dualité de sentiments, à mon avis, c'est logique, on cherche à avancer malgré tout, à tourner une page, mais sans oublier, et je suppose que ça demande une adaptation de qq temps. Je ne sais pas, c'est l'impression que j'ai.

En fait, à y réfléchir, votre appartement, c'est un peu comme moi et mes parents, on vivait chacun dans sa maison, mais on se voyait 15 fois par jour !!!! Du coup, dormir chez eux et les soigner, ça ne m'a changer que d'inverser les temps passés dans une maison ou l'autre, pourtant, tout le monde dit que c'est tout une histoire. C'est vrai que savoir qu'on a la possibilité de souffler, de s'isoler, même juste une heure, ça permet d'encaisser les moments difficiles. Mais ça me rassurait tellement aussi d'être là, que c'est donnant donnant, ne trouvez-vous pas ?
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 11 mai 2021 à 10:15:15
En fait, nous avons été confronté à un évènement d’une gravité absolue, la perte de nos parents avec un parcours douloureux qui a changé nos vies, cet évènement restera grave pour toujours, sans réelle explication qui pourrait nous apaiser (pourquoi nous, pourquoi ce parcours de souffrance et de peine, pourquoi maintenant,  pourquoi une perte des deux parents si rapprochée, …), avec peut-être toujours le sentiment que l’on aurait pu faire un petit quelque chose en plus. Face à cela, la vie continue qu’on le veuille ou non. Il faut réapprendre la liberté, même si cette liberté rappelle cruellement le prix qu’il a fallu payer. Avant, la peine venait de ma situation au quotidien, aujourd’hui elle vient des souvenirs; même les bons souvenirs sont encore difficiles car ils témoignent d’une vie passée que l’on ne retrouvera plus.
Malgré toutes les difficultés que cela impliquait, je sais que si je ne m’étais pas occupé de mes parents, je l’aurais vécu encore plus mal, sans parler du fait que c’est à la maison qu’ils étaient le mieux soignés, avec la meilleure attention et le temps nécessaire.
La place des personnes qui souffrent est auprès de ceux qui les aiment …
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 mai 2021 à 07:58:19
Aujourd’hui cela fait exactement 4 mois que ma petite maman est partie et a rejoint mon petit papa, parti à peine 6 semaines plus tôt.
Je concrétise tous les jours l’aspect définitif de la situation; ce point de non-retour devant lequel on reste impuissant, face à sa propre peine. On a beau raisonner, analyser, prendre du recul, se dire qu’on a fait plus que le maximum, cette peine est bien là, cachée, même dans les moments d’insouciance, prête à resurgir et on a alors l’impression de ne pas avoir beaucoup avancé. Il ne faut plus penser, ne plus penser aux moments de partage, de complicité, ne plus penser aux sourires, ne plus penser au bonheur d’être simplement ensemble. Mais impossible d’oublier …   
Évidemment la vie continue, mais il faut redonner du sens à ce que l’on fait … facile à dire.
Je vais mieux, mais je vis comme avec une blessure béante, elle est toujours présente, toujours douloureuse, surtout si j’y prête trop attention, parfois insupportable, je m’y habitue, je vis avec mais j’y pense en permanence.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Serine le 30 mai 2021 à 07:24:17
Je vous comprends tant.
Ce manque,  cette blessure béante , cette impuissante et cette dure réalité qu'on ne les verra plus jamais. Difficile à accepter. J ai perdu ma maman il y a un an et je n'y arrive pas, c est toujours aussi dur. Dans mes souvenirs,  elle est tellement vivante, comment s habituer à ce manque , parfois je ne réalise toujours pas.
Courage à vous Philippe.
Une pensée à toutes les mamans parties si loin de nous
Bonne fête à elles toutes
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 18 juin 2021 à 08:03:21
Cela fait aujourd’hui 6 mois, que mon petit papa est parti.
Déjà 6 mois et pour moi c’est comme si c’était hier.
Peu de mots, beaucoup de peine et de tristesse …
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 18 juin 2021 à 09:05:48
bonjour Philippe
ce sentiment que c'tait hier vous le garderez sans doute un certain temps le processus est long
Vous avez dans ce que je peux ressentir à travers vos lignes une forme de résilience étonnante et une vraie force
sans doute celle de l'amour que vous ont donnés vos parents et qui vous porte aujourd'hui malgré la douleur de la perte
venez parler ici de vos parents si vous en avez besoin, pour les faire vivre à travers vos jolis écrits
nous vous soutenons c'est si douloureux
amitié
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 juin 2021 à 07:56:12
Merci Katrinap pour votre soutien.

Aujourd’hui nouvelle date bien triste, cela fait 5 mois que ma maman est partie. Comme sans doute beaucoup ici, on compte  les mois, comme si cela pouvait changer quelque chose. Le temps passe mais tout est tellement présent.
Pour arrêter de penser, j’essaie de combler le vide par des activités, pour m’occuper l’esprit et m’échapper un peu de cette réalité. Difficile de trouver tout le temps un sens à ce que l’on fait; un peu comme se forcer à rire quand on n’en a pas envie. Bien sûr je suis moins anéanti, mais tout est fragile. Au hasard d’un propos, d’une situation, d’un souvenir, on réalise, à nouveau, et tout remonte à la surface en détail. J’ai désormais la liberté dont je rêvais pendant toutes ces années durant lesquelles je m’occupais de mes parents, mais au final le prix à payer est trop élevé, pour en profiter pleinement pour l’instant.
Les proches, pour qui c’est déjà du passé, un événement dont on ne parle plus; malgré toute leur empathie, leur vie n’a pas changé et poursuit son cours. Alors que pour moi la vie a radicalement changé et il faut combler le vide qui s’est définitivement installé. Cette nouvelle vie où même les instants plus légers ne font que souligner que rien ne sera plus comme avant. Les belles choses de la vie sont autant de moments que l’on ne pourra plus partager. C’est ce qui me fait le plus de mal.
Nous savons tous ici que face à cette blessure immense qui nous touche une lente rééducation doit se faire. Elle est terriblement individuelle, longue, difficile et sans succès écrit à l’avance.

Je vous souhaite à toutes et tous le meilleur et de trouver la paix intérieure et la force nécessaire pour affronter la peine qui nous touche.
Bien chaleureusement.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 28 juin 2021 à 09:32:26
bonjour Philippe
oui les mois passent et on les compte de manière absurde, en effet on attend quoi? one ne sait pas, sans doute une forme de sidération, de choc de se dire qu'on est toujours debout malgré les jours, les semaines, les mois
pour ma part, le comptage était terrible car  i me donnait l'impression que tout allait trop vite et que à telle date il était toujours vivant
on aime se blesser, c'est incontournable dans le deuil
Vous arriverez à remonter la pente, au vu de ce que je pressens de votre force de vie
mais en effet, rien ne sera plus léger, il y a aussi dans le deuil une  "plus value " sur soi, si je peux parler ainsi, une forme de regarde sur la vie plus grave mais aussi plus portée sur la beauté des petits moments que l'on aime, faire plaisir à soi parfois et à ceux qu'on aime, car on mesure pleinement la richesse d'être en vie, et que ce qui est futile doit être laissé de côté car le bonheur est ailleurs, dans le soleil, les moments heureux même fugaces, ce que vous aimez surtout
On a aussi le devoir de mémoire, être là pour faire vivre ses parents à travers ce qu'on regarde et fait ce qui rappelle ce que nos parents aimaient faire, le fait de s'astreindre à construire son bonheur parce qu'ils en seraient heureux pour vous et que le seul véritable bonheur es parents est de savoir son enfant en vie et soucieux d'être heureux
Alors en se mettant dans cet état d'esprit, on devient nostaligo heureux, on est double, on est pluriel, on reste soi et on devient autre, une partie de ses parents rentre en soi, et on se sent moins seul, porté
amitié
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 juin 2021 à 20:06:00
Très juste Katrinap.

