Auteur Sujet: Jeune adulte en deuil à la dérive  (Lu 12454 fois)

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Méthylène

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Jeune adulte en deuil à la dérive
« le: 31 juillet 2012 à 13:30:55 »
Bonjour à tous,

Je demande une AIDE MORALE d'URGENCE pour moi et mon fils adulte qui sommes en deuil !

J'ai perdu mon époux il y a 7 ans après plusieurs années d'un terrible cancer. Notre fils avait 15 ans à la mort de son père.
Depuis ce drame  la vie est devenue très compliquée et extrêmement difficile pour mon fils et moi : chagrin, difficultés de toutes natures, solitude, incompréhension des autres, déprime, retrait sur soi etc ...
Après les années de maladie, l'hôpital, la réanimation ( en dernier )  qui furent un calvaire pour la famille que nous formions, j'ai l'impression que l'enfer s'est ouvert sous mes pieds !

Pourtant je me suis battue et je me bas encore pour maintenir un équilibre familial vacillant. Ce fut très éprouvant. Mon fils a suivi une scolarité totalement en dents de scie les 3 années du lycée, ne supportant pas mon autorité. Il fut impossible de communiquer normalement avec lui car il se renfermait sur lui-même. J'ai encouragé ses activités musicales, il avait même créé un groupe de rock qui répétait chez nous. J'ai tout supporté, trop accepté peut-être. Quand je voulais redresser la barre parce qu'il n'allait pas en cours ou faisait des jeux de rôle tard dans la nuit ... il se rebiffait.

Je l'ai porté  à bout de bras jusqu'à la terminale afin qu'il passe son bac, et il l'a réussi de justesse. 
Mais depuis, il ne fait plus rien. Il est hyper-sensible, introverti, révolté et  terriblement choqué. Il est devenu insomniaque, passe ses nuits sur l'ordinateur et dort le jour. Ses tentatives pour reprendre des études ont été abandonnées. Il est parti plus de 2 ans dans une autre région pour dépasser tout cela. J'ai dû dépenser beaucoup d'argent pour lui, mais il trouve cela normal. Il me met au rouge financier et s'en fiche. Il s'est plus ou moins désocialisé, a une nourriture et des horaires anarchiques ! Mon fils est très intelligent, et doué pour certains domaines artistiques. Mais il passe une période extrêmement difficile. Il n'accepte aucune remarque de ma part, et devient même par moment nerveux et agressif.  Il est intolérant, injuste et ingrat avec moi. Je ne le reconnais plus. J'ai peur qu'il sombre encore plus, car il ne supporte pas d'être revenu à la maison et d'être dépendant. Mais à 22 ans il n'a pas de permis ( j'ai payé 1000 euros pour rien, car il n'a même pas eu le courage de le passer !), il n'est pas en études, il ne travaille pas. Il s'est tailladé les veines pour une peine de coeur il y a 3 semaines. Le SAMU l'a relâché sur sa demande et celle du psychiatre de garde ce jour là. Il semble que sa fragilité soit importante.

Je supporte tout cela, avec, en outre, mes difficultés matérielles, financières, mon chagrin, mon isolement ( car je vis dans un village éloignée de mes racines ), l'indifférence des autres ... Je ne sais plus quoi faire.  J'ai beau être forte mais j'ai aussi mes limites.  A la longue il est usant pour moi de gérer cette situation. Je suis à bout et  suis venue sur ce forum pour avoir une AIDE MORALE  et peut-être des conseils.

Je vous remercie, et bon courage à tous.

Hors ligne angelik

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Re : Jeune adulte en deuil à la dérive
« Réponse #1 le: 31 juillet 2012 à 20:35:31 »
Bonsoir Méthylène
Ne voyant pas de réponses venir, et votre message remuant en moi des souvenirs douloureux, je me lance quand même et je vais essayer de vous donner quelques informations qui j'espère pourront vous aider.

Je connais votre situation et reconnais les signes d'ados en grande difficulté, ayant eu les mêmes problèmes avec mes deux ainés. Et pour l'un d'entre eux, cela s'est mal terminé... c'est pour ça que je suis sur ce forum.

Je ne veux pas vous alarmer mais je pense que votre fils est en dépression, et que le deuil de son père ne se fait pas correctement. Il vous faut une aide extérieure pour renouer le dialogue et pouvoir l'aider. Et je sais aussi combien c'est difficile quand on est seule face à tous ces problèmes.

