Bonjour Sista ,
J'ai lu vos messages et votre histoire m'a touchée ;c'est pour cela que j'ai pris un peu plus de temps pour venir vous répondre .Je comprends votre douleur :deux êtres si soudés depuis l'enfance jusque dans la violence (parentale ,je suppose) puis la vie continue le frère et la soeur grandissent et prennent nécessairement des chemins en parallèle .Votre frère avait vraissemblablement de grosses difficultés à vivre ;vous vous avez construit une famille et continuez à vivre ,tout en prenant soin de votre frère dans la disponibilité que vous pouviez .J'ai lu que votre frère était frappé,battu ,étant enfant : je ne sais pas dans quelle proportion mais je peux vous assurer que cela abîme un enfant ;pouvant le détruire même .Je pense que c'est un point clé de sa souffrance ,de son manque de confiance en la vie ,de son manque de confiance en lui .Dans sa souffrance jusqu'au dernier jour ,il a cherché votre protection ,à être avec vous .Mais vous n'étiez pas disponible parce que vous assumiez votre rôle de mère auprès de votre enfant en difficulté de santé .Vous ne l'avez pas abandonné ,votre Yannick ,vous ne pouviez simplement pas répondre tout de suite à son besoin de protection et de consolation sans doute ;il devait être à bout .Cela s'est produit le jour où vous n'étiez pas disponible ;bien sûr que si vous aviez mesuré sa détresse ,vous auriez sans doute trouvé une solution pour gérer votre enfant malade et la détresse de votre frère : ne vous culpabilisez pas .Je sais combien cela est dur de faire rentrer cela dans sa tête mais c'est une réalité à intégrer ou à garder dans un coin de votre coeur .J'ai été surprise aussi ,je vous le dis ,et mal à l'aise ,je ne vous le cache pas non plus ,de lire tant de colère contre votre belle -soeur .Je pense ,sans toute fois la connaître ,qu'elle ne porte pas toute la responsabilité du désespoir de votre fréro .Votre fréro était fragile et ce n'est pas toujours facile de vivre avec qq'un de fragile ,de sensible .Je vous parle en connaissance de causes : je suis fragile et les évènements du quotidien ,les dires de mon mari sont souvent blessants pour moi .Pourtant mon mari ne cherche pas à me blesser mais ce que j'interprète de ce qu'il dit qui me fait sombrer : je prends bcp de choses mal parce que j'ai une mauvaise estime de moi et qu'un rien me fait basculer dans l'idée que je ne vaux rien .Ce genre de fonctionnement ,les enfants ,les adultes qui ont reçu de la violence dans leur enfance l'intègre ,et ce n'est pas facile de vivre à leurs côtés ,vous savez .De plus ,votre frère est, malgré sa détresse ,le seul responsable de son geste .C'est lui qui l'a décidé ,mis en action ....même si sa souffrance avait des causes multiples .Votre frère était en colère certes ,votre belle-soeur l'a effectivement appellée juste avant mais vous ne savez en aucun cas le contenu de leurs conversations ,acceptez-le comme tel .Et si elle a fuit ce n'est pas nécessairement qu'elle est fautive ,quels étaient vos rapports avant le décès de votre frère ?Protège-t-elle sa fille et elle-même contre des accusations ?Essayez de renouer avec elle ,comme le dit une autre interlocutrice de ce site ,vous avez le droit de voir la fille de votre frère ;votre mère en a juridiquement le droit .Ne le faites pas n'importe comment ;il y a une enfant qui a perdue son père et qui est au milieu de sa mère et de la famille de son frère ;par amour pour votre frère ;il devait bcp aimer sa fille .Comprenez-vous le sens de mes paroles ?C'est en dialoguant que l'on apaise les malentendus et il y en a certainement comme dans toutes familles .
Sista ,voilà ,ce que je peux vous dire pour aujourd'hui .Je peux comprendre que certains de mes dires soient en décalage avec ce que vous ressentez de si violent .Je vous comprends néanmoins même si je suis plus loin sur la route du deuil .N'oubliez pas : ne prenez pas la responsabilité ,la culpabilité du deuil de votre frère :vous avez fait ce qui était en votre possible au moment de ce drame .Et avec tout l'amour qui ressort de vos mots dans vos messages pour votre frère ,il est évident que vous l'aimiez très très fort .Lui garder une place ,c'est aussi parler de lui ,de vous et de lui ,à vos enfants quand ils seront à même de l'entendre .Je l'ai fait auprès de mes enfants pour ma soeur et qque part elle a une place ,imaginaire certes mais une place néanmoins et elle vit symboliquement par ce biais .Quant à votre culpabilité face à vos enfants d'avoir une période douloureuse ,de dépression ;là aussi donnez -vous le droit d'avoir mal .Vos enfants vous aiment telle que vous êtes et si ils ont en plus des explications ,des mots sur l'origine de votre souffrance ,vous verrez qu'ils n'en seront pas traumatisé .Le temps vous aidera aussi .
Je vous souhaite ,Sista ,beaucoup de courage ,de la douceur envers vous ,des larmes ,si vous en avez besoin ,et une écoute ici ou ailleurs pour vous aider à cheminer .J'espère ne pas vous avoir blessée et je suis prête à répondre à vos interrogations ,à votre colère aussi si ce que j'ai pu écrire est déplacé .Je reviendrai lire une éventuelle réponse de votre part et de la part d'autres lectrices .Accrochez-vous ,Sista ,les premiers temps sont un véritable chaos intérieur puis peu à peu les jours seront meilleurs ;je vous l'assure .Je vous recommande aussi le livre du Docteur Christophe Fauré sur le deuil par suicide :il est humainement beau et retrace bien le cheminement intérieur de ceux qui restent au bord de la route ,assis par terre ,les jambes coupés quand quelqu'un de proche décide de mettre fin à ses jours .
A bientôt ,Sista ;je l'espère .
Armelle