Mon fils, 10 ans, est décédé il y a maintenant 32 ans. J'ai été à la limite de la folie.... J'ai écrit ceci, dans le but d'aider les personnes dans la même situation. J'espère que ce sera le cas....
Je suis debout au bord de la plage.
Un voilier passe dans la brise du matin
Et part vers l’océan.
Il est la beauté, il est la vie.
Je le regarde jusqu’à ce qu’il disparaisse à l’horizon.
Quelqu’un à mon côté dit : « Il est parti. »
Parti vers où ? Parti de mon regard ; c’est tout !
Son mât est toujours aussi haut.
Sa coque a toujours la force de porter sa charge humaine.
Sa disparition totale de ma vue est en moi, pas en lui.
Et juste au moment où quelqu’un près de moi dit :
« Il est parti ».
Il y en a d’autres qui, le voyant poindre à l’horizon
Et venir vers eux, s’exclament avec joie :
« Le voilà ».
C’est ça, la mort !
William BLAKE
Perdre un être cher est une étape combien difficile à vivre. Son enfant, une partie de soi, son conjoint, la moitié de soi, son père, sa mère, son grand-père, sa grand-mère … rupture d’un lien très fort…
Ce passage qui nous est imposé peut-il être compris par tout le monde ? Ou simplement par celui qui l’a déjà vécu, … qui se trouve maintenant accompagné par celui ou ceux partis dans l’au-delà ?
Avant de ressentir cette présence constante autour de soi, la souffrance aura été difficile à vivre, le constat de l’absence, le vécu au quotidien sans lui, la vie qui continue, la perte de son visage dans notre tête ou l’éclat de rire qui nous met dans un état de consternation, nous donnent un sentiment de honte : l’aurais-je si vite oublié ? Mais, non. La vie continue, et cette souffrance énorme au départ, invivable, proche d’un état de folie dans certains cas,… s’atténue. Mais, elle ne disparaîtra jamais. Celui qui est parti nous accompagnera jusqu’au bout, nous aidera dans certaines décisions si difficiles à prendre tous les jours. Nous réaliserons même que celui qui est parti, savait inconsciemment qu’il allait nous quitter. Nous nous rappellerons ses dernières paroles, nous préparant curieusement à ce départ, ou de ce sentiment qui habitait en nous, par exemple celui de notre mort prochaine. Mais non, ce n’était pas notre mort physique, mais de la mort d’une certaine partie de nous.
Face à ce chagrin, cette douloureuse épreuve, nous trouverons toujours un aide sur notre chemin, d’autres qui nous comprendront, sans pour autant trouver un seul mot. Mais là aussi, ce constat ne sera réalisé que plus tard, lorsqu’un peu de paix sera revenu en nous.
Il est certain que certaines périodes de l’année seront toujours difficiles à vivre : les plus importantes pour certains, comme Noël, la fête de la famille, le 1er de l’An où l’on présente ses meilleurs vœux (comment peut-on parler de bons vœux dans ce cas, celui qui est parti ne reviendra pas !), et bien sûr de tous les anniversaires, tant de celui de la naissance, fêté joyeusement auparavant, que de celui du départ, si douloureux, de celui de la fête. La première année après cette disparition de notre vue, même disparition totale puisque nous ne le sentirons pas immédiatement autour de nous, sera aussi très dure à vivre. Chaque jour ou très souvent, nous repenserons à ce jour de l’an passé où il était avec nous et que, cette année nous vivons seul.
Comment supporter cette séparation ? Comment recevoir de l’aide ? Comment continuer à vivre, puisqu’il le faut ? Nous n’avons pas le choix.
Nous devons alors nous adresser à lui, s’inspirer de ce poème de William Blake : « la séparation est en nous, pas en lui ». Il entendra tout ce que nous lui dirons.
D’autres poèmes sont aussi très beaux, très forts. Pensons à LAMARTINE qui, lui aussi, a subi la perte de sa fille chérie :
Le livre de la Vie est le livre suprême
Qu’on ne peut ni fermer ni rouvrir à son choix.
