Auteur Sujet: Mon grand-frère, cette moitié que l'on m'a arraché  (Lu 20517 fois)

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Hors ligne Riata

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Mon grand-frère, cette moitié que l'on m'a arraché
« le: 12 novembre 2013 à 12:13:22 »
Bonjour/Bonsoir à tous,

Je cherchais justement un forum pour parler de cette période difficile (et encore, peut-on vraiment juger le deuil comme une période de notre vie ? Je ne crois pas). Certes, j'en parle à mon entourage, mais ce n'est jamais assez. J'ai l'impression d'être bloqué à l'intérieur comme si un mur m'empêchait de m'exprimer réellement. Du coup, personne ne semble me comprendre comme il se doit, ou bien je n'ai encore trouvé personne qui me comprend. Et ça m'attriste, ça me fait mal. Alors, je vais vous en parler. Depuis le début.


En Novembre 2011, ma mère a été admise à l'hôpital (pour 2 jours) pour une simple opération d'un kyste au sein. La veille, au soir, mon père, mon grand frère et moi lui avions rendu visite. Ma mère a l'habitude des opérations, donc elle n'était pas inquiète et on la sentait très bien. Le lendemain soir, elle sort de l'opération. Nous sommes allés la voir dans sa chambre, elle était encore sous l'effet de l'anesthésie, mais elle était consciente. Elle avait un grand bandage entre son aisselle et son sein, ce qui laisse penser que la cicatrice a dû être grande... Mais la voir avec une bonne mine, on s'est dit que ça a dû bien se passer. Son docteur est entré dans la chambre et quand il nous a vus tous ensemble, il avait l'air un peu perturbé. Je sais cela. J'ai une très bonne observation, peut-être parce que je suis malentendante de naissance, je reconnais très bien les expressions des gens (mais ça, c'est une autre histoire). Il nous a demandé de nous rapprocher. Et il a balancé cette phrase : "Elle a le cancer du sein". Et là, ça a été le choc. Ma mère, elle qui pète toujours la forme, elle qui bouge beaucoup, elle qui ne fume pas, ne boit pas, qui a tout d'une mère que tous enfants aimeraient, elle qui ne mérite pas une telle chose, et quoi ? Cancer ? Je n'arrivais pas à l'accepter. Et si je vous parle d'elle en premier, c'est parce que c'est elle, la plus forte et la plus courageuse d'entre nous.

Je me souviens, cette nuit-là, je pleurais déjà pendant que le docteur expliquait son traitement, c'était plus fort que moi. Mais... tout ce que je voyais devant moi, c'est mon frère, de l'autre côté du lit qui me regardait, sur le point de pleurer mais qui se retenait. Et son regard, je le comprenais. Il a juste bougé ses lèvres pour me dire qu'il ne faut pas pleurer, mais je ne pouvais pas. Ce n'était pas possible. Quelque chose a éclaté à l'intérieur de moi, ça m'a compressé. Il a bougé la tête, j'avais compris, j'ai quitté le lit un moment pour aller dans la salle de bain pour pleurer et m'essuyer le visage. Il a ouvert la porte, m'a pris dans ses bras fort, fort, fort. Comme je ne pouvais pas arrêter de pleurer, mon frère et moi sommes sortis de la chambre. J'ai suffoqué pendant tout le long du couloir, du hall jusqu'au parking. On a rejoint sa petite amie qui nous attendait dehors, inquiète. Ils se sont consolés, je me souviendrai toujours de cette partie. Et je remercie ma belle soeur d'avoir toujours, toujours, été là, même dans nos moments les plus durs (alors qu'elle était avec mon frère que depuis 7 mois à ce moment-là). Et mon frère m'a serré les épaules pour me dire, malgré les larmes aux yeux, "Il faut qu'on soit fort pour maman. Si on ne l'est pas, elle va s'affaiblir. Il faut qu'elle guérisse. Parce que maintenant, c'est à notre tour de nous occuper d'elle". Oui, je me souviens très bien de sa phrase.  Il l'avait presque murmuré. Ça a été le jour le plus douloureux qui nous est arrivé. Je n'oublie pas mon père qui, lui aussi, a été très fort pour traverser cette épreuve. Je sais qu'il a énormément souffert même s'il ne le montre pas, je le sais parce que je lui ressemble.


