Auteur Sujet: Papa ...  (Lu 5973 fois)

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Lolatara

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Papa ...
« le: 06 mars 2017 à 10:50:08 »
Bonjour à tous,

je m'appelle Lola et j'ai 19 ans. J'ai perdu mon papa le 25 Janvier 2017, mon anniversaire n'était pas passé et j'avais donc 18 ans.
Mon papa est entré à l'hôpital début Janvier pour une opération du poumon ainsi qu'une biopsie. Fin Novembre il avait commencé à dire qu'il respirait plus mal, et nous voilà début Janvier où nous découvrons qu'il a un cancer du poumon. Naïvement je pensais que ce n'était que le début puisque cela venait de se déclencher. En réalité il ne lui rester que quelques mois, le cancer était très avancé avec des métastases.
Mais il ne devait pas partir si tôt. L'hôpital venait de lui prendre une place en maison de repos. Le mardi 24 on m'a appelé, on m'a dit qu'il le remontait dans une chambre ( il était en réanimation jusque là ) car tout allait mieux et qu'ils étaient confiants et très contents. Imaginez comme j'étais heureuse à ce moment là ! Tellement soulagée.
Je suis allée le voir, avec ma mère aussi ( mes parents n'étaient pas mariés et séparés depuis peu mais toujours proches ).
Et mercredi matin ça a été l'enfer qui a commencé. Ma mère m'a réveillée en larmes, elle n'arrivait plus à respirer ni a parler, elle m'a juste dit " c'est papa ". Et quand je lui ai demandé si il était vivant, ( ce qui était pour moi une évidence ), elle m'a répondu " non ".
Ma vie s'est arrêtée à ce moment-là. Jamais avant je n'avais eu à faire le deuil de quelqu'un et voilà que je dois faire celui de mon père, de mon meilleur ami, de l'homme qui m'a aimé plus que n'importe qui. Qui m'a toujours soutenu, aidé, apprit tellement de choses ... je n'ai que dix neuf ans, j'ai tellement besoin de mon père !!
Je n'accepte pas la situation. Je pense à lui mais sans penser à ce qu'il se passe autour car c'est un vrai déchirement, c'est même pire, tellement pire. Je me sens morte. Je suis proche de ma mère et j'aime ma mère, mais cette perte pour moi est insurmontable. J'étais très très proche de lui, je l'appelais tout le temps dans la journée pour parler avec lui. Mon père est mon héros.
Comme mes parents n'étaient pas mariés j'ai dû m'occuper des papiers à la morgue et de tout le reste et je suis vraiment désespérée. Je suis au fond du trou. Je ne veux plus vivre, je voudrai juste voir mon père même une dernière fois, le sentir avec moi, lui parler. Je n'étais pas prête à ça !
Ca a été si brutal. Quand je pense à toutes les choses qu'il ne me verra pas faire, à tout ce qu'on avait encore à se dire ... je me sens mourir de chagrin. 
Je ne ressens plus rien, ni joie ni bonheur, ni plaisir. Rien sauf un profond chagrin et encore le mot est faible.

Comment suis-je supposée faire face à ça ?

Merci de m'avoir lu,

Lola

Hors ligne souci

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Re : Papa ...
« Réponse #1 le: 06 mars 2017 à 14:22:28 »

    Bonjour Lola,

    C'est affreux d'avoir à vivre un deuil pareil.
    Toi seule sais ce que tu ressens, mais sur ce forum, tu trouveras des personnes qui vivent semblables violences du "destin"...
     Tu es encore en plein sous l'influence de l'onde de choc, je ne te dirai pas que les mois, années à venir iront en retrouvant progressivement et calmement un nouvel équilibre, mais tu connaîtras peu à peu des petites accalmies dans ta douleur.
      Un aussi grand deuil c'est énorme, bien plus énorme il nous semble, que ce que nous avons perdu ... parce que nous avons perdu, en plus de la personne aimée profondément, qui nous étions, nous, dans la vie et la joie de la relation que nous entretenions ...
     Une grande part de ce qui nous définissait, nous motivait, nous faisait vibrer.
      La relation que tu as eue avec ton papa me touche énormément.
      Tu sais, toutes les petites filles n'ont pas la chance d'avoir un papa qui s'intéresse à elles, cela bien sûr ne te consolera en rien de prendre conscience de cela, mais ne vaut-il pas mieux souffrir d'amour que de vivre dans le refus et l'ignorance de ce que sont ces sentiments ?
   
