FORUM "LES MOTS DU DEUIL"

Comprendre et vivre son deuil => Après le suicide d’un proche => Discussion démarrée par: Alba1985 le 11 août 2017 à 10:00:29

Titre: Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 11 août 2017 à 10:00:29
Bonjour à tous,

Je suis nouvelle sur ce forum. J'ose prendre la parole car jai vu pleins de commentaires bienveillants et que je suis dans la phase d'interrogation, je cherche des gens qui pourraient me partager leur expériences et leurs réponses pour avancer. J'ai perdu mon mari par suicide il y a 3 mois. Mon mari était tout sauf suicidaire il était pompier et avait déjà fait des gens sur intervention pour tentative de suicide et je sais qu'il était "contre" cette mort. Il n'a pas dormi pendant 4 jours d'affilé et du coup cogite beaucoup. Il repensait à son enfance (sa mère est bipolaire) et il parlait de problème d'argent qui allait être résolu avec la vente de notre bien.  Il parlait de mauvaises évaluations à son travail alors qu'au contraire il a eu des félicitations enfin tout était mélange. Je n'ai pas compris sa douleur j'ai cru que c'était du fait qu'il ne dormait pas car jusqua son geste il n'a jamais été déprime il avait toujours pleins d'objectifs. Je ne comprends pas. Il m'a laissé alors que c'était tout pour moi m. On était ensemble depuis mes 15 ans (jai 32 ans). On essayait d'avoir un enfant depuis 4 ans.
Je ne comprends pas ce suicide comment en ait il arrive à ce geste ? Il ne m'a pas laissé de mot les médecins parlement de bouffes délirantes. Il croyait sentir du gaz la veille (ça non plus ça ne m'a pas mis la puce à l'oreille). Je me sens vide. Je reste pour l'instant pour ma mère et mes sœurs mais tout mon avenir est remis en cause.

Merci pour vos soutiens
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: souci le 11 août 2017 à 15:45:58
    Bonjour Alba 1985,

    Je crains que suite à une mort par suicide, la phase d'interrogation reste à jamais ... en suspens ...

    Il y a le deuil, et puis le problème du suicide, qui complique puisque, en tant que proches, nous pensons que nous aurions pu aider, et/ou être appelés à le faire, afin d'éviter la fatale issue.

   Je suis la tata d'un jeune suicidé, et des années après, les questions sont toujours ouvertes et sans possible conclusion !
   La problématique de ce suicide se pose chaque jour pour moi !
   Mais j'enverrais chier au diable quiconque oserait me dire de "tourner la page", NORMAL, c'est NOTRE PETIT, et je continue de l'accompagner pour toujours, ma seule catharsis possible dans cette souillure de ma vie. Non pas que je me sente coupable, mais je prends part, parce que cet enfant fait partie de moi point barre.
   Chaque vie est unique ... chaque souffrance si intime ... chaque "concours de circonstances" étroitement emmêlé de malchance ...
   Il semble qu'un rien aurait pu stopper l'engrenage ... quant à prétendre savoir "quoi" ...

   Ce n'est pas facile ...
   Et toi, à SEULEMENT trois mois, tu es encore sous le choc.
   S'il est vraiment arrivé à ton homme de ne pas dormir plusieurs nuits d'affilée, c' est très dangereux pour le psychisme, c'est ainsi que le cerveau se met à percevoir des sensations irréelles, à halluciner ... les hallucinations sont des "mélanges" incontrôlés ...
   
   Il est très difficile de reconnaître la personne équilibrée et saine que l'on a connue dans l'acte suicidaire, on se dit que si toutes les ressources avaient été présentes à l'esprit, le moment fatidique du suicide ne se serait pas passé.
 
   Mais ça s'est passé, horreur pour nous, oui horreur à "gérer", à rationaliser/contenir, sous peine, en s'identifiant de trop près au suicidé, à finir comme lui ...
   Je sais à quel point notre impuissance est inacceptable, et pourtant la vérité cruelle du suicide, nous révèle qu'on ne peut sauver ... que NOUS, hélas, tant il existe une distance entre les êtres même étroitement liés ! Terrible solitude ... terrible crise de confiance ... en soi, en l'autre, en ce de quoi les sentiments sont faits ... crise de confiance tout simplement dans la solidité de nos convictions, de nos options ...
   Et puis cette lancinante question: quelle part de l'autre nous était-elle
inconnue, nous connaissions-nous VRAIMENT ? Et donc, quelle était notre valeur pour l'autre ? N'oublions pas que jamais nous ne sommes dans la tête de l'autre, que nous ne savons pas, que nous ne saurons jamais, comment, pourquoi, à un moment tout s'est mélangé en déséquilibre envers son jugement ...
   Comme "tout remue", n'est-ce pas, Alba 1985 ...

