Pourquoi les gens meurent?
Pourquoi les gens bien meurent toujours en premier?
Je m'en veux toujours Ludovic, même si cela est moins douloureux et plus acceptable, pour le mal que je t'ai fait.
Cette fin est absurde, elle n'a aucun sens, elle est grotesque, elle ne te ressemble pas. Surtout, cette fin n'est pas à la hauteur du grand homme que tu étais.
Je regrette mon manque d'attention, car s'il y a une seule personne avec qui tu essayais de t'ouvrir un peu, c'est bien moi.
Et je m'en veux de ne pas t'avoir suffisamment écouté dans ces moments là, de ne pas avoir saisi la profondeur de ta fragilité. J'aurais dû tinciter à me parler, à faire sortir ce qu'il y avait enfoui. Mais bon... même Vero, ta pote de plus de 30 ans, n'a jamais vraiment réussi à te faire parler de toi.
J'ai beaucoup culpabilisé en revoyant Myriam, il y a presque deux bon mois maintenant,
Elle m'attendait dans sa voiture sur le parvis de la gare à côté de chez elle. On était tous les deux, que nous deux.
L'année dernière, jour pour jour quasi, elle nous attendait au même endroit, sauf que nous étions tous les trois. On avait passé un très bon week end chez elle. Vous revisitiez vos souvenirs d'étudiants, plein de tendresse, d'anecdotes, jusque 3h du matin, devant son amie et moi, très attentifs et curieux de vous écouter. C'etaient des soirées simples, chaleureuses, ce sont souvent celles-ci qui restent gravées en mémoire.
Il y a deux mois, on était que tous les deux... j'avais le coeur déchiré, on est tombé dans les bras l'un de l'autre et nous avons pleuré à chaudes larmes devant les passants.
Nous avons parlé de toi, avec bienveillance (evidemment!), avec une montagne de chagrin et beaucoup d'interrogation face à ton geste. Myriam aurait tant voulu que tu comprennes l'évidence, qu'elle était là pour toi!
Bon sang Ludovic, même si vous ne vous voyez pas souvent, vous vous adoriez, je le voyais dans vos yeux, vous aviez une admiration et une amitié réciproque, très forte. As tu pensé à elle?? Tu était son "Lulu" J'ai beaucoup culpablisé Ludo. J'avais le coeur déchiré en la quittant, car je m'en suis voulu, je me suis senti responsable de ta disparition.
Je me souviens d'un regard très attristé et de la gestuelle de Myriam qui a essayé de comprendre ta démarche, elle a posé sa main sur le coeur et l'a éloigné, comme si ton coeur avait été arraché par le chagrin.
Je m'en veux Ludo de t'avoir conduit dans ce précipice, tu ne peux pas t'imaginer, d'avoir brisé tes illusions, de t'avoir tant déçu. Je ne voulais pas de faire de mal, je te le promets.
Myriam m'a relaté ce qu'elle considère comme un signe de ta part. Elle était chez ses parents et se promenait. Arrivée en haut de la colline, elle était incosolable. Elle t'a criée de lui envoyer un signe, une manifestation. En redescendant, elle a vu quelque chose qui n'était jamais arrivé auparavant. Elle a croisé une biche qui a plongé, pendant un long moment, un regard d'une tristesse immense dans les siens, comme de lui dire : je suis désolé Myriam, mais je n'en pouvais plus.
Myriam m'a offert l'hospitalité. J'ai dormi dans la chambre d'amis, dans laquelle on avait dormi un an plus tôt... C'etait bizarre...
Comme c'est une artiste comme toi et qu'elle t'adore, je lui ai offert un de tes splendides carnets dans lequel tu dessinais à l'encre, à la peinture, à l'aquarelle, au stylo, des formes multiples. Souvent tu les découpais et tu les associait pour faire un grand tableau, plein de couleurs, d'effets et de forme différentes, sans que le moindre collage soit perceptible à l'oeil nu! Je lui ai offert un de ces tableaux.
Elle m' a donné des photos de toi quand tu avais 25 ans. tres emouvant, tu etais avec tes valises et tu quittais la gare de la ville où tu avais eu ta première affection pour rejoindre Paris (avec les numéros 75 sur ta ceinture). Tu étais resplendissant et tu avais toute la vie devant toi. C'est très touchant pour moi, car je n'ai pas vu beaucoup de photos de toi à cet âge.
Myriam était là pour toi...comme Véro, comme Olivier, comme Nicolas, comme Daniel comme moi...
mais moi je te connais très bien.... et je pense que tu ne voulais pas ou que tu ne pouvais pas appeler au secours, car ce n'etait pas dans ton shéma d'existence, beaucoup trop secret, beaucoup trop intérieur, beaucoup trop pudique pour appeler au secours. Alors, tu t'es renfermé sur toi-même malheureusement
Et tu as du penser que c'était vain, que tu n'avais rien à quoi te raccrocher, alors à quoi bon continuer cette vie qui ne me satisfait plus?
C'est extrêmement culpabilisant pour moi de me dire que sans moi, tout plaisir, tout souffle vital disparaissait aussitôt.. tout espoir aussi (trop de déceptions, trop d'isolement, trop de reproches que tu te faisais, à tort, à toi même).
Il commence à se faire tard. Je vais devoir me coucher, sur cette pensée sombre.
Je ne voulais pas de cette issue tragique, irréversible, catastrophique.
Tant bien que mal, j'ai toujours essayé de te préserver, même si parfois (souvent? je m'y prenais mal. J'avais aussi parfois mon côté râleur, je m'en veux aujourd'hui. C'etait idiot. Mais mon coté raleur, c'etait lorsque certains éléments ne me plaisaient pas, mais que je n'osais rien dire, de peur de t'affecter ou de te blesser.
Je t'embrasse Ludo, jj'aurai toujours de très belles pensées pour toi et tu continues à vivre en moi, mais aussi en écrivant sur ce forum. Sache que je regretterai toute ma vie d'avoir réduit tes espoirs à néant.
Tu es à jamais dans mon coeur.