Auteur Sujet: Comment parler du suicide aux adolescents ?  (Lu 6136 fois)

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Yuna

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Comment parler du suicide aux adolescents ?
« le: 14 décembre 2012 à 21:48:37 »


  Vous avez tous entendu parler de ce jeune professeur de français  d'un collège en france   qui a été suspendu récemment  ( momentanément peut-être)  pour avoir donné à ses élèves de 14-15 ans un sujet  de rédaction portant sur le suicide. Il les a invités à se mettre dans la peau d'une personne n'ayant plus le goût de vivre ; une personne suicidaire en fait. Les élèves devaient donner les raisons de ce choix de non-vie.

  J'aimerais savoir ce que vous vous répondriez à un jeune qui vous poserait des questions sur le suicide. S'il vous dit par exemple qu'il ne trouve pas de sens à la vie , que celle-ci est absurde et qu'il ne voit pas la nécessité de continuer sur ce chemin qui ne le rend pas heureux. Oui, que lui répondriez-vous ? Merci d'avance pour vos réponses.

Yuna

Hors ligne angelik

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Re : Comment parler du suicide aux adolescents ?
« Réponse #1 le: 15 décembre 2012 à 00:31:38 »
Bonsoir Yuna

Un débat a eu lieu à ce sujet sur france5 dans "C dans l'air jeudi" 13/12/12. Il est disponible sur Pluzz.

Au cours de ce débat, la présidente de Phare Enfants Parents parle du cas d'une jeune fille qui a menacé de se suicider sur la page fb de cette association où beaucoup de parents endeuillés échangent. Ma réponse à cette jeune fille quand j'ai découvert son message a été de lui dire
"c'est un non choix... vous ne voyez pas d'autres issues à vos problèmes. cela vous semble être la seule solution... mais je crois que le suicide est une réponse radicale et définitive à des problèmes qui ne sont que temporaires... Ne restez pas seule ! Appelez le n°"

Voilà c'était dans l'urgence et je n'ai pas eu trop le temps de réfléchir à ce que l'on pouvait répondre dans ce genre de cas et puis une alerte a été donnée. Cette jeune fille va bien et a consulté depuis grâce à son appel au secours.

Avec de la réflexion, je l'écouterai surtout pour essayer de comprendre et je lui conseillerais d'en parler avec son entourage car le dialogue peut clarifier les choses et souvent les jeunes cachent leurs difficultés. Puis, lui dire que la vie est pleine de surprises et que l'on ne sait jamais ce que demain va apporter, d'essayer de trouver de ce qui pourrait donner un sens à sa vie (rêves, centre d'intérêt, projets...)

Difficile de répondre, chaque personne est différente et c'est un sujet tellement sensible...
Bonne soirée

Corinne
chaque fois que tu sentiras le vent sur ton visage, c'est moi qui vient t'embrasser...

Yuna

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Re : Comment parler du suicide aux adolescents ?
« Réponse #2 le: 15 décembre 2012 à 06:38:18 »


 Merci de votre réponse Corinne.

  Je trouve que c'est important de parler et de reparler  de ce sujet qui occupe la pensée de pas mal de jeunes, au moins une fois dans leur vie.  J'ai eu l'occasion comme enseignante de discuter avec des adolescents qui me disaient à quel point ils se sentaient seuls et mal dans leur peau.
Je sais que ce n'est pas nouveau ; c'est une caractéristique  des jeunes gens d'être à la recherche d'eux-mêmes ( cf. la littérature, le cinéma, le théâtre  en témoignent  ...)

Aujourd'hui peut-être, c'est encore plus difficile ; on "zappe" tellement vite et tellement facilement ce qui gêne ! il suffit d'appuyer sur un bouton pour changer de chaîne et dans la vie de tous les jours, c'est un peu cela aussi ; la réflexion n'est pas de mise.
Il en résulte des adolescents encore plus déboussolés, encore plus perdus , je crois . les valeurs qui avaient cours autrefois et qui étaient au moins des "pare-feu" ou "para-tonnerre" quelque part, même et surtout pour les rebelles et les révoltés, cela a disparu.  Le laxisme "tue".La solitude est de ce fait encore plus ressentie durement, malgré les multiples moyens de communication dont les jeunes ( et les moins jeunes) disposent. Paradoxalement, ils ont beaucoup d'"amis" sur facebook notamment, et si peu ou pas du tout d'ami  authentique ,véritable, à qui l'on peut confier ses secrets, parler, échanger, être en harmonie.

Avec les parents, la famille, c'est un peu pareil ...Le temps est devenu ce qui manque le plus, certainement ; du temps pour être ensemble, tout simplement, sans interférence avec le portable qui ne cesse de nous interpeler... du temps pour laisser venir la discussion sur les thèmes difficiles à aborder, d'emblée ; du temps pour vivre et ... faire vivre.

