Bonjour,
C'est la première fois que je parle sur un forum. C'est délicat et je ne sais pas comment m'y prendre.
Donc voilà, je suis une jeune fille de 21 ans. Je me sens vide, très vide, et plus que vide …
A l'âge de 14 ans et demi, en pleine adolescence, ma maman a eu un cancer, à vrai dire je n'aime pas vraiment ce mot. Les personnes qui sont en connaissance de cause ne doivent pas l'aimer non plus, je suppose.
Donc après des longues années de combat, elle est bien évidement allée rejoindre le paradis blanc. J'avais 17 ans, je venais d'avoir mon bac et de rentrer en prépa HEC. Oui au bout de 2 jours dans ma nouvelle vie d'étudiante, la nouvelle est tombée.
Pour mieux comprendre nous habitions dans le sud, tous les 3, mon père, ma mère et moi. Je suis fille unique. Mais notre "famille", elle, est de Bordeaux (les alentours). Quand fut arrivé le fameux moment qui précède la mort, oui ce fameux moment qu'on appelle "soin palliatif" … On ne voulait absolument pas qu'elle finisse dans un hôpital, non ça c'était hors de question, et pour lui faire garder espoir nous ne lui avons rien dit non plus. C'était en Juillet, on lui a dit que le Professeur qui s'occupait d'elle voulait la revoir dans un mois. Pour qu'elle s'octroie une "pause de répit", si je puis dire, de ce traitement horrible qu'on appelle chimio.
Chez nous, il n'y avait pas de place pour organiser la future chambre, avec le lit médicalisé. Elle est donc allée chez mes grands-parents, à la campagne. Avec mon père, habitants dans le sud, c'était la saison pour nous. Je travaillais avec lui et nous descendions tous les weeks-end. Cet été là fut difficile, entre chercher un appartement pour ma rentrée scolaire, organiser mes dossiers, le boulot, et le fait de ne voir ma maman que 2 jours dans la semaine ...
Je n'ai pas eu le temps de pleurer. Pas une seule fois. Et puis plus les weeks-end passés, plus son état empiré, l'avant dernière fois, il y a eu des instants où elle ne me reconnaissait plus. Et puis la dernière fois c'était très dur … On est remonté avec mon père et on a du aller acheter la robe, oui la belle robe qu'elle allait devoir mettre le jour où … Il ne m'a pas aidé ce jour là, j'ai compris qu'il n'en avait pas la force, je l'ai choisis seule et il a à peine regardé. Je voulais qu'elle soit blanche, et j'ai choisis la mienne aussi.
Et puis il y a eu cette nuit, où mon père m'a appelé pour me dire que c'était fini, qu'elle était partie.
J'ai alors pris le premier train à 6h de Montpellier pour me rendre chez nous et partir en voiture avec mon papa à Bordeaux. En descendant de la voiture, j'ai couru, j'ai couru pour aller dans la chambre parce que croyais qu'elle se réveillerait en arrivant. Je suis peut être restée 1h ou 2, je ne sais plus à vrai dire. Je suis restée planter là, sans émotions, à lui tenir la main. Quand j'y repense …
Et il y a eu l'enterrement, le fameux jour, celui où j'ai tout fait pour qu'elle soit fière de moi une dernière fois. J'ai pris la décision de faire passer le mot à tout le monde pour que nous soyons tous en blanc, sans exception. Je ne voulais pas de pleurs, pas de noir, pas de tristesse, elle n'était surement pas comme ça et ça n'aurait pas été à son image. Des fleurs magnifiques, un cercueil blanc, des fleurons d'orchidée … Je ne suis pas triste de ce jour là, ce jour là était beau. Je n'aurais jamais voulu qu'il soit laid.
Et puis après l'enterrement, le vide. Le retour à la réalité, les cours … Les cours ? Oui bien sûr .. je venais de rater une semaine et quand j'y suis revenue je n'ai pas réussi à parler, et j'étais ailleurs. Je remontais chez moi le week-end pour voir mon père, il ne parlait pas, on n'en a jamais parlé.
A partir de ce jour là, je me suis retrouvée seule face à moi même. J'ai du grandir plus vite, sans qu'on ne m'en demande mon avis.