Il y  a sans doute par moment , consciemment ou pas, une culpabilité de ne plus avoir de peine, comme si on avait trop rapidement tourné la page. On confond alors la peine et l’oubli. Au final, il y a la théorie que l’on peut aborder avec lucidité, puis il y a la vie au quotidien où la peine peut vous submerger instantanément, sans que l’on ne maîtrise rien.
J’essaie toutefois de ne pas faire les choses « pour«  mes parents ou parce qu’ils auraient été heureux que je le fasse. Je le fais exclusivement pour moi, parce que j’ai envie de le faire, afin de ne pas m’enfermer dans un cadre, avec l’obligation de faire ou la déception de ne pas y parvenir et ainsi trahir  mes parents. Je sais que quoi que je fasse sur le plan personnel ou professionnel, ils étaient heureux pour moi. Pour autant, être totalement heureux est actuellement difficile car il y a toujours des moments qui nous ramènent à la dure réalité de la perte irrémédiable des êtres chers. On peut tourner le problème dans tous les sens, chercher des explications, se faire aider, au final c’est un combat que l’on mène seul pour redonner du sens à sa propre vie et c’est terriblement difficile.
En effet, rien ne sera plus comme avant (c’est le côté négatif) et on apprend à relativiser ce qui n’est pas essentiel pour soi (c’est le côté positif).
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 12 juillet 2021 à 09:17:12
Encore des dates, toujours des dates.
Aujourd’hui c’est l’anniversaire de ma maman. Mais plus rien à fêter.

Comme généralement le lundi, je ferai un crochet au cimetière, pour arroser les plantes et sans doute déposer des fleurs (ma maman adorait les fleurs). Je continue à dire « je vais voir mes parents », comme avant , même si cela fait mal. Je ne sais pas comment me positionner par rapport au cimetière. Ne pas y aller est comme un message d’oubli, alors j’y vais, c’est la seule chose que je peux encore faire pour eux. Comme toujours un moment difficile; je ne vais pas bien avant, pendant les quelques minutes où je reste c’est souvent compliqué et je vais mieux après; comme si j’avais passé une épreuve. Se dire que j’ai désormais mes habitudes dans ce cimetière, le chemin à parcourir, les stèles que l’on reconnaît, le point d’eau, le pin qui ombrage la tombe de mes parents … c’est inimaginable.

Les jours s’écoulent inexorablement dans cette nouvelle vie qui n’est pas installée. Un peu comme un déménagement précipité, rien n’était prévu, les cartons sont partout, mais rien n’est en place car pas envie de déballer et de tout réorganiser. Je fais de petites choses dans le seul but de m’occuper l’esprit pour ne pas trop penser. Toujours ce sentiment que, dans un autre contexte, un autre état d’esprit et surtout sans cette peine, on pourrait profiter pleinement de ce que l’on fait, alors que tout manque de saveur. La joie de faire des choses n’y est plus depuis longtemps et l’envie est un effort. Je profite de moments fugaces, mais le retour à la réalité est cruel. Pourtant c’est la seule solution partielle que j’ai trouvée pour l’instant. Donc je fais l’effort de chercher ce qui pourrait attirer ma curiosité; rien d’exceptionnel, il en faut très peu pour que je me demande ce que je fais là. Il faut se forcer un peu, dans la mesure du possible, pour ne pas sombrer et ressasser tous les moments terribles en cherchant où était la faille et ce que l’on aurait pu changer.
Hier, j’ai participé à une activité sportive, démarrée depuis peu. Je n’avais pas envie d’y aller, mais j’ai quand même fait l’effort. C’était une compétition et il s’avère (malgré ou peut-être grâce à mon détachement sur l’événement) que je l’ai remportée et avec un résultat inégalité selon les organisateurs. Alors que les gens autour de moi me félicitaient, j’étais comme ailleurs, content mais finalement peu impliqué et sans exaltation. L’impression d’être mi-acteur, mi-spectateur de sa vie. Plus tard j’ai surtout pensé à mon papa qui aimait me dire « là tu as fait fort », j’ai revu son beau sourire quand il était heureux pour moi … plus heureux que moi. C’est l’exemple type; tout manque de saveur, plus rien n’a de valeur. Le seul point positif, quand j’étais à ce que je faisais, évidemment je ne pensais pas à autre chose.

Dans la vie « normale », au quotidien, on essaie toujours de se positionner dans la situation la plus confortable pour soi ou faire en sorte qu’une situation désagréable dure le moins longtemps possible, on réfléchit, on agit, on cherche des solutions pour que cela change, on peut faire une pause. En l’espèce c’est différent car la situation de fond restera inchangée à jamais, elle est là en permanence et il n’y a pas de solutions pour contourner le problème. Il ne suffit pas d’avoir juste de la volonté, bien sûr ça aide grandement, mais sur le principe nous voulons tous aller mieux, pour autant la blessure profonde est là et très difficile à soigner.

Je suis encore plus sensible à la futilité des discussions ou la superficialité des relations. Les gens qui n’ont pas le moindre souci (et la plupart ne s’en rend même pas compte), mais appellent presque à l’apitoiement pour pas grand chose. Je ne dis rien, j’ai juste perdu mes deux parents … De l’extérieur personne ne se doute de rien, personne ne peut imaginer ma peine car le masque est bien en place depuis longtemps. Je n’ai absolument aucune aigreur envers les autres car il faut vivre ces situations terribles pour vraiment comprendre.
Pris au pied de la lettre, la vie continue. Cette phrase qui ne veut rien dire; comme si on pouvait passer facilement à autre chose.

La bienveillance est bien rare dans notre société, il faut venir sur ce forum pour la trouver dans chaque message. Pas de débat, de méchanceté, de controverses stériles, juste des paroles vraies de personnes qui savent ce qui est essentiel …

Bonne journée
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Serine le 12 juillet 2021 à 19:50:44
Je vous comprends tellement dans ce que vous dites.  Je ressens la même chose.  Nouvelles habitudes,  nouvelle vie qui ne ressemble plus à rien, perte de la joie de faire les choses qu'on aimait avant. Je suis comme vous,  je le fait mais sans le plaisir.  Et non , cette fois il n'y a pas de solution pour essayer d arranger la situation.  Cette cruelle réalité  est bien  là  et rien ne pourra la changer.
Oui ,  nous nous comprenons  ici ,  nous savons.
J'ai toujours mon papa qui a des soucis de santé,  on s'occupe de lui et j en profite  un maximum  car je sais que tout peux basculer d'un coup. Je regrette tellement de ne pas  avoir profité de ma maman encore plus.
Courage à vous.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 12 juillet 2021 à 20:44:54
Merci Serine.
Je suis sûr que vous êtes aux petits soins avec votre papa et que cela vous fait du bien d’être avec lui. D’une certaine façon, par sa présence, il vous aide dans ces moments difficiles. C’est ce que je me disais au départ de mon papa, la présence de ma maman me soulageait un peu et c’est finalement elle qui me réconfortait (alors qu’elle ne communiquait plus).  Elle était là donc il ne fallait pas lâcher l’affaire; malheureusement tout est allé si vite …