  J'ai écouté moi aussi  l'émission "C. dans l'air" sur ce sujet du suicide et je l'ai trouvé intéressant et nécessaire. Il faut continuer ; ne pas se taire ; le suicide n'est pas "tabou" ; il faut en parler et plus l'on partagera ses idées sur ce sujet avec les adolescents, moins l'on comptera de passage à l'acte ; c'est certain !

Encore merci de votre "écoute"  et de votre présence, Corinne et tous ceux qui sont ici et qui participent d'une manière ou d'une autre à faire en sorte que ce soit la vie et non la mort qui soit vainqueur.

Yuna

 

Hors ligne Méduse

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Re : Comment parler du suicide aux adolescents ?
« Réponse #3 le: 15 décembre 2012 à 18:45:30 »
Depuis le suicide de ma fille, je n’ai pas encore parlé à des personnes pensant au suicide, à part sur des forums de deuil. Je ne sais donc pas si mes arguments ont eu un effet.
Mes arguments aujourd’hui sont :
que je suis convaincue que la mort n’est pas une fin puisque j’ai eu de nombreux signes de ma fille et que les expériences proches de la mort le confirment. Le suicide n’est donc pas une solution aux problèmes. Cela implique aussi que nous avons quelque chose à accomplir ici, à nous de le découvrir.
Sur le forum, j’ai invité les personnes endeuillées parlant de suicide d’aller lire sur ce fil-ci pour voir la peine et les difficultés des proches ayant perdu quelqu’un par suicide. Peut-être que cela peut leur donner le courage d’affronter ses problèmes. Sur un autre forum, un jeune ayant fait une tentative de suicide parlait d’une émission télévisée sur les proches de quelqu’un ayant mis fin à leurs jours et il disait qu’il espérait se rappeler de l’émission en question si jamais il avait de nouveau des pensées suicidaires. Je dirais donc aujourd’hui que la peine infligée aux proches est terrible.
Effectivement, je pense qu’il faut avertir la famille et il faudrait que l’adolescent et la famille soient accompagnés.
Méduse

Yuna

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Re : Comment parler du suicide aux adolescents ?
« Réponse #4 le: 15 décembre 2012 à 23:14:05 »


 Oui, Méduse, c'est une bonne idée ...  leur faire lire les interventions ici, dans ce site .Cela peut en effet dissuader celles ou ceux qui envisageraient d'en finir avec la vie ... en considérant la peine que cette perte provoquerait !

Toutefois, quand la personne a tellement mal ; oui, quand elle est trop mal et que sa souffrance est devenue intolérable, je ne suis pas sûre que de savoir cela pourrait l'empêcher de passer à l'acte.
Cela a été le cas pour mon fils, il s'est donné la mort, parce qu'il était "au bout du rouleau", il n'en pouvait plus et souffrait terriblement. Sa mort , c'était quelque part sa délivrance ; j'en suis certaine.

Pour en revenir aux adolescents, je pense effectivement qu'il faut parler avec eux, tenter de leur faire dire quelle est la cause de leur malaise et leur montrer aussi à quel point ils sont aimés ( ils ne le savent pas souvent) et combien leur "départ" ferait du mal auprès de ceux qui les aiment ...

Bonne soirée.

Yuna

Hors ligne Méduse

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Re : Comment parler du suicide aux adolescents ?
« Réponse #5 le: 16 décembre 2012 à 18:04:43 »
Ma fille aussi était au bout du rouleau et ne croyait pas qu’on puisse l’aider à revivre à peu près normalement. Elle avait perdu toute confiance dans les soignants et vu comment cela s’était passé, je la comprends. Après son suicide, nous avons pu parler avec sa dernière thérapeute et j’ai l’impression que celle-ci n’y avait plus vraiment cru non plus.

Ma fille avait peur aussi de la disparition de mon père, son grand-père, auquel elle était très attachée. Il est malade et avait 86 ans à ce moment-là. Je lui disais que cela fait partie de la vie que les ainés partent et qu’après la douleur, on revivrait. Elle m’avait « préparée » depuis longtemps à sa propre disparition en me disant de temps en temps qu’elle ne vieillirait pas et disparaîtrait avant moi. Je pense qu’elle croyait en plus que notre vie serait plus simple sans elle et que le deuil serait pareil à celui que nous aurons pour mon père.

Elle sentait que sa maladie était difficile à assumer pour ses proches et je ne lui disais pas le contraire car pendant des mois, elle ne se soignait pas. J’espérais que cela lui fasse un déclic pour reprendre des soins et ne pas les abandonner en cours de route.

Je viens de discuter avec ma seconde fille qui travaille depuis peu en psychiatrie en tant que psychomotricienne. Elle me dit qu’il faudrait surtout mettre l’accent sur le fait qu’après la descente aux enfers, il y aura forcément une accalmie qui reviendra. Qu’on peut en être sûr et qu’il faudrait patienter.