L'ainé,
Le comportement de ta maman me semble tout à fait normal ... pour une personne en deuil de son conjoint.
Elle a perdu la moitié d'elle-même, elle était dépressive, elle est perdue !
C'est bien ce comportement qui fait tant peur aux autres, ces contradictions de comportement
Soyez là, ... fichez le camp !
Entourez-moi, ... laissez-moi seule !
Parlez-moi, ... taisez-vous !
Ecoutez-moi, ... parlez moi !
...
La souffrance, c'est ça, le deuil, et c'est aussi ça que, désespérément, elle attend des autres : l'impossible, prendre, la débarrasser de sa douleur qui l'étouffe, l'angoisse !
L'important, le fondamental que je ressens pour elle, c'est d'abord une présence d'écoute :
- Présence non envahissante, le plus souvent silencieuse
- Ecoute
Elle a tant de choses qu'elle voudrait dire, sans cesse, les mêmes choses, répétées sans cesse.
Car c'est là le principal travail de deuil : parler, répéter pour évacuer les souvenirs qui rongent.
Ce qui veut dire que le rôle d'accompagnant est avant tout d'écouter et d'être là, de peu parler mais d'inciter à parler, d'accepter les crises de désespoir, celles de larmes, et les écouter !
Sans réagir, sans argumenter ! Le plus souvent, se taire ou émettre des mots "d'accusé réception" ! Sans plus !
Les larmes qui font si peur sont le meilleur ami de la personne en deuil !
Car elles apportent à leur fin une forme de soulagement, d'apaisement.
Parler ?
Pour dire quoi dans un premier temps ? Le plus souvent quelque chose qui sera perçu comme "indécent" par la personne en deuil !
Donc synonyme d'incompréhension, de conflit même.
Son "Vous ne comprenez pas" est alors évident !
Bien sûr, c'est ce qu'elle ressent qu'elle veut exprimer, qu'elle veut voir entendu et compris, pas l'avis des autres !
Donc, écouter, être en position d'écoute, inciter à parler ... par une forme de silence ou une répétition de ce qu'elle dit (reformuler).
C'est pour ça que le téléphone n'est que peu adapté.
Souvent, jamais !
Pas assez, trop !
Accepter, refuser !
Oui, les visites, contacts, c'est un peu ça !
L'horloge, le calendrier ne sont plus les mêmes !
En ce moment, elle ne peut accepter que la réalité de sa souffrance, accepter qu'on l'en débarrasse, mais ne peut accepter les autres vues !
Même les meilleures !
Parce qu'elles ne le sont pas ... pour le moment !
Alors, lui expliquer ?
Non, l'écouter ... même si c'est difficile de ne pas réagir !
Elle n'est pas réceptive !
Pas facile !
Mais indispensable !

Yohann