   Et sans aller jusqu'à parler de "folie", ce qui est de toute manière une notion très relative, on ne peut s'empêcher de penser qu'il aurait suffi d'un rien pour que, telle les balances anciennes, notre aimé reste du côté de la vie au lieu de basculer dans l'abandon, dans le vide.

   UN RIEN, un rien ... voilà qui est bien amer à considérer ...
   Mais qui place le suicide dans l'ensemble des fatalités qui cause la mort ...
   Acceptable ou non, personnellement je ne pense pas que le deuil "avance" vers cette question, le deuil avance tout simplement vers une vie dans l'Amour en soi, à sonder, délivrer, partager ...

   Je t'ai pondu une tartine !
   Sans penser si ça allait t'aider ou non, simplement parce que ton histoire "inexplicable" me touche.
   Amicalement et solidairement, Martine.
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 11 août 2017 à 17:37:58
Merci beaucoup Martine. Tes mots me touchent. Je ne me rendais pas compte que d'en parler à des gens vivant la même situation me soulagerais.
Le problème c'est comme tu  le mentionnes cest l'acceptation. Je n'accepte pas. Souvent la nuit je rêve que cette situation n'existe pas et qu'il est à côté de moi en me disant que jamais il ne m'abandonnerait. Car cest bien ça que je ressens de abandon. On a passé plus de la moitié de notre vie ensemble et j'ai l'impression de ne pas le reconnaître dans ce geste. Je n'arrive pas à comprendre comment il a pu faire ça. Je ne dis pas qu'il y a des personnes prédisposées au suicide mais il y en a qui après une longue dépression ne voit que cette issue. Je ne dis pas que le geste est moins grave mais la il n'y avait rien de tout ça au contraire comme je le dis il était "contre" ce geste. Je ne comprends pas alors que pendant ces 17 ans on a tout partage et la pendant 4 jours je n'ai pas su l'aider et voir ce qui se passer.

Je partage aussi ta douleur car perdre un enfant de sa famille cest aussi une grosse douleur.
Comment fais tu ?

Encore merci pour ton soutien
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: souci le 11 août 2017 à 22:41:51

    Oh, eh bien, ma chère Alba 1985,
    si tu souhaites savoir comment je me débrouille, mon fil "ce deuil pour les autres" dans cette même rubrique, en témoigne pas à pas ... en pratique et non en recommandations, ces dernières ne valant pas grand-chose ...
    Non, le "problème" n'est pas l'acceptation, je l'ai d'ailleurs mentionné en précisant que, selon moi (mais je sais que beaucoup de théories simplistes -à mon avis- ne visent que ce -pauvre- terme),
   selon moi donc, l'avancement dans le deuil n'est PAS dans cette "étape" , mais tout simplement vers une vie dans l'Amour en soi, à sonder, délivrer, partager ...
   Bien amicalement et solidairement, M.
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 18 septembre 2017 à 23:03:59
Bonjour  à tous,


Peut-on se suicider sans etre déprime ? Sur un seul et unique coup de tête  fatal ?
Je cherche au travers vos témoignages des vas similaires mais je me sens seul. Seul car il y avait rien à voir ou seul parce que je n'ai fait pour
Empêcher ce geste. Comment arrivee à vivre avec ces interrogations
Merci
Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Helpa le 19 septembre 2017 à 11:06:12
Bonjour Aline,

Il est possible que ton mari ait eu de gros soucis, financiers par exemple, et qu'il n'ait pas vu de solution. Il était peut-être fier et ne voulait pas  subir l'affront d'un échec ou de la ruine. C'est peut-être ça qui l'a empêché de dormir et fini par altérer son jugement. Il n'a pas laissé de mot parce que son geste était injustifiable, et non pas parce qu'il ne t'aimait pas. Je te dis ça parce que c'est ce qui est arrivé à mon père qui était aussi très actif.

Dans ces cas là, c'est impossible d'empêcher ce geste car la personne n'en parle pas et s'isole. C'est peut-être aussi une forme de bipolarité (tu dis que sa mère en était). Les bipolaires sont souvent des gens généreux qui ont des phases d'activité intense et des phase de doute ou de déprime.

C'est difficile à accepter parce que tu ne comprends pas la cause. Le sentiment d'abandon et de trahison est extrêmement douloureux en cas de suicide. Mais, tu n'as rien à te reprocher puisque de toutes façons il n'aurait rien dit. Et je le répète, ça ne veut pas dire qu'il ne t'aimait pas, mais qu'il s'est senti acculé au bord d'un précipice et qu'il a sauté.

