Bonjour Angelica,
Je suis désolée pour ce que tu as vécu. Je n'ai personnellement jamais été confrontée au suicide d'un proche, mais si tu cherches des personnes jeunes ayant une vie très difficile, j'en fais partie. Je n'ai que 5 ans de plus que toi, c'est à dire 26 ans, et depuis mes 13 ans, je vis une accumulation de malheurs et de souffrances.
Pour résumer :
J'ai d'abord subi deux ans de harcèlement scolaire et moral au collège. Mes "camarades" de classe me frappaient, m'insultaient, me bousculaient dans les couloirs. Mon père était violent psychologiquement avec moi. J'ai vécu dans une telle violence qu'à l'âge de 13 ans, je suis tombée dans une très profonde dépression. Je ne mangeais plus, je m'automutilais et pensais à me suicider.
Je suis tombée dans la dépendance affective, je m'étais trop accrochée à une prof et lui demandais de m'apporter l'amour et l'affection dont je manquais tant. Mais à force de lui avoir écrit trop de lettres et offert trop de cadeaux, elle était allée se plaindre à la principale du collège. J'étais alors passée en comission éducative et la principe du collège avait menacé de me renvoyer du collège sous-prétexte que je harcelais cette prof pendant que mes véritables harceleurs restaient totalement impunis et continuaient leur scolarité normalement dans ce même collège. C'était une véritable humiliation dont je garde encore des séquelles plus de douze ans après...
J'ai souffert de dépendance affective, de dépression chronique et de crises d'angoisses pendant des années, j'en souffre encore aujourd'hui.
J'ai été hospitalisée 4 fois en psychiatrie avant même d'avoir 19 ans. En octobre 2008, à 13 ans et demi, j'avais été internée durant trois mois dans un hôpital psychiatrique de ma ville pour ados où on me gavait d'antidépresseurs et de neuroleptiques...
Oui, dès 13 ans, j'étais déjà sous Zoloft et Tercian.
Puis j'ai été ré-hospitalisée 2 fois à 17 ans, en 2012, à la Maison de Solenn.
Et une fois à 18 ans où ça s'est extrêmement mal passée... C'était en décembre 2012 : mon père avait été violent psychologiquement avec moi, une autre prof à laquelle je m'étais attachée me rejetait. J'avais donc avalé 29 comprimés de Xanax et m'étais retrouvée enfermée dans un HP pour adultes où j'avais été attachée par des sangle sur un lit et droguée de neuroleptiques jusqu'à faire les pires malaises de ma vie entière et être transformée en légume...
J'ai d'ailleurs été gavée d'innombrables antidépresseurs et neuroleptiques pendant plus de six ans (et ce, dès l'âge de 13 ans) : Zoloft, Tercian, Atarax, Xanax, Abilify, Norsert, Seroplex, Prozac, Xeroquel, Lexomil,Laroxyl, Citalopram et j'en oublie peut-être...
À l'âge de 19 ans, j'ai longtemps vu ma mamie souffrir à l'hôpital et puis je l'ai vu morte, le Mercredi 30 octobre 2013. J'étais très proche de ma mamie et son décès venait s'ajouter à ma souffrance déjà existante. Mais le pire ne s'est pas arrêté là.
À l'âge de 20 ans, à peine un an plus tard, mon cousin avec qui je partageais tout et que je considérais comme mon frère est mort en 19 jours d'une pancréatite aiguë sévère. Nous partagions tout ensemble : cinéma, piscine, restaurants, musée etc. Nous restions des heures au téléphone. Il venait chez moi, on faisait des jeux, on rigolait jusqu'à plus de quatre heures du matin. C'est comme si j'avais perdu mon frère.
Son décès brutal a été un drame atroce, indicile, une souffrance incommensurable qui s'ajoutait à des années de souffrances. Déjà là, je ne sais pas comment je faisais pour survivre à autant de souffrances, mais le pire, c'est que ça ne s'arrête pas là...
J'ai arrêté le lycée à 17 ans à cause d'une dépression sévère (avant même de vivre deux deuils coups sur coups donc) et je touche l'AAH depuis l'âge de 20 ans.
À l'âge de 22 ans, je suis tombée très malade. J'ai commencé à souffrir de diarrhées chroniques et de crampes d'estomac à me rouler par terre de douleurs. Au début, je pensais que ce n'était pas grave et me soignais à l'Imodium, jusqu'à ce que je frôle l'occlusion intestinale à force d'en prendre...
