Mon Ludo,
Je voulais exprimer ma colère et ma déception, mais je vais pour le moment essayer de procéder avec un certain apaisement, car tu es bien au-dessus de tout cela.
J'ai pu me recueillir sur ta tombe ce samedi, grâce à Bibou qui a eu la gentillesse de me conduire jusqu'à toi.
Je trouve décidément que cette tombe ne te ressemble pas. Elle n'est pas à la hauteur, elle n'est pas représentative, elle ne cadre pas avec le garçon talentueux et érudit que tu étais.
Pour l'égayer un peu, j'avais fait graver sur verre et placé un portrait sobre et très beau de toi, dans la sérénité. Mon idée était de te rendre visible et de permettre aux personnes qui t'aiment de pouvoir se recueillir, de rentrer en communion avec toi.
Sans me prévenir, ta famille l'a ôté... est ce que c'est pour que tu sois le moins visible possible, même dans la mort? Je ne veux pas que ta personne soit invisible. Je ne veux pas qu'on ai honte de toi, de ton décès, qu'on le cache, qu'on essaye de te dissimuler.
J'ai le sentiment que nous te méritions pas, que nous n'avons pas su entretenir ta flamme, ton amour.
Pour ma part, je continuerai à crier à quelle point tu étais beau. Dire que tu a été pourtant si prévenant avec tous tes proches de ton vivant, si attentif, certainement dans l'espoir d'obtenir leur reconnaissance, que tu n'as jamais eue ou très insuffisamment. Il ne faut jamais se taire. Le silence est pire que tout. C'est comme manquer à son devoir d'encourager son enfant, de le soutenir, de le féliciter.
J'ai versé des larmes, j'avais des difficultés à te laisser, mais j'ai réalisé que tu ne me quitterais finalement jamais et que je continuerai à te faire vivre à travers moi. Peut être l'avais tu compris, peut être l'espérais tu?
Je suis très reconnaissant pour la chance que j'ai eu de croiser ta route. C'est un immense honneur que de t'avoir rencontré, que nos routes se soient croisées. J'entretiendrai et essaierai d'être digne de cet honneur tout ma vie. Je t'en fait le serment.
J'ai du mal à comprendre les réactions de ta famille, que je trouve parfois si décalée par rapport à mes propres références.
Ils me donnaient l'impression d'être si distants lorsque tu étais de ce monde, comme s'ils ne savaient pas quoi faire de toi., ou plutôt comme s'ils étaient mal à l'aise, en décalage avec ta propre vie. Pourquoi cette distance? Ils avaient un diamant sous les yeux, un être exceptionnel, avec un talent fou et une densité culturelle immense.
Ou peut être que cette distance venait de toi aussi? Tu as peut-être toi-même entretenu cette distance? Pourquoi?
Quoi qu'il en soit, tu es ma fierté mon Ludo, rien que pour cela. Tu as eu le courage de prendre ta vie en main, avec le sens du travail et de la volonté.
Je ne te laisse pas sous terre. Je t'emporte, avec tout mon amour, sous mon bras, au fond de mon cœur, pour toujours. Tu avais raison. Ta place n'est décidément pas là bas.