Maintenant il faut te reconstruire en te faisant aider par des psy (voir docteur Fauré) ou en te tournant vers la spiritualité en lisant des livres sur l'au-delà, si tu ouverte à cette idée.

Courage !



Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 19 septembre 2017 à 19:35:44
Bonjour Helpa,

Merci de ta réponse cela me touche. Je désespérais d'avoir des retours et du partage.

Oui c'est vrai on avait des problèmes d'argent mais qui allait être résolu dans 2 semaines avec la vente de notre bien. Tout était boucle.
Il était fier c'est vrai mais je n'arrive pas à justifier son geste.  J'étais naïve de penser que le suicide touche uniquement les gens déprimés , isolés. En fait, jai du mal à intégrer que cest une maladie.  Le suicide peut arriver  alors que la personne elle même ne l'a pas désiré ou envisage. Cest cette image du suicide que jai du mal à envisager et que jusqu'à présent aucun témoignage ne me l'avait fait "connaître".

Grâce à ce forum, je me dis que je ne suis pas toute seule à ressentir ces sentiments.

Merci pour ton écoute
Courage aussi
Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Liesel le 19 septembre 2017 à 22:05:40
Bonsoir Aline,

Je suis très touchée par ton histoire.

Mon fils de 16 ans s'est suicidé il y a un an, malgré les difficultés propres à l'adolescence, rien ne laissait supposer un tel geste.
Il était de plus en plus accro au virtuel et dormait de moins en moins. Je pense en effet que trop de connections couplées à un manque de sommeil mettent dans un état second.
La psy que j'ai vue a d'ailleurs parlé de raptus suicidaire, ce qui correspond à une pulsion.

A ce niveau, ton histoire fait écho avec la mienne.

Perdre un être aimé est extrêmement dur; par suicide, cela équivaut pour moi à un acte terroriste, c'est comme un bombe qui explose et dévaste tout sur son chemin, les survivants errant hébétés au milieu des décombres. C'est d'une violence rare dont on ne se remet pas, on apprend juste à vivre avec, douloureusement, doucement, très doucement.

Sur ce forum, tu trouveras une écoute bienveillante, du soutien, de la compréhension, de l'amitié même.
Je suis de tout cœur avec toi.
Ton deuil est très récent, je t'envoie force, courage, espoir, douceur

Très amicalement
Liesel

Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 19 septembre 2017 à 22:37:26
Bonsoir Liesel,

Merci beaucoup pour ton message. Cest exactement ce que je cherchais sur ce forum de l'écoute, la compréhension et du partage.

Je suis très touchée en effet nos histoires comportent malheureusement des similitudes. Les médecins aussi me parlent de raptus et de bouffes délirantes. Rien que ce dernier mot pour moi est difficile à intégrer. Par méconnaissance sûrement jai d'autant plus de mal l'accepter.
Parfois jai l'impression de m'auto rassurée en me disant je ce n'était pas lui que ce n'était pas vraiment son choix.  Mais j'ai beau me refaire les derniers jours rien mais rien ne laisser présager ce geste.

Je peux te demander si toi à ce jour tu "acceptes" le geste de ton fils ? Arrives tu à te dire que c'est son choix ?

Jespere que nous pourrons échanger à nouveau.
Courage Liesel
Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Liesel le 19 septembre 2017 à 23:00:39
Je pense qu'il est impossible d'accepter l'inacceptable.
Je ne saurai jamais ce que mon fils avait dans la tête, s'il était réellement conscient de ce qu'il faisait (il n'a rien laissé).
Je pense qu'il avait un réel mal-être en lui, je crois aussi probable qu'il était dans un état  second au moment de son geste.
Et puis, que sait-on de la mort à 16 ans?

Le suicide est un acte effroyable et tellement égoïste. Non, je ne l'accepte pas, mais aujourd'hui, je pardonne à mon fils, malgré la détresse, la souffrance, le manque. Je continue de lui donner beaucoup d'amour et choisis de vivre, ainsi il continue de vivre, différemment.

Merci de cet échange, de ce partage; il est bon de témoigner, d'être soutenu, de soutenir également.
Plein de courage

Liesel
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 21 septembre 2017 à 08:54:31
Je crois que pour l'instant cest ce questionnement du pourquoi incessant qui me ronge. Je n'arrive pas à passer outre le geste.  Jai du mal à accepter qu'on puisse passer comme ça d'un  état heureux à un état ou la seule solution qui s'offre à soi est le suicide. Je ne crois pas que mon mari avait un mal etre. Beaucoup de pression c'est certain mais cest lui qui était avec exigeant avec lui même.


