Bonsoir,

Voilà, je viens de rejoindre la longue liste de ceux ont perdu leur mère.
La mienne s'est éteinte lundi de la semaine dernière, le 30 mai, à l'âge de 69 ans.
Je suis une femme de 50 ans. J'ai parfaitement conscience que perdre sa mère à 50 ans est moins "dur" que de la perdre à 25 ou 30 ans, c'est pour cela que je m'excuse d'avance auprès de ceux qui l'ont vue partir alors qu'ils étaient encore très jeune, trop jeunes, vous avez toute mon empathie.
Mais ce soir, j'ai besoin d'exprimer ce que je ressens auprès de personnes qui ont vécu ou qui vivent cette épreuve en ce moment. Les gens qui n'y sont pas confrontées, ne comprennent pas ce que l'on peut ressentir, et c'est bien normal.
Les relations que j'entretenais étaient extrêmement conflictuelles. Pour être plus claire, ma mère était ce que l'on peut appeler une mère toxique. J'ai terriblement souffert de son manque d'amour. Elle m'a abandonnée alors que ne n'avais que 16 ans, me laissant seule avec un père adoptif (je ne connais pas mon père biologique) lui aussi extrêmement toxique.
A cause de cela, je n'ai pas fondé de famille. Mon coeur brisé ne me l'a pas permis. Je n'étais qu'un champ de ruines que j'aurais mis 30 à reconstruire.  Alors, comment aider un petit être à se construire lorsque l'on est soi-même en miettes ?
Mais je vais vous parler de cette dernière année, l'année où tout a basculé, où j'ai pu entendre l'inaudible, l'impensable que j'aurais passé ma vie à fuir, me noyant dans l'alcool, incapable d'y faire face : "ma vie a été gâchée à cause de toi". Des mots qui m'auraient tuée il fut un temps et qui, aujourd'hui, ne font que me blesser.
Enfant non désirée et rejetée par sa mère, voilà quelle fut mon arrivée dans ce monde.

Moi, je t'ai aimée Maman, éperdument parce qu'il est naturel pour un enfant d'aimer sa mère, ce qui ne l'est pas forcément pour une mère d'aimer son enfant.
Et aujourd'hui tu n'es plus là et pourtant... Je suis bouleversée. Je pleure et j'ignore pourquoi ? Peut-être parce que tu es ma mère et que, par définition, je ne peux que t'aimer.

bonjour
pas tout à fait d'accord avec Mandy pour dire que s'il y a relation il y a amour, je pense que les mécanismes mis à l'oeuvre sont plus complexes
peut être cette mère "toxique" n'a pu reproduire que ce qu'elle avait reçu elle même et votre scénario à vous a été plus altruiste en ne désirant pas fonder une famille par peur de reproduire?
pourquoi la pleurez vous? à mon avis pour plusieurs motifs
c'est l'enfant en vous d'abord qui la pleure, votre positionnement devient autre, celui d'une adulte dont le moi enfant se réveille et douloureusement car il ne peut plus rebâtir puisqu'elle n'est plus là
l'enfant qui est en vous avait un amour idéalisé, celui pour une mère qui n'a pas existé mais que vous auriez voulu avoir
votre douleur est aussi exutoire peut être votre colère qu'elle ait été toxique n'a pas encore pu s'exprimer
et c'est peut être ce versant là qui doit trouver un lieu d'écoute, afin de vous en décharger avant que la douleur du moi enfant puisse aussi dire sa peine et ensuite vous reconstruire, peut être lui pardonner de n'avoir pas été celle que vous auriez voulu avoir.
Si j'ose vous donner une note d'espoir, c'est après cette purge du chagrin qui sera essentielle (peut être vous conseiller de voir un spécialiste du deuil, et/ou trouver un groupe de parole d'endeuillés,) pourrez vous construire votre vie, rien n'est impossible à 50 ans, et si le manque d'enfants se fait sentir, il y a d'autres modes de création de famille que la traditionnelle,  et si je peux me permettre il n'y a pas de déterminisme même si beaucoup de personnes reproduisent le schéma familial, il y a aussi ceux qui prennent cette distance qui permet de sublimer la chose vécue et qui deviennent des êtres épanouis et le cas échéant des parents aimants
on sera là pour vous lire et entourer si vous en avez besoin n'hésitez pas à venir parler de votre histoire
amitié
katrin

Bonsoir et merci pour vos messages.
Pour expliquer un peu la situation, ma grand-mère a eu 11 enfants. Dans cette fratrie, certains ont été aimés par leur mère et d'autres pas. Ma mère a fait partie de ceux laissés de côté.
Pour elle, ma mère, a dû considérer normal de ne pas avoir de lien avec son enfant. Elle n'a connu que ça et l'a reproduit à son tour (elle en a pourtant beaucoup souffert)
Je suis arrivée alors qu'elle n'avait que 19 ans, issue d'un accident. Et pour couronner le tout, l'homme, mon père, avec qui elle m'a eue et dont elle était très amoureuse, est parti dès qu'il a su qu'elle était enceinte. Je suis donc devenue celle qui, non seulement l'a privée d'une vie qu'elle n'a pas pu choisir et de l'homme qu'elle aimait. Autant dire que c'était mal parti pour moi !
Elle n'a jamais crée de lien avec moi. J'ai toujours été celle qui l'a empêchée de vivre sa vie, de vivre ses rêves.
Dès mes 16 ans, elle est partie vivre avec un homme qu'elle a rencontré en discothèque, me laissant seule avec un père adoptif malsain et extrêmement toxique pour moi (je ne rentrerai pas dans les détails, cela n'a pas d'intérêt, mais il m'a fait énormément de mal à l'époque)
A cause de tout cela, j'ai sombré dans l'alcool vers 26 ans, suivi 1 thérapie en service addictologie d'un hôpital, thérapie qui a duré 7 ans.
Depuis bientôt 2 ans, j'ai entamé une seconde thérapie. Je me suis rendue compte que je n'avais pas encore tout réglé et c'est là que j'ai pris conscience que tous mes maux étaient dus au rejet de ma mère pour moi.
Toutes ces années d'alcool m'ont permis, malgré tout, de survivre. La souffrance était telle, qu'il fallait l'anesthésier.
Plus forte depuis 2 ans, j'étais prête à me confronter à la réalité, même si cela a été très dur par moment, je m'y suis confrontée et heureusement ! Progressivement, je me suis détachée de ma mère,  j'ai tout essayé pour qu'elle voit enfin qui je suis et qu'elle finisse par m'aimer, en vain...
Mon dernier combat, est le pardon. Je vais y travailler pour vivre enfin sereinement, après 50 ans de souffrance et de désert affectif.
C'est vrai que la vie n'est pas finie à 50 ans et j'espère de mon coeur de rencontrer enfin l'amour qui me manque tant.

Belle soirée à vous.