[Bonsoir,
Cela fait plus de 5 ans que je n'ai pas vu ma maman et ma présence se fait beaucoup plus rare sur ce forum. Les 3 premières années j'étais très souvent connectée au site et aux endeuillés mais j'ai eu besoin de prendre de la distance pour essayer de me reconnecter à la vie. Lire le chagrin des autres nous replonge et nous maintient dans le nôtre.
J'aimerais te dire qu'au bout, il y a de la lumière car la douleur finit par s'apprivoiser, on finit par interioriser l'être aimé de sorte qu'il ne sous semble plus perdu. Je vais mieux aujourd'hui qu'il y a 5 ans mais je n'irai plus jamais aussi bien qu'il y a 6 ans où maman était encore là. Il y a un avant nous et un après nous.
Parfois, tout remonte. Son malaise me revient souvent en boucle, ses mots, l'annonce à mon frère et ses hurlements de douleur au téléphone. Nos disputes, ma difficultés à exprimer mes émotions et mes peurs car comme toi, malgré son corps fatigué, je refusais ne serait ce que d'envisager que ma mère puisse mourir. Non pas elle, elle était trop forte et moi pas assez pour continuer sans elle. Alors ce soir, je pleure avec toi et avec Commentfaire.
D'ailleurs il ne faut pas en vouloir aux mamans qui perdent un enfant de hiérarchiser. Tu dis Commentfaire que certaines mamans se "remettent" rapidement du décès de leur enfant. C'est vrai, j'en connais ou plutôt j'ai l'impression d'en connaître car parfois le chagrin est insondable et pourtant bien présent. Cependant, il y a une quantité de personnes qui n'ont pas de relation avec leur mère et ne la pleurent pas quand elle part. Je pense que celles qui perdent un enfant doivent vivre en plus de tout ce qu'on vit un sentiment d'ordre des choses inversé et de profonde injustice. C'est un deuil impossible car un deuil qui ne devrait pas se produire. On sait qu'un jour on perdra sa maman ou son papa. On ne peut s'y préparer mais c'est une peur ancrée, une épée de Damocles qui un jour tombe. En revanche, et je le dis en tant que maman, il n'est pas envisageable de perdre son enfant. Ce n'est pas imaginable. Et ce n'est pas dans l'ordre des choses.
Ma maman avait 69 ans, je trouve que c'est peu quand je vois le nombre de gens bien plus âgés que moi qui ont encore leurs parents. Mais comme elle le disait, elle avait eu une belle vie. Des enfants, un mari, des plaisirs simples.
Je pense qu'il faut essayer de s'accrocher à tous ces moments qu'on a pu partager et même si je ne sais ce qu'il y a de l'autre côté du rivage, j'espère qu'un jour nous nous retrouverons.
Je vous envoie de la lumière