16 cest tellement jeune en effet. La vie devant soi.
Je trouve ça tellement injuste.

Tout mon soutien
Affectueusement
Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Helpa le 21 septembre 2017 à 09:57:26
Bonjour Alba,

Je pense que la clé est à chercher de ce côté là :

Beaucoup de pression c'est certain mais cest lui qui était avec exigeant avec lui même.

C'est la peur de ne pas y arriver et de décevoir qui peut être à l'origine de son geste. Ca paraît fou, mais certains réagissent comme ça, plutôt les hommes il me semble.

Malheureusement tu n'auras sans doute jamais la réponse. Mais je suis sûr que de là où il est il veut que tu repartes de l'avant. Peut-être t'enverra-t-il des signes ?
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Coccie le 21 septembre 2017 à 12:27:27
Mon psy m'a dit : "on arrive à accepter, petit à petit, avec beaucoup de temps suivant les personnes... mais sans valider pour autant". Comment valider le suicide d'une personne qu'on aime même si les proches vous rabâchent "c'était son choix" ? Choisir la mort, c'est terrible, cela signifie qu'il n'y a pas d'autre issue... alors que l'amour de la vie peut être présent, paradoxalement. Mon compagnon m'a écrit dans sa dernière lettre, quelques heures avant de sauter d'une falaise début juillet : "je ne sais pas si je trouverai le courage, car j'aime beaucoup la vie aussi..." quelle désolation pour moi. Quelle horreur de se dire qu'il aurait peut-être suffi d'un rien.
C'est un long chemin semé d'épines qui est devant nous, endeuillés par un suicide... pour ma part je navigue entre chagrin, tristesse, colère et révolte contre l'injustice... son meilleur ami me disait hier "je me sens trahi". Oui, c'est ça aussi. On se sent laissés tombés comme de vieilles chaussettes, sans y être aucunement préparés, et dans une violence extrême.
Les sentiments, les ressentis sont exacerbés, la tristesse, le chagrin, incommensurables...
Ici, on est nombreux à partager tes émotions, ta douleur. Même ceux qui ne s'expriment pas, souvent parce qu'ils ne le peuvent pas, lisent, et trouvent, sans doute, le réconfort du partage. Je te souhaite une belle journée... une à la fois...
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Liesel le 21 septembre 2017 à 19:23:44
Bonsoir Aline,

Merci pour ton soutien.
Oui, tout cela est injuste, quelques soient nos histoires, pour ceux qui sont morts et pour ceux qui restent.

"La mort n'atteint pas seulement celui qui doit fermer les yeux à jamais mais aussi les autres, tous les autres qui recevront l'horreur et l'absence en partage."  Marie-Claire Blais

Je me pose encore parfois la question du pourquoi pour mon fils, tellement de réponses et un tel non sens! Je crois qu'il est impossible de répondre à cette question du pourquoi. Eux-mêmes sauraient-ils répondre?

Bien affectueusement
Liesel
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 23 septembre 2017 à 11:10:14
Merci pour vos messages qui me vont droit au cœur.

@coccie : tes paroles raisonnent en moi. C'est exactement ça que jai du mal à comprendre aujourd'hui cest ce goût pour la vie et pour autant ce geste d'une violence incroyable. Pour moi, par méconnaissance, quelqu'un qui se suicide c'était prévisible de par la personnalité et le comportement. Mais justement rien mais absolument rien ne laissait présager ce passage à l'acte par mon mari. Jai ce sentiment de m'être trompée de n'avoir rien vu de ne pas l'avoir compris alors que je suis aussi convaincue qu'il n'y avait rien de prévisible.  Ce geste me fait me remettre en cause moi notre amour alors qu'en 17 ans il ne m'a jamais fait doute de son amour pour moi.
Cest tout récent ton deuil aussi, as tu repris le travail ? Comment tu avances et explique le geste de ton compagnon et ses derniers mots ?
Si je suis trop indiscrète dans mes questions tu m'en excuseras. J'essaye de comprendre ce que les autres ressentent pour comprendre les propres sentiments.
Je suis de tout cœur avec toi

@liesel : merci pour ta très belle citation.
Oui c'est vrai se poser la question du pourquoi cest d'essayer de rationnaliser leur geste alors qu'il n'y a justement rien de rationnel.
Le chemin de l'acceptation me semble encore long. Toutes les nuits je rêve que c'est un cauchemars et que tout cane s'est jamais produit. Le réveil est brutal.