Bonne soirée
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 juillet 2021 à 08:01:30
Aujourd’hui 28, cela fait 6 mois que ma maman est partie.
Demain 29, un évènement majeur, extra ordinaire et qui va changer profondément et définitivement ma vie, aura lieu. Cet événement est l’aboutissement  d’un long processus entamé il y a 3 ans. Seuls mes parents connaissaient en détail  l’intégralité de ce parcours de vie qui a débuté il y a 34 années. Le fait que cet événement arrive en plein deuil lui enlève toute sa saveur. Le plus important pour moi était de le partager avec mes parents. Tout ce qui était prévu après, permettait de m’occuper de mes parents avec un peu plus de sérénité. Au final, plus rien n’est prévu, c’est le vide dans le vide.
On commence déjà à me dire « alors, tu dois être heureux ? », je ne dis rien … je suis tellement triste, mais qui pourrait le comprendre dans le contexte de cet événement …
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 28 juillet 2021 à 09:41:48
ce que le deuil m'a appris paradoxalement est de donner toute sa valeur à chaque événement, et de le vivre pleinement bonheur ou malheur
profitez de cet évènement extraordinaire du 29 pour ne jamais avoir à le regretter si vous le vivez avec fadeur
faites vous plaisir vivez ce moment
on est là pour vous
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 juillet 2021 à 12:22:42
Je comprends ce que vous voulez dire, j’y adhère pour les petits moments.
Mais là en l’espèce, cet événement extra-ordinaire (pas forcément dans le sens  exaltant, d’où l‘’espace entre extra et ordinaire), est une lame de fond gigantesque dans ma vie, qui n’arrive qu’une fois et dont je garderai pour regret que mes parents ne soient pas là pour le vivre avec moi. Cette lame de fond arrive derrière le décès de mes parents, ce  qui a déjà changé toute ma vie, vie qui est encore instable.
Vous aurez compris que je n’ai pas le cœur à détailler cet événement. Mais pour imager très globalement, imaginez  que durant des années (34 ans !) vous construisez une maison, avec peine et effort, vos parents voient ce que vous faites, ils partagent vos moments difficiles et  vos moments heureux dans toutes les étapes de la construction, ils sont discrètement inquiets sur le devenir de cette construction, ils sont fiers de ce que vous faites et vivent le projet à travers vous.
Puis le jour où le projet abouti avec succès et permet de tourner la page avec sérénité, le jour où la chose la plus merveilleuse serait de partager ce moment ensemble, le jour où les inquiétudes et les soucis peuvent disparaître, ce jour-là, ils ne sont plus là. Ils n’auront pas pu vivre la fin de l’aventure.  Mon père m’aurait dit « là tu as fait fort », ma mère « ça ne m’étonne pas il sait tout faire », les phrases de parents qui ne vivent que pour leurs enfants et qui sont encore plus heureux qu’eux lorsque tout va bien.
Donc, oui, c’est difficile pour moi et cela renforce la difficulté à trouver une nouvel axe de vie et lui donner du sens.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 29 juillet 2021 à 10:04:24
oui mon cher Philippe je comprends très bien votre discours
en même temps, l'achèvement de ce projet a aussi une valeur symbolique de don pour eux,  ce projet, cette construction sera impregné de leur présence, ils vous accompagnent
je vous embrasse philippe
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 30 juillet 2021 à 01:30:29
Bonjour Philippe,
J'espère que l'aura de vos parents vous aura accompagné en cette journée spéciale. Je ne puis que comprendre cette fadeur dont vous faites mention, cette déception qu ils ne soient plus là pour voir enfin l aboutissement...Ce qui enlève une grosse partie de l éclat de cette fin et peut même peut être rendre tout cela futile. Mais car il y a toujours un mais vos parents étaient là. Vous le dites vous même vous savez exactement ce qu ils auraient dit, vous pouvez même en y pensant très fort voir leurs yeux briller de fierté.
Il y a bien trop de choses extraordinaires en un seul mot dans ce monde, des choses qui nous émerveillent incroyables voire inexplicables pour que tout s'arrête du jour au lendemain. Il y a des jours où je ne sais plus, d'autres où je n y crois plus mais aujourd'hui, ce soir, je ne peux pas croire que ma mère et que vos parents ne soient nul part. Alors je voulais le partager avec vous. Je suis sûre qu'ils étaient avec vous aujourd'hui.
Prenez soin de vous
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 30 juillet 2021 à 06:20:51
Katrinap, Mandy, un grand merci pour votre soutien et vos mots justes.

Voilà, comme tout passe toujours très vite, c’est fait et aujourd’hui, sans encore réaliser, je suis dans cette nouvelle vie.

Hier, il y avait durant toute la journée des étapes, comme des passerelles à traverser pour acter de tous les changements. Ces étapes importantes se sont bien passées, dans une ambiance cordiale et sympathique et l’attention qu’elles nécessitaient me protégeaient de toute tristesse. Seule la fin de la matinée fut très dure à un moment, sans que je m’y attende. J’avais envisagé beaucoup de choses auxquelles il fallait résister pour tenir le coup, pour ne pas à la fois vivre le moment et penser que je ne pourrai pas le raconter à mes parents. Mais vous savez bien tout se cache derrière un détail et que parfois face à quelque chose d’insignifiant pour tout un chacun, pour nous qui vivons un deuil, tout remonte à la surface instantanément , la dure réalité qui éteint une petite tranquillité d’esprit qui tentait de s’installer. Nous étions deux personnes concernées par cet évènement, liées sur le même projet. Après que nous ayons, tous les deux, apposé notre signature, actant définitivement la fin d’une aventure, un des interlocuteurs a posé une question qui se voulait totalement anodine et de circonstance « quelle est la première chose que vous allez faire maintenant ? », la réponse immédiate de mon homologue « je pense que ma famille m’a préparé une surprise » m’a totalement assommé; fini la légèreté du moment et combat pour tenir. Je n’ai rien pu dire, inconcevable de dire la vérité, « moi, entre midi et deux, je vais aller voir mes parents au cimetière pour les remercier de tout ce qu’ils ont fait pour moi … »
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 30 juillet 2021 à 13:11:41
Comme je comprends Philippe, il y a parfois des petites phrases si simples qu on aimerait encore pouvoir prononcer....une toute petite chose qui nous plonge dans un gouffre de chagrin.
Une grosse pensée pour vous et vos deux étoiles
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 07 août 2021 à 18:57:12
Une semaine vient de s’écouler; la première semaine de vacances depuis 8 ans, passée loin chez des amis. Je n’avais pas réalisé que je n’étais plus parti depuis aussi longtemps; en fait cela ne me manquait pas réellement, je n’en avais pas envie; j’avais simplement besoin de moments de calme au gré de l’état de santé de mes parents.
Aujourd’hui je suis parti pour fuir (temporairement) le vide. Pour mes amis, qui connaissent parfaitement la situation, mon double deuil n’est évidemment plus un sujet; on est déjà passé à autre chose, ils ont leur vie et donc on continue comme si rien ne s’était passé. C’est normal, mais évidemment impossible pour moi. A l’inverse, leurs « soucis » me paraissent tellement dérisoires. Je ne peux pas leur dire que ce qu’ils croient être des problèmes serait réglé immédiatement, s’ils y mettaient le millième de l’énergie que j’ai mise pour m’occuper de mes parents.
Si j’ai passé de bons moments durant mon séjour, je ne me suis pas senti heureux. La peine que nous avons tous subi ici, nous change et, pour ma part, ternit tout. Il n’y a pas une chose, face à laquelle je ne me sens pas en décalage.
La fatigue du voyage estompe encore le cruel retour à la réalité … ma réalité sans mes parents. Ce retour ne sera pas illuminé par leur sourire et leur joie de me revoir, comme si j’étais parti plusieurs mois. Il n’y aura plus ce partage, qui prolongeait encore les bons moments.
Une semaine vient de s’écouler, évidemment rien n’a changé et je n’attendais pas à revenir en ayant tout oublié. L’insouciance, la plénitude et le cœur léger ne sont toujours pas d’actualité …

Je vous souhaite le meilleur à toutes et tous.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 25 août 2021 à 21:30:40
Voilà, déjà plusieurs semaines dans cette nouvelle vie. Je ne m’étale pas auprès des tiers sur cette nouvelle vie (mis à part les proches qui savent, mais qui savent aussi pour mes parents); si le sujet est abordé, la première réaction est « tu as une chance énorme », car naturellement ils se projettent par rapport à leur quotidien actuel, ce que je comprends et ils ont raison. D’abord, bien loin de la chance, c’est avant tout 34 années de travail acharné mais surtout le traumatisme que représente ce double deuil, ces images précises et détaillées sur les derniers instants de vie , ma conviction profonde qu’à une heure près ma maman serait toujours là, toute cette peine vécue, entachent la situation que les autres perçoivent comme idyllique.
Pour autant, je ne suis pas resté inactif et je peux même dire que, même si mes parents sont toujours dans mes pensées, je vais relativement bien. Mais ce soir, peut-être à cause d’une fatigue plus importante, j’ai été envahi d’une tristesse immense, rien que par le constat que cette nouvelle vie et tout se qui se passe maintenant, mes parents ne le connaîtront jamais. L’idée même qu’ils auraient été tellement  heureux pour moi , ce qui m’aurait fait un plaisir extrême, me peine ce soir profondément. J’ai l’image très nette de chaque trait de leur visage, de leur sourire, de leur regard. Comme la vie serait merveilleuse, s’ils étaient encore présents. Regrets éternels …

Le chemin est très longs et difficiles, mais chacun à notre rythme, nous y arriverons tous.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 26 août 2021 à 00:36:54
Comme la vie serait merveilleuse...c'est exactement ce que je me dis aussi...je vous comprends tellement.
Une pensée pour vos parents
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Serine le 27 août 2021 à 18:16:59
Oui c'est tout simplement ça,  la vie serait merveilleuse. Elle l était avant mais nous ne savions pas et c'est seulement maintenant qu'on le réalise.
Courage à vous.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 19 septembre 2021 à 19:36:54
Cela fait 10 mois que mon papa est parti.
Pour l’entourage, la page est tournée depuis longtemps et plus personne n’évoque le sujet et encore moins la difficulté du deuil. Je fais comme si de rien n’était, le deuil se vit seul.
Pour moi, 10 mois, c’était hier.
La vie continue son chemin, mais je n’ai rien oublié, tout reste présent en détail, douloureusement en détail. La peine est là, moins permanente et pressante, mais toujours tellement présente. Elle est régulièrement alimentée par les événements les plus anodins, une musique, un paysage,  un couple de personnes âgées qui se baladent, des rires en famille, une atmosphère de bonheur que l’on reconnaît, quelque chose que l’on ne partagera jamais, et là tout remonte à la surface et c’est difficile.
Difficile de ne pas se laisser happer par cette dure réalité … ils ne sont plus là. Comment est-ce possible !!
Il faut alors relever la tête, autant que possible, et faire des choses pour occuper son esprit. Compliqué de donner de l’importance à ce que l’on fait après avoir vécu un double deuil si rapproché; il n’est pas rare que je me demande ce que je fais là … c’est dans ces moments là qu’il ne faut pas sombrer car tout paraît  bien futile quand on vit un deuil.

