merci, je suis désolée pour ta maman, te lire me fait me sentir moins seule même si j'aimerais que personne ne connaisse cette souffrance. c'est vrai qu'écrire peut nous soulager...
c'est vrai que j'ai besoin d'en parler, et de lire aussi des personnes qui vivent des ressentis similaires car très vite, on peut se prendre pour un monstre quand on reste seule. je suis en thérapie ( depuis des lustres comme on dit
) et ca apporte un certain soutien... Mais ces thérapeutes ne vivent pas ma vie, ils ont une grille de lecture mais le soir, ils retrouvent leurs famille, leurs train-train, leurs démons. c'est difficile de se sentir vraiment en lien quand il y a une "distance thérapeutique". j'ai penser aux groupes de paroles, surtout à l'annonce du diagnostique de ma grand mère... avec le confinement, au moment ou j'ai appeller, il arrêtaient les groupes. alors je me suis dis que j'allais faire comme je pouvais. mais le problème est là : je ne peux plus. ces derniers mois ont été vraiment épuisants, j'ai l'impression d'avoir sérieusement entamer mes ressources intérieur. Mais comme d'habitude, je tiens le coup en surface alors ca passe inaperçus.
pour répondre à tes questions, mon père est hors de ma vie depuis mes 14 ans. il s'est passé des choses vraiment inconcevables ( auxquelles ma mère n'a pas réagit d'ailleurs) et donc, je ne veux pas m'exposer à quelqu'un de malsain. mais je ne lui veut pas de mal pour autant, juste que je lui pardonne mieux à distance. mes frères, ont été marqués par la vie aussi. l'un était militaire, l'autre est éducateur, autant te dire que j'ai intérêt à filer droit ( ce que je ne fait pas, naturellement.) pour te situer, le jour du décès de ma mère, ils m'ont dit deux choses : " ne compte pas sur nous, on vas vivre notre vie chacun de notre coté" et " ne fait pas de conneries, pense à bonne-maman". et c'est à peu près ce que j'ai entendu tout le reste du temps jusqu'à l'enterrement. sinon que mon frère m'a dit que j'étais une gosse qui arrêtait pas de pleurer quand on était enfant et que c'était chiant. que c'était toujours moi qui passait en premier. bref, on est pas très doué dans la famille pour les relations.
je suis pas très douée non plus, il faut l'avouer... j'ai laisser les choses m'échapper. à l'enterrement j'étais pratiquement seule. je ne voulais pas que trop de mes proches amis viennent. c'est incroyable, avec le recul, je me dis que le seul à être venu rendre visite à ma mère dans mon cercle social, c'est mon psy. ca en dit long sur moi. ma mère, était quand même bien entourée pour son départ, il y avait pas assez de place dans l'église pour tout le monde, des gens ont fait des malaises du fait de leurs émotions, on a du appeller les pompiers, mes frères étaient entourés de tous leurs collègue et amis. j'étais heureuse de voir ca. toutes ces personnes réunies pour l'être que j'aimais le plus au monde.
je ne sais pas si c'est normal, mais plus que de la douleur, j'ai ressentit beaucoup d'amour. la vraie douleur est venue avec le temps. je ne comprends pas pourquoi on dit qu'avec le temps la douleur s'estompent... plus les jours passent et pire c'est. j'ai quelques périodes de répis mais par vague je suis engloutie. depuis la mort de ma grand-mère c'est encore pire, avec la vente de la maison aussi, l'héritage que je gère si mal, ma vie que je ne sais plus reconstruire. je ne sais pas comment avancer. j'ai l'impression d'être attachée à cette catastrophe par un énorme élastique, plus j'essaye d'avancer, plus je me retrouve entrain de lutter juste pour me lever le matin, me doucher, ... c'est tous les jours, pratiquement tout le temps. c'est ca que les personnes autour de moi ( qui ont encore leurs parents pour la plupart) ne comprennent pas. quand je parle de ma douleur ils se disent " ah oui c'est vrai elle vit des deuils, ca explique tout" mais ils reprennent leurs vie. moi je vis avec ca tout le temps. le jour, la nuit, tout m'y confronte. mais je n'ai pas à vous l'expliquer je pense.
c'est fou le nombre de film, de chanson, ou la mort apparait. à chaque fois, mes jambes se coupent, j'entends un son aigus, je revois des flashs, je comprends plus rien à ce qu'on me dit, je sais plus vraiment ou je suis. ... j'ai le livre du dr fauré et j'ai écouter ses conférences... qu'est-ce que j'ai pu pleurer. Ses mots sont en or. ma plus grande difficulté je pense, c'est d'acceuillir la souffrance. depuis plusieurs mois, je vis sans me retourner. aujourd'hui tout me rattrappe, encore. ce deuil de ma mère, celui de ma grand mère, mais toute mon enfance aussi, mon adolescence, le sentiment d'être seule au monde.
j'essaye de "me raisonner", c'est peine perdue... alors j'ai peur de me morfondre, de me faire assimiler à une vitime passive et barbante... mais comment on peut être actif dans un deuil ? passer à l'action oui mais comment ? je ne pense pas pouvoir accélérer les choses, quand un arbre pousse, c'est pas en le voulant plus fort qu'il va pousser plus vite. mais je suis fatiguée, de pleurer, de résister, d'aller à des rendez-vous, de traverser des anniversaire qui me rapellent la réalité des faits encore et encore. ma mère est morte, et ne reviendra jamais. on avait encore tant de choses à se dire, de dispute à terminer, de choses à règler... j'avais encore besoin d'elle. j'ai toujours eu besoin d'elle et elle a si peu eu la force d'être vraiment là, comme une mère assumée. elle me disait " je t'aime" mais ca voulait dire " j'ai besoin que tu m'aimes". et je n'ai jamais pu lui offrir un je t'aime comme un cadeau qui viendrait spontanément. j'avais a peine la force de lui dire " moi aussi" vite fait... pour lui donner ce qu'elle réclamait. et oui, je l'aime, je l'aimais. je regrette tellement de ne pas avoir eu plus d'espace pour le ressentir pleinement. sans devoir la rassurer, la soigner, la materner. ma petite maman... tout ca est tellement déchirant.
avec la mort de ma grand mère, un autre déchirement est arrivé : quel deuil choisir ? pour qui être triste ? est-ce que je suis équitable ? pourquoi je suis plus atteinte par le décès de ma mère alors que ca fait 2 ans ? quand ma grand mère est partie il y a 10 mois. est ce parce que ma mère est partie sans prévenir ? parce que j'avais un role parentale avec elle ? parce que j'ai passer toute ma vie fusionnelle avec elle ? mais quelle place reste il pour ma grand mère. pour toute sa beauté, sa force, l'odeur du café, les pates au jambon, l'odeur de sa lessive, le bruit de son horloge?
je vais éclater, je finirai par exploser. tout ca me remplit, me déborde, m'épuisent,... je vis minutes après minute sur une mer agitée, j'essaye de garder un certain cap, de pas prendre d'eau, pas chavirer, pas sauter par dessus bord...