J'ai connu malheureusement trop tard l'existence de l'association Phare Enfants-Parents qui aident les parents en difficulté. Ils ont un site internet et le numéro est le 0 810 810 987. Je suis sûre qu'ils seront de bon conseil et sauront vous aider à reprendre confiance pour soutenir votre fils.

Ne baissez surtout pas les bras... (je sais c'est facile à dire), votre fils a plus que jamais besoin de vous et son agressivité n'est que le signe d'un profond mal-être qui ne vous est pas vraiment destiné.
Bon courage et n'hésitez pas à demander de l'aide
chaque fois que tu sentiras le vent sur ton visage, c'est moi qui vient t'embrasser...

Méthylène

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Re : Jeune adulte en deuil à la dérive
« Réponse #2 le: 03 août 2012 à 19:41:15 »

Bonsoir à Angelik et à tous,

Merci infiniment Angelik pour ces précieux conseils et ces informations très utiles. 
Je vais prendre contact avec cette association. Je pense que vous avez raison. Mon fils est certainement en dépression. Le problème est de savoir comment il va s'en sortir et par quels moyens. Il ne veut pas de médicaments à son âge et n'accepte pas mes conseils. Il s'est tellement durci et souffre beaucoup.  Par contre il  semblerait qu'il accepte enfin de consulter auprès d'un professionnel compétent. Cette situation est immensément grave et difficile pour nous deux, car notre isolement est grand et nous vivons dans un monde âpre. Je me sens souvent démunie et si triste de voir mon fils ainsi. Je me suis moi-même culpabilisée d'être en dépression, que mon fils le sente et qu'il en souffre. Après la mort de son père j'étais si triste que mon fils  m'a avoué penser que je ne l'aimais plus. Et s'il a compris aujourd'hui que son idée n'était pas juste, il m'en a énormément voulu de cela. Pourtant j'ai tout fait pour que la vie continue et ne pas anihiler notre vie à cause du chagrin. Mais quoique l'on fasse, il faut que le deuil se déroule pour lui, comme pour moi. Et dans ce cas là aucune attitude n'est jamais la bonne.

Je comprends comme il a dû être excessivement dur pour vous de supporter de telles épreuves.
Je vous dis encore un grand merci , chère Angelik, et vous souhaite beaucoup de courage.
Avec toute ma sympathie.
Bien amicalement.




Hors ligne Méduse

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Re : Jeune adulte en deuil à la dérive
« Réponse #3 le: 04 août 2012 à 00:05:25 »
Bonsoir Méthylène,
Moi, j’ai perdu ma fille ainée. Après son suicide, nous avons appris qu’elle était atteint du syndrome Borderline et que c’est cela qui l’avait poussée à devenir anorexique.
J’ai cherché de l’aide par moment, mais sans trop d’efficacité. Sans doute, il aurait mieux valu que je sois « coachée » par une psychologue – sans être malade moi-même – afin de pouvoir mieux aider ma fille.
Ma fille était très sensible et douée pour la photo. De nombreuses portes s’étaient ouvertes pour elle et elle les a toutes fermées elle-même. Elle avait très peur de la vie dès son plus jeune âge. Elle n’avait aucune protection contre les émotions. Elle pouvait être très douce et attentionnée et puis se mettre très en colère. Je croyais qu’elle était dépressive et mettait tout en plus sur l’anorexie.
Cela vaudrait peut-être la peine que tu regardes si ton fils ne pourrait pas être atteint du même syndrome qui est complètement méconnu et souvent confondu avec la dépression ou la bipolarité. J’ai lu qu’un à trois pourcents de la population en sont atteints, mais peu sont diagnostiqués et souvent qu’au bout de dix ans. 70% des personnes souffrant de ce syndrome font des tentatives de suicides.
Voici un site où tu peux trouver des informations : http://www.aapel.org/bdp/borderline.html
Je ne connais pas l’association dont parlait Angelik, mais tu pourrais peut-être trouver de l’aide aussi auprès de l’UNAFAM : http://www.unafam.org/
Je te recopie aussi les sites que Mammj avait indiqués : info-dépression.fr et infosuicide.org.
Je me demande si tu ne pourrais pas reprendre le dialogue par écrit avec ton fils. Il aurait ainsi le temps de réfléchir avant de réagir.
De toute façon, viens nous parler quand tu en as besoin. Il y aura toujours quelqu’un à ton écoute.
Je te souhaite beaucoup de courage.
Méduse

