Auteur Sujet: tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie  (Lu 3972 fois)

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Hors ligne qiguan

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tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« le: 16 octobre 2018 à 13:19:55 »
TRIBUNE. Les médecins d’Unité et d’Équipe mobile de soins palliatifs du département du Nord témoignent de l’intentionnalité de leur mission, qui «n’est jamais d’abréger la vie mais de soulager les symptômes».

Tout commence par notre interrogation sur l’importance médiatique donnée à ceux qui défendent corps et âme la possibilité d’une dépénalisation (ou légalisation) de l’euthanasie. Révoltés par l’omniprésence d’un seul langage, qui fait appel à la projection et aux peurs, légitimes, que nous pouvons tous avoir quant à notre fin de vie, nous avons voulu faire part de notre témoignage de professionnels de santé habitués à l’accompagnement palliatif. C’est pour cela que TOUS les médecins d’Unité et d’Équipe mobile de soins palliatifs du département du Nord ont signé une déclaration stipulant, entre autres, que «l’euthanasie va à l’encontre de notre culture palliative.» Nous sommes des palliatologues, dont le métier consiste à soulager les symptômes d’inconfort et à faire «vivre le temps qu’il reste à vivre» aux patients et à leur famille, dans les meilleures conditions possible.

Mais c’est quoi, les soins palliatifs? Le docteur Thérèse Vanier, pionnière de notre spécialité dans les années 1970, les décrivait ainsi: «C’est tout ce qu’il reste à faire lorsqu’il n’y a plus rien à faire.» Dans l’imaginaire collectif, les soins palliatifs sont abusivement associés à la phase terminale de la maladie. En réalité, il n’existe aucune opposition entre soins curatifs (qui ont la visée de guérir) et soins palliatifs, mais au contraire une continuité, une complémentarité entre ces deux types de prise en charge.

    «L’objectif est de ne pas maintenir de façon artificielle la vie, lorsque seul le confort du patient nous importe»

Les soins palliatifs sont présents dès le début de la maladie incurable, dès l’annonce du diagnostic (même si ceux-ci sont présentés autrement), et prennent une place croissante dans la démarche globale de soins, au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, s’adaptant constamment à l’état du patient, à ses désirs, à ses besoins. L’objectif des soins palliatifs est d’obtenir un confort optimal pour des patients qui souffrent de pathologies graves évolutives et/ou terminales. Pour soulager les souffrances dites réfractaires, la loi Claeys-Leonetti de 2016 permet d’utiliser des thérapeutiques pouvant avoir un «double effet».

Le «double effet», c’est utiliser tous les moyens possibles pour soulager un symptôme même s’ils peuvent avoir comme effet secondaire d’abréger la vie (cet effet secondaire étant imprévisible et inconstant). Si nous décidons de prescrire des opioïdes (la morphine par exemple) ou des anxiolytiques, c’est qu’il existe des symptômes d’inconfort (douleurs, anxiété…). Ces thérapeutiques ne provoquent pas le décès, d’autant plus que nous essayons toujours de rechercher la posologie minimale efficace, celle qui permet le soulagement des symptômes et, si possible, de préserver la conscience du patient.

De même, il est possible, en situation palliative terminale et dans le cadre d’un refus d’obstination déraisonnable, que l’on décide après concertation collégiale d’arrêter une hydratation ou une alimentation artificielle afin de ne pas provoquer d’inconforts inutiles (encombrements, œdèmes locaux, risques de pneumopathies d’inhalation…).

L’objectif est de ne pas maintenir de façon artificielle la vie, lorsque seul le confort du patient nous importe. Les patients, dans ces situations, ne souffrent pas de faim ni de soif, ce sont des sensations qui disparaissent ou que nous savons apaiser.

    «De par notre expérience, nous savons que l’accompagnement palliatif permet un travail de deuil, des échanges, des moments de joie et de partage, qui n’au­raient pas été possibles autrement»

En dernier recours, si nous n’avons pas réussi à soulager le patient par des moyens habituels, nous pouvons mettre en place une sédation pour que celui-ci ne soit plus conscient de la situation qui lui cause un inconfort… Cela reste exceptionnel. L’intentionnalité de nos soins n’est jamais d’abréger la vie mais de soulager les symptômes. Ce ne sont pas les thérapeutiques initiées ou arrêtées, mais l’évolution de la maladie sous-jacente qui cause le décès ; celui-ci étant inéluctable à plus ou moins court terme. Puisque son intention est d’entraîner, de façon directe et intentionnelle, la mort d’un patient, l’euthanasie va donc à l’encontre de notre culture palliative, de nos pratiques.