En écrivant, je réalise que le 4 octobre c’est l’anniversaire de mon papa. … le moral est touché …

Une pensée pour vous toutes et tous.
Bien chaleureusement
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 20 septembre 2021 à 09:50:22
Cher Philippe
l'espace temps est si différent pour ceux qui ne vivent pas le deuil et pour ceux qui y sont confrontés
je pense bien à vous, accordez vous du lâcher prise, bien douloureux mais combien nettoyant, utile, indispensable même pour retrouver un jour le gout de la vie, et pas la vie derrière une vitre comme nous les endeuillés le ressentons
je suis ave cvous
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 septembre 2021 à 21:14:02
Il y a exactement  huit mois, quasiment à la même heure, vers 21h, je quittais les urgences en ayant embrassé une dernière fois ma maman qui venait de partir dans mes bras. J’entends encore le tout dernier souffle (exactement comme pour mon papa), cette dernière petite inspiration comme un soulagement. Le traumatisme lié à toutes ces images est toujours présent.

Je me souviens de cette soirée, cette solitude terrible, ce vide immédiat, la difficulté à réaliser ce qui s’était passé en quelques heures, l’incompréhension et toutes ces questions sur le difficile chemin parcouru qui prenait fin, sur le futur, sur une histoire qui emportait mes parents en 6 semaines après plus de 7 années cruelles qui ont bouleversé notre famille.

Ma peine est multiforme. La peine liée à la perte de mes parents et tout ce que cela entraîne (perte des racines et des souvenirs en commun, perte définitive du partage de la vie à venir). La peine liée au regret profond que mon rêve de voir mes parents profiter sereinement et pleinement d’une retraite tant méritée, n’ait pas pu se réaliser (bien au contraire).
Je sais que bon nombre de personnes ici, comprennent exactement ce que je veux dire …

Chaleureuses pensées.
Philippe


Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 28 septembre 2021 à 22:06:46
Que d'images douloureuses Philippe...et quelle épreuve de vivre ce double deuil pour vous.
Comme je comprends ce regret que vos parents n'aient pas pu profiter...Je l'ai également pour ma maman...elle a eu son cancer si peu de temps après sa retraite...
Au moins vos parents ont il eu une fils aimant et dévoué...ils devaient être fiers de vous.
Prenez soin de vous
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 01 octobre 2021 à 10:26:00
Merci pour votre soutien Mandy.
Le temps passe, la vie continue mais la douleur reste intacte.
J’espère que, malgré tout, vous parvenez à prendre des moments pour vous, durant lesquels la peine s’estompe un peu.
Bien à vous
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 02 octobre 2021 à 09:55:15
Oui malheureusement, avec le temps il paraît qu'elle diminue pour être supportable mais un rien peut nous y ramener.
J'ai la chance d avoir un mari et un fils qui m'aident beaucoup.
Prenez soin.de vous
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 04 octobre 2021 à 08:36:13
Il y a des périodes où les dates difficiles s’enchaînent. Aujourd’hui 4 octobre, nous aurions fêté l’anniversaire de mon papa. Nous savons tous ici ce qu’un anniversaire représente en termes de souvenirs et de regrets.
Avant que la vie ne soit interrompue par toutes les difficultés rencontrées, ces moments étaient précieux. J’ai encore en mémoire tous ces moments de partage.
Ma maman aurait cuisiné pour nous faire plaisir (c’était une cuisinière hors pair), j’aurais apporté le gâteau, et cherché une petite attention pour mon père (j’adorais les surprendre et voir leur étonnement), nous aurions passé un moment simple, profitant de la douceur de vivre.
Au fur et à mesure que la situation se dégradait, j’ai maintenu ce petit rituel mais c’était évidemment plus difficile à vivre. J’ai des vidéos de mon père  soufflant les bougies … jusqu’à la dernière où il n’arrivait plus à éteindre une bougie.
Alors aujourd’hui j’ai une pensée encore plus spéciale pour mon papa et ma maman à qui j’aurais tant aimé faire plaisir en ce jour d’anniversaire.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 04 octobre 2021 à 09:28:00
peut être faire néanmoins un petit rituel pour rendre hommage à cet anniversaire? pour communiquer avec eux encore
Sacrée force que vous devez avoir pour surmonter en même temps la disparition de vos deux piliers, vous faire passer en un claquement de doigt du statut d'enfant de vos parents à celui d'un adulte sans parents
entourez vous, créez vous des moments cocon car vous en aurez besoin
on pense bien à vous
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 04 octobre 2021 à 18:35:23
Merci Katrin pour votre soutien.
Pour rendre hommage  j’ai apporté une plante au cimetière, je sais que mes parents adoraient les plantes et c’est symboliquement un petit lien de vie déposé à leur côté, un témoignage, le seul petit geste matériel que je puisse faire, en imaginant que ça leur ferait plaisir.
Moment forcément difficile …
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 04 octobre 2021 à 19:03:14
J'ai lu vos mots avec beaucoup d'émotions.
Une pensée pour vos parents et en particulier votre papa.
Malheureusement on se sent tellement démunis dans ces moments là. On aimerait tant qu'ils soient encore là.
Je vous envoie du réconfort
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 04 octobre 2021 à 19:12:27
Merci Mandy.
Une pensée chaleureuse pour vous aussi.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 05 octobre 2021 à 11:12:49
cher philippe
oui des liens de vie: plantes, messages, autres témoignages qui vous feront du bien car faits avec le coeur ne pourront que vous accompagner sur ce chemin douloureux
c'est la vie qui doit primer,; la votre pour en profiter, la votre pour en perdurer le souvenir de vos parents
la votre pour rendre hommage à ceux qui ont contribué à faire de vous j'en suis convaincue, une belle personne
amicalement
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: comment_faire le 25 octobre 2021 à 20:36:18
Bonjour Philippe,
Juste un mot pour te dire que je suis bien d'accord avec toi lorsque tu écris, dans ton premier message : "mais on ne peut pas se préparer à cette étape ultime."
Hélas c'est clair : il s'agit d'une mission impossible, car tant que nos parents sont avec nous, on est toujours dans" l'ancien monde", celui d'avant.
Et celui d'après n'a plus grand chose à voir, effectivement.
Je suis un homme qui a sa perdu maman lorsque j'avais 51 ans, et elle 80/ presque 81, et mon papa quelques années plus tard.
Je vais mieux c'est sûr, parce qu'au début c'était très très dur.
Mais à certains moments, des sensations, des images reviennent. Et en général, cela génère plus de tristesse qu'un sourire ...

Je pense à toi.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 30 octobre 2021 à 17:51:20
Bonjour Comment_faire,

Merci à toi.

