Bonjour,
J'ai déjà brièvement expliqué mon histoire dans le post de Mandy mais je peux de nouveau la "résumer" : j'avais déjà perdu mon papa il y a 12 ans d'un cancer et il y a un mois et une semaine j'ai perdu ma maman d'un cancer également.  Pour elle tout a été très vite, premières douleurs aux articulations 15 jours avant le confinement, traitée pour de l'arthrose puis chute chez elle le 14 avril, radio qui montre des métastases, passage rapide en oncologie où on lui annonce qu'il y a des métastases partout. Puis très vite les soins palliatifs où elle est morte le 28 avril. Donc 15 jours d'hospitalisation et basta. Plus rien. Le vide. L'absence. Avec toutes ces règles du confinement, visites limitées à l'hôpital, 20 personnes max à son enterrement...
Aujourd'hui un mois après je me cache déjà de mon conjoint pour pleurer. Un mois après qd on me demande "ça va ?" Je réponds "on fait aller".  Car non ça ne va pas. Elle me manque, je me sens brisée. J'en veux à la terre entière de continuer de tourner. Ce WE de Pentecôte il fait beau dans le jardin on entendait le voisinage où les familles joyeuses se réunissaient. Moi je n'ai envie de voir personne. Et je m'en veux de faire vivre ça à mon conjoint et à nos deux enfants. Je sens que pour lui forcément ça va vite, il voudrait revoir des gens, retrouver une vie sociale. Moi toutes les conversations futiles et inutiles vont me saouler. Je veux parler d'elle, de ce qui s'est passé, de ma douleur. Je ne supporte que de voir des proches de ma famille eux mêmes très touchés. Ou des personnes qui ont vécu un deuil pour partager cette expérience. Je sens qu'autour de moi on voudrait que j'aille vite mieux. Allez refaisons des barbecues, rendons visite à tel ou tel.  Comment c'est possible ? Ils n'ont perdu aucun être aimé ces gens là ?? Eh bien non c'est vrai. En général ce sont des gens qui ne savent pas. Qui n'ont pas fait face à ça. Ils ne savent pas que ma vie à moi s'est brusquement arrêtée. J'envie leur insouciance que je n'aurai plus. Moi j'ai perdu ma maman. Celle qui m'aimait de façon inconditionnelle, que je pouvais aller voir à tout moment, qui aimait me rendre service, m'écouter, me consoler. Je me sens comme une petite fille perdue.
Mais au bout d'un mois certaines personnes autour de moi sont déjà passées à autre chose. Elles voudraient que je ne pleure plus. C'est embarrassant le mal être. Pourquoi n'a t'on pas envie de rire comme avant ? Donc ce matin par exemple en parcourant ce forum je pleurais et qd mon conjoint s'est levé j'ai vite essuyé mes larmes. J'ai peur de lasser avec mon chagrin, qu'on me croit dépressive ou je ne sais quoi. Je sais que je ne le suis pas. Mon coeur est triste, si triste, si lourd. Les gens de ce monde passent ils si vite à autre chose ? Aiment ils si peu ceux qui les ont accompagnés toute leur vie ? Est ce que la peine fait peur au point où il faut vite donner l'image de qqu'un qui va bien ? N'est-il pas superficiel ce monde où il faudrait oublier si vite ceux qu'on a perdus ?
Moi je ne m'y reconnais pas dans ce monde. Ma mère me manque. Je souffre physiquement, dans mon cœur et ma tête. Plus rien ne sera comme avant. Pourquoi ferai je semblant ? Pourquoi est ce qu'un mois après je dois déjà le cacher pour pleurer ?

