Salut à vous.
Dans covid, il y a vide. Co-vide. C'est quand même pas rien, qu'il se soit retrouvé ainsi nommé. un peu comme vivre avec du vide. ça, nous, les En-deuillé(e)s de tous bords, nous connaissons. Un être cher nous a laissé gérer du vide, souffrants, hurlants, griffants, pleurants. nous nous en sortons plus ou moins bien, bricolant de la résilience avec nos p'tits outils, plus ou moins performants, plus ou moins affligeants, mais jamais satisfaisants. Nous serons bancal(e)s à jamais, étayant notre devenir de ce "Vous ne serez jamais plus comme avant, et vous ne souhaiterez pas non plus l'être".
Comme écrit Yannick Haenel dans le Charlie du 1er avril, p12, "le néant comme chance", faisons de notre néant actuel une victoire, ne revenons pas en arrière.
Sacrée résonance que celle de se dire que néant nous inflige changement dans la souffrance qu'il induit. Mais qui l'induit?
Perso, changement a signifié un "chant du vide" qui me conduit à produire bouquin issu en partie des échanges de notre forum. L'autre partie m'appartient, nous savons toutes et tous ici que deuil est un cheminement singulier, personnel, partageable mais unique. Le mien a été et est finalement assez simple : il m'a fallu 65 ans et la mort de mon enfant pour comprendre que l'Univers est vivant, que nous n'en sommes que des éléments, qu'un élément encore plus infime, viral, vient prendre place dans ce maillage du vivant, et secouer le prunier. Maître Univers a parfaitement répondu à ce que produit genre humain, obsédé de croissance et de profits, au point de lui enlever de la couenne d'une de ses planètes, ses poumons, les arbres.
Déforestons, quelle image pitoyable que celle de ce pauvre orang-outang se battant contre une pelleteuse qui bousillait son environnement. Bah, tiens, puisque vous attaquez mes poumons, v'là que comme la grande règle de la psychologie humaine est de souffrir de ce que nous générons, suffit de laisser faire, Covid va vous rappeler que maîtrise n'est qu'une illusion. Pas la peine non plus d'espérer que religion sauve vos arpions, qu'elle soit de science ou d'esprit, mortel tu es, mon ami(e), et mortel tu resteras, c't outil là, il est dans ma trousse, pas dans la tienne.
Très probable que le changement ne se fera que très progressivement, par à coups plus ou moins violents, un peu comme notre cheminement d'endeuillé(e)s qui nous a confiné(e)s, lui, à être vécu depuis que mort prématurée est venue toquer à notre porte un jour de malheur. De là à crier victoire, perso, j'en suis loin. Je me contente de tenir debout et de partager mes pensées sans non plus me prendre pour Jésus, et encore moins pour guide spirituel, chemin propre à chacun. Le mien est passé par un "chant du vide" dont je ne regrette absolument pas que partie de ses recettes soient dévolues à cause amazonienne, c'est ma façon de plier les genoux devant le pire du pire : la connerie.
Merci aussi à Yann Diener, dans ce même Charlie du 1er avril, p6 "passion de l'ignorance au sommet de l'état", de finir sur ce propos que je partage entièrement :
"J'ai déjà dû les citer dans cette colonne, mais aujourd'hui je ne résiste pas à l'envie de rapporter ces mots de Lacan : "la psychanalyse est un remède contre l'ignorance. Elle est sans effet sur la connerie".
Pardonnez-moi, ça me fait du bien de lâcher un peu de vapeur, à force d'être confiné, j'ai la pression qui monte dans ma cocotte minute intérieure! Mes propres recettes ont leurs limites, foi de marmiton.
Bizs, Un peu tristes, mais bizs quand même.
Pascal.