De par notre expérience, nous savons que l’accompagnement palliatif permet un travail de deuil, des échanges, des moments de joie et de partage, qui n’auraient pas été possibles autrement. Les soins palliatifs, contrairement à ce que vous pouvez penser, sont remplis de vie. Qu’ils soient à domicile ou à l’hôpital, c’est une réponse pluridisciplinaire moderne, adaptée à l’accompagnement en fin de vie dans notre société qui a peur de la vieillesse, de la maladie, de la perte d’autonomie et de la mort. Les soins palliatifs respectent la vie et considèrent la mort comme un processus naturel. La singularité du vécu des patients dans cette situation et leurs souhaits y sont profondément respectés.

Ce n’est pas la question de l’euthanasie qui devrait être actuellement débattue mais celle du droit des patients à la non-obstination déraisonnable, au soulagement des symptômes d’inconfort et à l’accès aux soins palliatifs.
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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #1 le: 16 octobre 2018 à 14:24:51 »
"Ce n’est pas la question de l’euthanasie qui devrait être actuellement débattue mais celle du droit des patients à la non-obstination déraisonnable, au soulagement des symptômes d’inconfort et à l’accès aux soins palliatifs."

Serait-ce une question fermée ? Décider que la question de l'euthanasie n'a pas à être débattue car sortant du champ de la "Fin de vie" semble limiter singulièrement les débats...
Pour plus d'infos sur le sujet, consulter le thème "Prise en charge de la fin de vie" (cliquer sur onglet 2 Consultation afin de prendre connaissance des 626 propositions émises et voir Ici ! la synthèse ) qui a fait l'objet de consultations publiques lors des États Généraux de la Bioéthique qui se sont tenus cette année, ainsi que le Rapport de Synthèse du Comité Consultatif National d'Ethique/Opinions du Comité Citoyen de tous les thèmes abordés (transmis par Eva, merci !)
« Modifié: 16 octobre 2018 à 15:51:51 par Faïk »

Hors ligne qiguan

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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #2 le: 16 octobre 2018 à 15:28:37 »
Merci pour cette alimentation de la réflexion de chacun
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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #3 le: 16 octobre 2018 à 15:42:43 »
Merci d'avoir ouvert ce thème.
D'une part, je partage l'avis des 2/3 du comité citoyen du rapport sur le sujet du suicide assisté, et d'autre part,  les  fins de vie que j'ai été amené à accompagner directement m'ont laissé un profond questionnement sur  la dignité,  la responsabilité et la culpabilisation, sujets difficiles et assez occultés, voire zappés ou évacués ai-je trouvé. A suivre, sujet complexe, évidemment, et plus qu'intéressant. donc vraiment merci.
Pascal.
C'est dans les situations les plus difficiles et les plus désespérées que les individus trouvent le courage de se battre pour leur conviction. Tecumseh.

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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #4 le: 16 octobre 2018 à 19:27:12 »
bonsoir..je vais donner un avis tres personnel puisque Jean Pierre a demandé a bénéficier (si on peut dire) de la sédation après 3 semaines de souffrances physiques et psychiques et sachant qu'aucun traitement n'etait possible dans son cas,son cancer a été foudroyant et les résultats ont tellement tardés à tomber qu'il n'y avais plus de solutions médicales.
Nous avons demandes dans un premier temps l’arrêt des investigation en tout genre qui ne servaient plus a rien et par la suite la sedation, nous avons du réitérer 3 fois cette demande avant qu"elle ne soit pris en compte, et quand enfin nous avons eu gain de cause ,le service  dans lequel etait jean pierre (oncologie et non palliatif ) a gérer la situation de façon catastrophique,rien n'a fonctionné comme cela aurais du être et il souffert inutilement  encore plusieurs heures.
Voila un resume de mon vecu..le probleme est dans l'organisation des services  hospitaliers et dans l'application de la loi existante;puisque ce sont des hommes et des femmes comme nous avec leur convictions religieuses, humanistes  ou autres qui vont mettre en route le processus et que nous sommes ,nous, les malades et leur famille obligé de faire avec leur bon vouloir.
dans mon cas et celui de mon mari son état ne laisser plus aucun espoir et sa souffrance était paroxystique, il  me suppliait de l'aider a partir ailleurs...je ne pouvais le faire malheureusement.
Appliquons  deja parfaitement ce qui existe ce serais je crois le premier respect a donner aux malades et leur famille
Si j'avais su que je T 'aimais autant, je T'aurais aimé encore davantage.