Affectueusement
Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: LaetitiaMcL le 01 octobre 2017 à 12:14:28
Bonjour Aline,

Je viens de lire ton histoire. Tes mots font écho en moi. Nos histoires se ressemblent par certains aspects.
 Accepter la violence liée au suicide est pour moi encore mission impossible, mais comme certains disent " à chaque jour sa peine".

Chez certaines personnes, on peut dire que le suicide est plus ou moins prévisible. Mais ça n'empêche pas de vivre avec bon nombre d'interrogations. Je me remets aussi en cause alors que je savais que mon compagnon pouvait passer à l'acte à n'importe quel moment. Et dans mon cas, juste au moment où le bonheur était à porté de main, il a décidé de partir. Les "pourquoi" et les "si" me hantent depuis 4 mois... mais nous n'auront malheureusement jamais les réponses.



Courage à toi
Amicalement
Laetitia


Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 02 octobre 2017 à 23:01:47
Bonjour Laetitia,

Je suis contente de te lire et te remercie. Aujourd'hui je ne sais pas si j'aurais voulu qu'il me laisse un mot. Je me demande souvent pourquoi il n'a pas pense a moi mais en même temps ça me rassure en me disant que même lui a été dépassé par ce geste. 

Il est vrai que je croyais jusqua présent que le suicide était prévisible qu'il y avait des personnalités à fleur de peu mais je m'en rend compte qu'en fait non et que ça peut nous tomber dessus sans crier gare et même si on pense savoir. Alors ne culpabilise pas.

Affectueusement

Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: LaetitiaMcL le 03 octobre 2017 à 16:04:45
Bonjour Aline,

Je pense que le mot que mon compagnon m'a laissé  renforce ma culpabilité. Alors des fois  je préfèrerais ne jamais avoir eu de message.

Ton mari a peut être pensé à toi mais ce qui est sûr, comme tu le dis, c'est qu'il a été dépassé par son geste. Je suis persuadée que mon copain attendait que je réagisse à  temps et que j'appelle les secours plus tôt, c'est pour ca qu'il m'a laissé  de nombreux messages. Et ce sentiment de culpabilité, je ne le souhaite à personne.

Le suicide est malheureusement imprévisible  et déstructeur. Et il reste  encore trop tabou dans notre société.


Au plaisir de te relire

Affectueusement
Laetitia
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Sabie le 03 octobre 2017 à 21:30:05
Bonsoir a tous,

J ai la conviction que si nos défunts avaient pensés à nous ils  n auraient pas fait ce geste. Je pense qu  au moment du passage a l acte ils ne pensent pas ils sont dans une bulle. C est une pulsion.  Un acte pour allé mieux vers une nouvelle vie sans douleur, sans démons. Ils ne partent pas pour la mort mais sur un autre chemin.

Cet  question du pourquoi reviens sans cesse également. Et cette culpabilité de n avoir rien fais le  moment où je l ai trouvé.  J etais pétrifié mon cerveau n imprimait  pas ce que je voyait. Je m en veux tellement de ne pas avoir agit. Même si je sais qu il etait déjà parti depuis quelques heures déjà.  On se dit toujours "SI "....

Hier soir je me suis encore endormi avec mes larmes tellement douloureuses. Tellement seule. Tellement injuste. La vie nous a " joué " un mauvais tour. Mais comment s en relever?  Comment trouver cette force de  continuer à rire a sortir a faire la fête, comme mes amis le voudraient. ....Comment ?

Douce nuit à vous tous

Sab
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 03 octobre 2017 à 22:21:16
Bonjour à toutes,

Je vous comprends et vous lire me fait du bien. Je me sens moins seule dans ma douleur.

J'essaye de m'occuper tous les jours, soit en faisant du sport soit en voyant des copines. L'ennui est mon pire ennemie. Justement des que jai du temps je commence à réfléchir et broyer du noir.

Jai l'impression que je ne pourrais jamais pu compter sur d'autres personnes. La seule personne En qui javais une confiance absolue était mon mari. Mais jai cette impression qu'il m'a abandonné. Je n'arrive pas à admettre qu'il ne m'a pas mise dans la balance au moment de faire ce geste.

Je me demande comment peut on vivre après quand on vit ce que nous sommes en train de vivre.

Bisous les filles
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Helpa le 03 octobre 2017 à 22:49:45
Bonsoir,

Moi je crois qu'ils ont pensé à nous avant de faire ce geste, mais qu'ils se sont dits que nous nous en remettrions. En somme ils se sont dévalorisés au point de croire qu'ils avaient peu d'importance pour nous. Ce n'est pas un manque d'amour, c'est un manque total de lucidité.