Le 29 Décembre 2011, première chimio pour ma mère. J'avais coupé ses cheveux quelques semaines auparavant pour l'habituer. Très courts. Je ne vous dis pas l'émotion que j'ai dû ressentir en coupant ses longs cheveux noirs très épais jusqu'au bas du dos ! Elle n'avait jamais eu les cheveux courts. Je comprenais ma mère, je savais la vraie raison de ses coups de blues. Peut-être parce que nous sommes des femmes, mais quand elle a craqué, ce n'était pas pour son cancer (à proprement parler), mais pour ses cheveux. C'était plus pour ses cheveux. Bref, ces jours là n'étaient pas vraiment joyeux, mais on a fait de notre mieux pour fêter Noël et le nouvel an. Il ne faut pas changer les habitudes de vie, juste améliorer, adapter...
Pour le nouvel an, soirée dîner en famille puis un peu plus tard, étant donné que je n'avais jamais "trip" avec mon frère en dehors de la famille, mon frère a décidé de me prendre avec lui et sa petite amie à une fête avec ses amis. Du coup, c'était devenu notre premier trip (bon je ne sais pas comment vous dîtes, teuf ?).


Fin Janvier 2012, mon frère a eu une proposition de travail dans l'armée en tant qu'administrateur de réseau. Tout d'abord, il doit passer par une formation de 1 mois en tant que volontaire technique à la caserne (avec d'autres jeunes) pour, au moins, apprendre les bases (discipline militaire, entraînement physique et sportif, utilisation des famas...). Et éventuellement, avoir le béret à l'issue de la formation. Il a été appelé à se présenter à la caserne le 05 Mars 2012. On s'est tous dit que ça ne va pas être facile, mais que ça ira. Au mieux, il aura un travail à la fin du mois. C'était déjà super. Bref, on était tous contents pour lui, quoique un peu inquiets quand même. Parce qu'il ne sera à la maison que le week-end, puis retournera à la caserne pour toute la semaine.


En Février 2012 commencent mes examens oraux de BTS. Mon frère m'a déposé pour ma première épreuve orale, stressé tout autant que moi.

Le 1er Mars 2012, on l'a appelé à 3h du matin pour lui dire que c'est maintenant qu'il doit aller se présenter à la caserne. Je pense que c'était un test pour savoir s'il est toujours joignable, comme pour tous les autres jeunes aussi. Il a dit au revoir à maman, papa. Il n'a pas eu le temps de me réveiller pour me dire au revoir. Il s'est préparé à la va vite avec sa petite amie, et papa l'a déposé à la caserne. D'après sa petite amie, il a pleuré un peu avant de franchir le portail. Lui qui pleure rarement, j'ai dit "Pourquoi ? Il ne va pas bien ?". C'est quand elle m'a dit qu'il était triste parce qu'il ne m'a pas dit au revoir avant de partir tellement ça a été rapide, je suis partie pleurer dans ma chambre. C'était idiot, mais j'aime mon frère, vraiment. Il me comprend très bien. Notre relation est telle que c'est impossible de ne pas se voir pendant longtemps, qu'on n'a pas besoin de parler pour se faire comprendre, on se comprenait déjà avec un seul regard, un seul sourire, une seule et une moindre expression. C'est presque surprenant à chaque fois. Et aussi, il était triste parce que je ferai seule toutes les tâches au quotidien pour m'occuper de Maman. Quant à Papa, comme il travaille, il rentre l'après-midi, mais il s'occupe des courses au magasin, et plus des démarches pour son traitement. A chaque séance de chimio, on lui permet de s'absenter pour ce jour, et ainsi de suite.

Pendant tous les jours où mon frère était à la caserne, c'est sa petite amie qui nous donnait des nouvelles de lui. Il pouvait appeler, mais pas tout le temps à cause du couvre-feu. Et aussi, comme sa petite amie restait chez nous pour l'attendre, donc on a toujours des nouvelles et à chaque fois, on était contents. Dès qu'il a son jour de libre, c'était trop bien. Il rentrait à la maison, tout heureux, tête rasée, et des kilos en moins. Ah oui, il avait bien fondu ! Il était fier, lui qui se plaignait de son gros bidou (haha). En plus, il était content parce qu'au moins, maman ne serait plus la seule à avoir la tête rasée (oui ! ça y est, elle n'a plus de cheveux. Tout bizarre. Mais on l'a plutôt bien pris, on en rigole même. Et elle aussi, elle se sentait libérée au bout d'un moment). Je me souviens, il avait posé sa tête sur la sienne comme pour lui dire "Voilà maman, tu vois, tu n'es plus seule. On va se faire pousser les cheveux ensemble !". Ah la la, j'ai souri tout bête, hi hi. Bref, quand il revenait pour le week-end, il nous racontait tout. Parfois, on le laisse avec sa petite amie, parce que ça se voyait tellement qu'elle voulait aussi être seule avec lui  :). Du coup, on s'éclipsait dans le salon par politesse. Ce qui fait qu'on le voyait moins, mais ça ne nous a pas dérangés. De toute façon, ça se passait bien, et il aura son béret.