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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #5 le: 16 octobre 2018 à 19:57:29 »
Un très grand merci .
Il s'agit qu'une question très très délicate .
Beaucoup d'entre nous ont été confrontés à un choix tellement difficile en accompagnant un proche .
Comment faire respecter les dernières volontés clairement exprimées ?
Mon compagnon avait signé devant notre notaire un document exprimant ses souhaits; j'étais la personne de confiance désignée et j'ai tenté de respecter scrupuleusement ce qu'il désirait entre autres ne pas divulguer son dossier médical y compris à ses enfants et me laisser dire aux soignants ce qu'il avait décidé .
Sa  propre fille ayant des convictions religieuses et étant  avocate a pris rendez vous avec la cancérologue de mon compagnon  sans lui demander son avis et a exprimé haut et fort ses propres désirs .
Malgré le document officiel les soignants ne sachant que faire et ne voulant pas de 'bataille rangée' ont écouté sa fille .
Que dire? que faire ?
Comment le laisser s'en aller sereinement sans nous battre au pied de son lit?
J'ai tenté de résister mais j'ai renoncé pour qu'il ne sente pas ce qui se passait autour de lui .
Et puis, pour ne pas avoir de remords, je me suis persuadée qu'il avait pu changer d'avis et que dans le doute ...?
Comment être sûre d'avoir raison?
Nous étions pacsés et non mariés; je n'en veux pas aux soignants ;  ils voulaient le bien être de leur patient pas être les arbitres .
Comment être sûrs que nos volontés seront respectées ?
Les choix et convictions de l'une des filles de mon compagnon étaient portées par de l'amour ( je n'envisage pas d'autre option.... quoique?)
Vaste débat .
Je suis persuadée qu'il vaut mieux en parler avant et devant plusieurs témoins .
Je me suis inscrite et je vais lire tous les textes proposés .
Merci encore

Nath


Hors ligne Eva Luna

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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #6 le: 16 octobre 2018 à 20:15:28 »
Pour réfléchir sur cette problématique bien plus complexe qu'on ne le pense...

euthanasie:   http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?rubrique4

soins palliatifs: http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?rubrique2

Les soins palliatifs peuvent être d’excellente qualité et bien accompagner...
2 exemples personnels en tête, mon père, mon amie...leurs souhaits ont été respectés...

L'euthanasie...je me questionne beaucoup...

Hors ligne résilience et silence

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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #7 le: 17 octobre 2018 à 09:17:51 »
Bonjour.
Sujet bien délicat évidemment...Et je suis convaincu d'1 chose:  c'est le retracé de nos vécus qui forge  un débat contradictoire plus que tout autre chose.
Alors, je vous livre une des difficultés à laquelle j'ai été confronté à la mort de Papa.
Très bien entouré par le personnel soignant et très apprécié dans la maison de retraite où il a résidé 3 ans, il lui a été impossible puisque, entre autre affecté d'une DSTA (démence sénile type Alzeimer) de me soutenir comme il l'aurait fait en pleine possession de ses moyens aux moments du décès de ma fille...Je n'ai d'ailleurs pu aller le soutenir non plus pendant 3 mois tellement j'étais KO, ni lui dire non plus.
Il n'est pas possible d'éviter la réalité des neurosciences qui apprécient à leur juste mesure l'impact des dommages cérébraux comme ceux de la déshinibition (discours dominant) ...C'est un fait, comme toute vie est unique, singulière et d'un contexte propre à chacun. Il a néanmoins perçu que quelque chose chez moi  n'allait pas comme avant...tout comme sa grande prévenance naturelle était intacte au fond de lui. Il m'a fallu trouvé dans la mienne des astuces pour lui dire que sa petite-fille ne pourrait plus venir le voir car elle était partie très loin et que son attention pour lui passait par cette belle plante verte qu'elle lui transmettait par mon encontre. Très honnêtement et sans amertume, pas grand monde était capable de nous aider dans ce trajet de vie et de fin de vie. J'ai même été confronté à des réflexions assez salaces dont je vous passe le détail.
Et, presque 1 an après le décès de ma fille mon Papa est DCD le jour d'anniversaire de sa petite fille après avoir refusé de s'alimenter de lui-même 10 jours avant. ça a été le seul acte potentiel et volontaire qu'il lui restait pour transmettre qu'il donnait ce qui lui restait comme compréhension et soutien  de son rôle paternel et grand-paternel : son propre terme.
Au-delà de ma peine, j'en ai retiré un renforcement de mes convictions : il n'existe pas de maladies mais seulement des sujets malades, fonction d'une histoire, d'un contexte, d'une singularité propre et unique à chacun (e)s, et là, il y a à apprendre et à avancer dans la complémentarité de nos connaissances en tous domaines, palliatifs comme psychanalytiques, systémiques, neuro-sciences et autres. Et ça "on" ne sait pas encore le faire, car, à mon avis, nombre d'entre nous se retrouvent seul(e)s pour faire face aux situations parfois ultra-lourdes et compliquées de l'hyper-complexité humaine, tout autant les soignants que les patients.
Et pour rappel, Freud ne dissociait pas l'histoire singulière de tout être de sa pathologie. Et il ne s'agit ps, à mon avis, de se satisfaire d'une simple approche génétique ou moléculaire qui gommerait toute autre approche. Mille fois NON à cette porte comme seule issue!
Pascal.
« Modifié: 21 octobre 2018 à 09:12:14 par résilience et silence »
C'est dans les situations les plus difficiles et les plus désespérées que les individus trouvent le courage de se battre pour leur conviction. Tecumseh.