     C'est bien normal, jeune fille, de te sentir complètement à plat, au fond du trou c'est exactement ça, et encore, des fois on voudrait carrément nous enfouir jusqu'à nous éteindre pour ne plus ressentir tant de mal.
     
    Il n'y a pas de manière "standard" de traverser le long temps dont tu auras besoin pour que ton deuil te transforme.
    Ton papa et son amour t'ont donné un socle solide pour bâtir ta vie.
    Une base saine, c'est déjà ça.
    Ta blessure est grave, mais tous les antidotes à l'infection sont dans ce que tu as pu partager avec ton père, j'en suis persuadée.
    Que mon optimisme ne te choque pas, je sais qu'en attendant c'est horrible pour toi ...
    Filialement, solidairement, une tata.

Hors ligne Mononoké

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Re : Papa ...
« Réponse #2 le: 06 mars 2017 à 22:15:08 »
Bonsoir Lola,
Si je le pouvais j'écrirai les mots qui pourraient te réconforter, adoucir  ta peine, alléger ton chagrin. Malheureusement, ce n'est pas possible, il ne me reste que les mots qui peuvent t'exprimer mon soutien.
Comme le dit si bien Souci, la façon dont tu parles de ton papa est très émouvante, il devait être très fier d'avoir une fille comme toi!
je t'entoure de toute mon affection
tendrement
"Tu ne sais jamais à quel point tu es fort jusqu'au jour où être fort reste la seule option". B. Marley

"Un arbre qui s'abat fait beaucoup de bruit ; une forêt qui germe, on ne l'entend pas." Gandhi

Lolatara

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Re : Papa ...
« Réponse #3 le: 07 mars 2017 à 19:40:35 »
Tout d'abord merci beaucoup pour vos messages dont j'ai ressentis toute la tendresse ... cela m'a fait chaud au cœur.
Je partageais un tas de choses avec mon papa, mes études par exemple ... dès que je sortais de la FAC je l'appelais pour lui raconter ce que j'avais appris et pour en parler avec lui, c'était quelqu'un de très brillant. Je suis morte de trouille à l'idée de retourner à la FAC, d'en sortir et de retrouver ... le vide. De devoir rentrer jusque chez moi seule, sans pourvoir l'appeler, lui raconter, lui montrer que j'écoutais tout et l'entendre me dire qu'il était fier de moi. Cette douleur ... elle est insoutenable.
C'est étrange ... toute la journée j'ai la gorge serrée en me disant " encore une chose que je ne pourrais pas lui raconter " ... mais pourtant je vis dans le déni, je me suis forgé une sorte de carapace et j'évite de penser à ce qu'il se passe car lorsque je le fais, la souffrance est tellement grande, tellement douloureuse ... je pleure, je gémis de douleur tellement ça fait mal. C'est de la détresse pure et simple. Car je voudrai juste avoir une chance de lui dire au revoir, de l'entendre me donner un dernier conseil pour m'aider à vivre sans lui, encore un encouragement. Un dernier je t'aime.
Mon papa savait que je l'aimais à la folie et que j'aurais fais n'importe quoi pour lui mais j'aurais tellement voulu lui dire à quel point je suis fière d'être sa fille, à quel point pour rien au monde je n'aurais changé de père.
Quand je me mets à penser à ce qu'il se passe je ne vois qu'un tunnel de douleur sans fin, je vois toute une vie sans lui et pour moi c'est impossible. Je ne veux pas vivre comme ça, je ne veux pas d'une vie sans lui ça ne m'intéresse pas ...
Alors je n'y pense pas. Et je me sens coupable et tellement faible ... mais je ne peux pas c'est au-dessus de mes forces.
Je vois un psy et c'est aussi ce qu'il m'a dit , que si j'avais l'impression d'avoir perdue une partie de moi c'est justement parce qu'avec tout l'amour qu'il m'a donné il a forgé une partie de moi.
Je me sens comme une coquille vide.