Ma fille a laissé un mot pour nous, ses parents, en disant entre autres : "J'espère que ça va aller" et plus loin : "Vous allez me manquer".
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: souci le 04 octobre 2017 à 00:03:27

    Solène, la jeune fille de P.P.D.A.,
    avait écrit ceci, terrible ... :
    "Je vous aime, mais je n'aime pas la vie" ...
    Tristement et tendrement, Martine.
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: LaetitiaMcL le 04 octobre 2017 à 08:44:59
Bonjour à tous,

Sabie, moi je pense qu'il est possible qu'ils aient pensé à  nous mais à  ce moment la douleur a été plus forte que tout et ils n'ont pas vu d'autres solutions.

Dans son dernier message, mon compagnon  m'a dit qu'il était  à  bout mais surtout qu'il se sacrifiait pour que j'ai une vie meilleure, lui se sentant incapable de pouvoir me rendre heureuse.

Alors comment  se relever? Je n'en ai pas la moindre idée. Je me dis à  chaque jour sa peine et j'essaie de continuer comme je peux sans me préoccuper de demain.

Bon courage à  tous
Je suis de tout coeur avec vous
Laetitia

Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Coccie le 09 octobre 2017 à 15:14:21
Oui Aline, j'ai repris le travail le 21 août (il est mort le 5 juillet). J'y allais avec des pieds de plomb,  et paradoxalement ça m'a aidée.  La routine, les tâches, même "imbéciles" et sans sens aucun, occupent l'esprit, le corps, les mains... on "fait", sans se poser de questions. Chez moi, livrée à moi même, j'aurais cogité non -stop. Et mes collègues ont été sympas. J'ai eu de jolies surprises, et en majorité, chacun a eu la juste distance. Cela fait du bien aussi.
J'ai beaucoup lu sur le deuil  :"Vivre le deuil d'un proche au quotidien", le "Deuil par suicide", du  Dr. Fauré. Et puis le "Journal du deuil" de Roland Barthes, qui a couché au quotidien ses pensées nourries du deuil, douloureux, de sa mère. Je t'en cite une qui me revient : "Je ne suis pas en deuil, j'ai du chagrin"...
lu ici, des  témoignages qui expriment tous la même douleur, les mêmes émotions... on se sent moins seul quand les proches sont si maladroits, ou pour certains, carrément aux abonnés absents, ce qui est très surprenant. Certains amis sont là, les fidèles parmi les fidèles, d'autres se carapatent. ça permet de remettre des choses à leur juste place, de faire du tri dans cette "vie" nouvelle qui est devenue la nôtre...
J'ai aussi vu un médium. Je n'ai pas choisi le 1er sur une liste, mais quelqu'un de très connu. J'y suis allée pleine d'émotions, et j'en ai eu pour le temps passé, ça a été très émouvant. Je n'ai rien eu à dire, c'est lui qui m'a tout dit.  Certains trouveront ça ridicule, j'assume complètement. J'y retournerai d'ailleurs, je vais laisser passer quelques mois... d'ailleurs il n'est pas facile d'avoir un RV, l'attente est longue, j'ai eu de la chance, sur un désistement ! Comme quoi...
Cela m'a beaucoup apaisée et m'a confortée dans des croyances personnelles : la vie ne s'arrête pas "là". Ils sont ailleurs, différemment.  J'avais énormément besoin de ce "contact", ça m'a aidée. Je n'ai pas eu de réponses (on ne pose pas de questions,  le médium reçoit des messages ou images, à nous de les interpréter. Il m'a tout de même donné le nom de son frère, et m'a dit "il me montre un enfant très blond" - le fils de mon compagnon quand il était petit était très blond - et il a  ajouté : "je pense qu'il aimerait que son frère prenne soin de son fils, même adulte". Il m'a dit aussi : "il me montre un paysage de soleil sur la mer, très beau. " c'est là qu'il est mort, il s'est jeté d'une falaise, en bord de mer. Il m'a dit "ça n'est pas un suicide ? Parce qu'il me fait ce geste..." et il a fait mine de faire un pas en avant avec bascule sur son bureau. Bref, très troublant... je précise que je n'avais rien dit en arrivant, juste apporté une photo).
Bien sûr, je ne te dis pas d'avoir recours à ça, c'est une démarche personnelle, de plus, il ne faut pas en abuser, on y prendrait vite goût tant le besoin de contact est fort. Et puis nos disparus ont besoin de se "reposer" là où ils se trouvent. Ils sont souvent perturbés par ce nouvel environnement, et par la peine laissée sur terre. Le médium m'a aussi conseillé des lectures comme "Le pays d'après", que je lis en ce moment.
Toutes ces démarches aident un petit peu à apprivoiser le chagrin qui nous mine. Chacun essaie de trouver une réponse comme il peut, où il peut... mais je pense qu'il faut bien intégrer qu'une part de mystère restera pour toujours.
