Auteur Sujet: Comment l'accepter ?  (Lu 5789 fois)

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masset

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Comment l'accepter ?
« le: 17 septembre 2014 à 10:28:45 »
Mon fils Yoann était hyperactif et suivi à Robert Debré. Il a été "diagnostiqué" bipolaire à l'âge de 20 ans suite à une crise psychotique. Ce jour là il est monté sur le toit d'un train en circulation et a été arrêté par la police. Etant négatif au contrôle d'alcool et de stupéfiants un médecin a été contacté pour savoir ce qu'il pouvait avoir. Le médecin a demandé son internement car il avait fait selon lui une crise psychotique.

Il s'en est suivi un mois de psychiatrie avec une semaine sous camisole chimique afin de faire baisser sa crise maniaque. En sortant de l'hôpital il avait un traitement très lourd qu'il a fini par laisser tomber au bout de deux mois pendant lesquels il était complètement shooté mais "calme".



Il aurait dû être suivi par un psychiatre du CMP mais il n'a obtenu qu'un seul RDV après sa sortie.

Le 19 août 2012, Yoann s'est suicidé par pendaison chez nous alors qu'il venait de se marier et venait d'apprendre qu'il allait être papa. Le médecin qui a confirmé son décès a dit à mon mari qu'il avait fait une crise dépressive très importante alors qu'il était depuis 2 semaines complètement euphorique d'être papa.

 

Il ne nous disait pas qu'il allait mal mais je le sentais et je m'en veux de ne pas l'avoir senti cette nuit là.
On se disputaient souvent à cause de ça car je voulais qu'il aille à l'hôpital quand il allait mal et évidemment lui refusait.
Ma famille refusait de voir la maladie mais nous ses parents, sa soeur et sa femme l'acception comme il était avec sa gentillesse et sa "folie" comme nous disons aujourd'hui.
C'est cela le plus dur à vivre est de savoir qu'il serait peut-être encore là s'il avait accepté le traitement, shooté mais présent.

Aujourd'hui cela a fait deux ans qu'il nous a quitté et nous ne comprenons toujours pas son geste. :'(

Hors ligne Eva Luna

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Re : Comment l'accepter ?
« Réponse #1 le: 17 septembre 2014 à 13:56:24 »
Bonjour, Masset,
je crois sincèrement qu'on ne peut pas comprendre ce qui motive sur le moment ce genre de geste.. la maladie prenait la main sur sa volonté à lui... Yohan... c'est une maladie difficile à accepter pour le jeune qui ne saisit pas toujours la nécessité d'un traitement, surtout en période euphorique... et la descente en période dépressive est brutale...si heureux d"etre bientot papa.. il faudra le transmettre encore et encore à son enfant.. il a eu un papa qui l’aimait dès avant sa naissance.....
 
Ta culpabilité est incontournable... je serai pareille... mais  je serai aussi terriblement en colère contre la médecine incapable de les aider à suivre leur traitement comme le sont deux amies , leur fils est schizophrène, l'un s'est jeté sous le train, l'autre erre en Italie comme un SDF alors qu'il est malade...coupable et en colère, elles le sont violemment...
Reviens nous donner des nouvelles de ce t enfant... et de de toi sur ton chemin de douleur... le suicide est encore plus terrible à vivre...

Hors ligne stellarose

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Re : Comment l'accepter ?
« Réponse #2 le: 17 septembre 2014 à 14:22:02 »
Bonjour Masset,

Je t'accueille sur ce forum, toi qui est dans la douleur. Accueillir devrait être synonyme de joie, mais c'est avec tout mon coeur de maman endeuillée que je le fais.
Viens nous parler de ton fils, viens écrire ta douleur, tout ce qui se passe dans ta tête de maman, viens, ici, nous partageons, échangeons,  nous essayons de nous entraider dans la peine.
Souvent, confier aux autres ce que l'on a sur le coeur, dans la tête,  dans les tripes, ça soulage, ça fait du bien. Pas de jugement ici, juste de l'écoute et une progonde compassion , empathie pour les autres touchés eux aussi par différents deuils.

On ne peut pas accepter le départ d'un enfant, et c'est encore plus difficile quand la personne que l'on aime se donne la mort. Les pourquois, les comment, les culpabilités, les questions sans réponses.......je connais. Mon deuxième fils s'est jeté sous un train en juin 2012, laissant une compagne et un petit garçon de 18 mois. Depuis, on survit à l'indescriptible, aux non-sens et aux questions. Dans notre cas, il a quand même laissé des lettres, mais je me demande encore comment  il en est arrivé à ce geste. Je suis sûre que ce geste il l'a prémédité,  il avait tout préparé. 

27 mois plus tard, le mal, le manque sont toujours là. Moins souvent il est vrai, mais c'est une douleur, une cicatrice qui fera toujours mal. Je le sais. On ne peut pas accepter la mort de son enfant, on peut vivre avec, mais l'amputation est définitive.
Ne te jette pas la pierre avec les SI, tu ne pouvais rien faire, ne te culpabilises pas. ( je sais, c'est dur )

Est-ce que ce petit garçon ou petite fille qu'il n'a pas connu vous apporte un peu de sérénité,  de la joie, sûrement.  J'espère comme tous ceux qui vivent le même deuil, pouvoir un jour dire les mots qu'il faut à mon petit fils. Il parle souvent de son papa, car pendant 18 mois il s'est beaucoup occupé de lui. Je sais qu'il veille sur lui, mais sa souffrance l'a dépassé.

Tu peux ouvrir un fil pour parler de lui, de vous. Pour t'aider sur ce chemin qui est bien difficile. Chaque deuil est particulier, chacun vit à sa façon et en solitaire son deuil, car au bout de quelque temps les autres retournent à leur vie, et c'est à ce moment là qu'on a besoin de communiquer avec ceux qui sont passés par là.

Mille pensées pour ton fils, toi et les tiens.

Hors ligne magalilou

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Re : Comment l'accepter ?
« Réponse #3 le: 17 septembre 2014 à 16:32:32 »
Masset,
Certaines personnes qui pratiquent la médecine sont malheureusement incompétentes et ne devraient pas avoir le droit d'exercer. Oui mais voilà parce que sur le plan théorique elles ont passé les épreuves avec succés elles ont le droit de pratiquer alors qu'elles n'ont aucune once d'empathie et dans le domaine psychologique il en faut. J'étais éducatrice et j'ai vu des choses qui m'ont fait arrêter ce métier rapidement. Tu n'es en rien responsable du geste de ton fils mais je sais bien qu'en temps que maman tu ne peux t'empêcher de te le reprocher. Même quand le départ n'est pas un suicide on se reproche des choses alors...! Certaines périodes on est vraiment au fond du gouffre et dans ces moments là on voit tout en noir.   N'hésite pas à écrire comme te le disent Stellearose et Eva il y aura toujours quelqu'un pour te lire et te répondre. Le De Fauré dit qu'il faut parler et encore parler pour user son deuil alors ici tu trouvera toujours une oreille qui de plus peut comprendre ta souffrance. De tout coeur avec toi, mes plus douces pensées Martine, maman de Madeleine
Ce n’est pas parce que vous ne voyez pas de larmes que je ne pleure pas.
 Ce n’est pas parce qu’à nouveau je souris que j’oublie.
 Ce n’est pas parce que j’ai l’air heureuse que je vais mieux.
 Je peux vous offrir le visage qui vous fait plaisir,
 Mais il n’empêche qu’à l’intérieur, je meurs.