Le passage attachant ne s’y lit pas deux fois
Et le feuillet fatal se tourne de lui-même.
On voudrait revenir à la page où l’on aime
Et la page où l’on meurt est déjà sous nos doigts.
Ce poème, triste pour certains, nous aidera. Désormais, nous penserons à l’instant présent, en essayant de ne pas nous préoccuper de trop loin.
Autre poème très touchant :
Je ne suis pas mort,
Je suis seulement passée dans la pièce d’à-côté.
Je suis moi : vous êtes vous.
Ce que j’étais pour vous, je le suis toujours.
Donnez-moi le nom que vous m’avez toujours donné,
Parlez-moi comme vous l’avez toujours fait.
N’employez pas un ton différent,
Ne prenez pas un air solennel ou triste.
Continuez à rire de ce qui nous faisait rire ensemble.
Priez ; souriez,
Pensez à moi.
Priez pour moi.
Que mon nom soit prononcé à la maison,
Comme il l’a toujours été,
Sans emphase d’aucune sorte
Sans une trace d’ombre
La vie signifie tout ce qu’elle a toujours été.
Le fil n’est pas coupé.
Pourquoi serais-je hors de vos pensées,
Simplement parce que je suis hors de votre vue ?
Je ne suis pas loin ; juste de l’autre côté du chemin.
Tout va bien.... Rien n’est perdu
Un court moment encore et tout sera comme avant :
Mieux encore ?
Infiniment heureux et pour toujours
Nous ne serons plus qu’un avec Jésus, Christ !
Dans ce dernier poème, elle nous demande de prier. Le pouvons-nous toujours ? Non ! Alors, le texte ci-après peut, parfois, être aussi une aide précieuse :
JE NE SAIS PAS PRIER
Seigneur, je ne sais pas prier.
Ma plus grosse difficulté,
C’est que je n’y pense pas.
Lorsque j’y pense,
Je n’en ai plus envie.
Lorsque j’y pense et que j’en ai envie,
Je n’en trouve plus le temps.
Lorsque j’en ai le temps
Et que j’y pense et que j’en ai envie,
Alors je ne sais plus m’y prendre.
C’est très compliqué, Seigneur, de te prier.
Comme c’est curieux,
Il me semble que je viens d’entendre ta voix,
Seigneur.
Au plus profond de moi,
Tu me disais ceci :
Si tu veux prier,
Prends simplement le temps de me dire :
« Notre Père ».
Avoue que cela n’est pas bien difficile
Et je t’assure que cela me suffit.
Le poème suivant montre aussi que ceux qui partent sont préparés à ce départ :
Si je meurs
Et te laisse ici un moment,
Ne passe pas,
Comme d’autres affligés,
De longues heures en pleurs
Auprès de la poussière silencieuse…
Pour moi,
Continue à vivre et à sourire…
Donne vaillance à ton cœur
Et fermeté à ta main tremblante
Et offre ton réconfort
A d’autres cœurs que le tien.
Achève pour moi ces tâches que je chérissais
Et peut-être ainsi pourrais-je te réconforter ?
Ou cet autre, d’après Jules BEAUCARNE /
Mes amis, me voilà parti pour le pays de l’envers du décor… C’est vrai que la société est malade et il nous faut la remettre d’aplomb et d’équerre, par l’amour et l’amitié…
Sans vous commander, je vous demande d’aimer plus que jamais ceux qui sont proches ; le monde est une triste boutique et seuls, les cœurs purs doivent se mettre ensemble pour l’embellir et faire refleurir l’âme humaine.
Je vous assure que là où je suis maintenant, je resterai sur le pont, attentif à vous. Je serai un jardinier.
Oui, il n’est de vrai que l’amitié et l’amour.
En attendant, à vous autres, mes amis, je prends la liberté de vous écrire pour vous dire ce à quoi je pense aujourd’hui : je pense de toutes mes forces qu’il faut s’aimer à tort et à travers.