Le 27 Mars 2012, dernière semaine de formation pour mon frère et également, la dernière épreuve : le rallye de 8km. J'étais dans la voiture avec Papa sur le chemin du retour (il était 17h20). Son portable sonne, il s'est garé pour prendre cet appel. Et moi, je n'écoutais pas comme d'habitude. Mais c'était le ton de sa voix qui m'avait tilté. Quelque chose n'allait pas. J'ai regardé le visage de Papa, j'ai essayé de comprendre ses lèvres, de quoi il parlait ? Il a raccroché, m'a regardé, je lui ai dit "C'est qui ?". Il m'a dit que mon frère est tombé dans les pommes. Là, j'ai déjà commencé à avoir mal au coeur. Je déteste. Je déteste vraiment de voir que mon frère souffre, quelle que soit la douleur. J'aime pas. Il était à une clinique. Ça fait 4h qu'ils essayent de le réveiller. La température de son corps a monté, il était très fiévreux. L'ambulance était sur le point d'arriver là-bas pour venir le chercher et le ramener à l'hôpital qui était carrément à l'autre bout. Quand nous sommes rentrés à la maison, parce que visiblement, je n'étais pas bien, j'ai prévenu Maman et ma belle soeur. Puis y a eu des appels. Mon père est allé voir à l'hôpital. Nous avons attendu son appel. On nous dit que son cerveau va bien. On était soulagés. Puis plus rien jusqu'à ce que Papa rentre. Et là, il nous dit qu'il y a un problème au niveau du foie. Il n'arrive plus à réguler sa température corporelle. Donc ils l'ont plongés dans le coma pour refroidir son corps. Ils étaient en train de lui enlever les toxines. Il faudrait alors attendre le lendemain pour voir si son état va s'améliorer. On a eu peur. J'ai eu la peur de ma vie. Je n'ai pas dormi, j'ai à peine fermé l'oeil. J'ai prié, j'ai tellement prié pour qu'il se réveille. Que ce n'était rien, qu'il s'était juste évanoui. J'ai pas arrêté de pleurer.