Bonjour Sandrine
Ne te blâme surtout pas d aimer ta mère. C'est parce que tu l'aimes fort qu elle te manque autant.
Parle à ton conjoint. Au début cela a été très difficile avec mon mari. J avais l impression qu il était complètement à côté de la plaque. Quelques jours après le décès de ma maman, peut être 15, un de ses copains est venu pour voir une série à la maison. Il ne m a pas demandé une seule fois comment ça allait alors qu'il avait fait livrer des fleurs pour l enterrement de ma maman. Il n'y a qu en partant qu il m a dit bon courage. Après la soirée j ai dit à mon mari que je ne voulais plus recevoir pour le moment. Et je t'avoue que cela fait 8 mois que je n ai reçu personne si on excepte la famille.
Il faut être patient avec soi même.
Je sais que la peur de mon mari est que je ne sois plus jamais heureuse et quil ne retrouve jamais sa femme. Je lui ai expliqué que celle que j étais avant était morte avec ma mère mais que j espérais qu'un jour j'arriverais à intérioriser ma maman et être "mieux". Après je ne vais pas te mentir c'est une veritable épreuve pour le couple mais je pense que communiquer aide à la surmonter.
Il faut dire les choses quand ça ne va pas plutôt que ruminer.
Pour les "autres" je ne sais pas trop. En réalité j espère moi même ne pas avoir été si indélicate quand des proches ont été confrontés à la mort d un parent. Quand on ne l a pas vécu on ne se rend pas forcément compte de l absurdité de certaines de.nos remarques. Il faut dire que quand on perd son parent on est à vif et que la moindre reflexion peut faire l effet dune bombe. Après je sais aussi qu'il y a des personnes qui semblent insensibles de l extérieur, qui ne parlent pas de leurs morts, et font tout pour éviter le sujet parce que ça leur fait trop de mal intérieurement. En parler les replonge dans une mauvaise période. On vit tous différemment le deuil.
Parle de ta maman avec tes enfants pour cultiver son souvenir. Ça fait du mal mais ça fait aussi tellement de bien de la faire revivre dans une conversation. Peut être que rejoindre un groupe de parole te ferait du bien? Ne pas avoir pu accompagner comme tu voulais ta maman avant son décès mais aussi après par le rituel funeraire est qqch d'eprouvant dont il faut à mon avis parler.
Peut être, quand l épidémie sera derrière nous, faire une cérémonie en l'honneur de ta maman pour lui rendre un hommage avec les personnes qui n'ont pas pu lui dire au revoir ?
Prends soin de toi en tout cas
J'espère de tout coeur que nos parents veillent sur nous peu importe l'endroit où il se trouve

Sandrine , moi ça fait 10 mois que j ai perdu ma maman et j ai le même sentiment  que toi .
Mon monde s est écroulé et cet amour inconditionnel  dont tu parles me manque extraordinairement
J ai l impression de ne pas avoir le droit d aller mal , on veut me voir comme avant .
Mais je ne serai jamais plus comme avant
Il faut que je fasse semblant d aller bien , mais il faut aussi absolument que je vois un psy , que je me fasse aider,  que je prenne des antidépresseurs  . Es ce si honteux , si anormal d aller mal après le décès de la personne qui compte le plus au monde ?!!?  Y a il un nombre de jours au dela duquel c est fini on a assez pleuré ?!
J ai juste envie de crier : soyez la pour moi , comprenez ou du moins respectez ma peine et foutez moi la paix
Pour ma part j ai l impression que tt le monde veux que j aille bien sans pour autan faire d efforts pour que ça soit le cas . Mais on  ne balaye pas le chagrin , la douleur , l innommable tristesse d un revers de la main , j ai besoin  de temps , de pouvoir pleurer et j aurais besoin de soutien , de douceur . Pas de conseil du genre il faut sortir , va chez le coiffeur , fait toi soigner ...