Méthylène

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Re : Jeune adulte en deuil à la dérive
« Réponse #4 le: 04 août 2012 à 17:55:34 »

Bonsoir Méduse,

Je te remercie beaucoup pour ton témoignage et tes informations fort utiles. Le fait de parler de moi, de mon fils et de nos immenses difficultés depuis la mort de son père, l'échange qui s'installe ici, est déjà bénéfique. Ainsi je me sens moins seule, car les personnes qui ont traversé des épreuves similaires me comprennent et ne me jugent pas.

Lorsque tu évoques ta fille, sa sensibilité, son émotivité et ses peurs,  ses sautes d'humeur, j'ai l'impression de me reconnaître.
Mon fils a également hérité de certains de ces aspects, et il semble avoir peur de l'avenir, de se lancer dans la vie, de se confronter aux autres. Peut-être que la mort de son père lui a ôté la confiance en la vie, et aussi en lui-même. Il a certainement senti mes angoisses face à un destin brisé et au fait que je devais tout affronter seule. J'ai pourtant voulu éviter que notre joie de vivre soit annihilée par le chagrin et par mes peurs. Mais ce n'est pas si facile. Même si l'on a conscience de ses failles, il n'est pas forcément aisé de les dépasser. En outre, il est terrifiant de voir des couperets tomber en pleine adolescence, alors que l'on devrait être confiant et s'appuyer sur ses parents pour se construire. Après son bac il a totalement sombré, et la confrontation avec le monde lui a été insurmontable, parce qu'il était fragile ou fragilisé. Il a alors fuit le monde, ne gardant que peu d'amis ou de contacts, refusant l'inconnu, le risque et les épreuves. Il m'a avoué récemment qu'il était déscendu très bas, qu'il cachait son mal-être à moi, aux autres et à lui-même,  et qu'aujourd'hui il  considérait qu'il allait mieux,  qu'il avait plus de force, même si moi je le trouve mal et instable, irritable et fragile, destructuré dans son rythme de vie. Mais avant il ne disait rien et gardait tout pour lui. Aujourd'hui il réagit. Est-ce mieux ? Je ne sais pas. Il s'est certainement senti en danger parce que je me sentais moi-même en danger, face à un monde qui me paraissait hostile. Y a-t-il un phénomène de mimétisme de comportement ? Je sais qu'il supporte difficilement de me voir baisser les bras, devenir angoissée ou négative sans m'en rendre compte. Je dois parfois me forcer pour paraître " normale ", alors que moi-même je vais très mal.
Son état m'inquiète et je suis décidée à prendre rendez-vous pour lui auprès d'un psychiatre- psychanalyste que je connais et qui est très bien. Il l'a lui-même souhaité. Nous verrons cela en Septembre.

Entre les diverses maladies mentales le néophite se sent perdu. Seul un médecin spécialisé dans ces pathologies pourrait dire si mon fils est borderline ou autre. J'ai entendu parler de ce syndrome, mais je n'ai pas approfondi. Quant aux autres maladies - bipolarité, dépression etc - cela paraît simple à diagnostiquer, mais finalement seul un expert peut le faire. Toutes ces pathologies sont excessivement complexes.

J'ai déjà utilisé l'écrit pour communiquer avec mon fils. Certaines choses semblent avancer, mais par moment j'ai l'impression qu'il revient à la case départ.  Signe d'une régression ? J'espère que ses efforts prennent corps dans le futur et ne soient pas découragés par trop de difficultés pour construire son avenir. L'équilibre de mon fils va dépendre de sa capacité à agir et de son potentiel à suivre la voie qu'il souhaite. Il a totalement conscience de ses manques et de ses blocages vis à vis de l'action justement. Il sait bien que là est le soucis. Mais justement, la volonté défaillante et la perte de confiance en soi ne sont-elles pas les signes d'une dépression latente ou déclarée ?

Bon courage également chère Méduse.
Bien amicalement à tous.