Le matin, j'avais les yeux très gonflés. J'étais à côté de Maman, et rien, aucun appel encore. On a tourné au rond. J'avais contacté ma copine pour lui prévenir que je ne serai pas aux cours. C'était le dernier cours pour se préparer à l'examen. Ça oui, je me souviens très bien. Et vers 10h, on a appelé mon papa. Maman et moi avons serré nos mains. Et quand il a raccroché, je ne pourrais pas oublier ça. Le docteur nous a dit "Je suis désolé, il faut venir le voir. Parce qu'il ne passera pas la journée". Il ne passera pas la journée, ça m'a tué.
Et puis ça a été très vite. Y a eu des appels. Je me souviens seulement avoir vu ma tante se précipiter chez nous, un costume blanc pendu sur son bras. Je me souviens avoir ouvert ma table à repasser, avoir repassé sa chemise blanche. Puis j'étais en route vers l'hôpital, en plus je ne sais même plus avec qui.  J'étais perdue. J'étais comme un fantôme, je ne savais pas ce que je faisais, je n'avais même plus cette force qui m'a permis de m'occuper de Maman. Je n'avais pas maman sous mes yeux ! On m'a dit de pas m'inquiéter, que tout le monde sera là. Je suis arrivée, y avait la famille. Je voyais mon père faire les cent pas. Et enfin maman. Je me souviens de mes petits cousins qui couraient dans le couloir. Puis on nous a permis, à nous deux maman, d'aller voir mon frère. On a enfilé un pardessus là... des gants, et j'avais le coeur serré. J'ai tourné la tête. Et il était là. Allongé, des fils qui le reliaient à des machines. Dès que je l'ai vu, j'avais compris. Parfois, je me sens désolée d'avoir pensé ainsi. Quand je l'ai vu comme ça, ce n'était pas possible, il va mourir là. Même maman l'avait pensé, honnêtement. Mais je lui ai dit, à mon frère, de tenir le coup, encore un peu. De se réveiller, de nous dire que tout ira bien. Que ce n'était rien, qu'il s'est juste évanoui. Quand nous sommes sortis, y avait du monde dans le couloir à attendre, attendre, prier, espérer. Dans mon côté, j'ai erré dans l'hôpital. En fait, je crois que je cherchais les toilettes. Mais je n'étais plus là. Je ne sais plus ce que j'ai pensé, je me sentais lourde comme si on m'écrasait. On devrait attendre avant de le voir à nouveau, parce que les infirmiers étaient en train de nettoyer. Il saignait. Ah oui, maman avait demandé à un des infirmiers si y a un moyen pour qu'il s'en sorte, même un petit quelque chose ou quoi ? Et il nous a dit "Pour être franc... Non. Il n'y a pas d'espoir. Je suis désolé." L'attente a été horrible. Le docteur vient nous voir et nous annonce que son coeur s'est arrêté. Je ne vous raconte pas ça, car ça me fait mal actuellement rien que d'y penser.
On est venus le voir une dernière fois. Tout est dégagé autour de lui. J'ai pu serrer sa main, caresser ses joues, lui parler aussi longtemps qu'on me l'a permis. Maman, dans son côté, était plutôt calme une fois dans la pièce. Elle aussi n'avait pas toute sa tête. On nous dit qu'il faut accepter que mon frère parte, sinon ça va être trop difficile pour lui et pour nous (oui, déjà les premières minutes, on nous balance ça). Moi, oui, on m'a serré les épaules, on m'a dit en face qu'il faut que je le laisse partir. On m'a même secoué légèrement. Et après, à un moment, je me suis levé pour embrasser son front. Je lui ai dit de partir en paix, que je l'aime si fort, et que je le porterai toujours dans mon coeur. Maman aussi a dit des choses juste à côté de moi. Et à cet instant précis, dès qu'on lui a dit tout ça, à ce moment précis, il y avait du sang qui coulait de ses yeux. Je ne sais pas, mais y avait tant de mots derrière ces "larmes", tant de choses qu'il aurait voulu nous montrer, nous dire. C'est mon frère, je le sais. C'est mon miroir, ma moitié, et je le comprenais plus que tout. Il ne voulait pas mourir. Pas comme ça. Pas maintenant. Il allait avoir un travail. Il était tellement heureux. Je suis sûre qu'au fond de lui, qu'au fond de son âme, il a tout fait pour s'en sortir. Mais c'est son corps qui n'a pas pu, son corps n'a pas pu supporter et l'a lâché.


Le 28 Mars 2012, à 18h30, mon grand frère (25 ans) décède d'une hyperthermie maligne d'effort. J'avais 19 ans. Maman aurait sa dernière séance de chimio dans 8 jours.


Aujourd'hui, 1 an et 7 mois plus tard, il est toujours dans nos coeurs. On embellit sa tombe tous les mercredis et samedis sans faute. Son anniversaire, Noël, Nouvel an, le jour de son décès, la toussaint sont devenus des retrouvailles de famille (des deux côtés). Des liens se sont renoués entre les membres qui ne s'entendaient plus depuis des années. Papa, dépressif au début, s'est relevé et a pour seul but de m'intégrer dans la vie active malgré mon handicap. Maman a fini le traitement et est en rémission pour 5 ans. Sa tumeur a complètement disparu, elle doit juste faire des contrôles de temps en temps au cas où. Ses cheveux ont bien repoussé. Maintenant, elle se plaint car elle n'a pas encore trouvé une coiffure qui lui plaît. Sa petite amie, qui était restée avec nous pendant presque 1 an, a enfin pu se résoudre à s'en aller malgré son immense chagrin. Je le sais, je la vois. Et moi, malgré tout ça, j'ai eu mon BTS. J'ai eu mon permis, et je suis actuellement en stage rémunéré (pour un début).