Merci beaucoup pour votre attention, vos réponses et votre tendresse ... je vous embrasse

Lola

Hors ligne Lena

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  • Le forum d'entraide durant un deuil
Re : Papa ...
« Réponse #4 le: 08 mars 2017 à 18:20:02 »
Chère Lola

Quand je te lis, c'est moi que je vois. J'espère vraiment pouvoir t'aider mais je sais à quel point c'est dur, à quel point il suffit d'un rien pour nous faire du mal tant la douleur est énorme après ça.

C'est drôle, à quel point nos histoires sont similaires. 19 ans aussi, cancer aussi (mais un cancer vicieux, invisible, impossible à diagnostiquer), et un père si incroyable. Pas la peine de raconter ça, tu le sais. La même admiration, le même attachement, le même amour incommensurable que je le lui porte transparaît dans ton message.  Il est mort le 27 mars, presque un an et cet "anniversaire" me passe difficilement dessus. Les deux premiers mois ont été si durs, atroces, comme toi j'en avais mal, physiquement. Je sentais un couteau dans ma poitrine, ça tournait sans cesse, j'avais une telle envie de l'arracher et de poignarder quelque chose, n'importe quoi, pour évacuer ce déferlement de rage et de tristesse. Pas de regret, aucun, pour mon père, si ce n'est qu'il n'ait vécu plus longtemps, mais un chagrin immense, l'impuissance de l'avoir vu partir si vite. En à peine 6 mois! Et le matin du jour de Pâques, il allait si bien! ¨Pour mourir le soir.

La fac était dure, je ne te le cache pas. A 19-20 ans, peu de mes amis avaient le tact minimum pour me parler. Ils m'évitaient même, faisaient parfois comme si rien n'avais changé. Je ne leur en veux pas, c'est une chose énorme à gérer. Je n'avais arrêté les cours qu'une semaine, le temps de s'occuper de l'enterrement et de rester avec ma mère et mes frères à Bordeaux (j'étudie à Paris). Les premiers mois sont les plus durs, et c'est vrai, le temps fait beaucoup de choses. Mais tu n'as sans doute pas envie d'entendre ça, ceux qui me disaient, "avec le temps", je m'en foutais, quel temps? Il ne comptais plus. J'avais besoin de quelque chose, mon père.  Mais là, en un an, j'ai vu le chemin que j'ai parcouru. Tout n'est pas tout rose bien sûr, et ceux qui me disent de me "reconstruire" ne savent clairement pas de quoi ils parlent. Faute sans doute à toutes ces images de pseudo-résurrections qui sont présentes dans les livres ou les films, où le héro ne peut que aller mieux. Nope. Les émotions sont un vrai yoyo.

Avril et mai étaient hardcore, vraiment. A la fac, je ne laissais rien voir. J'ai toujours pas mal refoulé. Le soir, parfois, je craquais complètement. Mais j'avais une amie qui m'a beaucoup aidé. Et puis, en juillet, j'ai fait une partie de St Jacques de Compostelle. Boum. Énorme pas en avant.Rencontré des personnes incroyables. Un jour, je me suis arrêtée dans la forêt, j'ai sorti une photo de mon père et moi et j'ai pleuré à chaudes larmes pendant 5mn. Puis je suis repartie. Je ne te dis pas de faire absolument quelque chose comme ça mais mon conseil c'est d'être égoïste. Tu es dans une situation où tu es en droit de demander de l'aide sans rendre immédiatement la pareille. Les gens ne te le proposeront pas, ils ne savent pas comment le faire. Dis-leur des choses simples : "venez parler avec moi", "viens dormir, je ne veux pas être seule", "aller, je veux sortir un peu, ne rien dire, ne rien faire mais sois-là". C'est un temps où tu es la priorité et tes amis qui voudront t'aider le feront.

N'ai pas peur de pleurer, ni honte. S'il y a bien une chose que j'ai apprise, c'est que ni l'humilité ni le sensibilité ne sont des marques de faiblesse. On aimerait nous le faire croire mais ce sont de grandes qualités. Tu as perdu ton père. Tu as 19 ans. Tu ne sais pas ce que tu peux faire, un pilier de ta vie s'est écroulé et on te demanderait de faire comme si de rien n'était?
Tu m'as l'air d'avoir partagé énormément de choses avec ton père, vous vous êtes tout dit, vous vous aimiez tant. Si tu veux m'en dire plus à son sujet je serais très contente, j'y retrouve des traits du mien. Perdre son père à 19 ans est quelque chose d'anormal et d'atroce mais cela peut aussi te forger des atouts extraordinaires, car se relever après une telle douleur, et surtout prendre aussi tôt conscience que la vie a intérêt à être vécue est une chose rare.  Je sais, tout ça n'est que mots, ils ne valent rien face à ton chagrin. Ce que tu veux c'est ton papa. Ce que je veux, c'est mon papa.