Hors ligne Faïk

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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #8 le: 17 octobre 2018 à 15:47:18 »
Ma double, triple expérience concernant ce qu’on appelle les soins palliatifs m’a laissée de la colère, une amertume et une tristesse inextinguible … C’est très difficile pour moi de les évoquer, 3 et 4 ans après. Je crois ne l’avoir jamais fait.

J’habite une région que l’on nomme « désert médical ».
Certaines spécialités y sont peu représentées, que ce soit en public ou privé, les délais d’attente pour des consultations sont parfois bien au-delà de ce qu’on peut estimer raisonnables.

En janvier 2014, ma belle-mère était hospitalisée en secteur public, son retour à domicile, malgré un état assez alarmant et les soins importants qu’elle nécessitait, ne semblait souffrir aucune attente de la part de la direction de l’hôpital alors même que ses enfants n’étaient pas capables, dans un temps très limité, d’organiser au mieux pour elle ce retour. Pas d’unité de soins palliatifs, juste la bienveillance et le dévouement du personnel soignant en sous-effectif … ceci explique peut-être cela …  Elle mourut quelques jours après, ayant entre-temps passé par différents services et étages de l’hôpital.

En août de la même année, mon père vivait lui aussi ses derniers jours après de longues années de maladie et des soins palliatifs furent, difficilement et à notre demande, mis en place pour le soulager.

Un mois après son décès,  mon conjoint déclarait en septembre 2015 sa pathologie (je fus informée -par téléphone-des résultats du scan qui bouleversait notre vie par le service de radiologie qui m’invitait à récupérer mon mari qui ne pouvait plus « décemment » conduire …) et pour laquelle des soins palliatifs nous furent proposés dès le tout début par notre médecin traitant et devant être assurés par une association « Onco XX ». Ladite association étant sous contrôle de l’ARS et composée d’un médecin, infirmière et psychologue itinérants, se déplaçant dans le département au gré de leurs visites.
Bien qu’assommés par la nouvelle, nous avons fait le choix de recevoir, à notre domicile, les personnes évoquées plus haut.
Présentations, petite consultation médicale, j’ai continué seule cette première entrevue. L’équipe présente m’a informé des échéances (pour nous encore inconnues) qui nous attendaient, commencé à réorganiser notre maison en une future annexe hospitalière : montage de cloisons amovibles, aménagement des sanitaires … tout l’aspect matériel qui devait conditionner nos semaines et/ou mois futurs.
L’aspect psychologique des choses fut également initié et il me fut, à lui comme à moi, proposé un soutien … à raison de 2 à 3 visites/an.
Compte tenu du délai qui nous était imparti, j’ai exprimé le fait que cela représentait un engagement somme toute assez peu contraignant ... pour eux, comme pour nous. J’ai également regretté que ce parcours annoncé du combattant-vaincu d’avance- nous avait et nous était jeté à la figure sans aucun ménagement, et que notre vie actuelle et « future » ne semblaient réellement balisées que par des contingences matérielles, établies selon un schéma très professionnalisé et ne tenant aucun compte des ressources psychologiques et des desiderata des personnes malheureusement concernées.
Ce fut là notre première et dernière entrevue de ces services de soins palliatifs à domicile.