En tant que petite soeur, je subis beaucoup de pression et de stress. Mais au delà de ça, j'ai très mal. J'ai pris un coup de vieux malgré mon âge. Comme mes parents et ma belle soeur en fait. Mon frère était le seul homme à me comprendre. Oui, le seul. Il est cette main qui me relève quand rien ne va. Même quand je ne dis rien, il sait que quelque chose ne va pas. Il s'inquiète de mon silence, alors que les autres trouveraient ça normal. Mais pour lui, non. Parfois, il devient jaloux quand il apprend que ma meilleure amie arrive à me comprendre et pourra le dépasser (haha). Mais lui, il sera toujours mon number one. Il est toujours prêt à venir me récupérer à mes sorties, même à 4h du matin. Je crois qu'il veillait, mais il faisait mine de ne pas vouloir dormir parce qu'il jouait aux jeux lol. Même quand il ne peut pas venir me chercher, il veut toujours s'assurer que je suis bien rentrée. On pouvait se parler pendant des heures de tout et de rien, et revenir sur le même sujet plusieurs fois jusqu'à se rendre compte que le soleil va bientôt se lever ! (et qu'en plus, j'avais école à chaque fois). Il se fâche toujours après ma mère qui a l'habitude de "crier" sur moi pour me gronder (non non, ma mère est comme ça. Parler fort chez elle équivaut à crier chez moi). Il me donnait des conseils sur la vie en général. Il adorait m'informer sur tout ce qui se passe dans le monde, plus dans le domaine informatique. Il rêvait d'un téléphone qui traduit les appels en sms à la perfection pour moi. Bien sûr, tout n'est pas toujours rose. Enfants, on se chamaillait souvent. Je lui claquais la porte au nez, assez pour lui casser le nez ! Je l'ai frappé avec un bâton dans le dos. J'ai cogné sa bouteille entre ses dents. Je lui disais des mauvais trucs, je lui écrivais sur un tableau avant d'aller à l'école primaire qu'il n'est plus mon frère, que je ne l'aime plus ( ;D haha !). Après, ça s'est calmé. On se disputait rarement. La dernière fois, c'était pour une histoire de casserole non lavé. On s'est disputé à fond et fâchés, on s'est enfermés chacun dans nos chambres. A peine quelques minutes, je suis sortie, discrètement. Je ne voulais pas le croiser. Et là, mauvais timing, lui aussi faisait la même chose. Du coup, quand on s'est regardés, on a rigolé. C'était tellement idiot et puéril ! J'apprends toujours des choses de lui. Mais il n'est plus là. J'avais l'impression de perdre tous mes repères, comme si on m'a arraché une moitié de mon corps. Comme si mon coeur a subitement noirci. Seules les petites choses innocentes de la vie me donnent de la joie, avec les personnes que j'aime autour de moi aussi. D'après mes amis, j'ai beaucoup changé. Plus forte quand il le faut, plus sensible, à coeur ouvert. Mais également, très fragile. Je pleure pour n'importe quel truc malheureux. 


Ouh la, j'ai beaucoup écris ! Y a tellement de choses à dire. J'espère que vous arriverez jusque là. Mon but était de parler de ça, peu importe les personnes qui le lisent. Mais pourvu que je parle de tout ça.


Mon frère, je l'aime tellement. Il me manque tellement. Dans une autre vie, je suis sûre qu'on aurait été frère et soeur. Toujours. J'ai écris beaucoup de choses. J'espère pouvoir vous les partager. Merci à ceux qui me lisent. Je vous dis aussi : Soyez forts. Il y a eu une vie avant, il y en aura toujours après. Seulement, cette vie là, nous devrons la construire non pour oublier, mais pour vivre avec.
"Ta douleur d'hier est ta force d'aujourd'hui"

psycat62

  • Invité
Re : Mon grand-frère, cette moitié que l'on m'a arraché
« Réponse #1 le: 12 novembre 2013 à 15:34:11 »
Bonjour Riata,

Ton (long) témoignage m'émeut, vraiment...J'ai les larmes aux yeux de te lire...
Tu as dû être si proche, si unie avec ton cher grand frère...
Comme moi-même je l'ai été avec le mien...


Il y a eu une vie avant, il y en aura toujours après. Seulement, cette vie là, nous devrons la construire non pour oublier, mais pour vivre avec.
Quels jolis mots pour terminer cette si terrible histoire, empreints d'espoir...

Sois la bienvenue dans ce forum Riata, sur lequel je suis moi-même inscrite assez récemment, la douloureuse perte de mon frère ne remonte qu'à quelques 5 mois...
Mais je puise dans ton message la force de me dire que même après cette terrible perte, la vie peut -encore- valoir la peine d'être vécue...

Douce journée,
Une "grande" soeur, amputée à jamais...

Musti

  • Invité
Re : Mon grand-frère, cette moitié que l'on m'a arraché
« Réponse #2 le: 12 novembre 2013 à 16:03:09 »
Salut Riata,

Tes mots sont à la fois émouvants et encourageants, j'en ai pleuré. Ta famille et toi-même êtes si courageux.
Le deuil n'est pas une période de notre vie comme tu le soulignes, c'est un cap qui fait de nous une toute nouvelle personne. Certes, je n'ai pas encore le recul nécessaire, vu que j'ai perdu mon petit frère depuis 50 jours (seulement, et pourtant avec cette douleur que je ressens, j'ai l'impression de n'avoir jamais connu la paix avant), mais je le sens déjà.