Tu décris exactement ce que je vis actuellement.
Je vais mieux, mais au détour d’une situation parfois banale, les souvenirs remontent à la surface et ce n’est jamais quelque chose qui me fait du bien, d’autant que ce sont majoritairement les moments les plus durs qui reviennent. Je dirais presque que « j’ai l’habitude » , soit j’essaie de ne pas développer ces souvenirs et assez rapidement ça va mieux, soit je me laisse emporter par mes pensées et c’est plus dur. Le film de tous ces moments terribles reste intact et très détaillé, le traumatisme est présent; avec toujours le même schéma, il y a systématiquement des moments où j’arrête le film et où je me demande « pourquoi », « que pouvais-je faire pour éviter ça » …
Je commence un peu à redouter la fin de l’année, cet esprit festif généralisé, cette douceur de vivre apparente,  mais plutôt pour moi la date anniversaire (1 an) du décès de mon papa, suivi de celui de ma maman. Moi aussi avant, j’aimais cette période de fêtes, cette pause familiale où finalement tout le monde est heureux d’être ensemble. Aujourd’hui plus rien à fêter, mais un tunnel entre le 14 décembre et le 28 janvier à traverser, synonyme d’un changement de vie total.
Je pense bien à vous tous.
Chaleureuses pensées
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 30 novembre 2021 à 19:33:18
Bonjour à toutes et à tous,

Aujourd’hui, belle journée ensoleillée, je décide d’aller faire une petite ballade en vélo. Même si je sens une certaine fragilité à l’approche des dates anniversaires fatidiques, je vais bien et l’état d’esprit est bon. Je prends plaisir à flâner. Mais soudain, de façon totalement inexplicable et hors contexte, un souvenir réapparaît. Ce souvenir, c’est un petit surnom que me donnait mon papa, il y a de très nombreuses années, surnom affectueux que j’avais oublié. Et là, moment difficile; énorme coup au moral. J’ai les images de mon père lorsqu’il m’appelait ainsi, je me souviens du ton de sa voix.  Depuis cet après-midi, je suis un peu en boucle dessus. Si j’ai régulièrement des images des moments terribles pour mon papa ou ma maman, c’est la première fois où je suis terrassé par un souvenir qui n’est pas lié à un évènement majeur. Dans une famille ou entre amis, avoir un petit nom n’a rien d’exceptionnel et souvent on n’en connaît pas l’origine, mais finalement, seul mon père m’appelait ainsi. Ce petit signe affectueux, presque insignifiant au quotidien, je me rend compte maintenant de son importance. Plus personne ne m’appellera ainsi, encore un témoignage de ce qui est définitivement perdu, une douceur de vivre et le sourire de mon papa.
Heureusement j’étais seul et j’ai pu me mettre à l’écart pour me reprendre.
Au final, aujourd’hui, s’est rajouté un motif de tristesse supplémentaire …

Chaleureuses pensées
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Serine le 30 novembre 2021 à 20:11:07
Cher Philippe
Le deuil est ainsi fait. Des jours où on se sent un peu mieux et comme vous dites, soudainement un souvenir ressurgit et la douleur revient de plus belle.  Je comprends votre tristesse. L'autre jour, c'est une odeur qui a fait remonter en moi pleins de bons souvenirs.  Celle du basilic lorsque ma maman préparait sa sauce tomate. Souvenirs heureux et douloureux à la fois, souvenirs d'une vie heureuse et comme vous dites perdue à jamais.
Je vous souhaite du courage.
Sérine
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 01 décembre 2021 à 02:28:50
Je vous envoie tout mon soutien...J ai souvent.des souvenirs de cinéma avec ma maman qui me reviennent avant son cancer. Des souvenirs de nos rituels du dimanche midi et après midi. Je nous vois assises dans le salon avec nos sandwiches américains devant "le rebelle". Ce sont les moments quotidiens qui nous manquent, l'ordinaire, ce qui semblait naturel et auquel on ne prêtait pas beaucoup d'attention. Peu après le décès.mon frère a dit nous étions heureux, c'est juste que je ne le savais pas. C'est quand bonheur disparaît qu'on se rend compte qu'il était là.
Tout mon soutien
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 01 décembre 2021 à 10:43:55
parfois juste une odeur fait ressurgir des petits riens ou des grands tous qui bousculent nos esprits et font trembler nos forces
je comprends votre chagrin
ce matin, alors que mon père est dans toutes mes pensées en regardant sa photo je me suis dit qu'il y avait un moment que je n'avais pas regardé aussi intensément et cela m'a interpellé, cela m'a fait dire qu'à 5 ans du décès mes besoins avaient évolué, avant j'étais scotchée plusieurs fois par jour sur sa photo, maintenant elle est dans mon bureau cela m'accompagne, mais en la re regardant ce matin, cela était troublant ce chemin parcouru dans mes émotions, alors qu'il continue à me manquer
je dirai Philippe que ces moments qui seront durs sont aussi des moments importants pour revenir à l'essentiel de souvenirs qui ne paraissent rien mais qui sont grands car c'est dans l'intimité qu'une relation père fils belle comme la votre 'est construite et en vous faisant mal elle vous porte aussi
prenez soin de vous
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 02 décembre 2021 à 13:35:58
Serine, Mandy, Katrinap, merci beaucoup pour votre soutien.
Les souvenirs, c’est tout ce qui nous restent aujourd’hui. Tous ces moments qui sont ancrés en nous et dont nous sommes les seuls à apprécier la saveur.
 Les souvenirs les plus terribles sont encore là, en détail, mais j’arrive globalement à ne pas trop m’appesantir dessus, autant que possible. En revanche, comme cette semaine, les bons souvenirs qui surgissent soudainement, sont difficiles à gérer. J’ai du mal à concevoir qu’un jour leur souvenir me fera du bien. Aujourd’hui c’est systématiquement le rappel cruel de ce qui est irrémédiablement perdu. Cela n’est que le synonyme de regret, de peine et de tristesse.
Bonne journée

Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 03 décembre 2021 à 11:35:01
philippe
oui il faut du temps beaucoup je pense pour que les souvenirs ne soient pas le rappel cruel de la perte et de l'absence, et je pense même que le temps n'est pas linéaire et que ce qui fait sourire le lundi peut faire pleurer le mardi pour divers motifs si tant est qu'il y ait des motifs
mais on sent qu'on a passé un cap dans le deuil quand on se sent porté par ses souvenirs
vous y arriverez, je sens en vous cette force et capacité de résilience
avez vous pensé à écrire?
je vous embrasse bon week end
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: reseau le 06 décembre 2021 à 01:12:58
Philippe,
J'ai lu avec attention tous les messages de ce post et votre histoire fait un peu écho à la mienne sur certains points.
Je suppose que vous êtes fils unique?
Je vous partage mon histoire:
Moi je suis fille unique. A 27 ans, mon père décède à l'âge de 72 ans d'une fracture du col du fémur qui faisait suite à un Alzheimer. Mon père avait vécu la déchéance avec son Alzheimer mais suite à sa fracture du col du fémur, là, ça a été la descente aux enfers. Il était alité pendant 6 mois. Il a eu des escarres sur la peau. Rien que d'y penser, ça fout le moral en trompes. Ce n'est pas moi qui me suis occupé de mon père. Au début, il était hospitalisé puis ils ont mis en place l'hôpital à domicile mais ce n'était pas terrible comme accompagnement. Des auxiliaires qui changeaient tous les jours. Parfois une gestion complexe des retards, absences,....Ma mère était déjà assez malade et elle ne pouvait pas changer mon père.
Mon père est mort 6 mois après sa fracture du col du fémur. Il est mort quand même jeune: 72 ans seulement.
A ce moment là, j'étais mariée et j'attendais la naissance de mes jumeaux lorsque mon père est mort. Sa mort a été dure à encaisser mais c était une délivrance aussi car je me disais qu'il ne pouvait pas encore plus souffrir que ce qu'il avait vécu.

