Bonsoir Kukkii62

Je me risque bien humblement à te répondre, pour te dire: Non tu n'es pas folle.

Ce que je lis ici, semble être beaucoup de peine, de colère, d'incompréhension. Tu semble avoir joué un rôle qui ne te revenait pas et personne ne t'a dit que tu n'avais pas à le tenir (bien au contraire). Tu semble t'être «oublié»,  «sacrifiée»...

Tu dis plus haut que tu sais que tu as avancé dans ton deuil.  Ce que je ne doute pas, car en te lisant, tu es capable de prendre du recul et voir ce qui en est vraiment. Par contre un travail de deuil peut prendre plusieurs années, je le vois de plus en plus , moi-même qui ait perdu maman il y a deux ans. J'ai aussi perdu papa d'un suicide quand j'avais 14 ans, et mon frère quand j'en avait 20. Par contre c'est le départ (tu vois au contraire de toi je ne suis pas capable de dire qu'elle est........  morte , ça me donne un coup de poignard à chaque fois), c'est le départ qui m'a le plus détruite. Car j'avais la meilleure mère au monde pour moi.

J'ai beaucoup de colère d'accumulée depuis 2 ans, j'en ai évacuée et j'en ai encore. Bien que j'ai pleuré, j'ai remarqué qu'il était plus facile pour moi de gérer la colère que la peine. Plus facile de détester les autres que d'affronter réellement ma peine en pleurant un bon coup, ce qui m'est arrivé peut-être 3 ou 4 fois en 2 ans et c'était incontrôlé, involontaire. Je crois que maman mérite plus mon amour et ma peine que ma colère. Et c'est pourquoi je suis revenue ici sur le forum pour continuer mon travail de deuil. Car c'est un travail, un cheminement. Quand on pense avancer d'un pas, on recule de deux. Quand on pense sourire à la vie, la peine resurgi tel un nuage dans le ciel.

Est-ce que ça se peut que tu ais empilée beaucoup de chose dans ta vie, des choses qui n'ont pas été réglées, qui ont été mise de côté?  Que tu ais agis pour le bien des autres mais pas le tien? Il est peut-être temps de penser à toi. De t'occuper de toi. 

J'ai une famille qui n'a pas été aussi présente qu'elle l'aurait dû, j'ai beaucoup de frustration mais ça me pourrit la vie, je dois donc trouver des moyens pour m'en sortir. Et je m'isole, et je n'ai plus envie de voir ma famille. Ça me fait un bien fou et c'est aussi un autre deuil à faire: Laisser de mauvaises relations mourir pour enfin vivre sans colère, sa peine et amertume.  On doit faire et vivre ce qu'on ressent là, un jour peut-être la situation reviendra au beau fix mais là, on doit passer par des moments où il faut se préserver et penser à soi.

J'ai aussi commencé une thérapie par l'écriture chez moi, toute seule. Et ça fait du bien. Peut-être que ça pourrait aussi  t'aider. Deux de mes préférées sont: L'écriture folie. Tu écris tout ce qui te passe en tête, même si ça n'a aucun sens et dans le désordre. Le point de départ est le décès d'une personne aimée. Tu prend simplement une feuille, tu écris maman au centre et tu met tout ce qu'elle t'inspire. Dans mon cas ça ressemblait à «Amour, famille, cancer, décès, peine, vide, colère, médecins, amie, confidente......» Ensuite tu lis 3-4 fois. Tu la met de côté puis tu prend un livre ou une 2e feuille. Là tu écris, tu écris tout ce qui te vient en tête. Les mots que tu auras écris vont resurgir avec des gens ou des évévements, tu n'arrête pas d'écrire. J'ai beaucoup pleuré à cet exercice  Mais ça m'a vidé et fait un bien fou.

La deuxième est l'écriture ciblée: Tu prend une personne en particulier (ça peut être ta mère, ton père, un frère, un médecin peu importe) et tu lui parle comme s'il ou elle était devant toi. Tu lui dit tout ce que tu souhaite lui dire. Bon comme mauvais. Ensuite tu as le choix, soit de donner cette lettre à la personne concernée ou si tu  n'est pas capable, tu la brûle et la laisse aller dans l'univers. Ça fait vraiment du bien. J'en suis à celle là moi... j'ai des choses à régler sur le coeur et je sais que personne ne semble se reprocher rien. Ça serait des discussions vides alors j'écris et j'écris.

Il y a tellement à dire... tellement de piste... Tu sais parfois on agit de telle façon en croyant que c'est la bonne chose à faire puis on en veut aux autres. Et quand on vire ça d'une autre manière on a une perspective nouvelle. Et si tu avais décidé de ne pas jouer le rôle de ta mère? Qu'est-ce qui se serait produit? Et si tu avais décidé que tu avais plus de peine d'avoir  perdu maman que papa qui a perdu sa femme?  Tu en veux à tes frères et soeurs de ne pas s'être soucié de toi, mais leurs en as-tu parlé? J'en veux également à mes soeurs de ne pas avoir été présente pour maman, de ne pas avoir assez téléphoné à maman... De ne m'avoir jamais demandé comment j'allais et comment je trouvais ça d'accompagner maman avec son cancer. Mais la réalité c'est que j'ai été là, je l'ai accompagné, je n'ai demandé l'aide de personne... Alors elles ont pris pour acquis que c'était correct et voilà.  Je me suis sentie bien seule au bout du compte, voyant maman qui espérait des nouvelles, des visites et ma rage qui a grandi. Qui m'empêche aussi d'avancer là... Car mes soeurs font leurs vies comme si rien était et moi je fais du sur place 

Ça ne sera pas facile mais ton premier pas en venant ici est fait. Tu peux aussi, si tu aimes lire, t'aider avec d'excellent ouvrage. Il y en a plusieurs donné en exemple sur ce forum.  J'espère ne pas avoir été ni maladroite, ni t'avoir froissée. C'est la dernière chose que je voudrais. Par contre ton message, bien que différent de mon parcours, m'a rejoint.  Et j'aimerais te dire que perdre la personne qui nous as mise au monde n'est pas anodin. De t'empêcher de pleurer ne fera que retarder ta guérison. Et même 2 ans, 5 ans ou 20 ans après.... il n'y a pas de temps ni de moment pour pleurer, pour laisser sortir sa peine, ses regrets, sa colère.... sa joie également.  Et chéris ceux qui t'aiment et se soucient vraiment de toi. C'est vers ces personnes qu'on doit aller.

Prend bien soin de toi, je t'embrasse et sache que sur cette terre, au même moment que toi, on est plusieurs dans le brouillard. Et je suis certaine que si ta maman te regarde de là haut, elle aurait sûrement fait des choses bien différemment et souhaite sûrement te voir la plus heureuse du monde. Il n'en tient qu'à toi.... qu'à nous... nous qui restons ici à essayer de continuer.

Et je répète........ Non...... tu n'es pas folle. Juste une personne sensible Normale qui doit affronter les choses de la vie, aussi pénible soient-elles !