En vous souhaitant à tous une belle journée,
Musti

Hors ligne coeur

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Re : Mon grand-frère, cette moitié que l'on m'a arraché
« Réponse #3 le: 12 novembre 2013 à 20:48:22 »
Merci Riata pour ce témoignage si émouvant.
Merci aussi pour cette leçon de courage que nous essayons d'appliquer chaque jour un peu plus.
Je te souhaite, ainsi qu'à ta famille, une continuation de la vie toujours dans le souvenir de votre cher disparu.
"Tenir, toujours tenir ! Tenir le cap ! Envers et contre tout ! Dans la continuité de ton Amour !"

Hors ligne Riata

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Re : Mon grand-frère, cette moitié que l'on m'a arraché
« Réponse #4 le: 12 novembre 2013 à 20:50:09 »
Bonjour Psycat62, Musti,

Que ce soit 5 jours, 5 semaines, 5 mois ou 5 ans, le temps est indifférent face à la douleur que nous éprouvons. Nous souffrirons toujours autant, mais ce que le temps nous donne, ce n'est pas cette possibilité de tourner la page. Ça n'existe pas. On aurait bon nous dire que le temps guérit les blessures. Mais c'est faux, il ne guérira pas, c'est ancré en nous. Ce que le temps nous donne, c'est la possibilité d'avoir la force de repartir, de revivre, doucement mais sûrement. Moi-même, j'ai encore l'impression d'être au point mort. Comme si je ne vivais pas, mais qu'en fait, je survivais chaque jour. J'essayais de survivre. Mais quand j'ai commencé à travailler, petit à petit, j'ai pris ma vie aux mains. Ce sont les petites choses de la vie, ce sont les gens autour de vous qui essayent de vous réconforter (peut-être maladroitement, mais ne leur en voulez pas pour ça), ce sont les choses que vous aimiez avant et que vous continuerez à le faire, ce sont des promesses que vous voulez tenir, tout ça qui font que vous êtes encore là, debout sur vos pieds. C'est ce que j'ai ressenti et c'est ce que je vous le souhaite. D'être capable de prendre les rennes et d'avancer malgré le coeur lourd.

Je vous souhaite une bonne soirée,
Riata
"Ta douleur d'hier est ta force d'aujourd'hui"

CindyJoy

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Re : Mon grand-frère, cette moitié que l'on m'a arraché
« Réponse #5 le: 14 décembre 2013 à 19:20:54 »
Comme ton témoignage m'est familié. Je suis aussi une petite soeur, et comme toi mon grand frère est décédé le 4 mars 2012 d'un arret cardiaque à seulement 25 ans. Il était comme mon jumeau, mon meilleur ami, mon petit amour. C'était fusionnel. Depuis mars ma mère est atteinte d'un cancer du sein, donc ton témoignage me boulverse tellement je comprends pas ce que tu ressens mais comment toutes ces épreuves sont dures surtout quand elles s'enchainent de cette manière. C'est si dur en tant que "bébé" de voir son grand frère partir, et on a quelque part un rôle de soutien à faire envers nos parents, et on a tendance à s'oublier. On a une grosse pression comme si c'était notre devoir, c'est extremement difficile. Je ressentais également une grosse pression mais je me disais "c'est mon devoir!"
Je dis souvent la première année on survit... on ne vit pas on survit. La deuxième année on commence à essayer de vivre et de retrouver ces petits bonheurs par des choses simples.
Jour après jour c'est difficile de se replacer dans la vie quand la mort a frapper à ta porte, et que plus rien n'est pareil. Mais ces toutes ces petites choses simples qui nous réaprenne à vivre! On est tous des survivants quelques parts et le plus dur c'est de réapprendre à être heureux à vivre. Chaque jour, j'essaie de trouver des petites choses qui me rendent heureuses et je me concentre dessus. Pour le moment ça semble machinale et parfois j'ai l'impression de ne pas avancer mais je sais que ça prendra du temps...

Ton témoignage m'a vraiment fais écho. J'espère de tout coeur que tu trouveras les petites choses qui te feront avancer ou être heureuse. Tu sembles vraiment très courageuse.

Bisous à toi.
« Modifié: 14 décembre 2013 à 19:25:00 par CindyJoy »