Les douleurs se sont accentuées, aggravées, il m'est arrivé de passer plus de huit heures d'affilée aux toilettes sans pouvoir sortir. Un véritable cauchemar.
J'ai passé une coloscopie en 2017 qui avait révélé de multiples érosions aphtoïdes dans le côlon et en conclusion "Cet aspect pourrait faire évoquer une forme débutante de maladie de Crohn colique". Le ciel me tombait une énième fois de plus sur la tête.
J'ai lu le livre de Jeanne Deumier "Diagnostiquée Crohn", mais si elle donne de très bons conseils sur l'alimentation, je ne me suis pas reconnue en elle car cette jeune femme écrit que la maladie de Crohn est venue bouleverser et faire basculer "sa vie d'adolescence heureuse et insouciante". Or, dans mon cas, même avant d'être atteinte d'une maladie intestinale, je n'étais ni heureuse ni insouciante, mais ma vie était déjà bourrée de souffrances et de malheurs...
La maladie n'a été qu'un énième malheur de plus.
Cela fait désormais trois ans que je suis malade et que cette maladie physique s'ajoute à mes douleurs morales. Mais le pire ne s'arrête pas là, non, ça continue sans cesse, sans cesse, sans cesse...
En 2019, j'ai retrouvé un semblant de bonheur en discutant avec mon voisin de 69 ans et son ami de 83 ans. J'aimais discuter avec eux, ça me détendait, ça me faisait plaisir. Mais je suis retombée dans la dépendance affective avec mon voisin, il m'a fait des avances sexuelles auxquelles je n'ai pas su dire non et cette histoire m'a troublée. J'ai tout de même eu de la chance de tomber sur lui, car j'aurais pu tomber sur un violeur.
Cet homme fait 3 AIT (accidents ischémiques transitoires, mini AVC) dont deux sous mes yeux et ça m'a traumatisée, j'ai passé toute l'année 2020 à m'occuper de lui et de ses problèmes de santé.
J'avais une belle relation avec Jacques, son ami de 85 ans. Mais Jacques m'a fait le même coup que mon cousin...
Nous nous voyions tous les jours dans un parc, et d'un seul coup, comme mon cousin, Jacques s'est plaint d'atroces douleurs abdominales. Comme mon cousin, Jacques a passé environ trois semaines à l'hôpital avant de mourir...
Jacques m'avait commandé un cadeau pour mon anniversaire qu'il ne m'offrira jamais puisqu'il est mort.
Comme mon cousin, Jacques avait l'air en pleine forme avant de mourir et ne se plaignait d'aucune douleur. Mais il est mort, comme ça, d'un coup.
Voilà. J'étais déjà venue sur ce forum et y avais posté un message trois mois après la mort de mon cousin :
http://forumdeuil.comemo.org/vivre-le-deuil/pourquoi-le-sort-s'acharne-sur-certains/Et sur la deuxième page, je suis revenue dire que malgré les 5 années qui se sont écoulées depuis le drame, je n'ai vécu que de nouveaux malheurs...
Ma vie est tellement peu commune que certaines personnes me prennent pour un fake, et je préférerais bien en être un, mais hélas non.
Et j'ai le même sentiment que toi, je me sens en total décalage avec les personnes de mon âge. Le copain de ma soeur a 32 ans, soit 6 ans de plus que moi et il n'a jamais vécu de harcèlement scolaire, jamais vécu de harcèlement moral, jamais été interné en psychiatrie, jamais eu la moindre maladie chronique de sa vie et jamais perdu aucun être cher de sa vie. Une vie de bisounours...
Pour la plupart des amies de ma soeur, c'est la même chose. Evidemment je ne leur souhaite pas de malheur, mais je ne peux m'empêcher de me demander "pourquoi moi ?"
Dans ma tête, tu vois, je n'ai pas 26 ans, j'en ai déjà 70...
Voilà, j'espère que ça ne te dérange pas que j'ai pu raconter ma vie, mais c'est pour te dire que je comprends ton sentiment.
Je suis une jeune femme de 26 ans, mais ma vie n'a acuun rapport, aucun lien, aucun point commun avec la plupart des jeunes femmes de 26 ans.