Hors ligne Méduse

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Re : Jeune adulte en deuil à la dérive
« Réponse #5 le: 05 août 2012 à 00:12:49 »
Chère Méthylène,
Si ma seconde fille n’était pas en train de faire ses études de psychomotricienne (elle vient juste de les terminer, malheureusement trop tard pour pouvoir aider sa sœur), nous n’aurions jamais pu poser les bonnes questions et nous n’aurions jamais su la vérité. Je ne connaissais même pas le nom de cette terrible maladie. Ma fille aussi nous avait caché pendant longtemps à quel point elle était mal, alors qu’elle se sentait différente des autres. Puis, avant de devenir anorexique, elle me disait qu’elle pensait être malade et moi, je la rassurais qu’elle n’avait pas encore trouvé ses marques et que cela allait passer. J’étais consciente qu’elle n’était pas bien dans sa peau, mais je ne me doutais pas un instant de la gravité extrême. J’étais optimiste de nature.
Tu pourrais quand-même lire le site que je t’avais indiqué. Au début, ma seconde fille qui venait juste d’aborder la bipolarité et ne s’y connaissait pas encore bien, me parlait de cette maladie. J’avais lu un livre là-dessus mais voyais que cela ne correspondait pas à ma fille. La psychothérapeute ne pouvait pas nous dire son diagnostique et elle nous disait ce qu’est la bipolarité et ce qu’est le syndrome Borderline pour nous mettre sur la voie. C’était facile alors de retrouver ma fille ainée. En lisant les symptômes des différentes maladies, tu pourras peut-être plus facilement énumérer les symptômes.
 Je pense aujourd’hui, qu’une psychomotricienne aurait fait beaucoup de bien à ma fille ainée car il existe un échange entre elle et le patient et puis le corps qui est en souffrance est également pris en compte et pas seulement le psychisme.
Certaines maladies se déclenchent au moment d’un traumatisme. Tu as fait ce que tu as pu. La vie est injuste. Il arrive des tragédies aux uns et pour d’autres, la vie a l’air simple. Nous ne sommes pas pareils face aux traumatismes, les uns arrivent à surmonter là où d’autres sombrent. Tu n’as pas à te faire des reproches. Ma mère est décédée quand mon frère avait 16 ans après 8 ans de cancer. Cela l’a transformé à tout jamais. Après le décès de ton mari, vous étiez en deuil tous les deux. La vie ne pouvait pas continuer dans la joie comme avant. En as-tu déjà parlé avec ton fils de cette période ? Peut-être vous vous êtes interdits l’un comme l’autre de faire votre deuil ou vous vous l’êtes cachés pour ne pas vous faire du mal. Alors il faudrait faire votre deuil maintenant.
Je pense que c’est bien que ton fils s’ouvre à toi.
J’espère que le psychiatre pourra aider ton fils. Pour ma fille, le côté psychanalyse n’a pas été positif. Elle  n’arrivait pas à gérer ses émotions et le fait de remuer toujours ce qui faisait mal, l’a plutôt enfoncé. Il aurait fallu passer à autre chose après.
J’espère qu’en attendant septembre, tu trouveras de l’aide auprès des associations qu’on t’a indiquées. Et te fais-tu aider toi-même ?
Je te conseille d’être patiente avec ton fils et de ne pas le mettre sous pression. Je pense que moi, je manquais de patience et parfois j’écoutais les mauvaises personnes car ce qui « marche » pour une personne ne marche pas toujours pour une autre. Je pensais souvent à son avenir professionnel, cela semble si vain maintenant. Elle aurait pu être en invalidité et recevoir une rente ou une aide pour travailler en milieu protégé sans toutes les exigences du monde de travail actuel. Je pensais que cela l’enfermerait dans la maladie, mais cela lui aurait peut-être donné le temps de se soigner et d’être libérée du stress et de sa peur de l’avenir.  Mais peut-être cela aurait aussi été signe d’échec pour elle. Les maladies mentales sont difficiles à vivre pour tous, le malade et les proches.
Tu te sens perdue comme néophyte, mais je crois que même les spécialistes font juste ce qu’ils peuvent sans être sûrs d’eux. Cependant, pour ma fille, il aurait été important qu’elle puisse mettre un nom sur sa maladie. Elle avait la double-peine : elle était très mal et personne ne pouvait la comprendre. Combien de personnes lui ont dit qu’elle avait tout pour être heureuse et pensaient que c’étaient juste des caprices d’enfant gâté.
Je ne répondrai peut-être pas tous les jours car je suis en vacances chez mon père à 850 km de chez moi.
Prends bien soin de toi et de ton fils.
Méduse