Quand je rentrais, il n'était pas souvent là, il préférait sortir avec ses amis, surement pour oublier sa peine. Mais moi je n'avais personne. Une année de ratée, et puis deux, des crises de boulimie … Et toujours personne à qui parler.
Je me suis résolue à changer de voie, je suis partie en fac de droit, la première de ratée (encore) et celle de l'année dernière fut la bonne. Je suis partie de chez moi, la vie à la maison était devenue très dure à supporter. Au bout de 3 ans de vie tous les deux, sans elle.
Mon meilleur ami, que je connaissais depuis 6 ans, n'avait pas spécialement été la pour moi. Je n'avais toujours personne à qui parler, et le mois de mai 2013 il est venu passer qq jour dans sa maison de vacances non loin de la mienne, et petit à petit il m'a redonné goût à "la vie". Je suis tombée amoureuse et il m'a demandé d'aller m'installer avec lui à 3h de chez moi.
J'ai dit oui, c'est donc l'année dernière que je suis partie et que j'ai réussi mon année. Mais le bonheur que je ressentais s'est vite estompé. Je suis redevenue vide, mais cette fois avec des pleurs. Depuis 1 an, je me suis rendue compte qu'elle était partie, ça fait 4 ans maintenant.
Je me sens vide, en colère, et aussi peut être un peut coupable; POURQUOI ? J'ai beaucoup changé, j'ai perdu toute confiance en moi, et j'ai pris du poids. Je ne m'aime plus. Je n'ai plus goût à rien. J'ai essayé de faire une psychothérapie une première et une deuxième récemment, je n'y arrive pas, rien ne sort, je n'arrive pas à parler. C'est ancré beaucoup trop profond en moi. Une psychiatre m'a mise sous antidépresseurs mais je n'y aie pas touché et je n'y toucherai pas, c'est hors de questions. Pour moi à 20 ans on est censé avoir toute la vie devant nous … Cependant je n'arrive pas à retrouver mon chemin.
Quelque chose c'est éteint ce jour là. J'ai 21 ans mais j'ai l'impression d'être beaucoup plus âgée que cela, dans ma tête. J'ai l'impression d'avoir perdu toute la force que j'avais en moi, je n'ai plus aucune ressource. Et je ne m'aime tellement plus, la vie en couple devient difficile, à vrai dire au début tout allé bien et depuis cette espèce de dépression il n'a plus été là pour moi. Peut être que ce la lui fait peur. J'ai l'impression que plus les jours passent et plus ça empire. Et j'étouffe de ce sentiment de solitude. Je n'arrive pas à vivre comme quelqu'un de mon âge aurait envi de vivre. J'ai aussi beaucoup de mal à "aimer" sa famille, car au fond, moi je n'en ai plus vraiment. Ce n'est pas normal. Je suis vide, éteinte et triste.
J'en suis là, au bout de 4ans. Je ne sais plus vers qui me tourner. Ecrire sur un forum où des personnes peuvent me lire n'est absolument pas mon genre, je n'expose pas mes problèmes, je n'arrive pas à parler. Mais là j'arrive sincèrement à un point de non retour … Je sais que personne ne pourra répondre à tout ça, qu'il n'y a pas de solutions. Mais que puis-je faire ? Pourquoi est-ce si affreux ? J'aimerai tant être heureuse et me sentir en vie.
C'est si dur de devoir se reconstruire tout en essayant de devoir construire une nouvelle vie. Comment devenir une femme en ayant perdu son plus précieux modèle ?
Je me sens coupable d'être dans cet état là car je sais que d'en haut, elle ne doit pas être heureuse non plus de me voir ainsi. Je sais aussi que d'autres personnes ne demandent qu'à s'accrocher à la vie pendant que moi je me sens éteinte … C'est très culpabilisant.
Mon post est très long. J'en suis désolée. Je remercie ceux et celles qui auront le courage de me lire et la gentillesse de me répondre. Et merci à "Qiguan" pour m'avoir guidé sur ce forum.
Je souhaite énormément de courage à toutes les personnes qui sont en deuil.