Je ne pouvais pas trop céder au deuil car je devais trouver les forces pour l'arrivée des jumeaux.
Ma mère, suite au décès de mon père, était en totale dépression. Elle pleurait et était si triste et si seule.
Je voulais l'amener chez moi mais mon conjoint ne voulait pas.
3 ans après le décès de mon père, mon conjoint décide d'amener ma mère chez moi.
On vivait chez moi avec les enfants, mon mari et ma mère.
Au début, on s'est dit que comme je reprenais le travail, ma mère allait s'occuper des enfants en mon absence.
Sauf que dans la réalité, ma mère avait tellement d'antécédents, qu'elle était juste présente mais ne pouvait pas trop s'occuper des enfants.
La cohabitation a été très dure. Mon conjoint était désagréable avec ma mère. Il ne la supportait pas, ne lui disait pas bonjour,....Et cela blessait ma mère. Mon conjoint était jaloux même de la relation qui m'unissait à ma mère.
J'avais vécu un véritable enfer entre mon conjoint qui détestait ma mère sans raison et ma mère qui finissait aussi par haïr mon conjoint.
Je tentais de concilier tant bien que mal tout le monde. Je faisais de mon mieux pour que ma mère soit à l'aise. Parfois, il nous arrivait aussi de nous chamailler mais jamais plus de 2 jours. Elle me pardonnait toujours avec son grand coeur.
Même si on se chamaillait, les enfants venaient me réconcilier avec ma mère.
Puis en 2019, ma mère a eu des complications cardiaques AOP. Elle a fait 4 AOP en 4 mois. On a crû qu'elle allait y passer tellement les crises sont impressionnantes.
Elle a guéri et une femme médecin m'avait dit au téléphone: "votre mère avec ses antécédents, elle ne sera jamais stable. ça va même s'empirer." J'étais si désemparée après ce coup de fil. Mais grâce à la volonté divine, elle s'en était sortie et elle allait bien. Elle était stable. J étais tellement contente d'avoir ma maman stable et avec moi.
Puis fin mars 2021, elle a eu un kyste ovarien. J'étais en télétravail et je lui ai dit que je comptais la prendre d'ici 10 jours en consultation mais que pour le moment, le travail n'accepterait pas d'absence. Son kyste s'empirait. Puis elle le sentait carrément dans la peau. Je décide donc d'appeler les pompiers et ils l'emmènent à l'hôpital. Comme vous le dîtes, l'hôpital n'est pas le meilleur lieu pour s'occuper des personnes âgées.... Elle était mal voyante et les aides soignantes refusaient de lui donner la chaise percée et refuser aussi de l'accompagner aux WCs. Ce qui m'a fait le plus mal, c'est qu'avec ce covid, les visites étaient interdites. Ma mère m'a appelé le dimanche 11 avril et m'a demandé pourquoi je n'étais pas venue la voir et je lui ai répondu que l'hôpital ne voulait pas. Elle était en larmes en me disant qu'elle souffrait trop et qu'elle voyait la mort approchée à grands pas. Elle m'a dit de prendre soin des enfants.
Ils ont fait 2 opérations à ma mère et je n'ai même pas pu la voir.

Ils m'ont ensuite appeler ce lundi 12 avril 2021 à 4h du matin pour me dire que ma mère était en réanimation et que ses reins ne fonctionnaient plus. J'ai donc averti le travail que je m'absentais et je suis allée voir ma mère.
Elle était contente de me voir et m'a appelé de sitôt par mon prénom.
J'essayais de voir si elle avait toute sa tête. Je lui ai demandé ce qu'on lui faisait. Elle m'a dit qu'ils étaient en train de lui faire une dialyse car ses reins lui avaient fait trop mal. Elle m'a dit qu'elle voyait la mort approchée à grands pas et qu'elle allait pas tarder. Je lui ai dit qu'on savait pas, que seul Dieu sait. Elle m'a dit "non, j'ai eu trop mal. C est sûre que c'est fini."
Elle avait peur, peur pas de la mort, peur de ne pas avoir été assez prier.
J étais en larmes. Et elle m'a dit "non, cesses de pleurer. Moi aussi, mes parents sont morts,....Ton père également est mort....c'est comme ça,...on va tous mourir." puis elle m'a dit "Non ma fille, je ne veux pas te voir pleurer."
J'étais si impuissante face à ses douleurs.
Puis elle a appelé par leurs noms chacun de mes enfants et elle m'a demandé de bien prendre soin d'eux. C'est comme si elle me disait qu'ils allaient tellement lui manquer.
Elle a même pensé aux démarches administratives liées au rapatriement du corps en me disant que j'allais galéré vu qu'on n'avait pas fait le changement de sa carte nationale. Même ça, elle y avait pensé.
Puis, je me suis dit qu'il serait plus adéquat de voir le médecin pour avoir un vrai avis médical. Celui ci m'avait dit qu'il allait tenté son maximum dans ses 3 semaines en faisant la dialyse et qu'après elle pourrait aller mieux. Par contre, il me demandait si elle était autonome dans sa vie de tous les jours et là, je lui ai répondu que non. Qu'elle se déplaçait que dans la maison, que c'était moi qui la douchait, et qui lui faisait les repas. Et là, il était un peu déconcerté et il m'a dit "moi, je vais faire mon maximum mais si la situation se détériore, je ne vais pas faire de réanimation en urgence car ses antécédents sont trop lourds et par rapport à son âge, c'est délicat.". Suite à cette entrevue, je me suis dit qu'il y avait un espoir. Que peut être après les 3 semaines, ma mère pourrait aller mieux.
Comme on avait transféré ma mère pour son opération dans un autre hôpital, sa carte vitale et sa pièce d'identité étaient dans l'autre hôpital. J'ai donc dû aller avec mon mari dans cet autre hôpital.
Puis on revient à la maison. Et là, à 19h15, le médecin m'appelle pour me dire que ma mère a l'air de partir et qu'il fallait que je vienne au plus vite. Arrivé à 19h30, ma mère est décédée à l'âge de 72 ans et on ne m'a pas laissé la voir jusqu'à 20h....
J'étais tellement désemparée …. tellement triste. Je me retrouvais à 37 ans, orpheline de père et de mère.
Même si entre le décès de mon père et ma mère, il y a 10 années, la douleur reste quand même là.
Seule. Même si j'avais un mari et des enfants. Mes parents n étaient plus là. Chaque jour est un combat. J ai souvent des coups de blues.
Je repense comme toi à ce qu'aurait pu dire ma mère dans tel instant.
J'ai ressorti toutes les photos en cherchant les photos où mes parents étaient encore en bonne santé et souriant. J'en ai pas trouvé des masses.... tout un sac de photos et à la fin, on en trouve 2 ou 3 photos où ils étaient en bonne santé....
Puis si seulement j avais pu faire l'enterrement au plus vite. Avec le covid, les frontières étaient fermées. J'avais des démarches administratives pour que ma mère soit "refrigérée" jusqu'à ce que les frontières s'ouvrent.
Le 15 juin, on a rapatrié le corps et le 16 juin, ma mère a été enterré.
Voilà ce que j'ai vécu au cours de cette année. C est dure, éprouvant. C'est vrai qu'avant quand je m'occupais de ma mère c était un peu dure de la doucher, de faire avec ses coups de pompes à cause de sa santé,...mais au moins, elle était présente et avec moi. Mais là, sans elle, j'ai tout mais j'ai rien. Comme tu le disais dans un de tes messages, j'ai trouvé une liberté mais je ne la saisis pas car les personnes que j'ai aimé sont parties.
Parfois, j'aurai aimé avoir juste un message de ma mère dans un rêve pour me dire qu'elle est bien là où elle est.
Puis il y a ces souvenirs qui remontent à la surface comme un film où on revoit des séquences. Parfois, je revois des anciens souvenirs que j avais complétement occulté mais très souvent, c'est l image de l'agonie de ma mère avec ses souffrances à l'hôpital qui me reviennent en tête et là, je me sens si mal. Je me dis que j'aurai dû l'emmener plus tôt à l hôpital, que j aurai dû faire plus pour elle, .....Les regrets viennent comme si ça allait changer quelque chose.
J'aimerai tellement revoir ma mère pour l'embrasser de tout mon coeur et lui dire à tel point je l'aime.
Il y a ce vide de maintenant presque 9 mois. Il m'arrive de compter sans arrêt le nombre de mois comme si ça allait changé quelque chose à ma peine.
C'est dure de vivre un deuil et en particulier celui de la maman.
Courage à tous.




 
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 07 décembre 2021 à 17:37:16
Merci Katrinap : il m’arrive d’écrire (un peu) mais seulement certaines réflexions, Je ne sais pas à quoi vous pensiez mais je n’écris pas « à mes parents » et je n’écris pas sur les souvenirs du passé; cela me semble difficile aujourd’hui et m’obligerait à ressasser ce terrible passé , déjà trop présent.

Merci Reseau : vous avez vous aussi connu un chemin difficile. Les entretiens avec les médecins, les appels téléphoniques, le labyrinthe administratif, tout ce contexte que vous décrivez fait évidemment écho chez moi et me rappelle de mauvais souvenirs. Oui, le vide créé par l’absence est immense.

