Caroline, que cet épisode de vie est triste, et me touche, vraiment, beaucoup.
Ton histoire récente n'est pas très éloignée de la mienne, à deux différences près :
1. Pour toi, enfin, pour les tiens, la responsabilité des confinements est reconnue. Pas pour mon papa et ma maman. (pb d'insuffisance cardiaque grave pour elle aussi, qui s'est transformée aussi en infection pulmonaire, sauf que le cardiologue a juste "remarqué" que ls jambes gonflaient ... mais a écrit de poursuivre le même traitement, alors ... est-ce que c'est elle qui n'a rien dit de ce qu'il aurait conseillé, elle a été tellement dans le déni que je ne sais plus.
2. Mon papa, diagnostic de cancer retardé par la psychose entretenue autour de ce truc, la mode, les vieux, fallait surtout pas qu'ils sortent et bla et bla et bla ... Pauvre papa, il était scotché à la tv, terrorisé ... pensant même que prendre rdv était risqué, et puis, on nous promettait toujours que ça allait se débloquer ... il a attendu, il a obéi ... il est MORT, mort paralysé, après 2 mois cloué au lit, sans sentir ses jambes, avec une soude urinaire et des couches ... quelle humiliation.
Sauf que moi, j'ai eu la chance d'avoir des équipes médicales vraiment géniales, une HAD pour papa, on l'a eu à la maison jusqu'au bout, il est mort, la tête dans mes bras, la main dans celle de maman ...
A l'hôpital où il est resté 5 semaines, il a souffert, mais ils ont fait tout pour atténuer au max. J'avais le droit d'y rester plus qu'une heure, on a passé des moments magiques, malgré la peur panique de rentrer après leur satané couver-feu. J'ai emmené maman le plus possible, mais la pauvre, avec ses jambes, c'était compliqué, je me débrouillais pour avoir un fauteuil pour la conduire dans la chambre, c'était une expédition qui l'épuisait à chaque fois.
Puis, à la maison, on a eu 3 semaines avec la Croix Rouge ... une complicité avec papa, comme jamais ... mais en même temps, maman qui se dégradait dès qu'elle a compris que ce retour à la maison n'était pas la guérison mais la fin de vie.
Elle est morte elle aussi, elle s'est laissée glisser ... avec ses jambes, son coeur, les poumons puis les hémoragies à l'hôpital ... les reins ont lâché, elle nous a quitté 18 jours après papa.
merci le confinement, merci les couver-feu ... et ça, on n'en parle pas. On n'a pas le droit.
Alors, Caroline, je comprends vraiment ce que tu ressens, cette solitude, cette difficulté face à tout, tous les jours, et personne à qui en parler. Car ils ne sont plus là pour nous écouter, pour nous conseiller, pour nous demander notre avis, pour discuter, pour nous sourire, pour nous raconter, leurs doutes, leurs inquiétudes, leurs petits plaisirs ...
Je comprends à quel point ils te manquent ... je me surprends aussi à leur parler, à dire "coucou" qd je rentre dans la maison ... vide; à me dire "maman va être contente, il y a un inédit à la tv ... oui, sauf que maman n'est plus là ... à dire à papa qu'il peut être rassuré, la pelouse, j'ai tondu, sans pb, je vais y arriver à nouveau malgré les douleurs de la fibromyalgie (dûe au 1er confinement ... et oui, ça aussi, c'est interdit de le dire et même de le penser, c'est tout juste si j'ai le droit d'avoir mal
). Mais papa n'est plus là, il ne l'aura pas su ... alors j'en arrive à me dire que ça ne sert à rien que je tonde, de toute façon, je vais déménager ... mais il faut qu'on tienne, Caroline, il faut qu'on sache qu'il reste du monde malgré tout, tu as ta maman, certainement des ami(e)s ... des gens qui t'aiment, t'apprécient.
Moi, j'ai des frères que je ne peux pas laisser tomber pour les successions, ils sont loin, je suis sur place, on était voisins avec papa et maman. J'ai mes neveux ... et des ami(e)s qui m'ont soutenue ...
Ton papa est décédé le jour de ton anniversaire, le mien le jours de ma fête ... c'est tout récent, 22/02 et 6/03 ...
Et moi aussi, pourtant très cartésienne, j'ai des signes ... je les raconterai si tu veux. Enfin, est-ce que c'est des signes ou est-ce que je l'interprète ainsi ... j'ai envie d'y croire, ça me fait du bien.
Quelque chose qui me fait du bien aussi, c'est aller m'assoir sur leur tombe, leur parler puis écrire dans un cahier tout ce que je voudrais leur raconter si tout ça n'était pas arrivé. As-tu essayé ?