Le psy qui me suit m'a dit "Avec le temps, on accepte, ce qui ne veut pas dire comprendre, et encore moins valider". Il m'a aussi parlé, en ce qui concerne l'acte en lui-même et la façon de mettre en œuvre, qui sont tellement choquantes et nous renvoient l'image d'un inconnu, car notre proche pour nous était incapable de faire ça, de cette façon, et pourtant il l'a fait... il m'a donc parlé, sur le plan psychique, d'une "altération du discernement". A un moment, la personne suicidaire se bâtit un schéma comme une spirale qui l'entraîne, que le schéma soit véritablement fondé ou nourri de ses angoisses personnelles, d'une situation qu'il ressent comme inextricable pour lui. Il arrive dans un état d'angoisse où la situation est devenue tragique, et où il pense, à tort sans doute, que personne ne peut comprendre ce qu'il ressent, et surtout que la perspective du suicide est la seule solution pour lui.
C'est le paradoxe dans l'écrit que j'ai eu (et le psy m'a dit que j'avais eu de la "chance", car beaucoup de proches n'ont rien, même pas une ligne...), chez quelqu'un qui dit : "Je vais le faire, je le sais, car c'est LA solution pour moi"... et qui ajoute un peu plus loin "... si je trouve le courage car j'aime beaucoup la vie aussi"...
Cette force spirale, comme je disais plus haut est tellement puissante, que le goût de la vie, l'amour des proches, n'arrivent pas à faire contrepoids. Et que, même si l'idée suicidaire était présente depuis un temps plus ou moins long, soigneusement cachée aux autres ou évoquée dans la rigolade, pour mieux tromper son monde, le déclencheur est souvent une pulsion. Pour mon compagnon, la matinée avait bien commencé, il l'a écrit, une soleil éclatant, belle journée d'été, il est sorti, les gens étaient joyeux... et puis une crise vers midi, besoin de son aérosol pour respirer, et voilà le déclencheur. La "crise" du midi. Ensuite, c'est allé très vite : vers 18h il était à Etretat, à 22h40, il a sauté quand la gendarmerie est arrivée. Voilà ce que je peux te dire de ma triste expérience.
Alors oui, j'ai découvert quelqu'un que je ne connaissais pas dans cet acte, quelqu'un qui en portait peut être les germes en lui sans le savoir, quelqu'un qui était dans un désespoir que je n'ai pas vu, quelqu'un qui a eu un courage immense pour se tuer d'une façon si terrible. Cet homme là m'est inconnu et le restera, hélas. Celui que j'ai aimé par contre, est là, présent, je le sens. Et même si son absence et la perspective de ne plus jamais le revoir est une souffrance au quotidien, je te passe des détails que tu connais aussi, je pense qu'il faut s'accrocher à cette image là, celle qu'on a aimée. Car "l'autre" est parti avec sa part de mystère et ses tourments cachés. Il faut finir par accepter de ne pas tout comprendre. C'est le plus difficile quand on a tant besoin de réponses, et qu'on culpabilise de ne pas avoir vu, senti...
Son meilleur ami, vu au cimetière il y a quelques jours m'a dit "Je me sens trahi". Et moi j'ai ajouté : "et moi, je me sens coupable de négligence"...  On en est tous là je crois, on passe par tous ces sentiments,  quand on a perdu un proche par suicide. C'est inévitable.
Voilà, je ne sais pas si tu te retrouveras un peu dans mon récit... cela aide beaucoup de lire les autres sur ce forum. On se sent moins seul dans le drame que l'on vit.  "Sale cadeau "qu'il t'a fait m'a dit un ami. C'est vrai aussi. Mais, à leur décharge, ce "sale cadeau" n'est aucunement dans leurs intentions. Une force les pousse, leur discernement est altéré. Ils savent que d'autres vont souffrir mais ne peuvent faire autrement et c'est pour cela qu'il faut leur pardonner vite (sans pour autant "valider" !), pour eux, et surtout pour nous.
On peut échanger en privé si tu le souhaites.
Caroline/Coccie
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 15 octobre 2017 à 20:33:46
Merci Caroline de t'être livrée sur ton histoire. Cela me touche et tes mots sont réconfortants. Je sens comme un apaisement  en toi que moi je n'arrive pas encore à avoir. Cest très juste quand tu dis qu'on ne reconnaît pas l'autre dans ce geste, en effet, je ne reconnais pas mon mari avec qui je suis restée 17 ans. Ma famille proche qui le connaissait le mieux essaye de me convaincre que c'est un geste fou, déraisonne et qu'il aimait trop la vie pour avoir fait ça de manière préméditée. Pour autant je n'arrive pas à me l'ancrer dans le crâne. J'ai besoin de chercher désespérément des situations des mots qu'il aurait pu me dire et qui auraient pu me mettre la puce à l'oreille. Mais je ne trouve pas.
Je suis au fond de moi persuadé qu'il a eu une pulsion, une folie, une bouffée délirante mais une part de moi essaye de culpabiliser et chercher des raisons à ce geste.  Je suis aussi en colère après lui, car il est parti sans même me parler de ses tourments alors qu'on se disait tout, il ne m'a rien laisse même pas un je taime.