La période de creux que je pressentais se confirme. Le moral est touché et c’est donc un peu plus difficile en ce moment. C’était à prévoir, l’hiver arrive, il fait nuit à 17h, il y a (pour moi) moins de légèreté dans l’air (… cela ne veut pas dire grand chose, mais c’est ce que je ressens ), la période des fêtes qui accentue le vide et surtout les dates anniversaire du départ de mes parents qui approchent. Tous les ingrédients du cocktail « moral en baisse » sont réunis. Sans oublier, l’inévitable « passez de bonnes fêtes ! » qui me guette.
Donc il faut lutter un peu plus en attendant que cela passe, mais c’est compliqué car tout manque de saveur.
Merci à tous pour nos échanges.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 14 décembre 2021 à 07:59:01
Un an. Cela fait aujourd’hui un an que mon papa est parti, dans mes bras, dans un dernier souffle. Nous étions seuls à la maison, tous les deux. Une matinée de cauchemar où tous les secours et intervenants semblaient tellement détachés de la situation; sans doute avaient-ils compris que plus rien n’était possible. Une matinée où le mot solitude n’est pas assez fort pour décrire le vide et l’abandon que l’on ressent. Puis, tout le monde est parti, « bon courage Monsieur » … oui, ce courage que l’on vous souhaite parce qu’il faut bien dire quelque chose et qu’il n’y a pas de mots plus adaptés. Sauf que pour moi, cette formule a toujours été le synonyme de « maintenant on s’en va, tu vas devoir faire face tout seul ». Faire face, plus de sept années à faire face. Faire face à des informations terribles, voir des choses terribles, faire des choses terribles.
Durant plus de trois heures j’ai veillé mon papa, dans le coma, scrutant tous les appareils, ne sachant ni quoi faire, ni quoi penser, en espérant l’impossible. Puis, cette grande respiration, ce massage cardiaque désespéré et l’oxymetre … qui s’éteint. Une vie qui part, comme ça, et sans transition c’est fini, on est déjà dans autre chose. Les personnes endeuillées connaissent ce tourbillon après le décès où tout s’enchaîne vite. On nous force à être déjà dans l’après, alors même que nous n’avons pas réalisé le cataclysme qui vient d’arriver.
Une année … si j’avais mis une croix sur un agenda chaque jour où j’ai pensé à tout ça, tous les jours seraient cochés, et plusieurs fois. Un an, c’est très long mais tout est tellement présent; il s’est passé beaucoup d’événements déterminants depuis, mais rien n’a pu atténuer ce terrible passé.
Aujourd’hui est donc un jour de grande peine et dans 6 semaines, cela fera un an que ma maman a rejoint mon papa, ce sera un nouveau coup dur.
Mon papa était une très belle personne; j’aurais tellement aimé le revoir, apaisé, lisant le journal dans son fauteuil, avec ma petite maman s’affairant en cuisine, en chantant. Aujourd’hui, c’est moi qui pleure …

Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 14 décembre 2021 à 08:58:46
je vous comprends cher Philippe et comme vous décrivez bien ce sentiment d'irréalité cauchemardesque que vous avez vécu emportant tout et vous avec comme un quinze  tonnes, sans vous laisser le temps de reprendre votre respiration
je pense qu'après la perte, c'est tout ce tourbillon, tout ce non accompagnement post décès qui est très violent et qui accentue encore davantage si tant est que cela soit possible  la douleur ineffable de la perte
1 an c'est aussi le temps du bilan, parfois pour certains endeuillés ils mettent ce temps pour réaliser le décès presque brutalement
N"étant plus dans le tumulte des actions administratives à réaliser, on reste du coup orphelin de soi et de ses êtres disparus, comme un sentiment d'inutilité et de douleur
je suis avec vous, je suis passée par là même bientôt 5 ans après pour moi , très difficile, mais j'ai passé le cap de la sidération, du poignard permanent, maintenant c'est le manque avec parfois, souvent maintenant le sentiment qu'il est en moi, une forme de dissociation, à la fois le manque, à la fois le sentiment qu'il est en moi
je pense à vous car aujourd'hui c'est vous qui êtes  important, faites vous plaisir, faites quelque chose que votre papa aimait pour rappeler le souvenir pour peut être j'espère vous faire du bien
amicalement
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 14 décembre 2021 à 10:07:21
Ce matin je pleure avec vous.
Je vous envoie toutes mes pensées, pour vous et votre cher papa
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 14 décembre 2021 à 16:38:25
Katrinap, Mandy, merci beaucoup pour votre soutien.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Serine le 14 décembre 2021 à 17:30:29
Je suis de tout cœur avec vous Philippe.  Je comprends tout ce que vous traverser. Un an c'est loin et pourtant tellement proche. Laisser couler vos larmes. Comme Mandy,  je pleure avec vous en vous lisant.
Je vous embrasse.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 14 décembre 2021 à 20:28:31
Merci Serine.
Chaleureuses pensées.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: NguyenLou le 14 décembre 2021 à 22:04:21
Bonsoir Philippe,

Je vous envoie également tout mon soutien en ce jour si particulier pour vous.
Votre message m’a beaucoup ému, nous partageons votre douleur…
J’espère que vous avez réussi à trouver du réconfort aujourd’hui…

Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 17 décembre 2021 à 11:26:35
Je tenais à vous remercier sincèrement pour vos petits mots de soutien.
Le cap de cette première date anniversaire est passé. Ça va globalement mieux,  démonstration que c’est cette première échéance qui  posait problème. Il reste cette période de fêtes à passer et surtout fin janvier que je redoute. Désormais, je dois commencer à penser en années; années qui nous éloignent des bons souvenirs et années de peine.

Je vous souhaite le meilleur.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 27 décembre 2021 à 00:18:04
Voilà, une première partie des fêtes est passée. Pas simple de faire face à tous ces souvenirs.
Aujourd’hui, il s’est passé quelque chose d’un peu troublant. Je suis allé au cimetière, moment particulièrement difficile. Je me souviens avoir pensé à un signe que j’aimerais avoir, pour m’indiquer que mes parents sont là et que tout va bien. Je précise que je suis d’un naturel  plutôt cartésien, peu porté par tout ce qui n’est pas rationnel.  En repartant, je quitte le carré du tombeau pour reprendre l’axe principal et exactement dans ce croisement, sur mon passage, se trouve au sol, un tee de golf. Il se trouve que … je joue au golf !(depuis qq mois  seulement; un des moyens pour m’occuper l’esprit). Un tee dans un cimetière, c’est totalement improbable. Alors, hasard et interprétation ou signe envoyé, chacun se fera une idée, mais c’est perturbant car ce n’est pas un sentiment dont on pourrait penser qu’il est dû au moral du moment, j’ai concrètement un objet en lien immédiat avec une de mes activités; première activité après le décès de mes parents, dont je peux dire aujourd’hui que cela a été un point important pour reprendre du moral. Je ne sais pas trop quoi penser …
Prenez soin de vous et de vos proches.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 27 décembre 2021 à 11:40:31
Je prends cela comme un très joli signe de vos parents pour ma part.  C'est assez improbable de trouver un tel objet dans un cimetière...j espère que cela vous a apporté du réconfort en tout cas et remonter le moral. Je suis assez cartésienne aussi mais je me dis qu il y a des choses tellement incroyables dans la.nature que pourquoi pas?
Je vous souhaite du courage pour la suite des fêtes
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: NguyenLou le 28 décembre 2021 à 09:25:29
Bonjour Philippe,

Je pense aussi qu'il s'agit d'un très beau signe de vos parents vous encourageant à aller mieux : )
Je demande souvent des signes de ma maman. Lorsqu'elle est partie, peu de jours plus tard, un petit chaton est venu me rendre visite fréquemment dans mon jardin. C'est peut-être juste un simple hasard mais j'aime à penser que c'est elle qui m'envoie du réconfort de là ou elle est.

Prenez bien soin de vous
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 09 janvier 2022 à 17:21:51
Je vous souhaite à toutes et tous que cette nouvelle année soit synonyme d’apaisement et de sérénité.

De mon côté, le passage de cette première année de deuil est encore  plus difficile que je pensais. J’avais mal appréhendé ce cap, je suis donc plus impacté au quotidien et j’ai l’impression d’avoir fait une petite marche arrière.