Oui C est ca , il ne faut plus embêter les gens .. J ai mis bcp de temps à pouvoir extérioriser  ma douleur , il fallait être forte ! Et puis m****, j en ai eu marre , plein le C** d être forte ! Ça m a enlevé  un poid , on m a dis que c était bien que c était normal de pleurer , qu' il fallait en parler ... Mais ds les faits c est pas du tout comme ça.. tu ne t es pas maquillée,  tu ne souris pas assez , tu as les yeux rouges .. Mais qu' es ce qu' il y a ENCORE ?!  A croire que le quota est dépassé ,  j avais un nombre de jours autorisés mais la c est bon ça suffit ; en plus c est l été barbeccu piscine , que demander de plus .
Hier maquillage , sourire de facade , tt le monde ravi , j ai pas été un poid , j ai participé  , j ai caché  magnifiquement  ma douleur et le pire c est que ça semblait normal pour tt le monde . A croire que ce qui n aurait pas ete normal c est que ça n aille pas ... on part de chez mes beaux parents vers 20h30 , petite baisse de régime,  je ne montre rien , je demande juste à mon conjoint si on peut marcher un peu , pas envie de rentrer . Non il a faim , on rentre je prépare le repas , je m endors sur le canapé  , je me réveille très mal , encore un cauchemar  ...et la comme d habitude la question piège : qu' es ce qu' il y a ? Je répond que c était dur pour moi  cette journée mais c était à priori pas la bonne réponse.. ça embête
Je crois que ce qui me touche le plus c est que personne ne mesure l effort que ça m a demandé,  que personne ne se soit soucié  de ce que je pouvais resentir .. Après tout c est un jour festif , il ne faut surtout pas entacher la fête.
Je suis qq un d extrêmement  empathique , très attentive aux autres , j ai fait bcp  bcp pour mon conjoint, pour certains de mes" amis "aussi et même si on ne fait pas les choses pour avoir un retour , j aurai espéré  un vrai soutien .. ça rajoute une goutte de tristesse dans mon océan de malheur .

Voilà on sort aujourd'hui... J'ai accepté une invitation... Surtout pour mes enfants... Moi je me lève et j'ai une grosse boule d'angoisse, je n'ai pas envie d'y aller... Je sais que je vais être sinistre. Envie de voir personne. Ce matin j'aurais envie d'appeler ma mère pr qu'elle me rassure. C'est absurde car c'est parce qu'elle n'est plus là que je me sens comme ça... Comme quoi il n'y a pas de "solution"... Il faut du temps sans doute... Mais qd on a des enfants pleins de vie on ne veut pas les priver... Je vais subir et attendre que passe cette journée... On m'a dit "tu penseras à autre chose" , est ce que j'ai envie de penser à autre chose ?? Je veux me souvenir de tout moi ! Même de ses derniers jours. J'ai l'impression au contraire que quand je m'éloigne de ma peine je m'éloigne de la possibilité d'aller mieux à un moment donné... Si je ne vais pas au bout si je n'y fais pas face c'est là où je ne vais pas en sortir... C'est l'impression que j'ai... La vie est d'une telle absurdité... Je commence à me dire que ce n'est pas possible, il y a qque chose après, sinon à quoi bon ? Aujourd'hui ça ne va pas... J'ai eu envie de vomir en me levant... Je voudrais juste qu'on me foute la paix, mettre ma vie en pause pr réfléchir, aller au bout...

Bonjour Sandrine, je me reconnais tellement dans votre récit. J'ai perdu mon père le 18/07/20, après 3 semaines d'hospitalisation où le jour d'avant on nous a donné un diagnostic de cancer du foie métastasé aux os. Il était hospitalisé au Portugal , protocole covid ma mère était la seule à avoir le droit de le voir 2h 3 jours dans la semaine. Protocole covid des obsèques, enveloppé dans un drap, pas le droit de le voir. Comme toi mon monde c'est effondré, on me dit fragile car je suis hyper sensible. Mais m****e, j'ai perdu mon papa . Laisser moi le pleurer, être triste et là je dois partir en vacances, comme c'était programmé avant pour faire plaisir à belle maman qui n'arrête pas de dire que c'est le chagrin de ma mère qui est horrible comme le sien depuis 15ans. Moi j'ai juste envie de rester dans ma bulle, ne pas écouter les futilités des autres. Du temps et de la compréhension, tout ce que j'applique quand j'accompagne les gens dans un processus de maladie car je suis infirmière. J'espère que je n'ai pas dit de grosses âneries car oui je pense que tant que l'on ne l'a pas vécu on ne connait pas.