Je ne m’étendrai pas sur le chaos médical, physique et psychologique des mois qui suivirent.

Les soins palliatifs de sa fin de vie furent difficiles, avec des questions restées sans réponse de la direction médicale concernant les possibilités offertes par la loi et les sentiments, avec des aménagements purement matériels prévus  pour son confort  et jamais mis en place … etc …  mais avec une écoute, une attention sans failles du personnel infirmier et aide-soignant, malgré un travail difficile émotionnellement et toujours sous tension. Le personnel qui pallie les soins palliatifs …
Je ne peux même pas évoquer les circonstances de la déclaration du décès par le médecin qui fut ma première bataille post mortem … pour le coup, celui-là, je l'aurai bien euthanasié à ma manière !
Il n’y eut ni douceur, ni apaisement.
Si je devais résumer, je dirai que ces divers soins palliatifs, hors l’attention du personnel, n’ont constitué qu’en l’administration de produits divers à visée antalgique ou sédative profonde …

La mise en place de ces soins palliatifs s’est faite dans un contexte différent, concernant des pathologies différentes affectant des personnes d’âges divers.
J’ai conscience que je dresse là un tableau bien peu flatteur. Chabraque mais toujours raisonnable, je n’aurai pas la prétention de dire qu’il reflète la réalité des soins palliatifs en France. Parce que mon expérience ne concerne que le secteur public, qu’elle est contingentée par ma personnalité, mon vécu et également par ma situation géographique médicalement parlant.

La question ne se posait guère autrefois : pas d’hôpital, on mourrait chez soi, avec les « moyens du bord ». Et personne à qui adresser des récriminations ...
C’est un pari difficile aujourd’hui dans un système où le formatage est plus simple et moins coûteux que d’assurer de manière individuelle un « confort » de fin de vie personnalisé. Où la technologie a semblé repousser la mort hors de ses frontières, l’exilant bien loin du monde des vivants. Mais la politique de santé, soucieuse d’assurer le bien-être et le respect des personnes en fin de vie et qui légifère dans ce sens se doit de se donner les moyens de ses prétentions …

Je pense à vous
« Modifié: 17 octobre 2018 à 16:31:26 par Faïk »

Hors ligne qiguan

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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #9 le: 17 octobre 2018 à 21:13:11 »
Mon ,notre, expérience, du palliatif, n'a duré que 4 jours
En service public
Pendant un weekend ... De Pâques ...
Dans cet hôpital où mon aimé a été rapatrié le palliatif est éclaté dans tous les services avec du personnel qui court d'un service à l'autre plus des soignants dans chacun des services formés au palliatif
Je n'ai rien à redire nous fûmes très bien accompagnés sur tous les plans au vu des circonstances du weekend et de son état
Le seul endroit où j'ai été écoutée de ma colère face à l'incapacité du service oncologie du grand hôpital de Toulouse ... Qui laissa sans réponse les appels (sonnette) de mon aimé qui m'avait appelé dans la nuit sur le portable car personne venait alors qu'il avait appelé et criait de douleur ... Je crois que je n'oublierai jamais ...

Voilà mon témoignage
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Re : tribune publiée sur les soins palliatifs et euthanasie
« Réponse #10 le: 17 octobre 2018 à 23:05:11 »
Mon amie...54 ans
cancer du poumon...
 refus de traitement
elle avait vu son père trainer longtemps avec la même sale maladie...
cancérologue pas content du tout, l'a renvoyé chez elle sans rien puisqu'elle refusait...
métastases cérébrales pas sympas du tout
Service de soins palliatifs à 2 pas de chez moi, dans le publique,
elle m'a élue comme amie de la dernière ligne droite et m'a beaucoup sollicitée...
ils ont été exemplaires, à la fois proches et discrets, respectant ses choix...
souffrance plutôt  bien contrôlée, c'est elle qui ne voulait pas trop de morphine...
elle y est morte assez vite,apaisée,lucide, entourée de ses filles
je l'ai vue la veille.
je l'ai beaucoup pleurée.
Une "belle fin de vie" est quand même une mort difficile...le chagrin est là...mais pas la rage ou les regrets.
Elle a eu de la chance dans son malheur?
Elle est quand même totalement tristement morte...