Oui tu as raison le travail vide l'esprit et moi qui suis restée arrêtée plus de 3 mois je vois la différence. La journée mon esprit s'échappe un peu et ça fait du bien. Pour autant ces moments là sont trop courts encore.

Je serais ravie de communiquer avec toi en privée. Ton histoire, par sa ressemblance avec la mienne me touche.

Affectueusement
Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Anaïs le 06 novembre 2017 à 13:23:22
Bonjour,

Je suis soulagée de trouver enfin un forum sur le suicide du conjoint.
Aline, nous avons bcp de points communs
J'ai 32 ans et mon conjoint s'est suicidé il y a 6 mois.
Il était plein de vie, c'était un bon vivant.
Nous étions heureux et très amoureux l'un de l'autre.
Nous étions ensemble depuis 11 ans et nous avons un fils de 3ans et demi maintenant.
Il n'allait pas bien depuis quelques mois mais rien qui ne laissait entendre un tel geste...
C'est moi qui l'ai trouvé, le monde s'est effondré
Je dois maintenant reconstruire ma vie avec mon fils, j'en suis convaincue mais je suis fatiguée de me battre chaque jour
J'ai la chance d'être bien entourée mais il me manque terriblement et j'ai l'impression que les autres ne peuvent pas comprendre ce que je vis.
En venant sur ce forum, j'essaie de mettre une chance de plus pour avancer
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Anaïs le 06 novembre 2017 à 13:33:00
Contrairement à vous, je sais que le geste de mon conjoint était prémédité.
Sur le coup, je pensais que le mal-être l'avait submergé mais j'ai appris peu de jours après son décès qu'il avait prémédité son geste et que l'amour que nous avions mon fils, lui et moi n'avait pas suffit à le sauver... sa détresse était plus grande
Il avait pris sa décision la veille et a passé la soirée avec nous sans rien laisser paraître.
D'un côté c'était très dur de se dire que notre amour n'a pas pu le sauver mais d'un autre côté, je me dis qu'il est parti en sachant qu'on l'aimait profondément. Son message m'a évité de ressentir la culpabilité que ressentent les proches de victimes de suicide
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Alba1985 le 13 novembre 2017 à 23:22:34
Bonjour Anaïs,

Je suis touchée par ton message.
Je me dis que tu as de la chance d’avoir ton fils pour t’aider à surmonter cette tragédie et en meme temps j’ai tellement de peine pour lui et toi.
Je ne comprends pas comment ils ont pu nous laisser, ne pas penser à nous et aux conséquences.
As tu repris ton boulot ?

Affectueusement
Aline
Titre: Re : Suicide de mon mari
Posté par: Anaïs le 14 novembre 2017 à 21:43:13
J'ai repris le travail un mois après son décès. J'y ai trouvé du réconfort car c'est le seul endroit où son absence ne pesait pas trop.
Pour ma part, je pense qu'il s'est dit que je serai assez forte pour m'en sortir. Il m'a dit plusieurs fois avant de passer à l'acte qu'il me trouvait forte... Il sous-estimait le chagrin et le manque terribles.
Et tout ce quotidien qu'il faut continuer à gérer malgré tout.  Ça m'aide mais c'est parfois très dur.
J'ai hâte que le temps face son oeuvre et que la souffrance s'estompe

On en est toutes là je pense.

Bon courage à toutes, c'est une épreuve que nous impose la vie. C'est à nous de faire en sorte qu'elle nous rende plus fortes