N'empêche que j'ai beaucoup moins mal. Je suis triste parfois, mais d'une tristesse presque bénéfique. Je pense souvent à lui, je lui dis que je l'aime et je sais qu'il m'entend.  C'est une chose très étrange mais je n'ai ni envie de mourir, au contraire je compte bien faire le maximum de choses, ni peur de la mort. D'un côté, il y a quantité de moments et de gens extraordinaires, de l'autre, il y a l'inconnu mais un inconnu familier, où mon papa sera toujours avec moi. Quand je rêve de lui, je sais qu'il est mort mais je suis contente de le voir, je me dis quelque chose comme "tiens papa, t'es là, ça faisait longtemps, je suis heureuse d'être avec toi".

Je pense fort à toi.
Lena.

Lolatara

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Re : Papa ...
« Réponse #5 le: 11 mars 2017 à 15:38:13 »
Coucou Lena. Si seulement je pouvais t'exprimer la chaleur que m'ont procuré tes mots ... Ils m'ont fait du bien. Ils m'ont fait me sentir moins seule. Et ils m'ont donné un peu d'espoir. J'ai l'impression que jamais, jamais je ne pourrai aller mieux et rien que l'idée de vivre avec un vide, de vivre sans lui ... j'en suis malade.
Moi aussi je serai contente de discuter avec toi, je t'ai justement envoyé un message privé ...
je te souhaite du courage aussi, et en attendant un nouveau message de toi je t'embrasse.

Lola

sonia tlili

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Re : Papa ...
« Réponse #6 le: 12 mars 2017 à 01:40:33 »
bonsoir lola ,
j'ai eu la chair de poule et j'ai pleuré en lisant ton témoignage , j'imagine ta souffrance , j'ai perdu mon papa le 03 février ,il était très malade ,en 10 mois 3 hospitalisations ,dont une qui a durée 18 jours pour une complication trés grave pendant laquelle j'i pensé que j'allais le perdre et que c'était la fin .
mais mon père était un battant et il s'en ai sorti ,j'ai pensé que dieu lui a donné une seconde chance ....2 mois aprés  ,une autre hospitalisation pour un séjour de 24h ,un petit acte sous anesthésie ,puis un programme d'un saut pour boire un café au soleil avant de rentrer à la maison ..; eh non ,cette fois ci papa a décidé de ne plus se réveiller ,une longue nuit de sommeil après l'acte chirurgical ,très calme d’ailleurs , puis 4 jours de  soins intensifs  et puis on m’appelle  pour me dire que mon papa " épuisé toute ses ressources et qu'il va faire un arrêt cardiaque dans les heures a venir "
c'était trés violent comme annonce , aussi violente que pour toi ,je te comprends parfaitement ,tu es en droit d'etre en colère ,de te dire pourquoi moi ?? c vrai tu si jeune et il te reste pleins de choses a vivre avec lui ,ton père restera à jamais vivant en toi ,tu es sa fille et son sang coule dans tes veines ,donc il continuera a vivre en toi tant que tu es vivante ,la relation que tu avais avec lui est une richesse profite de cette richesse pour faire vivre ton papa dans ton quotidien ,parle lui comme s'il pouvait t'écouter , partage avec lui tes pensées ,des craintes ,dis toi qu'il peut t'écouter et qu'il aimerai que tu sois heureuse  , dis toi qu'il a était fière de toi et qu'il aimerai continuer a l’être ,je sais que ce n'est ni évident ni facile ,mais donne toi le temps qu'il faut  pour pleurer son départ , pleure chaque fois que tu en éprouve le besoin ça te fera du bien , mais autorise toi à sourire en parlant de tes souvenirs avec lui ,soit triste pour son départ mais sois heureuse d'avoir eu un papa qui t'a aimé plus que tout au monde ,de tout coeur avec toi ma grande