Chaleureuses pensées
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 10 janvier 2022 à 10:45:15
bonjour philippe
bonne année...malgré tout
c'est une émotion et un sentiment ce retour en arrière très fréquent lors de la 1ère année, c'est hautement symbolique
c'est comme si on ne faisait que réaliser le décès, comme si le crops et a psyché avait besoin de ce temps pour que le vide s'installe
je comprends très bien votre sensation
je suis de tout coeur avec vous
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 10 janvier 2022 à 18:28:34
Merci Katrinap,

C’est exactement çà, j’ai l’impression que tout tourne autour du décès comme il y a un an. Je suis bien revenu en arrière. Favorisé aussi sans doute par le contexte hivernal, j’ai perdu la motivation de faire des choses et de voir des gens.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 24 janvier 2022 à 19:03:46
Mon titre  initial (une peine immense) est toujours d’actualité.
La semaine prochaine, cela fera un an que ma petite maman est partie,
Je ne sais plus combien de fois , j’ai revécu ces dernières heures, où une journée quasi normale se transforme en drame et bouleverse votre vie à jamais. Je sais que vous toutes et tous ici, savez pertinemment ce que cela signifie.
Toujours les éternelles questions, comment ai-je pu ne pas être là ce jour là ? (sachant qu’elle était fatiguée suite à son retour de l’hôpital); pourquoi cette hospitalisation totalement hors contexte, sans gravité,  dont elle est ressortie tellement dénutrie (par manque d’attention et de temps qu’il fallait lui accorder au quotidien ); pourquoi ne me suis-je pas battu, comme d’habitude, pour passer outre les interdictions de visites et pour lui donner à manger moi-même; pourquoi ai-je cru les soignants me disant tous les jours qu’elle mangeait bien; pourquoi tous ces mensonges ???
Après toutes années de lutte à tout cadrer dans le moindre détail, la situation m’a échappé …   Une seule fois en plus de 7 ans …
Je sais que je ne suis pas totalement fautif, mais je sais aussi que si j’avais été présent, elle serait encore là. Plus qu’un sentiment, cette certitude, quasi factuelle, reste gravée. Une peine immense …

Pensées pour vous toutes et tous.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: katrinap le 25 janvier 2022 à 17:16:48
cher philippe
je comprends parfaitement votre détresse, d'abord on pense qu'on peut sauver son parent, on pense que l'amour peut tout sauver, ensuite on est là précisément tous les moments de vie sauf celui le plus important à nos yeux
et si ce n'était qu'à nos yeux? si notre cher parent ne voulait justement pas nous infliger ça? pourquoi suis je partie 20 mn avant son décès alors qu'au fond je le savais?
je m'en veux aussi, mais avec le temps et l'analyse , je sais que je n'aurai pas pu le sauver quand il s'enfonçait j'essayais de  le nourrir mais il ne le voulait et sans doute ne le pouvait plus
pensée  à vous
katrin
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Serine le 25 janvier 2022 à 20:25:48
Cher Philippe
Je comprends toutes vos questions et regrets. Comme vous je m'en veux terriblement de ne pas avoir essayé et insisté pour aller voir ma petite maman.  Je suis persuadée également que si nous avions pu être auprès d'elle,  elle serait toujours là.  Elle avait trop besoin de nous à ses côtés.  C'est mon plus grand regret. Je suis tellement en colère contre cette crise sanitaire et le médecin qui ne nous a jamais inquiété sur l'état de santé de ma maman durant toute cette semaine d hospitalisation. Uniquement la veille de son décès le médecin nous a dit qu'on pourrait peut-être aller la voir le lendemain.  Mais c'était trop tard.  Je l ai revue mais morte. Rien que d'en parler ça me rends folle, je leur en veux tellement. Oui Philippe,  une peine immense...
Courage à vous pour cette date anniversaire qui approche.
Je pense à vous
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 26 janvier 2022 à 11:29:27
Katrin, Serine, merci beaucoup pour votre soutien.
Je vous souhaite une belle journée.
Philippe
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Philippe99 le 28 janvier 2022 à 00:21:16
Il y a un an aujourd’hui, 28 janvier, je vivais le deuxième jour le plus terrible de ma vie.
Aujourd’hui, je n’ai pas les mots; je suis juste abattu et triste.

Pour lui rendre à nouveau l’hommage qu’elle mérite, j’ai décidé de partager quelque chose de plus personnel; ce que j’ai écrit et lu pour le départ de ma maman.
Philippe


Ma petite Maman,

Il y a quelques semaines seulement, Papa nous quittait, laissant un vide immense et une douleur terrible.
Je ne t’ai rien dit pour te protéger le plus possible, mais je pense que tu avais perçu ma peine. C’est pourtant toi qui me remontait le moral.
Tout s’est enchaîné tellement vite.
Aujourd’hui c’est toi qui pars et c’est à nouveau un pilier de ma vie qui s’écroule.

En sept ans et demi, que d’épreuves, que de combats !
La place des personnes en difficulté est auprès de ceux qui les aiment.
J’ai fait tout ce que je pouvais pour t’éviter les difficultés et la cruauté du quotidien, je ne suis même pas certain d’y être vraiment parvenu.
J’ai une profonde gratitude envers les quelques personnes qui nous ont accompagnés; leur soutien est inestimable.

Tu as toujours été forte, beaucoup plus que moi, tu me l’as démontré jusqu’au bout, en m’attendant avant de partir. Tu savais que je tiendrais ma promesse d’être toujours présent et de ne jamais douter que je faisais le maximum.

Tu as toujours été là pour moi; toujours contente dans les bons moments, toujours très soucieuse dans les moments difficiles. Tes cris de joie, lorsque je rentrais à l’improviste, résonnent encore dans ma tête.  Nous avons partagé tellement de choses ensemble. Tu t’es dévouée pour moi sans compter.
Je me souviens de tout ce que tu me disais et qui restera à jamais entre nous. C’est toi qui avais raison.
Je souhaite que soit venu pour toi le temps de l’apaisement et de la sérénité que tu mérites tant.

Je vais garder ton sourire dans mon cœur. Ce si précieux sourire qui nous a tenu durant toutes ces années. Ce sourire, avec Papa, nous le scrutions tous les jours, à chaque minute. Nous étions tellement heureux de le voir éclairer ton visage; c’était nos petits moments de partage,  ensemble. Ces sourires soulageaient les moments difficiles de notre quotidien; ils illuminaient nos journées.

Tu aurais  beaucoup apprécié ce poème :

Un sourire ne coûte rien et produit beaucoup,
Il enrichit celui qui le reçoit sans appauvrir celui qui le donne,
Il ne dure qu'un instant, mais son souvenir est parfois éternel,
Personne n'est assez riche pour s'en passer,
Personne n'est assez pauvre pour ne pas le mériter,
Il crée le bonheur au foyer, soutient les affaires,
Il est le signe sensible de l'amitié,
Un sourire donne du repos à l'être fatigué,
Donne du courage au plus découragé
Il ne peut ni s'acheter, ni se prêter, ni se voler,
Car c'est une chose qui n'a de valeur qu'à partir du moment où il se donne.
Et si toutefois, vous rencontrez quelqu'un qui ne sait plus sourire,
Soyez généreux donnez-lui le vôtre,
Car nul n'a autant besoin d'un sourire
Que celui qui ne peut en donner aux autres.

Tu m’as donné beaucoup de sourires, plus que les mots que tu ne pouvais dire.
Le sourire nous repose quand nous sommes fatigués et nous encourage quand nous sommes déprimés. J’aurais tellement aimé continuer à te faire rire. Ne plus voir ton sourire est une nouvelle épreuve pour moi.

J’ai un profond chagrin de te voir partir, avec Papa, pour toujours, et une extrême affliction face à ces années passées que je rêvais douces et agréables pour vous.
Il va falloir accepter qu’après plus de 62 années passées ensemble, l’un à côté de l’autre, vous ne deviez pas être séparés.
Toi et Papa allez désormais pouvoir reprendre un merveilleux chemin ensemble et veiller sereinement sur moi.

Part apaisée, ma petite Maman.
Je n’ai plus les mots pour décrire l’immensité de ma peine.
Tu pars rejoindre Papa; je vous imagine vous retrouver souriant et joyeux.

Merci d’avoir été ma Maman.
Je vous remercie tous les deux d’avoir été des parents exceptionnels.

Part tranquille, ma petite Maman.
Titre: Re : Une peine immense
Posté par: Mandy le 28 janvier 2022 à 18:26:06
Merci d avoir partagé ce moment d'intimité. C'était un très bel hommage à votre maman...très émouvant....j'avais écrit le mien dans un cahier et impossible de le retrouver et je serais incapable de m'en souvenir tant le jour de l'enterrement paraît être une journée dans la brume.
Une pensée pour votre chère maman et votre papa également...Et bien sûr pour vous à qui je souhaite je souhaite l apaisement....